François Bayrou peut-il déjà être renversé par une motion de censure un peu plus d'un mois après sa nomination? Celle déposée par des députés insoumis, écologistes et communistes est examinée ce jeudi 16 janvier à l'Assemblée nationale. Elle ne devrait pas être fatale au Premier ministre, faute d'être votée par l'extrême droite et les socialistes.
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00:00Il paraît que vous vous êtes imposé au Président de la République en le menaçant s'il refusait d'accéder à votre nomination.
00:08On peut donc dire que votre mandat est marqué par le saut du chantage.
00:13Et c'est ce chantage que vous infligez désormais au peuple pour lui imposer une politique qu'il a pourtant refusée à de multiples reprises.
00:21En vérité, vous vous fichez bien de la stabilité du pays.
00:26Vous l'utilisez comme un prétexte pour imposer la continuité d'une politique.
00:30La preuve, vous avez volontairement reporté l'examen parlementaire de la loi sur Mayotte pour le faire débuter après la première motion de censure contre votre gouvernement.
00:41Et vous avez refusé de déposer immédiatement une loi d'urgence pour que soient votées des mesures budgétaires consensuelles.
00:48Elles auraient déjà été adoptées à l'heure où l'on se parle.
00:52Mais vous préférez gouverner par la peur et braquer sur la tempe des oppositions le revolver de la paralysie du pays.
01:00Pourtant, c'est bien le président de la République qui sème le chaos.
01:05Il a gaspillé trois premiers ministres en un an.
01:08Vous êtes le quatrième et vos heures sont déjà comptées.
01:11Vous êtes en CDD.
01:13Vous tomberez aujourd'hui ou dans quelques jours.
01:16Car l'entêtement du monarque à s'accrocher au pouvoir malgré le vote des Français condamne le pays à une instabilité durable.
01:23Seul son départ et le retour aux urnes permettra de sortir le pays de l'impasse dans laquelle il l'a plongé.
01:30Monsieur le Premier ministre, le roi Henri IV était notamment connu pour son attrait pour la ruse.
01:37En fidèle admirateur, vous vous êtes donc livré mardi à un bel exercice d'enfumage.
01:44En vous présentant comme un novice, vous pensiez peut-être nous intoxiquer.
01:49Mais après sept ans de macronisme, nous avons acquis une très large expérience à ce sujet.
01:55Je veux donc mettre en garde contre vos manipulations.
01:59Non, il n'y aura pas de changement de politique budgétaire.
02:03En décidant de repartir du budget austéritaire et injuste du gouvernement précédent,
02:09vous rendez tout simplement impossible l'ajout de nouvelles recettes
02:13par la mise à contribution des plus hauts patrimoines ou des plus hauts revenus.
02:17Vous vous apprêtez donc à nous imposer 15 milliards de coupes supplémentaires
02:21qui pèseront sur le pouvoir d'achat des Français, sur nos services publics
02:25et sur les investissements indispensables face à l'urgence climatique.
02:29Non, il n'y aura pas d'abrogation de la retraite à 64 ans.
02:34Vous avez pourtant déployé tous vos talents d'illusionnistes
02:39pour faire croire aux uns que les choses bougeront et aux autres qu'elles ne bougeront surtout pas.
02:44Vous avez ainsi annoncé le lancement d'un conclave
02:48censé permettre la renégociation de la réforme injuste et inhumaine
02:53que vous avez imposée par 49-3 il y a quelques mois.
02:56Mais vous avez pipé la discussion en augmentant artificiellement le déficit du régime de retraite
03:03en y intégrant la somme versée par l'Etat pour payer les retraites des fonctionnaires.
03:08Et vous avez bloqué immédiatement toute remise en cause de l'âge de départ à 64 ans
03:13ou de la durée de cotisation en offrant un droit de veto au MEDEF.
03:18Vous avez, Monsieur le Premier ministre, inventé la négociation
03:23où on l'est perdant à tous les coups.
03:26Unanime pour demander l'abrogation de votre réforme,
03:30les syndicats de salariés pourront soit y renoncer pour se mettre d'accord avec le patronat,
03:37soit y renoncer parce qu'ils ne sont pas d'accord avec le patronat
03:40et que la réforme restera alors en l'Etat.
03:43Face je gagne, pile tu perds.
03:46Qui peut croire sincèrement ici qu'il y a une quelconque avancée pour les Français
03:53qui ont rejeté dans la rue comme dans les urnes la retraite à 64 ans ?
03:59Monsieur le Premier ministre, si vous étiez réellement ouvert à la discussion sur ce sujet,
04:05vous laisseriez les parlementaires se prononcer sur l'abrogation de votre réforme
04:10comme nous l'avons proposé en novembre dernier.
04:13En démocratie, c'est parfois bien de laisser voter les représentants du peuple.
04:19Non, il n'y aura pas d'avancée sociale ou démocratique.
04:24Vous avez rendu mardi hommage au mouvement des Gilets jaunes
04:27pour faire oublier que vous proposiez à l'époque d'envoyer l'armée pour le réprimer.
04:34Mais vous continuez à refuser chacune de ces revendications.
04:40Pas de coup de pouce pour le SMIC cette année.
04:42Pas de blocage des prix face à l'inflation.
04:45Pas de retour de l'impôt de solidarité sur la fortune.
04:48Pas de référendum d'initiative citoyenne.
04:51Vous préférez offrir le cumul des mandats pour les notables
04:54plutôt que de nouveaux droits démocratiques pour le peuple.
04:59Non, il n'y aura pas de prise de conscience face à la catastrophe du changement climatique
05:05et à l'effondrement du vivant.
05:07Alors que le seuil des 1,5 degrés de réchauffement par rapport à l'ère préindustrielle
05:12a été franchi avec 75 ans d'avance sur l'objectif des accords de Paris,
05:17vous refusez toujours les milliards d'euros nécessaires à la bifurcation écologique.
05:22Et monsieur le Premier ministre, ce ne sont pas vos métaphores sur les poireaux
05:27qui masqueront la continuité d'une véritable politique de destruction de la biodiversité.
05:33Non, il n'y aura pas de respect dû enfin à nos compatriotes des départements dits d'outre-mer.
05:39Alors que la vie y est plus chère que jamais,
05:42et que l'accès à l'eau n'y est pas partout garanti,
05:45vous restez sourds aux demandes d'égalité.
05:47Vous avez abandonné depuis des années nos compatriotes de Mayotte,
05:51et quand le gouvernement s'y rend aujourd'hui,
05:54c'est pour partir en tournant le dos aux habitants
05:57qui demandent des comptes sur la réponse de l'État au ravage du cyclone Chido.
06:03Non, il n'y aura pas de rétablissement de la voie de la France sur la scène internationale.
06:08Vous n'aurez rien fait pour arrêter le génocide à Gaza
06:11ou protéger le Liban des attaques du gouvernement d'extrême droite de Netanyahou.
06:16Et vous préférez laisser votre pyromane de ministre de l'Intérieur
06:21organiser une escalade délétère et irresponsable avec l'Algérie.
06:26Vous le voyez, Monsieur le Premier ministre,
06:28les raisons de vous censurer aujourd'hui sont nombreuses.
06:32Mais certains dans cet hémicycle,
06:35élus pourtant pour en finir avec le macronisme,
06:38s'apprêtent aujourd'hui à sauver votre gouvernement
06:41et à servir de béquille à la continuité de sa politique.
06:46Ils prétendent qu'il faut attendre de voir quelques jours ou quelques semaines.
06:49D'ailleurs, certains sont tout simplement absents au moment
06:52où sera votée la motion de censure contre votre gouvernement.
06:56Ils prétendent qu'il faut attendre de voir quelques jours ou quelques semaines.
06:59Quelle ridicule justification !
07:02Nous connaissons tous des orientations politiques de ce gouvernement,
07:05de ses grandes lignes budgétaires et de sa composition,
07:09incluant des anciens premiers ministres de Macron,
07:12des mercenaires sans conviction et des ministres de la droite extrême.
07:17Mais surtout, quelle irresponsabilité
07:21de prétendre vouloir attendre encore quelques jours ou quelques semaines.
07:25Pensez-vous que le pays peut se payer le luxe de vos attermoiements ?
07:29Pensez-vous que nos concitoyens peuvent perdre encore plusieurs semaines
07:32dans une comédie où l'on fait semblant que tout va changer
07:36pour que rien ne change et que nous nous retrouvions dans un mois
07:39au point auquel nous sommes aujourd'hui ?
07:42Ce n'est pas sérieux.
07:43Chacun se trouve donc à cet instant devant ses responsabilités
07:48et sa fidélité aux engagements pris devant le peuple.
07:52Françaises, Français,
07:53notre pays n'est pas condamné à perpétuité au macronisme.
07:58Nous sommes aujourd'hui dans ce clair obscur d'où surgissent les monstres
08:02dont parlait le philosophe italien Antonio Gramsci.
08:06Ce gouvernement de brique de broc en est la plus cruelle démonstration.
08:10C'est l'ultime affront d'un président ivre de son pouvoir.
08:15Monsieur le Premier ministre,
08:16les jours de votre gouvernement de malheur sont comptés.
08:19Quand il tombera, le monarque suivra.
08:23Et alors, dans ce grand pays d'offrance,
08:27ce peuple méprisé et martyrisé pourra reprendre le contrôle de son existence.
08:33Il pourra en finir avec une cinquième république à l'agonie.
08:37Il pourra organiser le grand partage plutôt que le grand saccage
08:41et garantir à chacun la dignité à laquelle il aspire.
08:45Il pourra faire face à ce défi du siècle
08:48qu'est la catastrophe écologique qui rappelle désormais
08:51chaque semaine sa brûlante actualité.
08:55Il pourra enfin être aux yeux du monde
08:57cette pointe avancée de l'humanité
08:59dans la lignée de la grande révolution de 1789.
09:04Comme il l'a fait lors des dernières élections législatives,
09:07le peuple pourra refuser de s'abandonner
09:10aux tentations malsaines de la division et du racisme
09:14auxquelles vous pavez malheureusement le chemin.
09:17Monsieur le Premier ministre,
09:18c'est cette nouvelle France fidèle à sa maxime,
09:20liberté, égalité, fraternité qui attend son heure.
09:25Vous pouvez toujours nous faire perdre du temps,
09:27vous n'empêcherez pas son surgissement.
09:31En cette froide journée de janvier,
09:37je fais donc mienne la parole pour conclure d'Albert Camus.
09:42C'est finalement au plus fort de l'hiver
09:44que j'ai compris qu'il existait en nous un invincible printemps.
10:14Donnez-lui la parole.
10:19Madame la Présidente...
10:23Allez, s'il vous plaît.
10:25Monsieur Bernalicis, s'il vous plaît,
10:27on écoute monsieur le Premier ministre.
10:29Allez-y.
10:35Madame la Présidente, mesdames et messieurs les députés,
10:38Monsieur Bonparts n'est pas l'intention de refaire
10:44la totalité des débats que nous avons vécus depuis plusieurs jours
10:48sur la déclaration de politique générale
10:52et sur les prémices de la discussion budgétaire.
10:57Je voudrais simplement vous lire une lettre
11:01qui a été publiée il y a moins d'un mois,
11:04exactement le 17 décembre,
11:08par la totalité des organisations des entreprises
11:13et la grande majorité des organisations syndicales,
11:17signant ensemble un document sans précédent
11:22qui s'adresse précisément à vous, aux élus et aux responsables politiques.
11:31L'instabilité, disent-ils, dans laquelle a basculé notre pays
11:38fait peser sur nous le risque d'une crise économique
11:42aux conséquences sociales dramatiques.
11:45D'ores et déjà en France, disent-ils,
11:49les projets d'investissement sont gelés,
11:52les intentions d'embauche se sont révisées,
11:55les défaillances d'entreprises de toute taille
11:58se multiplient au point d'atteindre un niveau inconnu depuis longtemps.
12:03Derrière ces remontées, c'est toujours ces organisations qui parlent,
12:08les organisations de la démocratie sociale en France,
12:12derrière ces remontées en temps réel
12:15de nos capteurs de terrain sur notre territoire,
12:19dont toutes nos organisations disposent massivement,
12:25c'est l'économie réelle, l'avenir des entreprises
12:28et le quotidien des salariés qui sont en jeu.
12:31Les conséquences d'une instabilité prolongée pour notre société,
12:36sa cohésion, les femmes et les hommes qui la composent, en seraient graves.
12:42Dans le respect du fonctionnement de nos institutions
12:46et des choix des élus de la nation,
12:49il est de notre devoir de vous alerter sur les risques réels
12:55qu'une telle instabilité génère.
12:58Comme vous, les acteurs sociaux que nous sommes,
13:02représentants des organisations syndicales et patronales,
13:06sommes profondément attachés à la démocratie et à la démocratie sociale.
13:10Nous sommes déterminés à participer pleinement aux transformations de notre société,
13:17confrontées à une situation budgétaire et à des mutations sans précédent,
13:24qu'elles soient technologiques, géostratégiques, démographiques ou climatiques.
13:29C'est pourquoi nous appelons, au nom de la confiance
13:33que les millions de salariés et chefs d'entreprise que nous représentons placent en nous,
13:38et l'esprit de responsabilité qui nous guide
13:41à retrouver au plus vite le chemin de la stabilité, de la visibilité et de la sérénité.
13:47La voie du paritarisme, qui passe par le dialogue,
13:51la négociation collective et la construction du compromis,
13:55est en capacité d'apporter des réponses concrètes.
13:59Nos organisations en ont fait encore récemment la démonstration.
14:03Il en va de notre capacité à être porteurs de progrès et de justice sociale,
14:09de performance économique et sociale et de respect de l'environnement.
14:14Les interlocuteurs sociaux seront comme toujours au rendez-vous du dialogue et de la responsabilité.
14:19Toutes les organisations représentant des entreprises
14:23et l'immense majorité des organisations de salariés
14:29ont signé ce texte.
14:35Et c'est la première réponse qui méritait d'être apportée à votre présentation de la motion de censure.
14:53Deuxièmement, je crois que nous ne prenons pas la mesure de ce qui est en train de se passer
15:03à l'heure qu'il est et dans les jours où nous sommes.
15:07Nous sommes, nous la France et nous l'Europe, en situation de citadelle assiégée.
15:15Nous sommes, nous la France et nous l'Europe,
15:19confrontés à des puissances qui ont désormais décidé et choisi le parti de la domination
15:28sur la société que nous formons et la civilisation que nous portons.
15:36Hier, à la fin du mois de décembre, la Chine a franchi le cap du millier de milliards d'excédent commercial.
15:51L'Allemagne est en récession.
15:54Le chiffre a été publié hier matin.
15:57Pour la deuxième année consécutive, l'Allemagne est en récession.
16:01Heureusement, la France, avec un peu plus d'un pour cent de croissance,
16:05s'échappe à cette récession.
16:07C'est toute l'Europe qui est atteinte et la France plus que tout autre
16:14parce que son projet de pacte social est évidemment menacé par la crise que nous traversons.
16:23Et c'est là que nous avons la divergence ou la confrontation la plus significative.
16:31La motion de censure, M. Bompard, que vous avez présentée, elle a une signification.
16:37Elle dit, nous voulons rester dans l'affrontement au sein de notre peuple entre les...
16:48Nous voulons rester, dites-vous, c'est ça que vous dites.
16:53Nous ne voulons pas, dit votre motion de censure, nous ne voulons pas qu'on sorte de l'affrontement
17:01pour entrer dans la pratique du dialogue, de la négociation, de la construction
17:07de l'avenir que nous avons à faire ensemble.
17:10C'est la raison pour laquelle les bancs que vous appelez à vous soutenir sont totalement vides.
17:16Vous êtes dans une situation où vous voulez choisir la guerre intestine au sein de notre pays.
17:28Vous voulez que l'affrontement soit la loi, que l'affrontement soit la loi
17:41et vous voulez que la conflictualisation comme...
17:47Excusez-moi, M. le Premier ministre, ceci ne doit pas être un dialogue.
17:51Je demande aux députés de la France Insoumise de bien vouloir se taire et d'écouter M. le Premier ministre
17:57qui va faire son intervention et nous reprendrons le cours de nos travaux.
18:01Mais on n'est pas dans un débat, on est dans un examen tel qu'il est prévu par nos textes.
18:07Seul le Premier ministre a la parole.
18:10Seul le Premier ministre a la parole.
18:12M. le Premier ministre, allez-y.
18:14Je vous remercie de vous taire, s'il vous plaît.
18:16Allez-y, M. le Premier ministre.
18:23M. le Premier ministre.
18:25Merci, Mme la Présidente.
18:27Et donc, je dis que le choix qui est devant nous dans la situation si grave que connaît notre pays
18:35et dont toutes les activités, dont tous les travailleurs souffrent et sont menacés,
18:43ce choix est entre l'affrontement intérieur perpétuel et la tentative de chercher un chemin de dialogue,
18:53de réflexion, de compromis, de négociation pour que les choses avancent.
18:58C'est la raison pour laquelle ce vote est très significatif.
19:02Mais la démocratie, ça n'est pas l'affrontement perpétuel.
19:07Et donc, de ce point de vue-là, je prétends que le vote que nous allons avoir est absolument significatif.
19:15J'ajoute que le chemin que nous avons choisi de prendre, ce chemin-là, c'est celui de la tentative,
19:27je ne suis pas assuré qu'elle réussira, de construire un avenir différent
19:33à partir de la contribution de tous ceux qui, par l'expérience sociale et politique,
19:40savent, disent, affirment qu'ils vont pouvoir améliorer la situation de notre pays.
19:48La situation de notre pays du point de vue des finances publiques, elle est terriblement inquiétante.
19:55La situation de notre pays du point de vue de l'économie, de l'industrie, elle est terriblement inquiétante.
20:02Cependant qu'ailleurs, et on peut tourner nos regards vers les Etats-Unis,
20:08où le président sortant des Etats-Unis a fait hier soir un discours extrêmement significatif,
20:14parce qu'il a dit que ce grand pays était en voie de se trouver livré à des oligarchies.
20:21Il a marqué le danger interne aux Etats-Unis, et c'est aussi un danger pour la planète,
20:28où des puissances extérieures à la politique ont décidé de se servir de la politique
20:35pour imposer leur point de vue et leur vision du monde, qui n'est pas très éloigné de la vôtre.
20:43Parce qu'en réalité, ceux qui veulent l'affrontement et ceux qui veulent la domination, ils sont au fond du même avis.
20:51Ils sont décidés à ce que le compromis, la discussion, la réflexion, le progrès progressif ne puissent pas trouver leur place.
21:08C'est pourquoi, je le crois, la motion de censure que vous présentez ne pourra pas être adoptée,
21:17et je le crois, un autre chemin se dégage.
21:21Difficilement, après beaucoup de travail, de discussion, de négociation,
21:27où chacun a apporté ce qu'il croyait et ce qu'il avait de plus précieux,
21:32un autre chemin se dégage pour qu'une entente permette de construire un avenir différent.
21:38C'est la seule réponse qui doit être apportée par le vote que va émettre l'Assemblée nationale
21:45à la motion de censure destructrice que vous avez présentée. Je vous remercie.
21:50Merci beaucoup, M. le Premier ministre.
21:53La parole est à présent à M. Olivier Faure pour une durée de 10 minutes pour le groupe socialiste.
22:23Madame la Présidente, M. le Premier ministre, madame et messieurs les ministres, mes chers collègues,
22:29nous sommes dans l'opposition et nous y resterons.
22:33Nous ne croyons pas en un en même temps qui entretient une confusion
22:37qui a pour seul effet de donner l'exclusivité de l'alternative à l'extrême droite.
22:43Nous sommes dans l'opposition, mais nous avons aussi signifié notre ouverture au compromis.
22:49La situation politique actuelle est inédite puisque aucune coalition ne dispose d'une majorité absolue.
22:56Vous êtes vous-même à la tête d'un socle commun dont on peine à voir le socle et qui n'a de commun
23:03que la volonté de siéger au Conseil des ministres.
23:06Nous avons tous entendu, il y a deux jours, M. Wauquiez expliquer à cette tribune
23:12que son parti, alors qu'il participe au gouvernement, ne voterait les projets de loi qu'au cas par cas.
23:18Mais pour permettre au pays d'être gouverné au cours des 28 prochains mois,
23:23nous vous avons proposé dans un premier temps un pacte de non-censure qui reposait sur trois conditions.
23:29Le non-usage du 49-3, un changement de cap, le respect du front républicain
23:34en vous refusant à faire dépendre votre survie de l'extrême droite comme l'a fait votre prédécesseur.
23:41Vous n'y avez pas donné suite.
23:43Il n'est donc plus question de pacte de non-censure, comme cela peut exister dans d'autres pays avec des gouvernants minoritaires.
23:50Un vote de censure est donc possible à tout moment.
23:55Depuis dix jours, nous sommes entrés en négociation avec vous et vos ministres.
24:00Nous avons fait ce choix, non pour négocier une place, obtenir un ministère ou un avantage quelconque.
24:07Nous l'avons pris pour vous arracher des concessions qui n'auraient pas vu le jour sans cette discussion.
24:14Nous n'avons pas la négociation honteuse et vous ne devriez pas davantage en avoir honte.
24:23Je vous ai écouté lors du discours de politique générale.
24:27Vous auriez dû, par simple respect du dialogue engagé,
24:30dire que vous aviez prévu nombre de coupes claires qui auraient directement porté atteinte aux quotidiens des Français les plus vulnérables
24:38et de reconnaître que nos échanges, notre dialogue, notre négociation a permis de faire bouger les lignes.
24:44Grâce à la négociation, il n'y aura pas de retour du gel des pensions de retraite en 2025,
24:50pas d'augmentation des taxes sur l'électricité,
24:53pas de déremboursement des consultations chez le médecin
24:56et pas d'aggravation du déremboursement des médicaments.
24:5912.000 postes de personnel soignant, hospitalier, créé ou maintenu.
25:04Pas de passage d'un à trois jours de carence dans la fonction publique.
25:08Pas de suppression de 4.000 postes d'enseignants.
25:112.000 créations de postes d'accompagnants d'élèves en situation de handicap.
25:15Pas de baisse du budget des Outre-mer comme le proposait le budget Barnier.
25:19L'extension du prêt à taux zéro, au neuf et à tout le territoire.
25:23Et les maires seront financièrement aidés, incités à construire plus de logements sociaux.
25:28Nous avons également obtenu le minimum de justice fiscale,
25:32la spéculation financière, les dividendes seront mieux taxés,
25:35le crédit, impôts-recherche, la niche fiscale la plus coûteuse sera limitée
25:40et les patrimoines les plus insolents seront à nouveau taxés,
25:44ce que nous demandons avec Gabriel Zucman depuis des années
25:48et que vous refusiez obstinément depuis la fin de l'ISF.
25:52Alors, pourquoi n'assumez-vous pas aussi,
25:56et je vous le dis dans un conseil presque amical,
25:59ces 21 milliards de recettes nouvelles ?
26:03Comprenons-nous bien.
26:06Le résultat de cette négociation n'a pas miraculeusement transformé
26:09le futur budget en budget de gauche.
26:13Les lois de finances ne sont pas celles que nous adopterions
26:16si nous étions au pouvoir.
26:18Mais c'est notre honneur d'avoir évité aux Françaises et aux Français,
26:24ces mesures qui ont un impact direct sur le pouvoir d'achat,
26:28leur capacité à se soigner, à offrir une éducation de qualité
26:32à leurs enfants, de rétablir un minimum de justice fiscale
26:36dans un pays où le CAC 40 sable le champagne
26:39tandis que 9 millions de nos concitoyens vivent sous le seuil de pauvreté.
26:43Je le dis à mes collègues, de droite comme de gauche,
26:47si souvent nous nous sommes interrogés sur notre politique
26:50si souvent nous nous sommes interrogés sur notre utilité,
26:53sur ces heures et ces nuits passées sur ces bancs,
26:56sans conséquence sur la vie des Français.
26:59Notre vocation n'est pas toujours de nous limiter à prendre date
27:02en attendant toujours la prochaine élection.
27:05Elle est d'arracher jour après jour toutes les victoires possibles.
27:10Mais monsieur le Premier ministre, vous le savez aussi,
27:14la clé de voûte de cette négociation portée sur la réforme des retraites de 2023
27:20qui demeure une blessure sociale et démocratique.
27:24Vous avez accepté un premier pas en rouvant le débat.
27:28Je ne minimise pas le geste.
27:31Jusqu'ici, les gouvernements précédents étaient refusés
27:34à toute remise en cause de ce qui est apparu progressivement
27:38comme le totem de la Macronie.
27:41En reconnaissant qu'il était possible, vous l'avez dit,
27:44de parvenir au même résultat avec une réforme plus juste,
27:48vous avez ouvert la possibilité d'une alternative.
27:52Vous avez accepté à notre demande de ne pas différer le débat
27:56et vous réunirez donc dès demain les partenaires sociaux.
28:00Si vous êtes gêné, prenez la parole après moi,
28:03vous l'avez prise avant moi, faites-le.
28:05Mais si vous pensez que ce que je dis là n'a aucun intérêt pour les Français
28:09qui ne sont pas heureux de voir une gauche qui propose,
28:12une gauche qui avance, une gauche qui fait céder le gouvernement,
28:15alors dites-le !
28:18Vous avez accepté à notre demande de ne pas différer le débat
28:23et vous réunirez donc dès demain les partenaires sociaux.
28:27Très bien, ils auront la maîtrise de leur ordre du jour
28:31et tout sera sur la table, âge légal, cotisation, pénibilité,
28:36carrière hachée, égalité femmes-hommes, source de financement mobilisable.
28:42Le dialogue social, la démocratie sociale que nous avons tous ici
28:47pendant sept ans demandé à ce qu'elle soit respectée,
28:50et bien cette fois-ci il est possible qu'elle revienne.
28:53Les Français, Monsieur le Premier ministre, se sont exprimés dans la rue,
28:56dans les sondages, dans les élections, et ils ont été clairs.
29:01Le contrat social français repose pour partie sur l'accès à la retraite en bonne santé.
29:0864 ans, c'est peut-être jeune pour ceux qui aiment leur métier,
29:13sont reconnus dans l'ambition et ne souffrent pas de l'usure, de la pénibilité,
29:17mais pour tous les autres, chaque trimestre supplémentaire est une souffrance
29:22et donc tout doit être sur la table, y compris les financements alternatifs
29:28qui permettent de ne pas reculer l'âge légal à 64 ans.
29:32En annonçant dans un premier temps, avant le courrier que vous venez de nous adresser,
29:37qu'en l'absence d'accord général, il y aurait un retour pur et simple à la réforme de 2023,
29:43vous avez déjà indiqué à ceux qui n'ont aucune intention de bouger
29:49qu'il leur suffisait de bloquer la discussion, de l'enliser pour obtenir satisfaction.
29:55Vous ne pouvez pas accorder un droit de veto aux tenants de l'immobilisme.
30:00Au cours des prochains jours, chacun des partenaires sociaux indiquera les voies
30:05qui permettent de consolider notre système par répartition.
30:09Nous n'accepterons pas une condamnation aux plus petits dénominateurs communs.
30:15C'est la raison pour laquelle, accord ou pas accord, nous souhaitons que le Parlement ait le dernier mot.
30:24Nous allons donc donner toutes ces chances à la négociation,
30:30mais que personne ne s'y trompe.
30:33Si nous avons le sentiment que le débat est verrouillé et ne permet pas d'aller au bout des alternatives,
30:41nous déposerons une motion de censure.
30:44Nous n'accepterons pas le statu quo.
30:47En ouvrant la discussion, monsieur le Premier ministre,
30:51vous devez prendre la mesure des espoirs qu'elle peut soulever
30:55et que rien ne serait pire qu'après avoir ouvert une perspective positive
30:59vous preniez la responsabilité de revenir en arrière.
31:04Si tout apparaît comme un simple simulacre,
31:08alors vous nourrirez une colère qui balayera tous les efforts entrepris
31:13et déroulera le tapis rouge à l'extrême droite.
31:17Si l'on veut bien s'éloigner un instant de nos débats franco-français,
31:22et j'en termine par là,
31:24Trump entre à la Maison Blanche dans quatre jours,
31:28qui promet déjà d'annexer tout le continent américain.
31:32Son allié Musk qui s'ingère dans les affaires internes des britanniques et des allemands.
31:37Poutine qui n'a pas baissé ses prétentions face à nos amis ukrainiens.
31:42Le Proche-Orient encore en feu,
31:45et Gaza qui succombe même si ce que nous apprenons ces dernières heures
31:49nous réjouit de cesser le feu tant attendu.
31:54Et la libération des otages bien sûr.
32:02Erdogan se rêve en nouveau sultan et Xi Jinping en dernière empereur.
32:08Il faut une puissance d'équilibre.
32:12Cette force c'est l'Europe,
32:14et en Europe la France ne peut basculer aux mains de l'extrême droite après l'Autriche.
32:20Ce qui se joue maintenant est proprement historique
32:24et suppose une certaine hauteur de vue.
32:27En ne censurant pas dès vos premiers pas votre gouvernement.
32:31Monsieur le Premier Ministre, vous l'avez compris,
32:34nous ne vous accordons pas pour autant notre confiance.
32:37Mais nous avons choisi de ne pas pratiquer la politique du pire
32:41parce qu'elle peut conduire à la pire des politiques,
32:44c'est-à-dire l'arrivée de l'extrême droite.
32:47C'est pourquoi nous ne vous assurerons pas.