Alain Duhamel, éditorialiste politique, était l'invité d'Apolline de Maherbe dans le Face à Face, ce mercredi 8 janvier sur BFMTV et RMC.
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00:00Il est 8h32, vous êtes bien sur RMC et BFM TV. Bonjour Alain Duhamel, merci d'être avec moi ce matin, c'est évidemment toujours un plaisir de vous entendre mais on a envie aussi avec vous de prendre du recul.
00:20Jean-Marie Le Pen est mort, cette phrase Jean-Marie Le Pen est mort qui a donc apparu sur toutes les antennes, sur tous les téléphones hier. Jean-Marie Le Pen qui est mort, quel héritage politique, quel héritage moral, comment il a traversé aussi cette 5ème République, est-ce que certaines de ses idées d'ailleurs ont finalement plus gagné que lui ?
00:44D'abord une question, vous Alain Duhamel, vous retenez quoi de Jean-Marie Le Pen ?
00:48Que c'est le seul homme politique de la 5ème République qui soit arrivé à exercer une influence décisive sans jamais exercer aucun pouvoir.
00:59Est-ce qu'il voulait le pouvoir ? C'est une des premières questions que je me suis toujours posée et que d'ailleurs je lui avais posé et que vous lui avez posé aussi.
01:05Oui, au fond des choses je crois que ce n'est en tout cas pas ça qui l'intéressait et qui le motivait. Je crois que c'était d'abord quelqu'un assez narcissique et très orgueilleux et qui voulait marquer son temps de façon différente des autres hommes politiques.
01:25Il voulait d'abord s'imposer comme un personnage hors normes, différent des autres. Ensuite bien sûr il y avait les idées que je ne partageais pas du tout mais qu'il portait et ces idées-là, il faut reconnaître ce qu'il y est, elles ont progressé et c'est lui qui les a fait progresser.
01:44Ensuite Marine Le Pen a su utiliser le patrimoine politique qui lui était légué et qu'elle ensuite a saisi complètement mais mettre sur pied le logiciel de l'extrême droite c'est vraiment Jean-Marie Le Pen qui est arrivé et aucun homme politique français n'était arrivé à faire quelque chose de ce genre d'abord au bénéfice de l'extrême droite,
02:11ni sous la Ve République, ni avant sous les autres républicains.
02:14Parce que jusqu'alors, il faut le rappeler, quand il crée le Front National c'est à partir de sous-groupuscules qui jusqu'alors étaient même non seulement distincts les uns des autres mais même parfois ennemis les uns des autres.
02:26Oui bien sûr, ennemis jusqu'à se combattre physiquement et peut-être plus.
02:31Ça veut dire quoi peut-être plus ?
02:33Parce qu'il y a eu des règlements de comptes, il y a eu des morts bizarres, on s'est en tout cas posé énormément de questions.
02:40Bon lui c'est autre chose, enfin non pas qu'il ait peur de la violence, au contraire mais...
02:47Il a commencé par une violence physique, qu'il a eu à nouveau plusieurs fois.
02:51Oui et déjà quand il était étudiant, il était connu pour être le bagarreur du quartier latin et avoir le coup de poing et quelques fois d'autres choses faciles.
02:59Je voudrais Alain Duhamel qu'on réécoute un échange que vous avez eu avec Jean-Marie Le Pen, c'était à l'époque d'Antenne 2 et c'était en 1984.
03:09Vous avez deux images, il y a une première image qui vous colle à la peau depuis 30 ans, depuis vos débuts dans la vie politique et qui est l'image d'un extrémiste et d'un activiste.
03:20Et puis il y a une seconde image que vous essayez visiblement d'accréditer en ce moment et à travers laquelle vous vous présentez comme un homme d'opposition, de droite nationale, respectable et légaliste.
03:36Est-ce que vous vous considérez comme un démocrate ?
03:38Oui certainement et je le démontrais en participant à la vie publique de notre pays en toutes circonstances et bien souvent condamné à l'avance par le système électoral majoritaire sans espoir.
03:52Je suis dans le fond un démocrate tchortilien, c'est-à-dire que je me réfère aux fameux aphorismes de Churchill disant la démocratie c'est probablement un très mauvais système mais je n'en connais pas d'autres.
04:03Démocrate ?
04:05Républicain et encore.
04:09Républicain vous diriez vraiment ? Vous le metteriez dans l'arc républicain Jean-Marie Le Pen ?
04:14Non ce n'est pas ça que je veux dire. Ce que je veux dire c'est qu'il jouait le jeu des règles de la Vème République.
04:21Il ne cherchait pas de prendre le pouvoir par la force, il ne cherchait pas non plus les accommodements idéologiques, il était ce qu'il était.
04:29Il était l'extrême droite, il apportait l'extrême droite à un niveau qu'elle n'avait jamais eu avant sauf dans l'immédiate avant-guerre entre 38 et 39.
04:43Mais ce qu'il a fait, que je conteste totalement sur le fond, mais personne ne l'avait fait avant.
04:52Arriver à imposer un courant politique uniquement par la force de sa parole et par son charisme à la télévision.
05:00Vous avez vu ce que vous faites Alain Duhamel et c'est parfaitement naturel.
05:04Vous ponctuez vos phrases depuis le début de cet entretien de « et je ne partageais pas ses idées et je combattais ses idées ».
05:11Au fond, vous vous incarnez presque dans la manière même dont vous avez cette gêne.
05:17Ce que l'on voit aussi depuis hier soir dans la classe politique française.
05:22Le Premier ministre qui a rendu une sorte d'hommage quand même à Jean-Marie Le Pen avec ses mots.
05:28François Bayrou qui a dit « au-delà des polémiques qui étaient son arme préférée et des affrontements nécessaires sur le fond,
05:34Jean-Marie Le Pen aura été une figure de la vie politique française.
05:39On savait en le combattant quel combattant il était.
05:43Beaucoup dans la classe politique et notamment à gauche reprochent à François Bayrou d'avoir un ton qui n'est pas assez pugnace, pas assez combattant.
05:53Oui, bon alors là je dirais, ça ne vous a sûrement pas échappé, qu'il y a un peu une différence de ton entre l'Élysée et Matignon,
06:00entre Emmanuel Macron et François Bayrou.
06:03Personnellement, je partage beaucoup plus la formule d'Emmanuel Macron, c'est-à-dire l'histoire le jugera,
06:11ce qui est une façon de dire qu'elle le jugera sévèrement, que François Bayrou qui ne le ménage pas,
06:18il le présente bien comme un adversaire, mais qui ne le diabolise pas du tout.
06:23Le mot polémique, c'est ce mot-là.
06:25« Au-delà des polémiques qui étaient son arme préférée ».
06:28Il a été condamné, condamné pour négationnisme, condamné pour antisémitisme, condamné pour des moments de violence, y compris physique, contre les adversaires politiques.
06:37Oui, bien sûr.
06:38Ce ne sont pas des polémiques.
06:40Non, mais il ne s'agit pas de dire que c'était un homme politique comme les autres, parce que ça n'est pas vrai.
06:46Et quand je dis qu'il s'inscrivait dans la Vème République, c'est parce qu'il n'a pas cherché à prendre le pouvoir autrement,
06:52donc par nature il s'inscrivait, et que ses condamnations étaient des condamnations sur le racisme, l'antisémitisme, etc.,
07:00qui étaient le reflet de ses convictions et de son idéologie, qui d'ailleurs était extrêmement dangereuse pour ça,
07:08même si je pense que la marque et en même temps son succès idéologique, en fait c'est, à mes yeux évidemment, sur l'immigration.
07:20Le fait que l'immigration, qui était son sujet de prédilection évidemment, soit désormais un sujet qui est quasi quotidien dans les débats politiques.
07:31Oui, et puis que ce qu'il disait sur l'immigration, et il n'a jamais changé de ce point de vue,
07:36et qui était au début critiqué par presque tout le reste du monde politique, et qui était minoritaire dans la tête des Français au début,
07:47maintenant a été non seulement banalisé, mais enraciné, et c'est devenu une des variables politiques principales aujourd'hui dans la vie politique,
07:56dans les choix électoraux, dans les choix gouvernementaux.
07:59En ce sens, il a, avec des arguments que je déteste, mais obtenu une victoire idéologique très importante, probablement assez dangereuse,
08:11et qui rejaillit sur la façon de s'exprimer de tous les autres politiques de tous les partis.
08:18Victoire politique, avec la question de son héritage politique, qui est aujourd'hui l'héritage à la fois politique et familial mélangé,
08:27puisque ce sont en l'occurrence Marine Le Pen, Marion Maréchal Le Pen, qui sont à la fois ses héritières humainement, physiquement, filles, petites filles,
08:38mais qui vont devoir aussi gérer l'héritage politique.
08:41Il y en a une qui l'a immédiatement assumé cet héritage politique, c'est Marion Maréchal,
08:45elle a eu ces mots que je voudrais quand même lire ce matin,
08:49« Part tranquille Daddy », c'est comme ça qu'elle appelait donc visiblement son grand-père,
08:53je pose d'ailleurs une question, mais on n'est pas là pour faire de la psychanalyse ce matin,
08:56mais enfin elle l'appelle père quand même, Daddy,
08:59mais à l'anglaise, « Part tranquille, je n'abandonnerai pas la mission »,
09:07elle relève en quelque sorte la mission politique,
09:10et silence évidemment de Marine Le Pen pour des raisons tout simplement géographiques,
09:15puisqu'elle était dans l'avion et qu'elle a appris alors qu'elle était dans l'avion de retour de Mayotte,
09:20on va y revenir, mais cet héritage « Part tranquille, j'abandonnerai pas la mission »,
09:24là pour le coup il n'y a pas de gêne.
09:26Mais de toute façon les thèmes de Marion Maréchal Le Pen sont les thèmes de son grand-père,
09:33ce ne sont pas les thèmes de Marine Le Pen, ce sont les thèmes de Jean-Marie Le Pen.
09:38Maintenant quel sera son impact politique réel ?
09:42Rien ne prouve qu'il sera significatif, on n'en sait rien,
09:45alors que s'agissant de Marine Le Pen, là on sait qu'il y a un héritage,
09:50un héritage modifié, un héritage transformé, un héritage maquillé aussi,
09:55mais un héritage qui est dans des mains robustes, en tout cas avec un impact.
10:02Marine Le Pen qui a effectivement repris le parti, qui a repris les idées,
10:07et l'électorat, mais qui a revendiqué une rupture.
10:11Alors humainement il s'était, semble-t-il, réconcilié les toutes dernières années,
10:16mais il y a eu une rupture violente, y compris avec ces hurlements de Jean-Marie Le Pen
10:22qui criait Jeanne au secours, en gros pour le libérer de Marine Le Pen.
10:27Quelle est la réalité de la filiation politique entre Marine Le Pen et Jean-Marie Le Pen ?
10:34D'abord c'est l'héritière de l'électorat,
10:38ensuite c'est l'héritière de l'image de la pugnacité extrême.
10:44C'est Marine Le Pen qui a été...
10:46C'est la même attitude ?
10:47Oui, c'est Marine Le Pen qui a été probablement la plus combative, en tout cas à droite.
10:55Et puis idéologiquement, elle descend tout droit de son père.
11:01Alors comme souvent les héritiers, ensuite on modifie les choses parce que les temps changent,
11:06parce qu'on croit que c'est son intérêt, ce qui en l'occurrence est effectivement le cas,
11:11et elle arrive à faire prospérer l'héritage qu'elle a eu en le transformant.
11:16Mais le fond de son héritage, son capital politique,
11:20c'est ce que son père lui a légué, un peu malgré lui, mais lui a légué quand même.
11:24La fameuse dédiabolisation du RN jusqu'au changement de nom,
11:29ça n'est plus le Front National, c'est le Rassemblement National.
11:33Je regardais parmi les titres de la presse aujourd'hui, c'est le diable est mort.
11:38C'est exactement ça l'idée qu'a eue Marine Le Pen.
11:41Est-ce que dans un sens, ça ne va pas être presque inconfortable,
11:44puisqu'elle est en première ligne désormais,
11:46c'était confortable d'avoir une sorte de mystiguerie,
11:49dont on pouvait dire le méchant c'est lui ?
11:51Alors, pour elle, je ne pense pas qu'elle va invoquer son père autre qu'humainement.
11:59Je pense que, ce qui est d'ailleurs naturel, enfin compréhensible,
12:03c'est son père qui est mort, il y aura les funérailles familiales,
12:08elle est affectée, etc.
12:10Politiquement, je ne pense pas du tout qu'il va y avoir un regain,
12:14par exemple, d'extrémisation assumée, pas du tout.
12:18Je pense que ce sera le contraire, je pense que Jean-Marie Le Pen,
12:21ce sera un portrait qu'on accrochera dans l'arrière-pièce,
12:25pas dans le bureau, pas là où il y a les caméras, il existera quand même.
12:30Mais que politiquement, elle continuera à se différencier,
12:34et se différencier pas du tout parce qu'elle se modère à l'intérieur d'elle-même,
12:40mais parce que c'est la meilleure ou la seule façon d'arriver au pouvoir.
12:45Et de ce point de vue, il y a quand même très grande différence de nature
12:48entre le père et la fille.
12:50Le père voulait être la vedette politique la plus atypique,
12:57la plus contestée, la plus provocatrice, mais la plus vedette.
13:00Et la fille veut le pouvoir.
13:02C'est pas du tout la même chose.
13:04Jean-Marie Le Pen se satisfaisait de ce qu'il était de lui-même.
13:08Dans tous les mots d'ailleurs, tous les sens du mot se satisfaisaient.
13:12Elle, elle veut gagner.
13:14Elle veut gagner et elle peut gagner.
13:16C'est complètement différent.
13:17On se souvient d'ailleurs en 2002, on l'a su assez vite,
13:22que Jean-Marie Le Pen lui-même non seulement était surpris de se retrouver au deuxième tour,
13:26mais ne le souhaitait pas.
13:29Ou en tout cas n'était pas prêt.
13:31Adi d'ailleurs, nous n'étions pas prêts.
13:33Il était encombré et embarrassé de se retrouver dans une situation
13:37potentiellement de devoir diriger.
13:39Moi à l'époque, ce que j'ai tout à fait senti en tout cas,
13:42c'est que son succès, le fait de se qualifier pour le second tour
13:46était un succès, même d'une certaine manière un petit triomphe,
13:49le désemparait.
13:52Et qu'il s'est senti impréparé.
13:56Il était intelligent, il était réaliste,
13:59donc il savait bien que le fait d'être au second tour
14:01n'allait pas lui ouvrir la voie de l'Elysée et qu'il serait battu.
14:04Donc il n'a pas eu, au sens littéral, peur du pouvoir,
14:07parce qu'il savait qu'il n'aurait pas le pouvoir.
14:09Mais au moment où il a su qu'il était qualifié pour le second tour,
14:13il a compris brusquement à quel point il était un opposant et pas un gouvernant.
14:19À quel point il pouvait gagner des batailles politiques,
14:22mais qu'il ne pouvait pas espérer et sans doute avoir envie du pouvoir.
14:28Je pense que Jean-Marie Le Pen mesurait ses succès par rapport à lui-même,
14:34alors que Marie Le Pen les mesure par rapport à la chance d'accéder à l'Elysée.
14:40Et on apprend à l'instant qu'il sera inhumé dans la stricte intimité familiale,
14:44comme on dit samedi en Bretagne.
14:47Il y a un mot quand même que vous avez dit sur la diabolisation,
14:50vous avez dit que c'est une stratégie.
14:52Ça veut dire qu'au fond, pour vous, Marine Le Pen,
14:55lorsqu'elle prend ses distances avec Jean-Marie Le Pen,
14:58c'est plus une stratégie qu'une sincérité.
15:01Oui, tout à fait.
15:02Il n'y a pas en réalité de rupture idéologique majeure entre Le Pen et sa fille.
15:07Il n'y a pas de rupture majeure, mais il y a une énorme différence,
15:11qui est que pour le premier, le pouvoir n'était pas l'objectif réel.
15:15L'objectif réel, c'était l'influence, c'était l'incarnation pour Jean-Marie Le Pen.
15:19Incarner quelque chose pour une part croissante des Français.
15:23Pour Marine Le Pen, c'est la recherche du pouvoir.
15:25Et je pense que pour la recherche du pouvoir,
15:27elle peut aller assez loin dans les évolutions.
15:30Pour prendre un seul exemple,
15:32mais depuis un an,
15:35l'évolution des positions du Rassemblement National
15:39sur les questions économiques, et notamment en ce qui concerne les entreprises,
15:43est spectaculaire.
15:45Ce n'est pas parce qu'elle a lu un manuel d'économie politique
15:48qui brusquement l'a converti.
15:50C'est parce qu'elle s'est dit que c'était la seule façon d'arriver au pouvoir.
15:53De ne pas faire peur aussi...
15:54C'est la même question, c'est la question de la stratégie d'accès au pouvoir,
15:57qui dit quand même une partie de ses idées.
16:00À l'un du Hamel, il y a eu des rassemblements spontanés,
16:04des sortes d'apéros géants.
16:06Enfin géants...
16:07À Paris, non, mais disons que la place de la...
16:09Inattendue en tout cas.
16:11Tout à fait.
16:12Et inhabituelle.
16:13Il y avait quelques centaines de personnes, pas plus,
16:15mais qui se sont rassemblées.
16:17C'était à Lyon notamment,
16:20parce qu'effectivement il fallait fêter,
16:22chanter la mort de Jean-Marie Le Pen
16:25avec des petits feux d'artifice,
16:27avec du champagne.
16:29Et Bruno Retailleau a dit que c'était vraiment indécent
16:34de fêter ainsi, de danser ainsi,
16:37sur la tombe d'un mort.
16:39Est-ce que ça ne dit pas quelque chose d'une époque
16:42où en tout cas on manifestait vraiment contre Jean-Marie Le Pen ?
16:45La jeunesse disait...
16:47La jeunesse emmerde le Front National.
16:49Ce n'est plus le cas aujourd'hui quand on regarde les chiffres.
16:51Les jeunes votent RN.
16:53Enfin une bonne partie votent RN, oui.
16:55Il n'y a aucun doute.
16:56Écoutez, hier...
16:59C'est vrai que c'est complètement...
17:00Mais les scènes de l'IS pour la mort d'un responsable politique,
17:03c'est du quasi jamais vu.
17:04Alors c'est quelque chose qui existe toujours
17:08quand il y a un tyran, un despote,
17:11un dictateur qui meurt.
17:14On l'a encore vu à Damas.
17:16Il n'est pas mort, mais il a été obligé de partir.
17:18Et tout le monde danse.
17:20S'agissant d'un homme politique dans un système
17:24qui, le système en tout cas, est démocratique,
17:27je ne connais pas d'autres exemples.
17:29Et en France, je n'en connais pas d'autres.
17:31Mais je pense que la réponse, c'est...
17:34La provocation entraîne la provocation.
17:37Jean-Marie Le Pen a été toute sa vie un provocateur.
17:41Et à un provocateur, on répond par des provocations.
17:44Un provocateur condamné, je le disais.
17:47Oui, multi-condamné.
17:48Pour négationnisme,
17:51pour antisémitisme.
17:54Lorsque je vois, et je trouve ça important de le dire,
17:57parce qu'il y a une filiation, presque même un compagnonnage,
18:00Dieudonné, le soi-disant humoriste Dieudonné,
18:04qui hier, à l'annonce de la mort de Jean-Marie Le Pen,
18:07publie, et c'est le jour de Charlie,
18:11Je suis Jean-Marie.
18:13Oui.
18:14Comme Jean-Marie Le Pen avait dit, je ne suis pas Charlie.
18:18C'est assez saisissant, ça.
18:21Oui, mais c'est alors...
18:24C'est, d'une certaine manière,
18:27micro-théâtral, si vous voulez.
18:30C'est du théâtre, mais à petite échelle.
18:33Oui, mais il savait mettre du théâtre.
18:36C'est, je dirais, dans la logique de ce qu'était Jean-Marie Le Pen,
18:41qui est différente de la stratégie que suit Marine Le Pen.
18:45Ce n'est pas la même chose, ce n'est pas le même objectif.
18:48Je répète, Jean-Marie Le Pen, il avait vraiment deux objectifs.
18:53Un, lui, c'est-à-dire être un personnage de premier plan,
18:58considéré comme un personnage de premier plan.
19:00Et deux, l'immigration,
19:03c'est-à-dire aussi sa revanche sur ce qui était le fond historique
19:06de son idéologie personnelle, c'est-à-dire les guerres coloniales.
19:10C'était aussi sa revanche.
19:12Marine Le Pen, elle veut le pouvoir dans tous les domaines.
19:15Elle veut être présidente.
19:17Alain Duhamel, est-ce que cette mort de Jean-Marie Le Pen,
19:21c'est quand même une page qui se tourne pour l'ERN ?
19:25Est-ce que c'est une forme presque même de libération ?
19:29Alors évidemment, ils ne diront pas ça.
19:33Et politiquement, il faut bien reconnaître que depuis dix ans,
19:36Jean-Marie Le Pen avait une influence qui était politiquement devenue marginale.
19:40Et il faut d'ailleurs préciser que s'il y a eu des scènes de liesse
19:43pour fêter sa mort, il n'y a eu en revanche quasiment, je crois,
19:47aucun hommage spontané de qui que ce soit,
19:50de quelques militants qui viendraient déposer des fleurs
19:53à l'entrée de sa maison.
19:55Non, il n'y a eu pour le coup, il n'y a plus personne.
19:58Oui, il y aura sans doute quelque chose qui se produira le jour de son enterrement.
20:02C'est très possible.
20:04Ce ne sera pas forcément considérable, ce ne sera pas forcément des foules,
20:07mais il y aura des fidèles, il y aura des nostalgiques,
20:10il y aura ceux qui ont partagé ses combats
20:13ou ceux qui aujourd'hui voudraient qu'ils se poursuivent de la même façon.
20:17Mais le Rassemblement National de Marine Le Pen aujourd'hui,
20:21ça n'est plus le Front National de Jean-Marie Le Pen.
20:23Jean-Marie Le Pen, le Front National de Jean-Marie Le Pen
20:26était un parti qui n'était qu'un parti d'opposition.
20:30Et Marine Le Pen dirige un parti qui se veut un parti de gouvernement.
20:34Ce n'est pas du tout la même chose,
20:36même si, évidemment, il y a de larges pans d'idéologies
20:39qui sont identiques, évidemment.
20:41Merci.
20:42Et probablement plus qu'elles ne veulent montrer.
20:45Et je trouve ça très intéressant, quand on vous écoute Alain Duhamel,
20:48qu'effectivement vous montriez qu'en fait la rupture n'est pas aussi considérable
20:52que l'on imagine ou en tout cas qu'elle n'est présentée
20:55par Marine Le Pen elle-même.
20:57Merci Alain Duhamel d'être venu ce matin
21:00pour revenir avec moi sur la mort de Jean-Marie Le Pen.