Jean François Bléchet agriculteur et représentant de la confédération générale des planteurs de betteraves
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00:00Ici Orléans, à 8h15, on vous souhaite un bon début de journée avec nous,
00:03on espère que tout va bien pour vous, de l'autre côté de la télé et de la radio.
00:06Bonjour Lydie Lahaye !
00:07Bonjour Marc, bonjour à tous !
00:09Comment se porte la filière de la betterave chez nous dans le Loiret,
00:12et même globalement dans notre région ?
00:13On fait le point avec votre invitée tout de suite.
00:15Exactement, bonjour Jean-François Blécher !
00:17Bonjour Lydie Lahaye, bonjour Marc !
00:18Merci d'être là, vous êtes agriculteur représentant de la CGB,
00:22la Confédération Générale des Planteurs de Betteraves,
00:24le syndicat des betteraviers français.
00:27La campagne, on le disait, elle vient de se terminer,
00:29la campagne betteraviaire, quand elle a commencé à l'automne,
00:33vous nous disiez qu'elle allait être décevante, est-ce qu'elle est décevante ?
00:36Malheureusement oui, les prévisions se sont confirmées,
00:40c'est une campagne très décevante, avec des rendements en sucre
00:45significativement en dessous de la moyenne 5 ans,
00:48puisqu'on est à 76 tonnes de betterave à 16% de sucre à l'hectare cette année en moyenne,
00:59globalement sur la région, pour une moyenne 5 ans à 85.
01:04Il faut remonter à quelle année pour avoir d'aussi mauvais résultats ?
01:08C'est difficile à dire, d'aussi mauvais résultats,
01:12la pire année récemment ça a été 2020,
01:15donc c'est pour ça que la moyenne dont je vous parle ne tient pas compte de l'année 2020,
01:192020 c'était la jaunisse qui avait attaqué le pays,
01:22où la jaunisse nous a fait perdre 70% de la production sur le bassin betteravier sud de Paris.
01:28C'est une mauvaise année, essentiellement à cause des conditions météo ?
01:32Oui, les conditions météo, c'est-à-dire que d'abord un manque d'ensoleillement
01:35qui a nuit à la production de sucre par les betteraves,
01:39on parle bien de betteraves sucrières aujourd'hui,
01:42et aussi les excès d'humidité qui ont favorisé les maladies du feuillage de fin de cycle,
01:49qui là aussi ont empêché les betteraves de produire tout leur potentiel de sucre.
01:54Vous par exemple, vous êtes installé à Jouy-en-Pitivré,
01:57c'est une exploitation familiale, 340 hectares,
02:00la betterave représente combien sur votre exploitation en superficie ?
02:05Alors ça dépend des années, mais on va dire entre 15 et 30 hectares suivant les décisions d'assolement.
02:12Et vous avez décidé il y a quelques temps déjà de vous diversifier encore plus ?
02:17Encore plus, alors déjà pour nous la betterave a été déjà une diversification,
02:20on n'est pas des planteurs historiques sur notre exploitation,
02:24donc on a introduit la betterave dans l'assolement en 2008 ou 2009,
02:29à l'époque pour produire de l'éthanol pour la sucrerie de Toury,
02:32qui malheureusement a fermé depuis.
02:34Et là dernièrement, on s'est diversifié dans la vigne, dans la viticulture et dans les amandiers également.
02:45La vigne, est-ce que même cause, même effet, la récolte a été également en deçà de sa pire passée ?
02:52Oui, la récolte a été quasi nulle cette année pour un peu les mêmes raisons,
02:56notamment le manque d'ensoleillement et l'excès d'humidité.
02:59Alors Jean-François Blécher, la filière betteraviaire est un peu dans le flou,
03:02confrontée à la fermeture de la sucrerie de Soupes-sur-Loin en Seine-et-Marne, tout proche du Loiret.
03:07Elle vient d'arrêter son activité, est-ce que c'est un vrai coup dur pour les planteurs du coin ?
03:13C'est un coup dur pour la filière betteraviaire en général,
03:16puisque quand vous avez un outil industriel qui ferme, il n'ouvre jamais, il ne va pas ré-ouvrir.
03:22Et c'est symptomatique des difficultés récurrentes que subit cette filière,
03:27qui est aujourd'hui très fragilisée.
03:30Pour les planteurs de Soupes-sur-Loin ou du Loiret, ou de L'Aube et de Lyon aussi,
03:38heureusement pour eux, il y a un plan B, c'est-à-dire qu'il y a des groupes sucriers autour,
03:42notamment Cristal Union et Théréos, qui peuvent les accueillir.
03:45Théréos qui est à la sucrerie d'Artenay.
03:47Voilà, Théréos c'est la sucrerie d'Artenay, Cristal Union à Pithiviers et Corbeil.
03:52Et Corbeil en Gatiney, donc la sucrerie la plus proche est Corbeil en Gatiney,
03:57et d'ailleurs Julien Ouvré a indiqué dans le courrier qu'il envoyait aux planteurs,
04:03qu'il incitait les planteurs à se tourner vers Cristal Union,
04:08puisqu'il a passé un accord avec Cristal Union pour assurer le paiement des betteraves de la récolte 2024.
04:18Donc aujourd'hui, pour les planteurs, l'enjeu immédiat c'est être payé du solde de leur betterave 2023,
04:28par la sucrerie Ouvré, et être payé de leur betterave 2024.
04:35Ça c'est le souci immédiat.
04:37Ensuite, pour les prochaines campagnes, il va falloir qu'ils passent un contrat avec Théréos ou Cristal Union,
04:47et bien sûr, ça ne va pas être exactement les mêmes conditions que celles qu'ils avaient chez Julien Ouvré,
04:54donc ce sera à chacun de choisir en fonction de son intérêt,
04:58mais en même temps en gardant dans l'esprit que...
05:04C'est pas le même mode de fonctionnement non plus, c'est des coopératives...
05:07C'est des coopératives. Théréos est une coopérative, Cristal Union est une coopérative,
05:11et donc chacune propose soit de devenir coopérateur, c'est-à-dire de prendre des parts dans la coopérative,
05:17soit de travailler avec eux en tant que ce qu'on appelle tiers non associés.
05:20Il va y avoir des incidences pour les planteurs du Loiret, cette fermeture de Soupes-sur-Loin,
05:24avec donc ces planteurs qui vont venir ici chez nous, en quelque sorte.
05:28Pour vous, par exemple, ça va se traduire comment ?
05:30On va devoir s'adapter, nos usines vont devoir s'adapter, ça va probablement allonger les durées de campagne,
05:37puisqu'ils ont plus de volume à traiter,
05:39donc il faudra que nous aussi, les planteurs, on s'adapte pour relever ce défi-là.
05:45Mais maintenant, moi j'ai pleinement confiance dans la capacité de nos outils industriels et de nos coopératives,
05:50l'une comme l'autre, à absorber et accueillir les planteurs de Soupes-sur-Loin.
05:56En 6 ans, plusieurs usines, plusieurs sucreries ont fermé. En France, ça illustre les difficultés du secteur ?
06:02Oui, complètement. 6 sucreries en 6 ans, dont 2 dans des bassins betteraviers qui ont été condamnées,
06:12puisqu'il n'y avait pas de plan B pour le coup, à Cagny dans le Calvados ou à Bourdon dans le Puy-de-Dôme.
06:17Et c'est très symptomatique d'une filière qui est soumise, comme toutes les filières, aux aléas climatiques,
06:24mais aussi à l'incertitude réglementaire, à l'excès de normes, aux décisions qui ne font qu'empirer les aléas climatiques.
06:35Et l'exemple qui a failli mettre tout le monde par terre, c'est la jeunisse en 2020, qui n'est pas intervenue par hasard.
06:41C'est parce qu'à l'époque, la France, et seulement la France, a interdit un insecticide qui permet de se protéger contre le puceron qui véhicule cette maladie.
06:51Et résultat, comme je l'ai dit tout à l'heure, 70% de pertes de récolte et une filière entièrement fragilisée.
06:58Et aujourd'hui, une sucrerie comme celle de Soupes-sur-Loin, qui n'avait plus assez d'eau sous la quille pour faire face à des incidents techniques comme ceux qu'elle a connus en début de campagne.
07:10Merci beaucoup d'être venu ce matin, représentant du syndicat des bétraviers français. Merci à vous, bonne journée.