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Aujourd'hui, dans « Les 4 V », Cyril Graziani revient sur les questions qui font l’actualité avec Clément Beaune, ancien ministre en charge de l'Europe.

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00:00Clément Beaune, bonjour. Vous avez été conseiller du président, ministre, député, vous avez été battu aux législatives en juillet dernier, et vous revenez avec un livre.
00:10Je dirais malgré tout que la politique est belle, paru le 5 février chez Stock. Vous n'êtes pas rancunier ?
00:16Non, je ne suis pas rancunier. C'est un très beau cadeau pour la Saint-Valentin. Et je pense que l'idée que la politique est un engagement noble, important,
00:23c'est de raconter aussi, non pas des anecdotes, mais un certain nombre d'épisodes que j'ai vécus et dont j'essaie de tirer des leçons pour le fonctionnement de nos institutions.
00:30C'est aussi la responsabilité de ceux qui ont été en politique. Moi, je n'aime pas ceux qui ont été en politique, et je veux d'ailleurs continuer à m'engager,
00:36et qui expliquent après que rien n'était possible, que rien n'est de leur faute, que rien n'a dysfonctionné, que c'est une activité qui n'a rien d'efficace ou rien de noble.
00:45J'essaie de montrer ce qui marche et ce qui ne marche pas de mon point de vue, et puis surtout de faire des propositions, parce que ce n'est pas simplement d'avoir un diagnostic sombre,
00:53mais d'essayer de dire comment faire mieux sur l'écologie, l'Europe, la sécurité, l'immigration, les institutions.
00:59Vous avez été au début de l'aventure avec Emmanuel Macron, vous faites une sorte de bilan de ces années Macron. Est-ce que vous vous reconnaissez encore dans le macronisme de 2025 ?
01:07Ce qu'on appelle macronisme, c'est d'abord l'engagement autour d'Emmanuel Macron, ça je le partage toujours, et puis ça a été aussi une méthode politique qui a dit dans un pays qui est fracturé,
01:17qui est fragmenté, peut-être encore plus politiquement aujourd'hui, il faut qu'on arrive à travailler différemment et à travailler ensemble.
01:23Cette idée, ce qu'on a appelé le dépassement, oui j'y crois, je pense qu'elle prendra sans doute d'autres formes, j'évoque des coalitions, c'est d'ailleurs ce qui doit se passer,
01:30je commence à se passer un peu, tant mieux au Parlement, mais l'idée…
01:33Ça n'arrive pas un peu trop tard ?
01:35Si, je pense que ça aurait dû arriver d'ailleurs dès 2022, puisqu'il y avait une majorité relative.
01:40Après la responsabilité, comme sur beaucoup de dysfonctionnements politiques institutionnels, elle est collective.
01:46Ce n'est pas celle du Président ?
01:47C'est celle du Président, comme celle d'autres acteurs, mais je prends l'exemple de l'après-dissolution.
01:52C'est une décision du président de la République, et puis ensuite il y a un résultat électoral, avec une forte participation.
01:57Vous le racontez dans votre livre, cette annonce de dissolution, vous la prenez comme quasiment toute la classe politique sur un plateau télé, vous n'étiez pas au courant ?
02:07Non, effectivement, je la prends, et puis après on repart au combat, on repart en campagne, c'est aussi ça la politique, des chocs et des combats.
02:13Mais après la dissolution, qu'est-ce qui s'est passé ? Il y a eu ce Parlement où il n'y avait pas de majorité claire,
02:17et tout le monde a dit pendant l'été, beaucoup de forces politiques, maintenant c'est le Parlement qui décide, on va travailler ensemble.
02:22Il y a eu zéro réunion pour essayer de trouver une plateforme, une coalition, un accord commun.
02:28Tout le monde a attendu que le Président convoque les partis.
02:30Donc on ne peut pas toujours renvoyer le Président à ses responsabilités et ne pas s'en saisir quand on est une force politique, un parti, un parlementaire.
02:37Ça c'est le mal français, c'est l'obsession présidentialiste, c'est-à-dire que tout le monde regarde la présidentielle d'après,
02:44le Président du moment, et personne ne veut partager la responsabilité ou l'impopularité quand il y a des décisions difficiles.
02:50Ce que réalise François Bayrou aujourd'hui, je crois que c'est en train de faire converger des forces politiques.
02:54Alors vous faites des propositions dans votre livre, Pellemel, désaligner le calendrier des élections législatives de celui de la présidentielle,
03:00revenir au septennat, introduire le scrutin proportionnel aux législatives par département,
03:05autoriser à nouveau le cumul des mandats parlementaires, mais aussi convoquer des référendums régulièrement.
03:11C'est un programme de candidats ça ?
03:13Non, c'est un programme d'un responsable politique qui a vu fonctionner.
03:16Pour qui alors ?
03:17Pour ceux qui s'en saisissent, et puis moi je vais continuer à apporter ces idées, je vous rassure bien sûr.
03:21Mais on crève d'avoir seulement de la com et puis seulement de la compétition électorale, et je crois un manque d'idées.
03:28Et donc beaucoup d'autres, mais j'essaie d'y contribuer, doivent et peuvent apporter des idées dans le débat.
03:33La politique c'est quand même le choix d'une offre qu'on fait à nos concitoyens, et puis ensuite on vote.
03:39Au cours de ces années, il n'y a pas eu assez d'idées ?
03:41Si, il y a eu des idées bien sûr, mais c'est un renouvellement permanent.
03:43Et si je pense qu'il y a quelque chose sur lequel on n'a pas fait assez et qu'on doit avancer,
03:47c'est justement cette question institutionnelle.
03:49Je dis que tous nos problèmes sur lesquels il y a des débats légitimes,
03:52la sécurité, le pouvoir d'achat, l'écologie, qui préoccupent les Français,
03:56les institutions un peu moins, prennent racine dans une crise démocratique.
04:00Et je pense, le référendum en fait partie, qu'il faut qu'on dégonfle un petit peu, si je puis dire,
04:05les attentes, les critiques vis-à-vis d'une seule personne, quelle qu'elle soit,
04:08qui est le président du moment, et que les partis politiques, les Français,
04:12participent davantage autrement à la vie politique, et des référendums régulièrement.
04:16C'est l'avis du président de la République.
04:18Quelles questions vous pourriez lui conseiller de poser aux Français dans les mois qui viennent ?
04:22D'abord, je pense que si on veut justement dépersonnaliser un peu les choses,
04:25il faut poser plusieurs questions en même temps, sur des sujets qui peuvent être assez différents.
04:29Ce que font par exemple nos voisins suisses, il y a régulièrement des votations
04:32sur des petits ou des grands sujets de société, par exemple sur l'élection à la proportionnelle.
04:37Est-ce qu'on veut élire demain nos parlementaires à la proportionnelle ?
04:40Sur des questions de société qui nous taraudent, comme la fin de vie, je pense que ce serait aussi…
04:44L'immigration ?
04:45L'immigration, moi je n'ai pas de tabou, simplement je ne vois pas quelles questions on pose.
04:51Parce que le référendum ce n'est pas à la place du Parlement,
04:54on est lié aussi des représentants pour débattre de sujets complexes, quand il n'y a pas oui ou non.
04:58La proportionnelle c'est oui ou c'est non.
05:00L'immigration, je ne vois pas bien quelles questions, à part entretenir une campagne démagogique,
05:04on va poser aux Français qu'ils pourraient trancher.
05:06On a aussi un Parlement, que le Parlement se saisisse de sujets comme le budget,
05:10comme l'immigration et comme d'autres.
05:12Le référendum c'est complémentaire.
05:13L'immigration d'ailleurs, c'est ce qui a causé votre perte au sein du gouvernement Borne.
05:20Vous aviez fait entendre votre voix au moment de la loi à l'immigration, vous le regrettez ça ?
05:25Je ne regrette pas d'avoir porté des convictions, ça jamais.
05:29Je l'ai fait sur plein d'autres sujets, mais dont celui-ci, je n'imagine pas qu'en politique on se planque.
05:34Ensuite, on peut me reprocher les modalités.
05:36Je reviens dans le livre longuement sur ce sujet,
05:38parce qu'on m'a reproché des choses qui n'étaient pas la réalité,
05:40notamment des menaces de démission qui n'ont pas existé.
05:42Mais sur le fond, je ne regrette pas qu'on est en politique.
05:45J'étais ministre des Transports, j'aurais pu tranquillement fermer ma bouche.
05:48Je pense que c'est important de défendre ses convictions.
05:50Après, ça plaît ou ça ne plaît pas.
05:52Il faut aussi en politique savoir prendre un certain nombre de risques.
05:54Si on risque sa place, ce n'est pas bien grave.
05:56Il y a d'autres façons de s'engager.
05:58Je me suis engagé ensuite dans la campagne des Européennes.
06:00J'ai été député. Aujourd'hui, je contribue au débat autrement.
06:02Mais vous ne vous sentez pas responsable finalement de ne pas avoir assez pesé ?
06:06On considérait que vous faisiez partie du courant plutôt de l'aile gauche de la Macronie,
06:12de ne pas avoir assez pesé face à cette aile droite qui a pris le pas finalement au gouvernement.
06:17Si, je pense et je le dis d'ailleurs, parce que c'est trop facile de dire c'est la faute des autres
06:20et moi je n'ai aucune responsabilité.
06:23Quand on n'est pas à l'aise avec quelques sujets,
06:25puisqu'il y en a beaucoup d'autres, la politique de l'offre, l'Europe,
06:27sur lesquelles je suis parfaitement à l'aise.
06:29Si on n'est pas à l'aise sur certains sujets, c'est que la bataille des idées n'a pas été assez bien menée.
06:33Et je n'élude pas le sujet de l'immigration dans mon livre.
06:35Je dis qu'il faut le traiter, lutter contre l'immigration illégale.
06:37Mais je pense que toutes les mesures nationales dont on parle tous les jours sont assez peu efficaces
06:41et que la vraie question c'est comment quelques pays européens ensemble
06:44font pression sur les pays d'origine et de transit migratoire
06:48pour les reconduire et mieux exécuter les OQTF.
06:50Le reste c'est beaucoup de com.
06:52Richard Ferrand c'est un bon candidat pour le Conseil constitutionnel selon vous.
06:54Vous le connaissez bien.
06:55Je le connais bien, j'ai beaucoup de respect pour lui.
06:57C'est le candidat qui est présenté par le Président.
06:59Là aussi je suis quand même très surpris par la confusion.
07:01Le Président propose un candidat, c'est notre Constitution.
07:04Ce n'est pas nouveau, ce n'est pas Emmanuel Macron qui l'a inventé.
07:06Le profil de Richard Ferrand c'est en plus un profil qu'on a connu dans le passé.
07:10Un ancien président de l'Assemblée nationale, comme Laurent Fabius, comme Jean-Louis Debré,
07:14un ancien élu, un ancien député.
07:16Le Conseil constitutionnel ce n'est pas un tribunal de magistrats professionnels, c'est autre chose.
07:19Et le Président propose et le Parlement va avoir l'occasion de s'exprimer.
07:23Donc j'entends des gens de l'opposition qui ont des critiques à faire.
07:26Ça ne se fait pas sur un plateau de télé, ça se fait en Commission des lois
07:29où il y aura un vote qui va s'exprimer.
07:31C'est démocratique, ça a toujours été la procédure depuis plusieurs années.
07:34Ça n'a pas changé, ni avec Richard Ferrand, ni avec Emmanuel Macron.
07:38Un mot sur Jean Castex qui hier a été placé en garde à vue dans une affaire.
07:42Des soupçons pèsent sur lui, sur des décisions qu'il avait prises
07:45lorsqu'il présidait une communauté de communes dans les Pyrénées-Orientales.
07:48C'est un dossier judiciaire dont je ne le connais pas et je n'ai pas à m'exprimer dessus.
07:52Je veux simplement redire mon respect, ma grande amitié pour Jean Castex.
07:56Et en un mot, est-ce que vous pourriez être candidat à la mairie de Paris ?
07:59Je pourrais, mais rien n'est décidé.
08:01Merci beaucoup Clément, bonne journée à vous.
08:03Merci beaucoup à tous les deux.
08:05Merci à Frédéric Chevalier qui a traduit cette interview en langue des signes.

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