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Le journaliste Henri Sannier présente son livre «Le jour où j'ai réappris à marcher»

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Transcription
00:00Ce qui vous est arrivé est sidérant.
00:02C'est sidérant et c'est paniquant, j'imagine.
00:05C'est-à-dire que vous faites une chute,
00:07vous vous retrouvez à l'hôpital, vous ne pouvez plus bouger.
00:10Vous ne savez pas ce que vous avez.
00:12On dit maladie auto-immune, mais quel est le diagnostic ?
00:15On m'a dit qu'il y avait une maladie de Guillain-Barré,
00:18mais pour moi, c'est de l'hébreu.
00:20Ensuite, on m'a envoyé faire de la rééduc,
00:23on m'a fait de l'immunoglobuline,
00:25j'ai marqué tout ça, parce que ça m'échappe,
00:28et on m'a renvoyé à Amiens, ils m'ont dit qu'il fallait aller à Paris.
00:32À Paris, ils vont vous trouver quelque chose.
00:34On m'a traité pour tout autre chose.
00:36On m'a dit que j'avais une polyradiculonevrite chronique.
00:40Ça ne veut pas dire grand-chose pour moi,
00:42c'est une maladie auto-immune, mais chronique, ça m'a fait peur.
00:45Ça veut dire qu'on n'est jamais guéri.
00:48Je ne le suis pas, là, je remarche, mes mains rebougent,
00:51je suis toujours sain de corps et d'esprit,
00:53mais je titube parfois dans le couloir, je ne sais pas pourquoi.
00:58Il y a quelques séquelles.
00:59– J'entends bien, mais pourquoi ça va mieux, puisqu'il n'y a pas de traitement ?
01:04– Ah si, j'ai fait un traitement, j'ai fait ce qu'on appelle une plasma féreze,
01:06c'est-à-dire qu'on m'enlève mon sang, on enlève le plasma,
01:11parce que dans le plasma, on a tous des, comment ça s'appelle, des anticorps,
01:15et ces anticorps, au lieu de me défendre, ils se rejettent contre moi.
01:19Voilà, alors il ne faut pas me demander pourquoi, mais c'est comme ça.
01:22Donc on m'enlève mon plasma une fois toutes les huit semaines,
01:24et ça va un peu mieux, je recours comme un lapin après.
01:26Enfin, comme un lapin, peut-être pas.
01:28– Ce qui est troublant, c'est ce que vous décrivez,
01:33et puis que vous restez à une parfaite gymnastique intellectuelle,
01:36il n'y a pas de problème d'élocution, vous avez toutes vos facultés,
01:39mais c'est le corps qui lâche.
01:40– Ah c'est le corps qui a du mal à suivre ?
01:41– Le contraste est vraiment troublant.
01:43– Mais il ne faut pas, c'est ce que j'explique dans ce bouquin,
01:45c'est qu'il ne faut pas baisser les bras, depuis que j'ai cette maladie,
01:47et qu'il en a été un peu question dans la presse,
01:50je reçois énormément de courriers, donc je me suis dit,
01:52plutôt que de répondre aux gens, je vais expliquer ça dans un bouquin,
01:55et je vais leur dire qu'il faut positiver, ne pas baisser les bras,
01:58c'est ce que je dis à longueur de temps,
02:00alors que des fois, je peux vous dire, je ne suis pas tenté de positiver,
02:03des fois j'ai le moral un peu à zéro et dans les soquettes.
02:05– Henri Sagné, le jour où j'ai réappris à marcher,
02:08c'est aux éditions du Rocher, mais c'est vrai,
02:10alors d'abord vous vous rendez hommage aux hôpitaux français,
02:14aux personnes médicales, c'est important,
02:16c'est vrai que vous, vous avez sans doute plus de chance que d'autres,
02:18parce que financièrement, vous êtes plus à l'aise peut-être
02:22que d'autres gens qui traversent cette maladie.
02:23– Je vous rassure, c'est zéro centime depuis le début,
02:26depuis trois ans, moi, je suis pris en charge totalement par les faits.
02:29– Je suis d'accord avec vous, mais la vie quand même autour de vous,
02:31elle peut s'organiser, elle peut être plus agréable quand…
02:34– Je n'ai pas pris d'aidant à la maison, c'est ma femme,
02:36parce que je ne voulais pas de tierces personnes à la maison,
02:38et je lui sais gré de m'avoir aidé, parce que je ne m'en suis pas rendu compte,
02:41mais elle avait un boulot de chien, c'est…
02:43– Mais votre morale, il y a un moment,
02:45est-ce que vous êtes désespéré au point de penser à l'irréparable ?
02:48– Non, non, jamais, vous savez quand ça ne va pas, je ferme les yeux,
02:52et je repense à des choses sympas dans ma vie,
02:54mon premier scoop qui m'a valu un contrat,
02:58l'interview de François Mitterrand, un peu foireuse un jour,
03:01mais qui m'a conforté dans l'idée qu'il fallait faire ce genre d'interview,
03:06la chute du mur de Berlin avec une interview de Willy Brandt,
03:09mon premier 20h, le jour de mes 40 ans avec Alain Delon comme parrain,
03:13alors je pense à tout ça, puis je me dis dans le fond Henri,
03:16tu as des choses bien derrière, et puis devant, il doit y en avoir d'autres.
03:19– C'est la méthode Coué.
03:21– On ne parle pas assez des aidants,
03:22et on a tous été confrontés parfois dans nos familles
03:26à quelqu'un qui est très malade, et puis on parle peu de l'aidant.
03:30– C'est vrai.
03:31– Je me souviens un jour, il y avait une dame
03:34qui accompagnait son mari depuis de nombreuses années,
03:38et puis une personne lui avait dit, et toi comment ça va ?
03:41Et cette personne avait dit,
03:44t'es la première personne qui me demande ça,
03:46qui me demande moi comment je vais.
03:48Et alors son mari était évidemment dans un état très critique, très difficile,
03:52elle s'en occupait depuis de nombreuses années,
03:55et elle soulignait que personne ne lui disait, et toi, comment ça va ?
03:59– C'est ce que j'ai oublié de faire avec ma femme,
04:01moi qui a fait une déprime à un moment, je ne me rendais pas compte.
04:04Vous savez quand on est malade comme moi, on est très exigeant,
04:07et j'ai été très exigeant très très longtemps avec ma femme.
04:10– Et très tyrannique parfois.
04:12– Oui, parfois, parfois, et alors je m'en fous maintenant.
04:14– Exigeant c'est un joli mot, moi j'ai vécu parfois des choses,
04:17j'ai été témoin de tyrannie,
04:19c'est-à-dire celui qui est malade est en train de tyranniser les autres.
04:22– Je n'irai pas jusque-là, mais moi j'étais très exigeant,
04:25très très exigeant, et c'est vrai qu'on s'en rend compte après coup,
04:28et moi je la remercie maintenant,
04:29mais je l'ai vu quand elle a écrit un petit papier dans mon bouquin,
04:33avant je ne m'en étais pas franchement aperçu.

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