Le président de la République a répondu en direct à des questions sur la guerre en Ukraine sur ses différents réseaux sociaux.
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00:00Donc en Ukraine, ce qui se joue en ce moment, et en quoi notre sécurité est en jeu.
00:07Comme je vous l'ai dit, je commençais par là, mais vous ne m'avez apparemment pas entendu au début de l'échange,
00:14au fond les cartes disent parfois mieux que beaucoup de choses.
00:17Cette carte, c'est celle en effet de l'Ukraine, vous la voyez.
00:21Les zones assurées, ce sont celles que la Russie a conquises dès 2014, c'est sa première guerre d'agression.
00:27Ensuite on a eu les accords de Minsk, la France d'ailleurs a été chargée de son suivi avec l'Allemagne,
00:32et ça a été un cessez-le-feu, des discussions politiques,
00:36et nous espérions, et on a vraiment produit beaucoup d'efforts pour que les choses se stabilisent.
00:41Et ce qui s'est passé, c'est qu'en février 2022, lundi ça fera trois ans jour pour jour,
00:47la Russie a lancé une guerre d'agression.
00:50Elle avait massé des troupes tout au nord et à l'est de l'Ukraine,
00:56des centaines de milliers d'hommes, et elle a envahi.
00:58Elle est d'ailleurs descendue jusqu'à Kiev, on l'a oublié aujourd'hui.
01:01Février 2022, la Russie nous dit, on va mener une opération spéciale,
01:05ça durera trois semaines, on va envahir l'Ukraine.
01:07Alors trois ans après, c'est un échec de la Russie, parce qu'elle ne l'a pas fait.
01:11Elle a commis le pire et des crimes de guerre terribles à bout de chat,
01:14mais l'Ukraine, par la bravoure de ses soldats, son organisation,
01:19a complètement repoussé au nord du pays.
01:21Et depuis trois ans, on a en effet la guerre dans cette zone que vous voyez,
01:25qui est en rose un peu plus foncée.
01:27Et ce qui est limité en jaune là, c'est ce que la Russie veut conquérir en quelque sorte.
01:33Et donc vous voyez que depuis trois ans, c'est sur un petit théâtre de jeu
01:38que les choses se passent.
01:39Mais cette guerre est terrible parce qu'elle fait depuis trois ans,
01:42en ce moment même, environ 1000 morts par jour sur le théâtre d'opération.
01:481000 morts par jour, de part et d'autre.
01:50Ce qui fait 1000 morts et blessés par jour, de part et d'autre.
01:53Ce qui fait que depuis le début de cette guerre d'agression lancée par la Russie,
01:57on a environ un million de morts et de blessés au total.
02:01Donc le bilan humain, vous le voyez, est colossal.
02:04Alors nous, dès le début, qu'est-ce qu'on a fait ?
02:06On a sanctionné la Russie parce qu'elle a lancé cette guerre d'agression,
02:09elle ne respectait pas le droit international, elle nous menaçait.
02:12On a tout de suite réagi, dès le lendemain.
02:14Et puis on a aidé l'Ukraine.
02:16Mais on s'est toujours donné une règle, aider l'Ukraine à résister.
02:20Mais nous ne sommes pas partis de cette guerre et on ne veut pas d'escalade.
02:24Depuis trois ans, cette situation est là.
02:27L'Ukraine a formidablement résisté, mais la situation est évidemment très préoccupante.
02:31Quel est notre objectif ?
02:32Une paix durable et solide.
02:34Une paix, parce que vous le voyez bien, ça ne peut pas durer.
02:36Et en quelque sorte, l'Ukraine ne peut pas reconquérir par la voie militaire ses territoires.
02:41Et la Russie ne peut pas, par une voie militaire, aller beaucoup plus loin.
02:45Et le bilan humain est énorme.
02:47Et donc nous, notre objectif, c'est d'avoir la paix, mais une paix durable,
02:51c'est-à-dire une paix qui permet à l'Ukraine d'être stable,
02:54d'avoir des garanties de sécurité, d'avoir le droit international qui est reconnu,
02:57une paix qui soit négociée par les Ukrainiens.
03:00Comme on le voudrait pour nous-mêmes si ça nous arrivait,
03:02un plan de reconstruction, etc.
03:06En même temps que la Russie a fait tout cela, elle s'est réarmée.
03:10Plutôt, elle a accru son armement.
03:12Et ça, c'est quelque chose qui s'est accéléré dans les dernières années.
03:15Elle a produit un effort de guerre considérable,
03:18ce qui fait que la Russie, aujourd'hui, investit dans la production des armements
03:2310% de son produit intérieur brut.
03:26Nous, en France, c'est 2%.
03:28Et on a quasiment doublé notre budget depuis que je suis là.
03:31Donc vous voyez l'effort qui est produit.
03:34C'est beaucoup plus que tous les autres pays.
03:36Et c'est à nos frontières, à la porte de l'Europe.
03:39Donc c'est une menace en soi.
03:41Et la Russie, pour vous donner là aussi quelques chiffres,
03:44mais elle a des capacités aujourd'hui qui se sont développées
03:47et qui sont considérables.
03:49Je vous mets là les chiffres du ministère des Armées, mais je peux vous les dire.
03:52C'est 1 300 000 hommes, 8 000 blindés,
03:551 200 avions de combat, 900 hélicoptères.
03:57Et elles continuent de produire.
03:59Ce qui fait qu'au-delà du théâtre ukrainien,
04:01la Russie est une menace pour les Européens
04:03si elle continue à être aussi prédatrice.
04:06Et en fait, elle l'est.
04:08Parce que ces dernières années se sont multipliées
04:11les assassinats d'opposants politiques,
04:14les actes terroristes sur le sol européen,
04:16chez les Britanniques par exemple,
04:18des menaces qu'on appelle hybrides,
04:20c'est-à-dire pousser des migrants à la frontière
04:24pour déstabiliser un pays,
04:26ce qui a été fait ces derniers mois encore à la frontière avec la Pologne,
04:30des attaques cyber massives à peu près partout en Europe,
04:34des manipulations d'élections, comme en Roumanie.
04:37Et puis la Russie, elle a changé de posture ces dernières années
04:41parce qu'elle a accru sa menace à notre égard.
04:43Je vais vous donner deux choses très simples
04:45qui ont été impensables il y a même 3-4 ans.
04:48Elle a décidé ces derniers mois, sur le front ukrainien,
04:52d'impliquer plusieurs milliers de soldats nord-coréens.
04:56Et ça, c'était impensable pour nous, mais c'est arrivé.
04:59Et donc elle a de fait mondialisé ce conflit.
05:02Et puis autre chose, elle a accru sa coopération avec l'Iran.
05:05Parce que l'Iran lui a donné des drones,
05:08des instruments pour se battre qu'on voit sur le théâtre ukrainien,
05:12et en même temps elle a aidé l'Iran à s'équiper, s'armer,
05:15et elle a aidé l'Iran dans son programme nucléaire.
05:17Et ça c'est très grave pour notre sécurité
05:19et la sécurité de beaucoup de nos amis.
05:21Donc au total, une guerre terrible, c'est la responsabilité de la Russie.
05:25Une Russie qui a accéléré son réarmement et son agressivité
05:30qui est une menace pour nous.
05:32Et qu'est-ce qui s'est passé ces derniers mois ?
05:34Notre premier allié, le plus puissant de notre alliance,
05:37qui est l'organisation transatlantique Nord, l'OTAN,
05:41a dit pendant sa campagne, c'est ce qu'a fait le président Trump,
05:45cette guerre est terrible, elle est ridicule, je vais la régler en 24 heures.
05:50Et donc la crainte de tous à ce moment-là, ça a été de dire,
05:53c'est la régler en 24 heures, si c'est abandonner l'Ukraine,
05:55c'est terrible pour nous. Pourquoi ?
05:57Parce que ça veut dire que le droit international
05:59n'est plus respecté sur notre continent,
06:01ça veut dire que c'est une défaite stratégique vis-à-vis de la Russie,
06:04pour les Européens et pour les Américains,
06:06et ça veut dire que la Russie prendrait en plus possession
06:08d'une grande armée de l'Europe, l'Ukraine,
06:10et puis pourrait aller encore plus loin et serait inarrêtable.
06:15Qu'est-ce qu'on a fait ?
06:17On a essayé d'agir diplomatiquement.
06:19Dans ce bureau même d'où je vous parle,
06:21au mois de décembre dernier, j'ai reçu le président Trump
06:23et le président Zelensky pour qu'ils puissent se parler,
06:26et pour convaincre le président Trump en lui disant,
06:28on veut la paix, on pense comme vous,
06:30mais cette paix en fait, il faut qu'elle soit durable
06:32et qu'elle prenne en compte les intérêts des Ukrainiens et des Européens,
06:35parce que nous sommes vos alliés,
06:37parce que vous ne pouvez pas être faible à l'égard de la Russie.
06:40On a beaucoup travaillé entre Européens, entre alliés,
06:43avec aussi le Canada, la Norvège, l'Islande et plusieurs autres,
06:47et on a essayé justement comme ça de bâtir des propositions.
06:50Il y a eu une accélération ces dernières semaines.
06:53Reprise des contacts directs entre la Russie et les Etats-Unis d'Amérique,
06:57des propos qui ont parfois inquiété,
06:59un doute sur le soutien durable des Etats-Unis à cette alliance
07:03et à sa présence en Europe.
07:05Tout ça a beaucoup inquiété les Européens et a créé du trouble,
07:09il faut bien le dire.
07:11Et c'est pour ça que nous nous sommes activés,
07:14que j'ai réuni ici plusieurs Européens dès lundi,
07:16que j'ai parlé à tous les autres Européens,
07:18des non-Européens aussi alliés, je vous le disais,
07:20les Canadiens, les Norvégiens, les Britanniques évidemment,
07:23les Islandais, et que j'ai, ces derniers jours,
07:27ainsi consolidé les choses et puis parlé aussi à plusieurs reprises
07:30et au Président Trump et au Président Zelensky
07:33que j'aurai d'ailleurs tout à l'heure à 20h.
07:35Et au fond, quel est notre objectif ?
07:37Il est très simple.
07:39Premièrement, on doit tout faire pour remettre en quelque sorte
07:42la discussion sur le bon rail.
07:45Et au fond, nous voulons la paix,
07:48mais on ne veut pas un cessez-le-feu qui soit une capitulation de l'Ukraine,
07:51parce que ça c'est dangereux, et ça on sait que ça conduirait
07:54à une Russie qui va plus loin, on l'a déjà vécue.
07:56Moi je l'ai vécue, j'ai eu à le suivre.
07:58Donc un, on veut les conditions, une pression suffisante,
08:01une exigence à l'égard de la Russie et de l'Ukraine
08:04pour qu'on ait une paix durable,
08:07qui soit compatible avec le droit international,
08:10qui ne soit pas négociée sans les Ukrainiens, parce que c'est pour eux,
08:13où les Européens soient autour de la table, parce que c'est notre sécurité collective,
08:16et qui nous donne des garanties solides pour l'avenir.
08:19Deux, nous, Européens, on doit augmenter notre effort de guerre.
08:23Pourquoi ? Parce qu'il y a du doute, il y a du trouble,
08:26parce qu'on a cette situation d'accélération et de la menace russe,
08:30et puis on a aussi des États-Unis d'Amérique qui nous disent,
08:33et il faut l'entendre, on a trop payé pour vous,
08:36on veut que vous preniez plus votre part du fardeau,
08:39et nous, on a aussi d'autres priorités géostratégiques,
08:42la Chine et ailleurs.
08:45Et donc là-dessus, on peut en quelque sorte s'entendre avec les Américains.
08:48Alors nous, Français, en vérité, on l'a déjà fait,
08:51on est l'armée la plus efficace d'Europe.
08:54On a beaucoup réinvesti, comme je vous l'ai dit ces dernières années,
08:57depuis que je suis président, puis on a fait des choix historiques.
09:00Nous, on a la dissuasion nucléaire, ce que n'ont pas les autres en Europe.
09:04Et nous, dans toutes les capacités du jeu, on est vraiment indépendants.
09:07Mais nos partenaires européens ont progressivement réinvesti ces dernières années,
09:10mais pour beaucoup, dépendent encore des Américains.
09:13Et donc au fond, premier objectif,
09:16bien négocier pour une paix durable en Ukraine et défendre nos intérêts.
09:19Deuxième objectif pour nous-mêmes,
09:22eh bien on doit monter la posture,
09:25on doit dépenser davantage, mieux, en Européens ensemble,
09:28et prendre très rapidement des décisions,
09:31au niveau national et européen,
09:34pour avoir une Europe plus autonome, plus forte,
09:37parce que c'est notre sécurité qui est en jeu.
09:40Voilà, ça c'est l'objectif du moment, des prochains jours pour l'Ukraine,
09:43mais dès maintenant, on doit accélérer.
09:46C'est pour ça que je voulais aussi que les forces politiques soient conscientes de cela,
09:49je voulais vous en parler.
09:52On va avoir des initiatives diplomatiques à prendre,
09:55un plan à vraiment concevoir avec les Ukrainiens,
09:58avec les Européens et Alliés,
10:01c'est ce plan qu'on va discuter aussi avec les Américains,
10:04pour essayer de bâtir cette paix solide et durable,
10:07avec les Ukrainiens autour de la table,
10:10et puis on va devoir faire des choix.
10:13Et donc au fond, le message que je veux vous passer,
10:16c'est qu'on rentre dans une nouvelle ère.
10:19Ça avait déjà commencé en vérité depuis plusieurs années, progressivement,
10:22parce que ça fait une quinzaine d'années que les Etats-Unis d'Amérique
10:25et je respecte cela.
10:28Il y a eu la période de pandémie où on a vu parfois aussi des moments
10:31où notre dépendance nous coûtait, on l'a vécu depuis 2022,
10:34où il y avait quand même eu un sursaut européen sous présidence française,
10:37à Versailles en particulier, au sommet qu'on avait fait.
10:40On rentre dans une nouvelle ère.
10:43On n'est plus sûr d'avoir ce qu'on appelle les dividendes de la paix,
10:46ce que nos aînés, nos grands-parents ont eus,
10:49c'est-à-dire un monde en paix où on pouvait en quelque sorte
10:52vivre nous-mêmes dans un monde où il n'y avait plus de risques.
10:55Le risque est là.
10:58Ce qui veut dire que nous, Français, on a une armée forte.
11:01Je vous l'ai dit, c'est la plus efficace d'Europe.
11:04On y a passé beaucoup d'énergie, de temps et on y a mis beaucoup d'argent
11:07ces dernières années et on a des femmes et des hommes extraordinaires
11:10qui sont engagés.
11:13Mais on rentre dans un moment où on va devoir en quelque sorte
11:16avoir encore plus de force d'âme et lever la posture en raison de tous ces risques.
11:19On va investir encore plus, Français et Européens,
11:22et on va devoir renforcer notre défense et notre sécurité.
11:25Ce n'est pas que les armées,
11:28c'est renforcer notre sécurité cyber,
11:31renforcer notre sécurité sur nos réseaux sociaux,
11:34nous protéger des interférences et des attaques,
11:37renforcer en quelque sorte notre force d'âme comme nation
11:40et nous consolider et le faire pour nous-mêmes en tant que Français
11:43et le faire en solidarité avec les Européens
11:46parce qu'on partage les mêmes intérêts de sécurité.
11:49Et être ce pilier européen fort au sein de l'Alliance transatlantique
11:52qui j'espère restera unie, mais c'est une nécessité.
11:55Voilà, je sonne un peu le toxin ce soir, c'est pour ça que je voulais vous parler
11:58et puis répondre à toutes vos questions parce que j'ai la conviction
12:01qu'on rentre dans une ère nouvelle et elle va nous imposer des choix.
12:04Et donc on va devoir aussi revisiter nos choix,
12:07nos choix budgétaires, nos priorités nationales
12:10dans ce monde qui commence.
12:13Je vais maintenant plutôt répondre à vos questions.
12:16Je voulais un peu cadrer les choses et vous donner à la fois
12:19les informations et ma lecture des choses.