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Lundi 13 janvier 2025, SMART IMPACT reçoit Christophe Downey (cofondateur, Horizom) , Aurélie Pontal (Directrice mécénat, WWF) et Céleste Coez (Cofondatrice, REUSSES)

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00:00Générique
00:08Bonjour, bonjour à toutes et à tous. Bienvenue, c'est Smart Impact, l'émission des entreprises à impact positif.
00:12Et voici notre sommaire. Mon invité aujourd'hui, c'est Christophe Donnet, le cofondateur d'Horizome qui cultive et valorise le bambou en France.
00:20Trois avantages, production de biomasse, augmentation du revenu des agriculteurs et séquestration du carbone.
00:27Le zoom de notre émission portera sur les actions du WWF et notamment son fonds pour lutter contre la déforestation et préserver la biodiversité.
00:37Et puis dans notre rubrique Smartilis, consacrée aux startups, la bonne idée du jour, elle est signée Reyus et son réseau de revendeuses de vêtements de seconde main.
00:45Voilà, c'est parti, c'est Smart Impact.
00:47Générique
00:54L'invité de Smart Impact, c'est Christophe Donnet. Bonjour.
00:57Bonjour.
00:58Bienvenue. Vous êtes le cofondateur d'Horizome, créé en 2022 avec Dimitri Guyot et Stéphane Halsey.
01:04Alors votre métier, c'est le bambou d'une certaine façon. Pourquoi vous avez décidé d'en cultiver en France ?
01:10Bien, le bambou existe partout dans le monde, mais en fait, il pousse très bien sous nos latitudes.
01:16Et donc Horizome a été créé en 2022 et a vocation de développer cette filière en France avec un triple objectif, séquestrer du carbone,
01:25produire de la biomasse qui est une matière première intéressante pour l'industrie et également proposer une diversification résiliente et rentable pour les agriculteurs.
01:35Oui, ça permet aussi une augmentation de leur revenu. On va reprendre ces trois thématiques.
01:39D'abord, pour savoir, vous nous dites, ça pousse bien. Vous produisez où et dans quelle dimension, en quelque sorte ?
01:45Alors, on produit aujourd'hui essentiellement sur le gros quart sud-ouest de la France, donc de la Vendée.
01:52On a des gros projets dans l'Indre où on est en train de développer un projet sur 350 hectares.
01:57Et on a aussi des projets qui descendent, on va dire, jusqu'aux Pyrénées-Atlantiques avec des projets dans les Landes, dans le Gers, en Ordogne.
02:03C'est adapté à toutes les régions. Ça pourrait pousser dans toutes les régions françaises ou alors dans le nord, il fait un peu trop froid.
02:09Enfin, je ne sais pas, je pose vraiment des questions basiques.
02:11Ça pourrait pousser dans différentes régions. Il faut éviter quand même les climats trop froids. Il faut éviter les climats trop secs.
02:21Et il y a un enjeu aussi de créer des gisements au niveau territorial pour optimiser les filières et éviter une logistique trop complexe avec un transport.
02:34Si on fait faire 3000 km au bon bout après leur produit, ce n'est pas très cohérent en termes environnementaux.
02:39En tout cas, vous êtes venu avec, j'imagine, des éléments qui sont produits à base de bambou. C'est quoi et à quoi ça sert ?
02:52Absolument. En fait, le bambou, c'est comme du bois. Dans sa composition chimique, ça ressemble beaucoup au bois.
02:59On vient récolter des plaquettes de bambou qui ressemblent aux plaquettes forestières qui viennent de nos forêts.
03:06Ensuite, on va pouvoir le défibrer pour en faire différents matériaux et on va aller sur les mêmes marchés que le bois industrie.
03:16Concrètement, on va pouvoir en faire des biomatériaux. On peut par exemple faire des biomatériaux qu'on va utiliser dans la construction.
03:23On a des panneaux de fibre, des panneaux de particules. On peut faire des panneaux d'isolant. On peut en faire également du papier.
03:31Bien entendu, on peut en faire de la bioénergie. On peut en faire des granulés qu'on va ensuite utiliser sous forme de combustible.
03:39Ensuite, on a aussi tout l'univers, ce qu'on appelle la chimie du végétal, où on va venir récupérer les composants de la biomasse
03:46pour en faire des résines, des polymères, des bioplastiques ou encore des biocarburants.
03:51C'est pour ça qu'on parle souvent de mine verte à propos du bambou ?
03:55On parle de mine verte parce qu'effectivement, c'est une ressource qui est très intéressante, qui a un fort taux de renouvellement
04:01et qui va pouvoir venir complémenter la ressource en bois disponible.
04:06C'est complémentaire. Ce n'est pas forcément destiné à remplacer parce qu'on ne manque pas de bois en France à ma connaissance.
04:12On manque de bois.
04:14En tout cas, on va manquer de bois.
04:16Quand on regarde aujourd'hui les équilibres entre l'offre et la demande, on voit un déséquilibre croissant avec une demande de plus en plus importante.
04:26Pourquoi ? Parce qu'on va demander de plus en plus de biomasse notamment ? C'est pour ça que vous dites qu'à l'avenir, on va manquer de bois ?
04:31C'est ça. Si on prend juste un petit peu de recul et qu'on regarde comment est-ce qu'on va décarboner notre économie, l'objectif c'est 2050.
04:40On a deux leviers. Il faut qu'on double les puits de carbone et en même temps, il faut qu'on réduise par 5 les émissions.
04:47Les puits de carbone, c'est nos forêts et les émissions, c'est diviser par 5 les émissions.
04:55On va le faire avec plus de sobriété et également en changeant notre façon de se nourrir, notre façon de vivre, notre façon de produire.
05:03Ça, ça va se faire via le développement de ce qu'on appelle la bioéconomie et aujourd'hui, le bambou a tous les atouts pour être au cœur de cette révolution de bioéconomie.
05:12Est-ce que c'est plus respectueux de l'environnement de cultiver du bambou que le bois par exemple ?
05:19Si on essaie de comparer si on produit de la biomasse venue du bambou ou les autres ?
05:25Ce n'est pas complètement comparable en termes de culture parce que la forêt, c'est une exploitation forestière sur les terres forestières.
05:33Là où nous, on vient remplacer ou en tout cas diversifier des surfaces agricoles.
05:40Quand on s'intéresse concrètement à la culture, on a une culture qui est intéressante parce que c'est une culture pérenne qui ne demande pas de travail du sol.
05:47C'est une culture qui demande peu d'intrants. C'est une culture qui ne demande pas de pesticides.
05:52De ce point de vue-là, c'est une culture qui a un taux de croissance très rapide et qui va venir séquestrer du carbone naturellement, rapidement.
05:59Est-ce qu'elle a besoin de beaucoup d'eau, la culture de bambou ?
06:02Ça n'a pas besoin de beaucoup d'eau mais ça a besoin d'eau parce que c'est une culture à vocation productive et donc pour avoir de la production, on a besoin d'eau.
06:12Nous, on travaille aussi beaucoup sur les impacts environnementaux de la culture et on a des impacts qui sont très positifs.
06:19On a des impacts sur le sol parce qu'on a un taux de renouvellement racinaire, une chute des feuilles.
06:25Ça, ça crée de la biomasse donc en fait c'est très bon.
06:28Ça crée de la matière organique pour les sols et ça vient rétablir la fonctionnalité des sols.
06:33On a des impacts positifs sur le cycle de l'eau parce qu'on vient structurer le sol, limiter l'érosion.
06:38Et ça, ça permet également, au même titre que la forêt, de recréer de l'évapo-transpiration.
06:44Donc ça, ça vient régénérer les sols et on a des impacts positifs en termes de biodiversité.
06:48On nous pose souvent la question.
06:50En fait, quand on prend soin du sol, on vient aussi développer toute la vie microbienne dans le sol.
06:55Mais une bambouzette, c'est aussi un habitat adapté pour des oiseaux, des insectes.
07:00C'est une culture persistante donc ça crée des corridors écologiques sur les territoires entre des zones de biodiversité.
07:06Et donc globalement, c'est une culture qui va pouvoir créer et générer des services qu'on appelle des services écologiques ou écosystémiques.
07:15Vous l'avez évoqué, la France doit multiplier par deux ses puits de carbone pour tenir les objectifs de neutralité de 2050.
07:24Donc là, on va parler de séquestration de carbone.
07:26Une exploitation de bambou, à quel point ça participe à la séquestration du carbone ?
07:33En fait, la séquestration de carbone est complètement en fonction de la quantité de biomasse aérienne et souterraine sur un projet.
07:43C'est le même mécanisme que la forêt.
07:47C'est de la photosynthèse avec du CO2 qui est séquestré dans la plante.
07:52Donc c'est une séquestration qui est absolument nécessaire.
07:55Et ce qui est intéressant quand on réfléchit à la forêt, c'est qu'aujourd'hui nos forêts sont victimes du dérèglement climatique.
08:01On a des sécheresses, on a du stress hydrique, on a des incendies, on a des maladies.
08:07Et donc aujourd'hui, on demande à la forêt d'avoir ce rôle de puits de carbone et en même temps la sollicite pour sa ressource.
08:13Et ça, c'est des objectifs qui sont contradictoires.
08:15Donc avoir une ressource avec un taux de renouvellement qui est beaucoup plus rapide que celui de la forêt,
08:20parce que nous on récolte le bambou annuellement une fois qu'il a maturité,
08:23par rapport à une forêt où on vient récolter tous les 30, 40, 50 ans, c'est très intéressant.
08:28On va réussir à apporter une ressource complémentaire et on va réussir à baisser la pression qui existe sur la forêt.
08:34Mais ça veut dire que pour les agriculteurs qui intègrent cette culture, c'est des crédits carbone qui vont pouvoir monétiser une certaine façon ?
08:43Alors aujourd'hui, nous, notre objectif, c'est de développer cette culture-là.
08:46Donc pour développer cette culture-là, il faut que la culture soit rentable pour les agriculteurs.
08:50Et donc effectivement, nous, on utilise tous les mécanismes à notre disposition pour que cette culture soit le plus rentable.
08:57On certifie nos projets pour effectivement générer des crédits carbone et des certificats carbone,
09:03mais derrière, il y a d'autres possibilités.
09:06Il existe des paiements pour services écosystémiques, par exemple,
09:09pour valoriser le fait que cette culture apporte beaucoup de co-bénéfices et de services écosystémiques.
09:16Et donc ça, ça a une valeur en soi, en fait.
09:19Production de biomasse.
09:21Vous avez commencé à l'évoquer, mais il y a toujours cette question quand on parle de biomasse.
09:26À quoi on utilise nos terres agricoles ?
09:30À produire pour que nous, on soit nourris, et aussi éventuellement un peu les animaux,
09:34ou alors pour produire de la biomasse pour faire de l'énergie ?
09:36Vous voyez ce que je veux dire ?
09:37Absolument.
09:38Donc là, ça va venir dans une rotation ?
09:39Ça va remplacer des cultures alimentaires ?
09:42Alors, ça ne va pas venir dans une rotation parce que c'est une culture pérenne.
09:45On plante du bambou, on en plante pour 30, 40, 50 ans.
09:48En revanche, on assiste aujourd'hui à une mutation du monde agricole
09:55avec une modification des asseulements.
09:57Et aujourd'hui, le modèle agricole, pour devenir plus résilient,
10:00il a besoin d'évoluer et on a besoin d'aller vers plus d'asseulements.
10:04Donc l'exploitation résiliente et rentable de demain,
10:07elle permet de produire de la nourriture pour notre souveraineté alimentaire,
10:14mais elle permet aussi de produire des matières premières
10:17qui sont essentielles pour décarboner.
10:21On ne peut pas faire les deux en même temps sur la même terre ?
10:23Non, on ne peut pas faire les deux en même temps.
10:25Mais aujourd'hui, il y a une modification qui est nécessaire.
10:28Et quand on regarde aujourd'hui les surfaces agricoles en France,
10:31on a deux tiers des surfaces agricoles qui sont utilisées,
10:34ou 64% exactement, pour l'alimentation animale.
10:37Et on sait qu'on va devoir baisser la part de l'alimentation de protéines animales.
10:43Donc ça, ça va libérer aussi des millions d'hectares.
10:45Et ces millions d'hectares, il va falloir faire un choix de dire qu'est-ce qu'on en fait.
10:49Et notre choix, c'est de se dire qu'il y a une partie de ces hectares
10:53qui va aller vers des cultures non-alimentaires, pas seulement le bambou.
10:56Le bambou, c'est une ressource très intéressante, mais il y en a d'autres.
10:58On a le lin, on a le chanvre.
11:00Toutes ces ressources, ce sont des ressources qui vont être des bio-ressources
11:04pour cette nouvelle bioéconomie qui va peu à peu remplacer des produits d'origine fossile.
11:11Dernière question sur les perspectives.
11:13Là, vous nous dites que vous êtes mono-bambou en quelque sorte,
11:16ou alors vous commencez à réfléchir à d'autres cultures ?
11:18Pour l'instant, on est focalisé sur le bambou.
11:22Parce que nous, on travaille sur toute la filière.
11:24Donc on a notre pépinière, où on développe nos propres plants, dans les Landes.
11:28Ensuite, on développe en partenariat avec des agriculteurs,
11:31et sur nos propres projets, des plantations,
11:34pour cultiver le bambou et produire de la biomasse.
11:38Et ensuite, via tout l'aval de la chaîne de valeur, avec toute la transformation, à optimiser.
11:45Donc on a déjà largement suffisamment de travail.
11:48Merci beaucoup Christophe Donnet, et à bientôt sur Be Smart for Change.
11:52On passe tout de suite à notre Zoom.
11:54On va parler du WWF et de ses actions.
11:58Ça rejoint un peu ce dont vous nous parliez, de lutte contre la déforestation.
12:09Le Zoom de ce Smart Impact avec le WWF.
12:13Bonjour Aurélie Pontal.
12:14Bonjour Thomas Hugues.
12:15Bienvenue, vous êtes la directrice du pôle investissement et Messé, la entreprise du WWF.
12:20En quelques mots, c'est une ONG mondiale.
12:25Mondiale, avec des bureaux en France.
12:27Depuis combien de temps ?
12:28Depuis plus de 60 ans au niveau mondial, et depuis plus de 50 ans quand même en France.
12:33Donc en France, on existe depuis longtemps aussi.
12:35Une ONG qui est basée sur la science.
12:38Et qui a sa spécificité de travail sur le terrain, avec des projets terrain.
12:42Et également avec le monde de l'entreprise.
12:45Oui, effectivement.
12:46Alors là, on va parler plus précisément d'un fonds qui s'appelle Nature Impact.
12:52On parle de quoi ?
12:53On parle de financement de projets de défense de la biodiversité ?
12:58On parle de financement de projets à l'échelle, de projets de préservation des forêts.
13:03D'accord.
13:04Pour Nature Impact, l'idée du fonds, et notre idée, ça a été de mettre en place un mécanisme de financement pour la préservation.
13:11Versus ce qui existe beaucoup aujourd'hui sur les plantations d'arbres, la restauration.
13:16On s'intéresse moins à la préservation, c'est là où il y a des besoins de financement.
13:19Et notamment en France, les gens ne le savent pas, sur la forêt, pour les forestiers.
13:23Pour qu'ils puissent mettre en place des pratiques.
13:25Qui dit préservation, dit parfois un manque à gagner.
13:28Parce que le forestier va sanctuariser une partie de sa parcelle forestière.
13:33Et donc va avoir un manque à gagner par rapport à la productivité de la forêt.
13:37Ou un coût direct de préservation pour acheter des équipements.
13:40Et donc il y a ce vrai besoin de financement.
13:43Et en parallèle, les entreprises, nous ça fait aussi plus de 20 ans qu'on travaille avec le secteur privé.
13:48Avec certaines entreprises qui deviennent partenaires du WWF.
13:52Et il y avait ce besoin de démarches robustes, scientifiquement crédibles aussi.
13:58Par rapport aussi à toutes les dérives qu'on a connues sur les mécanismes de crédit carbone.
14:02Justement qui financent la plantation.
14:05Et donc ils recherchaient ce type de démarches.
14:07Plus dans une logique d'ailleurs de contribution que de compensation dans leur politique RSE.
14:13L'entreprise va développer une démarche RSE, de responsabilité.
14:18Qu'est-ce qu'elle peut apporter à la société ?
14:21Comment elle peut contribuer sur son territoire ?
14:23Au-delà de son impact direct.
14:26Et c'est vraiment ça qu'on a cherché à mettre en place dans le fond.
14:29On reparlera de cet aspect SBTI basé sur la science.
14:32Parce que je trouve que c'est une dimension vraiment intéressante.
14:34Mais ce fonds dédié, comment il fonctionne ? D'où vient l'argent en quelque sorte ?
14:39Alors comme le fonds il est porté directement par la fondation WWF.
14:43Il est alimenté par des financements d'entreprises sous forme de mécénat.
14:47Mécénat défiscalisable.
14:48Ça c'est une des particularités.
14:50On mutualise les financements.
14:52Autre particularité par rapport à ce que font les associations de manière assez classique.
14:56Une entreprise finance un projet donné.
14:59Donc on mutualise pour avoir des volumes conséquents.
15:01Et nous au WWF, on se charge avec une gouvernance partagée.
15:06D'ailleurs on a un comité technique, un comité de partie prenante.
15:09On n'est pas seul pour choisir les projets forestiers.
15:12A travers un appel à projet.
15:14Donc on en a déjà eu un premier en 2023.
15:17On a cinq projets.
15:18On en a lancé un deuxième.
15:20Donc on est dans le tour de table de levée de fonds.
15:23C'est-à-dire que les fonds sont liés à un certain nombre de projets que vous avez déjà en tête ?
15:28Alors on en a déjà cinq qui ont été sélectionnés dans le premier appel à projet.
15:32On est en pré-identification d'autres.
15:35Et qui vont être sélectionnés ensuite via l'appel à projet.
15:38Et donc les financements des entreprises, ils passent par ce fonds.
15:41Et on les réalloue sur ces actions de préservation dans la durée.
15:45Ça c'est très important aussi.
15:46C'est cette spécificité.
15:47On contractualise avec les forestiers.
15:49Parce qu'on n'achète pas les forêts.
15:51Mais ils sont engagés sur des durées qui peuvent aller jusqu'à 99 ans.
15:55Donc là on est vraiment sur le temps de conservation qui est nécessaire en forêt.
15:59Et c'est...
16:00Ce qui donne de la visibilité aussi financière aux forestiers.
16:03Ce qui donne de la visibilité aux forestiers.
16:05Ils savent ce qu'ils vont avoir comme fonds grâce au WUF pendant des décennies.
16:08Exactement.
16:09Et une garantie aussi aux entreprises.
16:11Parce que souvent, le travers des projets qu'on a observés, c'est qu'on finance un projet pendant 5 ans, 10 ans.
16:16Et après, qu'est-ce qui se passe derrière ?
16:18Donc ça, ça a été vraiment aussi un objectif pour nous.
16:20Et l'autre spécificité pour le Fonds Nature Impact qui a intéressé les entreprises,
16:26c'est qu'on a un peu inversé cette logique de prisme carbone en premier.
16:31Je finance et je recherche comme impact, moi, pour mon entreprise, à séquestrer des tonnes de carbone.
16:36Oui, oui.
16:37C'est notamment...
16:38Il y a eu pas mal de dérives sur les plantations de forêts qui étaient faites parfois.
16:42Pas toujours, heureusement.
16:43Pas toujours.
16:44Un peu n'importe comment.
16:45Pas forcément les bonnes espèces, etc.
16:47Et le crédit carbone, c'est uniquement un outil, finalement, qui peut être plus ou moins bien utilisé.
16:52Donc nous, on a développé cette logique avec un prisme d'abord biodiversité.
16:57Donc c'est parce qu'on préserve la biodiversité, et c'est notre légitimité bien sûr au WWF,
17:01qu'on va séquestrer du carbone dans la durée.
17:04Mais le carbone devient uniquement un co-bénéfice.
17:06Et pour ça, on a travaillé sur une logique, alors on n'a rien inventé,
17:10qui sont les paiements pour services écosystémiques.
17:13Donc on regarde, en fait, non pas la valeur d'un arbre, d'une espèce,
17:18mais la valeur de la pratique qui est mise en place par le forestier.
17:21On lui donne une valeur économique.
17:23Et c'est comme ça qu'on valorise, du coup, les financements des entreprises.
17:27On leur délivre, finalement, des indicateurs d'impact.
17:31Climat et biodiversité.
17:33On mesure vraiment les deux, on ne sépare pas les deux.
17:35À quel point les forêts françaises sont malades et ont besoin, finalement, d'un programme comme le vôtre ?
17:41C'est vrai qu'on a souvent l'habitude de penser en France que la forêt va bien,
17:44comparée à d'autres bassins forestiers sur lesquels on travaille par ailleurs.
17:48En fait, la forêt française n'a pas un problème de quantité,
17:51on a un couvert forestier important,
17:53mais elle a un problème de qualité et de qualité écologique.
17:56La forêt nous rend de multiples services écosystémiques, gratuitement.
18:00Un service écosystémique, c'est le cycle de l'air, le cycle de l'eau, le cycle des sols.
18:06Bien sûr, la séquestration carbone, qui a intéressé en premier, d'ailleurs, les entreprises.
18:10Et qui nous permet de lutter contre le changement climatique.
18:13En fait, elle a un problème de qualité parce qu'on a homogénéisé souvent les plantations.
18:19On a rendu les forêts pauvres, finalement, en biodiversité.
18:23Le maintien de ces services écosystémiques est mis à mal par le changement climatique,
18:27les sécheresses, par, bien sûr, les parasites aussi.
18:31Il y a toute une multitude de facteurs qui font que la forêt française,
18:34en termes de qualité écologique, aujourd'hui, il y a une problématique.
18:38Et donc, ça veut dire, si on prend certains des programmes que vous avez déjà lancés,
18:41qu'est-ce que vous faites, concrètement ? Vous allez réintroduire de nouvelles espèces ?
18:46Alors, non, pas du tout. Nous, on est vraiment sur préserver l'existant.
18:49Donc, ce qui va nous intéresser, ça va être, typiquement, concrètement, dans une parcelle forestière.
18:55On identifie des arbres-habitats.
18:58Donc, des arbres qui ont une valeur de biodiversité écosystémique très importante.
19:03Et qui sont, du coup, préservés, sanctuarisés.
19:06Le forestier peut, par ailleurs, dans certains projets, exploiter la forêt.
19:11Pour ça, on travaille, d'ailleurs, avec le FSC, le Forest Heritage Council.
19:15Et qui a mis en place, d'ailleurs, toute une procédure de certification.
19:19Puisque là, c'est une certification sur les services écosystémiques.
19:23Et puis, on peut faire, quand même, un petit peu de restauration.
19:27Mais c'est vraiment minime.
19:29Et on va avoir tout un suivi.
19:31Et ça aussi, un suivi, dans le temps, de l'impact sur la qualité écologique de la forêt.
19:37Oui, mais alors, je repose la question.
19:39Parce que vous disiez, il y a un peu trop de...
19:41On a un peu uniformisé nos forêts.
19:43Est-ce que, dans le cadre de ces programmes, il n'y a pas une possibilité ou une opportunité de réintroduire de la diversité ?
19:51Bien sûr, et de mélanger les essences d'arbres avec différentes couches, d'ailleurs, différentes strates, différentes essences.
19:56Qui sont aussi plus résilientes.
19:58Ça, c'est un vrai sujet, aussi, pour nos forêts françaises.
20:00Parce qu'on a des forêts anciennes, dans les Pyrénées, par exemple.
20:03Mais on a des forêts qui sont peut-être plus jeunes.
20:05Et du coup, il faut vraiment s'intéresser, aussi, à la capacité, dans le temps, de résilience de la forêt.
20:10On parlait de ces programmes basés sur la science SBTI.
20:15Quel rôle joue le WWF quand vous accompagnez une entreprise ?
20:21Alors, vous ne certifiez pas, c'est ça ?
20:24Non, on n'est pas un organisme certificateur.
20:26On travaille avec la profession.
20:27Mais vous conseillez ?
20:29Nous, on challenge.
20:30Avant tout, on accompagne, on guide l'entreprise sur le comment.
20:34Parce que le pourquoi, la sensibilisation, la prise de conscience, elle est là.
20:37On a des entreprises qui travaillent avec nous depuis plusieurs années.
20:40La Banque Postale, par exemple, qui est un des premiers soutiens du Fonds Nature Impact.
20:43Le groupe Bell.
20:44Des PME, aussi.
20:45Tikamun, Aigle.
20:47Et nous, ce qui nous intéresse, dans une entreprise, quand on regarde son engagement.
20:51Et une entreprise, elle vient nous voir, parce que ce qui l'intéresse, c'est d'avoir un regard critique sur sa démarche, sur ses engagements.
20:57Quel est son niveau d'ambition ?
20:58Est-ce que pour une ONG comme le WWF, on est bien positionné ?
21:02Est-ce qu'il y a des trous dans la raquette ?
21:04Et donc, on regarde, comme vous le dites, à la fois la partie réduction de son impact sur des trajectoires de décarbonation.
21:11Avec des méthodologies, des outils qui sont basés sur la science.
21:14Vous citiez SBTI pour le climat.
21:16On a aussi développé toute l'approche sur la biodiversité, sur l'empreinte biodiversité avec le réseau SBTN.
21:22Science Based Target Network.
21:24Et donc, on regarde la partie réduction d'impact.
21:26Et la partie contribution positive à la société, à l'environnement.
21:31Financement, finalement, à l'échelle.
21:33On a besoin des entreprises, surtout dans le contexte actuel.
21:36Coupe de subventions publiques.
21:38On a besoin des financements.
21:39Est-ce que c'est aussi un moyen pour vous d'éviter de mettre le logo WWF à côté d'une entreprise qui fait semblant ?
21:47Vous voyez ce que je veux dire ?
21:48Alors, moi je suis arrivée au WWF il y a plus d'une dizaine d'années.
21:51Et c'est vrai qu'il y avait encore cette logique d'association en termes d'image qui ne nous pose pas de problème.
21:56Mais en fait, elles sont vite découragées.
21:58Et d'ailleurs, souvent les gens ne nous connaissent pas du tout pour notre travail avec les entreprises.
22:02On communique très peu, finalement.
22:04C'est très exigeant d'obtenir aussi quand même un partenariat avec le WWF.
22:08Il y a toute une démarche d'évaluation de choix.
22:10Les gens sont souvent surpris.
22:12On n'a pas énormément de partenariats avec des entreprises.
22:15Il y a tout un travail de sélection pour s'assurer que c'est gagnant-gagnant, qu'il y a une valeur des deux côtés.
22:20On ne travaille pas forcément avec les plus exemplaires.
22:22Ça ne nous intéresse pas non plus parce que ce qu'on cherche, c'est d'avoir un impact.
22:25Donc il faut qu'il y ait une vraie volonté, des engagements de base.
22:29Et après, c'est plutôt comment l'entreprise peut faire pour améliorer et progresser dans sa démarche.
22:38Et c'est là que c'est intéressant.
22:39Nous, on la guide, on la challenge.
22:41Mais sur la communication, on essaie de valoriser ce qui se fait de bien.
22:45Parce qu'il y a quand même, et surtout en France, on a la chance d'avoir des entreprises assez engagées.
22:49Qui ont mis en place des solutions, qui innovent, qui financent des alternatives.
22:54Et c'est aussi notre rôle, nous au WF, de mettre en lumière ces innovations.
22:57Merci beaucoup Aurélie Pontal et à bientôt sur BeSmart for Change.
23:02On passe à notre rubrique Startup tout de suite.
23:10Smart Ideas, notre rubrique consacrée aux startups et co-responsables avec Céleste Cohez.
23:15Bonjour.
23:16Bienvenue, vous êtes la co-fondatrice de Russe.
23:19C'est créé en 2021 avec Victoire Zviagjaké et Tara Dabinovitch.
23:23C'était quoi votre idée de départ ? Pourquoi vous avez créé Russe ?
23:27Alors au départ, Russe, c'est un besoin personnel.
23:30J'ai été une surconsommatrice de vêtements.
23:32J'achetais beaucoup trop de vêtements à une époque.
23:34Je me suis soignée depuis, ça va beaucoup mieux.
23:36Mais tu es passée par là, je pense, plus ou moins.
23:39Et donc, j'avais des placards qui débordaient.
23:41Je ne savais jamais quoi faire de ces vêtements.
23:43Je les ai donnés.
23:44Certes, je les ai donnés un petit peu au relais,
23:47mais je savais que ce n'était pas forcément un moyen parfait,
23:53parce que ça partait en Afrique, etc.
23:55Et puis, j'avais aussi des pièces qui étaient assez qualitatives.
23:58La petite jupe Kenzo Violette que je n'avais mise qu'une fois,
24:01que je n'avais pas non plus envie.
24:02Soit qu'elle parte en Afrique, soit qu'elle parte en isolant phonique et thermique.
24:05Donc au bout d'un moment, je me dis, qu'est-ce qu'on fait de ces vêtements ?
24:08Revendre, revendre sur Vinted à l'époque, vestiaire collective, etc.
24:12Ça existait, mais pas forcément le temps, pas forcément l'envie, la flemme, clairement.
24:20Et donc, je rencontre une copine qui me dit qu'elle vend sur Vinted depuis quelques temps,
24:26qu'elle adore ça.
24:27Et elle me dit, très bien, moi je prends tes vêtements et je les revends pour toi.
24:31Donc l'idée de créer un réseau de revendeuses, en quelque sorte, c'est ça ?
24:35Exactement. Au début, c'était ma copine Jade qui revendait pour moi.
24:37Puis quand j'en parle à mes copines, à ma famille,
24:39elles me disent toutes, mais attends, mais Jade, elle ne veut pas prendre mes affaires aussi ?
24:41Parce que moi aussi j'en ai trop et je veux vider mes placards.
24:43Et donc l'idée a commencé comme ça, avec Jade.
24:45Et puis Jade est devenue, aujourd'hui on a plus de 1000 revendeuses en France,
24:48qui du coup viennent chez vous à domicile, récupèrent les pièces et les vendent pour vous.
24:52Comment vous les choisissez ? J'imagine qu'il y a des critères de recrutement,
24:55parce que ce n'est pas si évident de confier ces vêtements à quelqu'un ?
24:59C'est vrai. Alors aujourd'hui, on prend à peu près 15% des candidatures qui nous sont proposées,
25:04uniquement, principalement sur leurs critères de vente sur Vinted.
25:09Donc en gros, on va analyser leur Vinted, voir le nombre de notes qu'elles ont, etc., d'évaluation.
25:15Et en fonction de ça, on les accepte ou on ne les accepte pas.
25:18C'est quoi le modèle économique de Ross ?
25:20On a un format de dépôt-vente.
25:22Alors pour le coup, c'est, vous nous confiez les vêtements, tout ce qui est vendu,
25:25il y a un pourcentage qui est reversé à chaque partie.
25:27Et ce qui n'est pas vendu, soit vous le récupérez, soit on le donne à des associations.
25:30Votre réseau, vous avez réussi à mailler déjà le territoire français,
25:34vous êtes en train de le mailler le plus possible ?
25:37Dans la Creuse, par exemple, il nous manque quelques Rust,
25:41mais sinon, on a des revendeuses Rust partout en France, oui.
25:44Je vois qu'on parle de l'impact carbone de l'industrie textile,
25:484 milliards de tonnes de CO2 par an, soit 10% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
25:55Quel regard vous portez sur ce secteur d'activité auquel vous participez aujourd'hui ?
26:01Il y a des grandes marques qui font des efforts, il y a des startups qui réinventent le modèle,
26:06mais malgré tout, qu'est-ce qu'on voit ? On voit une surproduction qui continue.
26:09Comment vous l'analysez, ça ?
26:11Il y a beaucoup trop de vêtements, ça c'est sûr.
26:13Il y a assez de vêtements sur la planète aujourd'hui pour habiller cette génération.
26:18Donc des vêtements, on en a beaucoup trop.
26:21Les manières dont c'est traité aujourd'hui, elles sont assez différentes.
26:25Moi, je suis un peu alarmée par les jeunes qui vont toujours vers des marques très chinoises
26:31et qui n'ont pas forcément un impact très négatif sur la planète.
26:37De l'autre côté, on voit aussi des entreprises qui font beaucoup d'efforts.
26:42Il y a un peu de tout, je trouve qu'on va dans le bon sens.
26:46J'aimerais que beaucoup plus de gens aillent dans le bon sens.
26:49Pour le coup, ça m'alarme un petit peu.
26:55C'est quoi les clientes ? Le levier du prix, c'est le premier argument ?
27:01Qu'est-ce qui rentre en ligne de compte ?
27:03On prend tous les vêtements qui valent plus de 20 euros.
27:06Ça veut dire qu'en effet, c'est du milieu de gamme.
27:10On commence au milieu de gamme, on prend un petit peu ce qu'on appelle la fast fashion,
27:15du Zara ou autre, mais des belles pièces.
27:17Et après, ce sera plutôt du milieu de gamme.
27:19Oui, en effet, des clients et des clientes vont avoir des pièces plutôt milieu de gamme ou haut de gamme.
27:25Mais qui viennent vers vous pour faire des économies ?
27:27Parce qu'elles vont trouver des pièces en bon état, moins chères qu'ailleurs ?
27:31Ça, c'est l'acheteur final.
27:33Notre cliente principale, c'est celle qui va nous confier les vêtements.
27:37Après, l'acheteur final, il est sur vintage, sur vestiaire collectif, etc.
27:40Finalement, nous, on n'a pas vraiment d'impact avec lui.
27:42Je vous pose cette question parce qu'il faut aller très vite dans la réponse.
27:45On est aussi dans une critique qui consiste à dire qu'on alimente, on se donne bonne conscience,
27:50on va continuer d'acheter des vêtements parce qu'on sait qu'on va pouvoir les revendre après.
27:53Vous voyez ce que je veux dire ?
27:54Il y a un avantage avec la circularité.
27:58Et en effet, il y a ce biais qui peut être vu comme très négatif.
28:02Pour le coup, aujourd'hui, il y a quand même peu de gens qui vont aller acheter.
28:05Et s'ils achètent, tant mieux, ils achètent plutôt des belles pièces qui vont y rester plus longtemps.
28:09On préfère que les gens aillent acheter des belles pièces et qu'elles durent plus longtemps,
28:12quitte à les revendre après et qu'ils aient une troisième, une quatrième vie,
28:16que du chien ou du boue qui ne va avoir qu'une seule vie parce que la qualité du vêtement fera que ce sera le cas.
28:22Merci beaucoup Céleste Cohez et bon vent à Ross.
28:25Voilà, c'est la fin de ce numéro de Smart Impact.
28:27Merci à toutes et à tous de votre fidélité et à demain.