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00:00L'édito politique sur Europe 1 avec Le Figaro, bonjour Vincent Trémolet de Villers.
00:04Bonjour Dimitri, bonjour Anissa, bonjour à tous.
00:07Depuis un mois à l'investiture de Donald Trump, Vincent, la France vit au rythme des
00:10embardés et des décisions pour le moins décoiffantes du président américain.
00:14On a même parfois l'impression qu'elle compte autant que nos propres décisions politiques
00:18nationales.
00:19Vous diriez qu'il y a un effet Trump sur la politique française, Vincent ?
00:22Il y avait déjà dans la société française une forte couche Yankee, selon la formule
00:26de Jérôme Fourquet.
00:27Mais la personnalité de Trump, aussi criarde que la téléréalité, aussi impulsive que
00:32les réseaux sociaux, a oui quelque chose d'hypnotique.
00:35Il suffit de voir avec quelle satisfaction Emmanuel Macron s'est rendu lundi à la Maison
00:39Blanche pour comprendre qu'un voyage réussi à Washington vous donne automatiquement un
00:43peu de prestige à Paris.
00:45Les mêmes qui s'indignent et s'inquiètent de la personnalité du président américain
00:49avaient du mal à cacher leur excitation et leur fascination quand Donald Trump est entré
00:53dans Notre-Dame de Paris au début du mois de décembre.
00:56Dans le personnel politique comme dans la psychologie collective, l'Amérique, qu'on
01:00l'aime ou non, porte les attributs de la richesse et de la puissance.
01:03Donc pour répondre à votre question, si l'action de Trump ne déchire pas la classe
01:07politique française, l'ombre portée du président américain s'étend depuis un
01:11mois sur notre pays et plus largement sur toute l'Europe.
01:14Tout le monde a compris que les changements de cap outre-Atlantique peuvent avoir des
01:18conséquences directes sur notre vie quotidienne et une partie de nos élites est complètement
01:22désemparée devant l'effondrement de la charpente qui soutenait sa vision du monde.
01:26Vous êtes en train de nous dire, Vincent, qu'on ne peut pas vivre sans l'Amérique ?
01:29Les piliers de la vision commune à Paris comme à Bruxelles, c'était la construction
01:33européenne pour le droit et le commerce, l'OTAN comme protection militaire, Washington
01:37comme tuteur, Moscou comme ennemi et le politiquement correct comme moral.
01:41Maintenant que tout cela est renversé, bouleversé, les Français vont d'abord chercher qui peut
01:46être un point de stabilité et maintenir leur pays dans le jeu.
01:49C'est un moment de bascule comme il y en a eu lors de l'invasion de l'Ukraine par
01:51la Russie il y a trois ans et c'est pour cela qu'Emmanuel Macron, qui a plutôt réussi
01:55son rendez-vous à Washington, pourrait bénéficier de façon temporaire et marginale, compte
02:00tenu de son impopularité, de ce que l'on appelle l'effet drapeau.
02:03Mais alors, hormis l'avantage institutionnel du chef de l'État, qui peut bénéficier
02:08de cette révolution trumpienne en France ?
02:10Eric Zemmour et Sarah Knafo en rêvent en se rendant à l'investiture du président
02:14américain, en choisissant les codes médiatiques tranchés et la critique frontale du système.
02:18Ils essayent de faire du Trump à la française.
02:20Au RN, c'est plus compliqué.
02:22Marine Le Pen réfute le libéralisme, Jean-Philippe Tanguay récuse le conservatisme et Jordane
02:28Bardella voudrait prendre au trumpisme sa dynamique victorieuse sans être sali par
02:32sa dimension scandaleuse et provocatrice.
02:35Mais plus profondément, l'effet du premier mois de Trump sur notre politique, c'est
02:40le grand dévoilement de notre faiblesse.
02:42Nous n'avons plus les moyens de nos incantations et de nos indignations.
02:46Au moment où il faudrait compter sur nous-mêmes, nous réalisons que nous dépendons de l'Union
02:50européenne, qui elle-même s'est construite sous le ciel protecteur des étoiles américaines.
02:54C'est un moment de vérité terrible que nous vivons, celui d'un pays, d'un continent
02:58qui, pour reprendre le mot de Nicolas Baverez dans le Figaro, se découvre sans croissance,
03:02sans sécurité et sans puissance.
03:05Cette situation, comme l'extrême efficacité du trumpisme, risque aussi de changer notre
03:09regard sur ceux qui prétendent gouverner.
03:12Les hommes publics capables de faire risquent d'apparaître beaucoup plus crédibles que
03:17ceux qui se contentent de dire.
03:19L'expérience et la force de caractère vont l'emporter sur le charme et sur le brio.
03:23La fin de la fin de l'histoire, c'est aussi le début d'une période où la politique
03:27va devoir reprendre ses droits.
03:28Et ça, c'est une bonne nouvelle.