Alain Duhamel, éditorialiste politique sur BFMTV était l'invité du Face-à-Face sur BFMTV et RMC.
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00:00Il est 8h32 et vous êtes bien sur RMC et BFM TV, bonjour Alain Duhamel, c'est un grand
00:07plaisir de vous écouter ce matin et prendre le temps avec vous parce que d'abord il faut
00:13qu'on comprenne cette attente, 49ème jour d'attente, qui mieux que vous pour essayer
00:18de comprendre avec vous ce moment d'attente et ce qu'il peut en sortir, mais pour une
00:23fois je veux aussi parler de vous, vous allez vraiment arrêter ?
00:25A la fin de la saison, vous avez encore à me supporter une saison entière et ça ne
00:31sera pas n'importe quelle saison.
00:33Et je peux vous dire que je vais en profiter comme jamais, mais pourquoi ?
00:38D'abord parce que ma femme me le demande, elle me le demande d'ailleurs depuis 10 ans
00:43chaque année, mais enfin de plus en plus fort, et puis parce que je trouve qu'il y
00:47a un moment rempli, il y a trop de gens de la famille en plus.
00:50Il y a de ça ? Ça vous met mal à l'aise ces critiques qu'on peut avoir sur la dynastie
00:55de journaliste ?
00:56La dynastie c'est complètement idiot puisque c'est des branches différentes, moi je ne
00:59suis pas une dynastie, mon père n'était pas journaliste et mon fils n'est pas journaliste.
01:03Mais votre frère l'est, votre belle-sœur l'est, et évidemment votre neveu.
01:07Mon frère, déjà sous Giscard, ça ne nous rajeunit pas, j'étais sur la 2, il était
01:12sur la 1, et c'était un problème, c'était un problème politique à l'époque qui était
01:16d'ailleurs public.
01:18Et là, mon frère est sur une autre chaîne, très estimable, mais je n'aime pas quand
01:25on est à la même heure, sur le même sujet, et sur deux chaînes concurrentes, donc ça
01:31jouit, oui.
01:32Est-ce que vous vous dites aussi que peut-être justement c'est le moment de les laisser
01:36en quelque sorte grandir ? On peut évidemment parler de Benjamin dans cette chaîne.
01:40Oui, ils grandissent très bien sans moi, alors là, de ce point de vue, il n'y a pas
01:43de problème.
01:44C'était plutôt la gêne d'avoir…
01:45Non, c'était plutôt l'âge quand même, et quand on a un certain âge, et moi un âge
01:51certain, on a toujours peur de ne plus trouver ses mots, d'oublier quelque chose.
01:57Mais d'accord…
01:58Ce n'est pas du tout le cas, et le nombre de directs qu'on a fait ensemble, et je peux
02:03même dire, et c'est une des choses qui m'a toujours impressionnée et plus chez vous,
02:08c'est que lors de nos soirées électorales par exemple, vous êtes même comme un enfant
02:15qui attend d'avoir la parole et qui lève le doigt par enthousiasme, par impatience
02:21de pouvoir justement parler parce que vous avez la passion de tout ce qui se passe sous
02:25nos yeux.
02:26C'est par vraiment passion et aussi un peu par mémoire, parce qu'à chaque fois qu'il
02:30y a une soirée électorale, j'ai dans ma tête toutes les soirées électorales auxquelles
02:35j'ai participé.
02:36Quand même la première soirée électorale auxquelles j'ai participé, d'une manière
02:39indirecte mais quand même importante, en 1965 pour la première élection présidentielle
02:46où j'ai participé à la première opération d'estimation présidentielle qui était faite
02:52par l'IFOP et Europe 1 à l'époque, et j'étais mêlé à ça, donc j'ai toutes
02:58les autres images qui reviennent dans ce cas-là.
03:00Est-ce que vous vous êtes dit parfois que l'époque que l'on traverse était moins
03:07bien que celle d'avant ou est-ce que vous gardez toujours un enthousiasme sur ce qui
03:11se déroule sous nos yeux ?
03:12Alors c'est toujours aussi passionnant, je dirais que c'est d'une certaine manière
03:16quelquefois de plus en plus passionnant, bon typiquement cette année.
03:19On va y revenir tranquillement mais j'aimerais savoir même s'il y a eu des moments peut-être
03:24de mélancolie, de tristesse, on a des gens qui parfois disent c'était mieux avant.
03:28Alors en ce qui concerne l'intérêt, donc la passion en fait, là franchement c'est
03:34tout le temps intéressant parce que tout se renouvelle, les hommes, les sujets, les
03:38drames etc.
03:39Donc c'est toujours aussi intéressant.
03:41Maintenant en ce qui concerne la satisfaction, l'évaluation des acteurs, le niveau des
03:46politiques, je ne vais pas vous dire qu'on va d'étape en étape vers des sommets éternels
03:52parce que ça, ça n'est pas vrai.
03:53Et quand je me rappelle, alors je sais bien que ça fait vieux monsieur de dire ça, enfin
03:57quand je me rappelle dans les années 80 qui étaient les chefs de file des différentes
04:01sensibilités.
04:02Bon, on ne peut pas dire qu'on soit un Himalaya aujourd'hui par rapport à ce nom blanc-là.
04:09Ce que vous venez de dire c'est que les chefs de parti ou effectivement…
04:12Les grands leaders politiques, ils sont d'un niveau inférieur.
04:15Est-ce que vous aimez notre époque Alain Duhamel ?
04:17Elle me passionne parce qu'elle est très neuve, elle me dérange terriblement parce
04:27que par exemple je supporte mal, ça va peut-être vous paraître ridicule, je supporte mal
04:31que des gens autour de moi, des enfants, des petits-enfants ne lisent pas ou lisent
04:35peu.
04:36Ça, je trouve ça insupportable et à ma génération, inimaginable.
04:39Bon, ça, il y a des choses comme ça, bon, et puis je ne vais pas vous dire que je suis
04:43un fanatique de la numérisation de la société.
04:46D'abord parce que je suis totalement incapable, inepte même, mais bon, il y a des pentes,
04:52puis la violence, etc.
04:53Même si je relativise sur la violence parce que j'ai connu de tels épisodes de violence
05:00dans ma vie que là, je peux relativiser.
05:04Mais il y a des choses que je n'aime pas, il y a aussi des choses que je trouve formidables.
05:08Lesquelles ?
05:09Mais d'abord, dans les formes d'enseignement, on parle toujours de l'enseignement de façon
05:13négative, mais dans les formes d'enseignement, il y a des progrès dans certains domaines
05:17qui sont inimaginables.
05:20Par exemple, là aussi, ça va peut-être vous paraître ridicule, mais dans la documentation
05:26qui est donnée aux élèves, ce qu'on peut leur donner aujourd'hui par rapport à ce
05:30qu'on donne...
05:31Et qu'on peut, d'ailleurs, à nous, journalistes, parce qu'on parlait d'un début où il fallait
05:34avoir tout en tête, où alors aller rechercher des documents.
05:36Il y avait des grands services de documentation, d'ailleurs, dans toutes les rédactions.
05:39Désormais, c'est vrai qu'on a besoin d'une information, on l'a de manière quasi immédiate.
05:43Voilà, donc ça, c'est quand même un progrès énorme.
05:45Et puis, par rapport, là aussi, je ne veux pas dire par rapport il y a 50 ans, mais même
05:51par rapport...
05:52Allez-y, vous pouvez le dire.
05:53Par rapport il y a 20 ans, je suis quand même frappé de voir que toutes les paroles se
05:58libèrent.
05:59Alors, elles ne sont pas toujours intelligentes, elles ne sont pas toujours agréables à entendre,
06:03mais en soi, c'est bien.
06:04C'est bien que les gens s'expriment, même si c'est pour râler, puis même on connaît
06:08les Français, si c'est en étant tout le temps défaitistes.
06:11Il y a quand même une grande liberté.
06:12On a gagné en liberté ?
06:13Oui, on a gagné en liberté.
06:15On a gagné aussi en risque, parce que ça va ensemble, mais on a gagné en liberté.
06:20J'aime le mot que vous venez de dire.
06:23Je peux relativiser, notamment sur la violence, et c'est vrai que c'est une des choses formidables
06:28avec la mémoire dont vous êtes l'incarnation encore ce matin, c'est de pouvoir relativiser
06:33alors que notre époque a souvent le nez sur le guidon.
06:37Prenons justement le temps de comprendre cette époque, mais je n'hésiterai pas à revenir
06:43parfois justement sur la mémoire et le champ que vous en avez.
06:47Ça, je vous fais confiance pour ne pas hésiter.
06:49Quel scénario ?
06:51Est-ce que si la société civile, est-ce que si Thierry Baudet, qui est le dernier
06:55non en date, enfin, je vous aurais interrogé hier matin, je vous aurais dit Bernard Cazeneuve,
07:00quel scénario Alain Duhamel ?
07:02Moi, ce qui me frappe, d'abord, ça a été la surprise gigantesque de la dissolution.
07:07Alors ça, je n'avais pas imaginé ça à l'instant.
07:08On a vécu ensemble en direct un dimanche soir.
07:10Exactement.
07:12J'ai trouvé ça extravagant et extravagant et non pas irrationnel, mais sur le moment
07:21incompréhensible.
07:22J'ai cherché ensuite.
07:23Avez-vous compris depuis ?
07:25La première chose, ça va vous paraître dérisoire, ce que je vais vous dire, mais la première
07:30chose que j'ai faite le premier jour de mes vacances, c'est de prendre le livre de Dostoevsky
07:35que je n'avais pas lu depuis 50 ans, qui s'appelle Le joueur, pour essayer de comprendre
07:38ce qu'il pouvait y avoir dans la tête d'Emmanuel Macron.
07:40Pas du tout dérisoire.
07:41Pas du tout dérisoire.
07:42Est-ce que ça vous a donné des clés ?
07:43Je suis dit qu'il y avait forcément une démarche, parce que ce n'est pas un intuitif
07:51empirique.
07:52Il a des stratégies.
07:54Je pense qu'il s'est complètement trompé sur ce qui allait se passer à gauche, c'est-à-dire
08:00qu'il n'a pas cru que la gauche pouvait ressusciter dans une unité même artificielle,
08:05même dangereuse, mais instantanée et efficace.
08:08Je pense que ça, il l'a complètement laissé de côté.
08:11Je pense qu'il a voulu jouer aussi un peu à qui tout double avec Marine Le Pen, c'est-à-dire
08:18de deux choses l'une, ou bien il gagne et à ce moment-là, c'est Bardella et on voit
08:24qui est capable de faire quoi, ou bien il perd et c'est moi qui l'aurai fait perdre
08:28de nouveau.
08:29Mais Le joueur est un homme malade.
08:30J'ai relu le livre.
08:33Précisément, Le joueur est un homme malade.
08:36Et ça se termine mal.
08:37Il est malade.
08:38Ça se termine mal.
08:39Et il est dans cette addiction.
08:40Est-ce que ça veut dire qu'aujourd'hui, vous vous dites, il s'est enfermé dans une
08:44forme quasi de maladie ou en tout cas de solitude ?
08:47Alors, solitude, il parle beaucoup à beaucoup de gens, ce qui ne veut pas dire qu'il les
08:53entendent ou ce qui ne veut pas dire qu'il en tienne toujours compte.
08:56Mais finalement, quand il a parlé à 20 personnes dans la journée, il en reste quelque chose.
09:02Je ne crois pas trop aux explications psychanalytiques, bien que j'en ai lu beaucoup pendant
09:07ses vacances.
09:08Je pense que c'est quelqu'un qui est foncièrement atypique, qui a un fonctionnement atypique.
09:14Malgré tout, on va essayer de comprendre ce qu'il se joue.
09:17Je vous reviens à la question du scénario.
09:20Plusieurs scénarios sur la table dans les toutes prochaines heures, probablement, on
09:25en aura la clé.
09:27Un choix politique d'expérience, un Bernard Cazeneuve, un Xavier Bertrand, le choix au
09:34contraire de quelqu'un qui n'a pas de bilan politique, un Thierry Baudet, dont on a pour
09:38nombre d'entre nous quasiment appris le nom hier, président du CESE, le Conseil économique
09:43et social, avec un gouvernement technique.
09:45Quel serait l'avantage ou l'inconvénient de l'un ou de l'autre ?
09:48D'abord, je pense que si c'était le président du Conseil économique, social et environnemental,
09:57je pense que ce serait dans le mauvais ordre.
09:59Je pense qu'un gouvernement avec un nom politique à sa tête, ça doit être l'ultime recours
10:07si d'autres tentatives ont d'abord été faites avant.
10:10Je pense que la logique, mais je pense ça depuis le début, je pense que la logique
10:14aurait été de demander à Mme Castex de former son gouvernement.
10:18Elle l'aurait fait, elle se serait présentée, elle aura été censurée, mais le jeu aura
10:23été joué comme il doit être.
10:24Ce n'est pas une règle constitutionnelle, mais c'est du bon sens et de la tradition
10:28politique.
10:29Ensuite, il fallait demander à quelqu'un, au contraire, de droite, même scénario,
10:33elle serait présentée, censurée, et une fois que la gauche et la droite auraient démontré
10:38qu'ils étaient incapables de résister à des censures, à ce moment-là, l'hypothèse
10:42d'un gouvernement qu'on appelle technique à gouvernement, ce n'est jamais technique,
10:47mais un gouvernement de personnalité de la société civile ou en partie de personnalité
10:52de la société civile, ça, ce serait imaginable, ça, ce serait le bon ordre.
10:56Ils ont donné leur chance, en quelque sorte, à la gauche d'abord, à la droite ensuite,
11:00et si aucun des deux ne s'en sortait, alors pouvoir justifier en quelque sorte et dire
11:05écoutez, vous n'avez pas réussi, je vous ai donné votre chance.
11:07Tout le monde l'a vu, les Français le savent, ils ont demandé un changement.
11:11Or, désormais, il y aura toujours ce doute, il y aura toujours Lucie Castex qui pourra
11:17dire mais j'aurais réussi.
11:19Je suis d'ailleurs étonné qu'il n'y ait pas encore eu à gauche quelqu'un pour dire
11:23si c'était notre prochaine candidate à l'élection présidentielle.
11:26J'attendais ça et je me suis trompé, ce n'est pas encore sorti.
11:28Ce n'est peut-être pas que vous vous êtes trompé, c'est peut-être que vous avez raison
11:31avant d'autres.
11:32Quand Olivier Faure dit il faudra un candidat unique, au fond, on a quand même l'impression
11:37que ceux qui ont le plus petit dénominateur commun, le plus petit bilan, sont les seuls
11:42sur lesquels ils arrivent à se mettre d'accord.
11:43Je suis d'accord.
11:44Le nouveau Front populaire est-il d'ailleurs fini ?
11:46Il est artificiel, il a un handicap de départ.
11:54Jean-Luc Mélenchon, c'est un personnage de roman qui a une vraie envergure, qui a
12:05un rêve, c'est d'être un Mitterrand de gauche, parce qu'il n'était pas Mitterrand,
12:09il est bien placé pour le savoir, d'être un Mitterrand de gauche.
12:13Ce rêve, maintenant, il est évanoui, il sera peut-être candidat, mais le rêve est
12:18évanoui, mais il a essayé, il a tout fait pour y parvenir.
12:21Vous, vous pensez que le rêve est évanoui, vous pensez qu'il y a renoncé ?
12:23Non, je ne pense pas qu'il y ait renoncé, mais d'abord je ne suis pas sûr qu'il puisse
12:27se présenter.
12:28Ça dépendra, peut-être Mme Gasset, on ne sait pas, ou quelqu'un d'autre.
12:32Ensuite, je pense que maintenant, il fait plus office de repoussoir que d'attirer des
12:40électeurs vers lui.
12:42Est-ce que ça peut créer tout cela, une immense frustration pour les… Sortir finalement
12:47un gouvernement technique, c'est alors quelqu'un sur lequel les électeurs n'auront aucun
12:51poids.
12:52C'est-à-dire que ce ne sont pas eux qui l'ont choisi et ce ne sera pas eux qui pourront
12:54le sanctionner.
12:55Je pense que quel que soit le Premier ministre, qu'il soit de centre gauche, de centre
13:01droit ou de la société civile, de toute façon, un, ça devra être quelqu'un qui a eu des
13:06relations très critiques vis-à-vis d'Emmanuel Macron, parce que c'est non seulement la
13:11logique démocratique, mais la nécessité absolue pour que quelqu'un accepte.
13:15Autrement, ça n'est pas jouable.
13:16Si c'était quelqu'un qui avait de très bonnes relations avec lui, on dirait évidemment
13:20que c'est une marionnette, c'est un pion, et ça le serait.
13:23Donc, il faut quelqu'un qui ait un passé conflictuel avec Emmanuel Macron et puis ensuite,
13:31il faut quelqu'un qui ait l'envergure d'un Premier ministre et tout le monde n'a pas
13:35l'envergure d'un Premier ministre.
13:36Est-ce que ce n'est pas plutôt un directeur de cabinet qu'il est en train de chercher
13:40Emmanuel Macron ?
13:41Je ne crois pas parce que ça, ce n'est pas jouable.
13:42Alors, justement, je voulais vous dire l'autre chose, c'est que quel que soit celui qui sera
13:47Premier ministre, il faudra qu'il prenne de toute façon que ça fasse plaisir ou non.
13:51Il y a beaucoup de mesures qui prendront, qui ne me feront pas plaisir personnellement
13:55parce que je ne les trouverai pas rigoureuses, adaptées, mais il faudra qu'il prenne des
14:00mesures de rupture par rapport à ce qui s'est fait.
14:03C'est évident qu'en matière de retraite, en matière de fiscalité, en matière d'éducation,
14:10en matière de construction d'appartements, etc.
14:14Logements.
14:15Voilà.
14:16Il va forcément y avoir des mesures qui apparaîtront comme des ruptures.
14:21Autrement dit, je ne crois pas que celui, quel qu'il soit, qui sera nommé à Matignon,
14:26Emmanuel Macron a le droit de nommer qui il veut, mais chacun a le droit de refuser aussi.
14:30Mais le pays est à droite ou il est à gauche ?
14:32Il est les deux.
14:33Il est lui.
14:34Mais en ce moment ?
14:35En ce moment, il est plus à droite aujourd'hui qu'il ne l'était en 2017, c'est sûr.
14:40Ce n'est pas quelque chose d'un peu contradictoire, effectivement, à se dire que si le pays est
14:44plus à droite, il finisse avec un Premier ministre qui soit plus à gauche ?
14:48Si on dit ce qui est la réalité, que de toute façon, cette fois-ci, pour la première
14:55fois sous la Ve République, sauf la période 58-62, je vous la laisse.
14:59Mais en dehors de ça, en dehors de ça, c'est la première fois que le Parlement va vraiment
15:07jouer un rôle moteur et même un rôle décisif.
15:10Et donc, Emmanuel Macron, contrairement à ce qu'on dit souvent, ne perd pas tous ses
15:15pouvoirs, toute son influence.
15:17Il en garde beaucoup, mais le Parlement sera beaucoup plus puissant qu'il ne l'était.
15:22Et donc, il n'y aura pas de marionnette à Matignon.
15:25Ça, je n'y crois pas un instant.
15:27J'aimerais avoir la même finesse historique que vous, Alain Duhamel.
15:29C'est ce qui me faisait rire quand vous me disiez, je vous la laisse.
15:32Oui, je n'y avais pas spontanément fait référence.
15:35Quand même un mot aussi sur la stratégie et sur, vous avez dit, le joueur.
15:39Parfois, on se demande s'il ne se joue pas de nous, mais aussi de eux.
15:42Quand hier, Emmanuel Macron reçoit très officiellement Bernard Cazeneuve et Xavier
15:48Bertrand, mais dans le même temps, laisse fluiter l'idée qu'au fond, il y a un troisième
15:54nom qu'on n'avait pas vu venir, qui est terrible, qui est Thierry Baudet.
15:57Est-ce que ce n'est pas se jouer d'eux ?
15:59Est-ce que ce n'est pas même assez humiliant, dur humainement ?
16:02Disons que même François Mitterrand, au pouvoir, était plus simple.
16:10Et donc, Emmanuel Macron est certainement celui qui, au pouvoir, dans l'utilisation
16:14de la communication et dans la tactique, parce que là, ce n'est pas de la stratégie
16:19vis-à-vis de la nomination, a trois ressorts.
16:24Premier ressort, il faut qu'il accepte de montrer, et il le sait très bien.
16:28Alors, il le fait, puis il le fait qu'à moitié, etc., que les Français ont voté contre lui.
16:34Il a du mal, quand même.
16:35Oui, mais enfin, il est obligé.
16:37D'ailleurs, il peut difficilement.
16:38Deux, il faut qu'il donne le sentiment qu'il ne cherche pas à se moquer de l'Assemblée
16:45nationale, mais au contraire, à la respecter, ce qui, sous la Ve République, pour le coup,
16:50est une grande nouveauté, sauf période de cohabitation.
16:55Mais n'oublions pas que là, ce sera une demi-cohabitation.
16:58Ce n'est pas une cohabitation avec une opposition forte, une majorité.
17:03Là, c'est un personnage, un paysage éclaté et complètement éclaté,
17:07terriblement difficile.
17:09Et puis, trois, il faudra que, justement, il n'apparaisse pas comme soit un
17:14marionnettiste, soit quelqu'un ayant envie d'agir comme un marionnettiste, même si
17:19ce n'est pas vrai, parce que ça serait à son détriment.
17:22Or, il a envie d'avoir une influence jusqu'au bout.
17:25Je pense que pour la prochaine élection à laquelle il ne participera pas, il aura,
17:28en tout cas, un pouvoir de nuisance, un pouvoir de nuisance.
17:32Oui, ce qui voudra dire que les différents candidats auront intérêt à réfléchir à
17:38leur relation avec lui.
17:39Joueur, mais pas marionnettiste.
17:43Alain Duhamel, vous allez faire quoi ensuite?
17:46Je n'imagine pas une seule seconde que vous allez juste aller jouer au tennis.
17:50Non, alors, d'abord, c'est de plus en plus difficile.
17:54Je peux le dire, je peux le dire, je vous ai vu jouer au tennis et je vous ai
17:57trouvé remarquable. Alain Duhamel, qu'est ce que vous avez envie de continuer à
18:02regarder, de continuer à analyser à la fin de cette année dans laquelle on va
18:04beaucoup profiter de vous?
18:06Je ne veux pas être hypocrite.
18:07Ma passion pour la vie politique et d'ailleurs pour la vie française en
18:11règle générale ne va pas disparaître.
18:14Donc, je n'aurai plus d'activité professionnelle.
18:19Quotidienne, disons.
18:20Je n'aurai plus de contrat.
18:21Je ne serai un collaborateur de personne.
18:25S'il se passe des choses importantes et qu'on me demande mon avis, surtout si
18:30c'est quelqu'un qui interroge bien, je vous dirai oui.
18:33Vous me direz oui. Je voulais penser aussi quand même ce matin, parce que
18:37vous avez dit il y a la gêne aussi de la famille et tout ça.
18:39Mais oui, j'ai bien compris.
18:42Mais est ce qu'il n'y a pas aussi la tristesse quand même de ne plus avoir
18:45votre complice de toutes ces années?
18:48Jean-Pierre Elkabbach?
18:49Si, bien sûr. Alors à chaque fois qu'il y a une interview un petit peu
18:53marquante, je pense à la façon très particulière qu'il avait de procéder,
19:00qui n'était pas une façon que j'approuvais, mais qui était une façon
19:02que j'admirais. C'est compliqué.
19:04Je n'approuvais pas sa technique qui consistait à passer trois quarts d'heure
19:07au téléphone avec l'invité la veille et puis à le voir au moins une
19:10demi-heure avant son interview.
19:12J'ai détesté ça quand on faisait des émissions ensemble, y compris avec des
19:16présidents. Lui y allait et moi, je disais non, moi, je n'y vais pas.
19:19Je n'y allais pas. Donc je n'aime pas sa technique, mais j'admire le virtuose
19:27inégalable.
19:29Et vous en parlez toujours au présent.
19:30Vous aviez l'habitude de vous appeler.
19:31Mais je pense à lui très souvent.
19:33J'ai bien pensé. Je me suis dit qu'il devait y avoir aussi de ça.
19:35Ah oui. Et puis de ne plus pouvoir lui passer votre coup de fil.
19:38Oui, c'est plutôt lui qui m'appelait.
19:40D'accord. Parce qu'il est plus bavard que moi.
19:42Enfin, vous voyez, je parle encore au présent.
19:44Mais oui, mais je le comprends parfaitement.
19:46Alain Duhamel, merci d'avoir pris le temps avec moi ce matin.
19:49On le refera dans l'année.
19:50Je peux vous dire que je ne vais pas vous laisser partir comme ça.
19:52On profitera particulièrement dans cette année où on aura encore plus besoin que
19:55jamais de votre analyse et de votre mémoire.
19:58Alain Duhamel, éditorialiste politique à BFM TV, toujours.
20:01Il est 8h52 sur RMC, BFM TV.