Affaibli et sous respirateur, le sénateur LR de la Drôme Gilbert Bouchet lance un appel pour faire évoluer la loi concernant la prise en charge de la maladie de Charcot, dont il est lui-même atteint. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-jeudi-19-decembre-2024-4815836
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00:00Bonjour Gilbert Boucher. Oui bonjour. Alors d'abord je vais vous demander de vos nouvelles, comment allez-vous ?
00:06Écoutez, il y a pire. Il y a pire ? Donc ça va, un second pause.
00:11Mais tout en faisant son devoir bien évidemment. Mais je crois qu'il faut résister et c'est ce que je fais.
00:19Alors qu'est-ce que l'avancée de la maladie vous empêche de faire aujourd'hui ?
00:24Beaucoup de choses. C'est vrai que lorsqu'elle nous tombe dessus, ça ne prévient pas.
00:31Et d'un seul coup, on est en fauteuil roulant. On ne peut pas parler normalement.
00:37On est obligé de suivre pas de traitement parce qu'il n'y a pas de traitement à cette maladie.
00:43Non, il n'y a pas de traitement.
00:45Mais bon, voilà.
00:47Donc vous êtes en fauteuil roulant.
00:49Vous êtes face à moi avec un respirateur, on l'entend, dans le micro, un respirateur artificiel.
00:54Depuis combien de temps vous ne pouvez plus respirer seul ?
00:57Ça fait un an, un peu plus.
00:59Un an ?
01:00Oui.
01:01Est-ce que vous avez des... Je vois vos mains et vos jambes qui sont très amégris.
01:05C'est vrai. J'ai suivi le cours d'amégrisement forcé.
01:11Forcé. Est-ce que vous pouvez encore attraper des choses avec vos mains ?
01:16C'est difficile de plus en plus.
01:19Voilà.
01:21J'ai besoin de quelqu'un qui m'aide.
01:24Et puis j'ai accompagné par mon épouse, qui elle aussi est maladie rare.
01:29Donc voilà. Mais on se soutient tous les deux.
01:32Oui. Et puis il y a votre petite chienne qui s'appelle Iris.
01:36Et qui monte la garde pendant cette interview.
01:39C'est vrai.
01:40Gilbert Boucher, comment ça a commencé et comment est-ce que le diagnostic a été posé ?
01:46Ça a commencé par un bal de dos.
01:49J'ai subi une opération du dos.
01:52Ça s'est bien très bien passé.
01:55Et un mois après, ça a recommencé ce bal de dos.
02:00Donc j'ai consulté, pour consulter, pour arriver au bout de plusieurs mois à ce diagnostic.
02:10Et lorsque le médecin m'a dit que c'était la maladie de Charcot.
02:15Là, vous réfléchissez.
02:18Et puis après, voilà, on reprend de l'espoir.
02:22Vous saviez ce que c'était, Charcot ?
02:24J'en avais entendu parler.
02:26Mais je ne savais pas du tout ce que c'était.
02:29Donc vous saviez, par exemple, quand le médecin vous a dit que c'était Charcot,
02:34vous saviez que c'était une maladie incurable ?
02:38Dégénératrice incurable.
02:41Pas totalement.
02:44On peut vivre entre 2 et 4 ans.
02:50Voilà, de l'espérance.
02:52Bon, il y en a qui font plus, d'après le docteur.
02:56J'espère que je ferai plus.
02:59Mais qu'est-ce que vous avez ressenti au moment de l'annonce du diagnostic ?
03:04Que le ciel me tombe sur la tête.
03:08Parce que, bon, je suis sénateur.
03:12Je suis présent dans toutes les manifestations.
03:15Et pour moi, ne plus pouvoir me déplacer comme avant.
03:20C'est dur, quoi.
03:23Mais en janvier, vous comptez bien revenir au Sénat.
03:26Vous comptez bien revenir à Paris.
03:28J'y étais il y a 15 jours.
03:30J'ai bossé à la CLCF.
03:32Je ne fais pas de publicité.
03:34Mais avec des fauteuils roulants, ils se sont adaptés.
03:39Alors justement, on vous a vu en fauteuil roulant au Sénat le 15 octobre,
03:43sous respirateur artificiel,
03:45défendre un texte de loi visant à mieux prendre en charge votre maladie.
03:49Elle frappe 8000 personnes en France.
03:52C'est vrai.
03:53Des adultes qui ont en moyenne 59 ans quand on leur diagnostique cette maladie.
03:59À partir de quand vous avez décidé de parler de votre maladie aux autres sénateurs ?
04:06Si vous voulez que je l'entende, je ne me suis pas caché.
04:10Parce que souvent, on se cache dans la maladie.
04:13Et je me suis dit, j'ai cette maladie de charcot.
04:17Je ne suis pas seul.
04:19Il y a 8000 personnes atteintes de cette maladie.
04:22Il faut que je puisse parler.
04:24Pour qu'on puisse m'entendre.
04:26Parce que je crois qu'un sénateur est plus entendu, je pense, que d'autres personnes.
04:33C'est ça que je voulais faire passer.
04:36Mais donc, dès le départ, vous avez publiquement assumé votre maladie ?
04:41Oui.
04:42Sans éprouver ni gêne, ni honte, ni peur de la réaction des autres ?
04:49C'est là où il ne faut surtout pas avoir honte.
04:52Parce que les gens, moi je vois quand j'arrive aussi là,
04:55tous mes collègues viennent me saluer, me dire bonjour.
04:59Pas de mes nouvelles.
05:01J'ai le président à l'archi qui m'élève très souvent.
05:06Je crois que c'est de ça qu'il faut faire passer.
05:10Alors, qu'est-ce qui doit changer dans la prise en charge des malades ?
05:15La prise en charge.
05:16Par exemple, j'ai un fauteuil rouleur.
05:19Il faut réunir une commission multidisciplinaire.
05:25Elle fait trois mois, ça veut dire, cette commission.
05:29Bon, rajoutez à cela les heures du docteur, n'est-ce pas ?
05:39Et au bout de trois mois, on me dit, vous n'avez pas le droit d'être remboursé par la Sécurité Sociale.
05:46Vous, vous n'aviez pas le droit d'être remboursé ?
05:48Alors pourquoi ? Parce que ce n'est pas un fauteuil adapté à ma maladie.
05:52Mais moi, j'ai besoin d'un fauteuil que je puisse payer pour aller travailler.
05:58Et bien non, il me fallait un gros fauteuil.
06:01Et là, j'ai été remboursé.
06:03Donc, je ne demande pas, je l'ai payé.
06:06Ce n'est pas pour moi que je parle.
06:08C'est-à-dire que vous, vous aviez les moyens de payer le fauteuil ?
06:10Bien sûr.
06:11Et puis, il y a d'autres personnes qui sont concernées et qui ne peuvent pas prendre en charge cela.
06:17Et puis, c'est de l'engueulant aussi, le diagnostic.
06:23C'est ça, genre qu'il n'y a pas de traitement.
06:26Et puis, il y a une forme de lourdeur administrative.
06:29Bien sûr.
06:30Qui fait que la prise en charge est extrêmement longue.
06:32Alors que la maladie, elle, elle va très vite.
06:34Elle est très rapide.
06:35Elle est très rapide.
06:36C'est ça qu'il faut que les gens pensent.
06:38C'est que ça va très vite.
06:41Et de quelques mois, c'est quelques mois que j'ai eu le président de la commission des affaires sociales au Sénat,
06:53Philippe Boubouier, avec qui nous avons déposé cette proposition de loi
06:59qui a dévout des gammes au Sénat.
07:01Partout, 342 sénateurs sur 342.
07:08C'est-à-dire qu'à l'unanimité.
07:10À l'unanimité.
07:11Votre proposition de loi, à l'unanimité.
07:13C'est rare.
07:14C'est très rare.
07:15Surtout par les temps qui courent.
07:16C'est très rare.
07:17Mais j'en suis très fier.
07:18Alors, qu'est-ce qu'il va devenir, ce texte de loi ?
07:21Alors, il devait passer le 16 décembre à l'Assemblée nationale.
07:28On m'a dit que ça va être enculé de quelques semaines.
07:32Mais en principe, ça arrive à l'Assemblée nationale.
07:36Mais par les temps qui courent...
07:38On ne sait jamais.
07:39On ne sait jamais.
07:40Oui.
07:41Il y a une autre grande question qui se pose aux malades de Charcot, comme vous.
07:47Il y a la question de la prise en charge, la question des soins, la question du diagnostic,
07:52la question du fauteuil.
07:53Mais il y a aussi la question de la fin de la vie.
07:56Bien sûr.
07:57Est-ce que ça vous fait peur, Gilbert Boucher ?
08:02Non.
08:03Non ?
08:04Non.
08:05Non.
08:06Je voudrais finir ma vie comme je l'entends.
08:08C'est-à-dire ?
08:10Comme je l'entends.
08:13Voilà.
08:16Ça ne me fait pas peur.
08:19Ça ne me fait pas peur, d'autant plus que je suis bien accompagné avec mon épouse.
08:24Donc, on se soutient habituellement.
08:27Mais quand vous dites « je voudrais finir ma vie comme je l'entends »,
08:31c'est-à-dire que vous voudriez pouvoir mettre fin à vos jours si vous souffrez ?
08:37Non, pas forcément.
08:38Pas forcément ?
08:39Non.
08:40Pas forcément.
08:41Non, non.
08:42Et puis, je pense que tant que je peux faire passer ce message, il faut que je fasse passer ce message.
08:49Donc ça, c'est une bonne raison de vivre ?
08:51Oui, absolument.
08:52C'est vrai.
08:54De se battre pour les malades de Charcot.
08:56Absolument.
08:57Mais il ne faut pas oublier que je ne suis pas le seul.
09:00Il y a des associations qui se portent de plus en plus pour faire des actions, pour charger des fonds pour cette maladie.
09:12Mais vous comprenez, par exemple, les malades français de Charcot qui prennent rendez-vous en Suisse
09:18parce qu'ils sont terrifiés par la dégradation physique qu'on leur annonce, par les douleurs que ça va…
09:27C'est vrai.
09:29Que ça va causer.
09:31On verra.
09:33Mais vous les comprenez ?
09:35Je ne les crois pas, bien sûr.
09:37Bien sûr que je ne les crois pas.
09:39C'est que les méthodes sont testées.
09:43Alors, justement, en voici une loi qui, pour le coup, était très attendue par les Français.
09:49En tout cas, un débat parlementaire qui était très attendu par les Français
09:54et que la dissolution de l'Assemblée nationale, la loi sur la fin de vie a suspendu.
09:59Oui, c'est honteux.
10:00C'est honteux ?
10:01Oui, c'est honteux.
10:03Avec cette dissolution, tout ce qui était avancé est stoppé.
10:10Et votre famille politique, elle est plutôt assez conservatrice.
10:14Vous êtes un sénateur républicain sur ce sujet.
10:17Vous, le fait de tomber gravement malade, ça vous a fait évoluer sur la question de la fin de vie ?
10:23Sur la question de l'euthanasie ?
10:25Non, ça ne m'a pas fait évoluer.
10:29Je crois qu'on reste tel qu'on est.
10:33C'est un genre d'esprit qui a sa tête.
10:35Donc vous êtes pour autoriser le suicide assisté en France, dans certaines conditions ?
10:41C'est une question grave.
10:46Oui.
10:47Je crois qu'il y a déjà des paramètres qui ne sont pas en place.
10:54La loi Léo Letty, par exemple, qui va bien loin.
10:58Donc si déjà, on allait jusqu'au bout de cette tour, ça serait déjà pas mal.
11:05C'est ça.
11:06Donc en fait, la législation telle qu'elle est, elle vous paraît...
11:10Permet.
11:11Permet.
11:12Il faut aller jusqu'au bout.
11:13Jusqu'au bout.
11:14Parce qu'il y a des dirigeants français, qui départent pas.
11:20Donc il faut couper un peu du monde.
11:22Et on ne peut pas répondre à cette alliance.
11:28Donc vous, vous n'êtes pas pour aller plus loin forcément.
11:31Vous êtes pour que chacun puisse bénéficier d'une fin de vie telle qu'elle est prévue par la loi Léo Letty.
11:38Bien sûr.
11:39Vous avez rêvé, Gilbert Boucher, toute votre vie de faire de la politique.
11:43Vous teniez un hôtel-restaurant.
11:45C'était bien.
11:48Vous vous êtes investi à l'office du tourisme.
11:51Vous êtes devenu adjoint au maire.
11:53Et puis vous êtes devenu maire.
11:55Et puis vous avez été conseiller général pendant 22 ans.
11:58Et puis enfin, sénateur de la Drôme depuis 10 ans.
12:01Vous avez aimé ça, la politique ?
12:04Oui, j'ai aimé ça, bien sûr.
12:07Mais c'est pas pour faire de la politique politicienne.
12:10Encore une fois, c'est pour se battre, pour son département, pour sa commune, pour la France.
12:18Je crois que c'est ça l'intérêt.
12:20C'est noble, la politique ?
12:22Pour moi, c'est noble.
12:25Mais bon, je n'en dirai pas plus sur ce sujet.
12:30Je vous pose la question parce que quel spectacle donne la politique à vos yeux aujourd'hui,
12:36vous qui avez si peu de temps à perdre ?
12:39Oui, je vois qu'il y a des gens qui ont du temps à perdre, justement.
12:44C'est ce qui est grave, c'est qu'ils ne comprennent pas.
12:48Ils jouent leurs petits jeux à eux.
12:51Ils ne pensent pas à l'évolution nationale.
12:55Et ça, c'est fort dommage.
12:57Vous pensez que vous allez pouvoir parler pendant combien de temps ?
13:01Vous savez ?
13:03Je pense que je parle pour le moment.
13:06J'ai eu le bon professeur qui m'a dit que c'était extraordinaire.
13:13Est-ce que c'est la politique qui me fait tenir ?
13:17Je ne sais pas.
13:18Mais c'est possible.
13:19Mais c'est possible aussi.
13:21Tant qu'il y a de la politique, il y a de la vie.
13:24Oui, mais il faut que ce soit une bonne politique.
13:27Ce n'est pas une politique de bas étage.
13:31Merci, Gilbert Boucher.
13:33Merci à vous de vous être déplacé jusqu'à la Drôme et à tel héritage.
13:38Très particulier.
13:39Nous sommes très heureux d'être venus dans la Drôme.
13:42Votre appartement, regarde le Rhône, c'est particulièrement beau.
13:46De l'autre côté, c'est l'Ardèche.
13:48Nous sommes face à l'Ardèche.
13:50Nous sommes face à l'Ardèche.
13:52Merci, monsieur le sénateur.
13:53Merci à vous.