Jean-Noël Barrot, ministre démissionnaire des Affaires étrangères, est l'invité de Questions politiques ce dimanche. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/questions-politiques/questions-politiques-du-dimanche-15-decembre-2024-9227940
Category
🗞
NewsTranscription
00:00Bonjour, ravie de vous retrouver dans Question Politique, l'émission politique du dimanche
00:13sur France Inter, diffusée sur France Info, la télé et en partenariat avec le journal
00:17Le Monde.
00:18Une crise à Mayotte, une crise politique, une crise budgétaire, voilà résumé le
00:24contexte dans lequel vient d'être nommé le nouveau Premier Ministre, le troisième
00:29en seulement un an après Gabriel Attal qui n'est resté que six mois et Michel Barnier
00:34qui n'en a pas dépassé trois.
00:35Que va pouvoir faire François Bayrou ? Moment de vérité pour celui qui théorise la vie
00:40politique française depuis des décennies.
00:43Après en avoir longtemps rêvé, il va devoir désormais exercer le pouvoir, faire travailler
00:48la droite et la gauche ensemble comme il l'a toujours imaginé, rassembler.
00:53Va-t-il y arriver ? Est-ce que cela peut vraiment marcher ? On en parle avec notre invitée
00:57ce dimanche, le vice-président du MoDem, Jean-Noël Barraud, ministre démissionnaire
01:01de l'Europe et des Affaires étrangères.
01:03Il est notre invité dans Question Politique, en direct et jusqu'à 13h.
01:07Question politique.
01:08Karine Bécard sur France Inter.
01:13Bonjour Jean-Noël Barraud.
01:15Bonjour Karine Bécard.
01:16Merci d'avoir accepté notre invitation.
01:18Merci à vous.
01:19Avec moi pour vous interviewer, Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions et Françoise
01:22Fressoz du journal Le Monde.
01:24Bonjour à toutes les deux.
01:25Bonjour à tous.
01:26Allez, c'est plus simple.
01:28Idem.
01:29On va commencer, comme chaque dimanche, avec les images qui ont marqué cette semaine.
01:34Images impressionnantes, évidemment, depuis hier, qui nous parviennent de Mayotte, le
01:38département le plus pauvre de France, dévasté après le passage du cyclone Chido.
01:43Quels sont les moyens, tout simplement, très vite, que le gouvernement va pouvoir déployer
01:48sur place, Jean-Noël Barraud ?
01:49D'abord, je veux dire ma solidarité et en réalité la solidarité du pays tout entier
01:55de la nation à l'égard de Mayotte et des Mahorais face à ce cyclone d'une violence inouïe.
02:01Je veux dire mes condoléances aux familles qui ont déjà perdu un proche et j'ai une
02:06pensée toute particulière pour mon collègue, Tani Swayli, secrétaire d'Etat chargé des
02:13questions de développement, qui, jusqu'à hier soir, était sans nouvelles de sa famille,
02:18qui, je l'espère, pourra le retrouver aujourd'hui.
02:21Alors, face à cette crise inouïe, l'État se mobilise et sous l'autorité du Premier
02:26ministre, une réunion de crise s'est tenue hier soir.
02:29Le Premier ministre a appelé tous les ministres concernés à se mobiliser pleinement.
02:34Sans attendre cette réunion, évidemment, 1 600 gendarmes et policiers étaient déployés
02:39pour venir en secours aux populations sur place, pour éviter les pillages également.
02:44Et puis, ce sont de nouveaux moyens, des centaines de personnels militaires, de la sécurité
02:50civile, mais aussi des pompiers qui sont déployés, ainsi que deux frégates, des
02:54moyens militaires pour apporter des renforts à la population maoraise.
03:01Et dans ces circonstances, nous sommes pleinement mobilisés, ce sont l'ensemble des services
03:05de l'État, jusque, si je puis dire, au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères,
03:10puisque nos postes diplomatiques dans les pays voisins, si je puis dire, de Mayotte
03:14sont aussi en alerte pour pouvoir apporter tout secours si la situation se présentait.
03:19On parle pour l'instant de 14 morts, c'est le dernier bilan, est-ce que d'ores et déjà
03:23au gouvernement, vous avez d'autres chiffres à nous apporter ? On imagine que ce sera
03:26beaucoup plus important que ça ?
03:27Il y a un bilan qui est d'ores et déjà extrêmement lourd, qui est très difficile
03:32à établir dans les circonstances, étant donné la violence des événements.
03:38Un bilan qui s'affinera au fil du temps et qui nous appelle, je le disais, à une
03:44très grande mobilisation.
03:45Alors, il y a le ministre de l'Intérieur qui va se rendre dès demain sur place, est-ce
03:48que le Premier ministre, est-ce que François Bayrou doit y aller ?
03:51Le ministre de l'Intérieur sera dès ce soir sur place pour coordonner la réponse
03:56de l'État et apporter le soutien de l'État aux populations de Mayotte.
04:02Pour le reste, ce qui importe, évidemment, c'est cette mobilisation des services de l'État
04:07à tous les niveaux, et c'est ce que le Premier ministre a demandé hier soir.
04:10Et je sais à quel point il est attaché à Mayotte, à quel point il est attaché aux
04:15Et je sais qu'il suit la situation en temps réel pour s'assurer que tous les moyens
04:20sont déployés.
04:21Juste une petite précision technique, un ministre démissionnaire a les mêmes pouvoirs
04:25qu'un ministre non-démissionnaire, c'est-à-dire qu'il peut avoir tous les pouvoirs d'intervention,
04:29parce que c'est un peu baroque la situation.
04:31On a un Premier ministre nommé, mais on est entouré d'une équipe de démissionnaires,
04:36donc il n'y a aucun frein à l'action publique dans ces cas-là ?
04:40La continuité de l'État est pleinement assurée.
04:43Les ministres démissionnaires, sous l'autorité du Premier ministre, sont chargés des affaires
04:48courantes, et les affaires courantes incluent évidemment la réponse de l'État à une
04:52crise d'une telle gravité.
04:53Allez, on avance.
04:54Votre image à vous, Jean-Noël Barraud, qu'est-ce que vous avez retenu dans l'actualité cette
04:59semaine ?
05:00J'ai retenu une photo le week-end dernier, celle qui rassemble Volodymyr Zelensky, le
05:07président ukrainien, Donald Trump, le président élu des États-Unis d'Amérique, et puis
05:13Emmanuel Macron.
05:14Pourquoi ? Parce que c'est une image qui a marqué sur le plan international, parce
05:18que malgré tout ce qu'on a pu entendre sur la relation de Donald Trump avec la France
05:23ou l'Europe, c'est bien à Paris que Donald Trump a fait son premier déplacement à l'étranger.
05:28Et cette réunion que le président de la République a voulue, entre le président
05:35des États-Unis et le président ukrainien, a été l'occasion de rappeler qu'aucune
05:43paix en Ukraine qui serait imposée aux Ukrainiens ne serait juste ni durable, et qu'aucun accord
05:52qui serait conclu au détriment des Ukrainiens ne pourrait être bénéfique pour la France,
05:57les Européens et les Américains.
05:59Et c'est une question qui nous importe parce que la guerre en Ukraine, elle nous concerne
06:03toutes et tous.
06:04Ce qui se joue là-bas, c'est notre sécurité, bien sûr, mais ça va au-delà, c'est aussi
06:08à terme la sécurité alimentaire, la sécurité énergétique de l'Europe qui est concernée,
06:13et donc cette réunion avait une valeur très importante en ce moment.
06:16Mais pour être vraiment clair, ça veut dire quoi cette réunion tripartite ? C'était
06:18le début d'un cessez-le-feu, de négociations de cessez-le-feu qui ont commencé en fait
06:22d'ores et déjà.
06:23On discute de ça là aujourd'hui entre l'Ukraine, les États-Unis et la France ?
06:27L'objectif que nous partageons avec les États-Unis et les alliés de l'Ukraine, c'est de permettre
06:33aux Ukrainiens d'entrer dès que possible dans des négociations de paix en position
06:38de force.
06:39Et je crois que le président des États-Unis, élu, Donald Trump, est convaincu de la nécessité
06:48de renforcer les Ukrainiens, mais aussi qu'il n'y a aucun intérêt à faire de cadeau à
06:52Vladimir Poutine.
06:53À terme, ce qui est un peu évoqué, c'est un possible déploiement des troupes européennes
06:59au cas où il y aurait un cessez-le-feu pour garantir au fond une zone de protection.
07:03Est-ce que vous pensez que la France est mûre pour ça et est-ce que l'Europe est mûre
07:07pour ça aussi ?
07:08Alors ça, c'est ce qui a été dit dans le Wall Street Journal notamment.
07:10Ce qui est certain, c'est qu'aujourd'hui, notre intérêt, l'intérêt des Français,
07:15c'est de soutenir les Ukrainiens autant que nous le pouvons.
07:18Et nous le faisons aujourd'hui au niveau français et européen.
07:21Nous le faisons financièrement, nous le faisons militairement, nous le faisons aussi avec
07:26de la coopération économique, notamment pour réparer les infrastructures énergétiques
07:30qui sont pilonnées constamment par Vladimir Poutine.
07:33Ensuite, et au moment où les Ukrainiens le jugeront opportun, lorsque s'ouvriront
07:38des négociations de paix et qu'elles seront conclues, s'ouvrira une nouvelle période,
07:43une nouvelle ère dans laquelle les Européens auront effectivement un rôle à jouer pour
07:48que ces accords de paix soient effectivement mis en œuvre et pour assurer leur propre sécurité.
07:53Je vous rappelle que si nous sommes aujourd'hui dans cette situation...
07:56Quel rôle ? Parce que c'est ça que les Français veulent savoir.
07:58Quel rôle il va falloir jouer ? La question de François s'était précise.
08:01Est-ce qu'effectivement on va avoir des militaires qui seront là pour faire en sorte de...
08:04Ma réponse est tout aussi précise.
08:06Si nous voulons que cette menace russe de Vladimir Poutine cesse de s'étendre,
08:11comme ça a été le cas depuis 2008, vers l'ouest et de plus en plus proche de nous.
08:16Si nous voulons éviter qu'elle se propage à l'est, puisque désormais, en entraînant
08:20la Corée du Nord dans cette guerre, c'est bien l'Asie que Vladimir Poutine a fait rentrer
08:24dans ce conflit.
08:25Si nous voulons éviter que cela s'amplifie dans les années à venir, il nous faudra
08:28relever nos défenses et faire des efforts que nous avons commencé à faire, mais il
08:33nous faudra aller beaucoup plus loin.
08:34Il faudra que l'Europe élève sa capacité à se défendre et à dissuader des attaques
08:39comme celles que Vladimir Poutine a conduites en Ukraine.
08:41Est-ce que finalement, tout le monde ne fait pas comme si on croyait qu'on allait pouvoir
08:44se battre et puis reconquérir Panou, Lombardie, Lacrimée, alors qu'en gros, on commence
08:49à parler de cesser le feu et de se dire qu'on va arrêter les choses et que l'entrée
08:53des Coréens dans la bataille fait que de toute façon, on lâchera à terme.
08:57Mais qu'il faudra bien lâcher et accompagner ce procédure.
09:01Non, je crois que la question, François Espresso, c'était ce qui nous attend après la paix.
09:05Et je pense que c'est une question très importante.
09:07Et ce qui nous attend après la paix, c'est que si nous voulons que cette paix soit durable
09:12et si nous voulons que la menace reste contenue, il nous faudra inévitablement faire beaucoup
09:17plus en matière de défense européenne.
09:18Est-ce que toutes les paix sont supportables ? C'est ça que je veux dire.
09:20Est-ce qu'au début, on a dit « Crimé, Dendebasse, on récupère ».
09:23Est-ce qu'on en est encore là ou simplement, on veut la paix ?
09:25Une paix ne peut être juste et durable que si, en l'occurrence, elle est consentie
09:30par le pays qui a été agressé.
09:32Et le pays qui a été agressé, c'est l'Ukraine.
09:34C'est donc à l'Ukraine de choisir le moment et les conditions de ses négociations.
09:38Alors, je voudrais poser une dernière question très concrète sur les missiles longue portée américains.
09:43On a Donald Trump qui a pris très clairement position cette semaine, qui s'est opposé
09:47vigoureusement à l'utilisation des missiles américains pour la Russie, contre la Russie,
09:53je devrais dire.
09:54C'est ce qu'il dit, d'ailleurs, dans une interview du Time.
09:57Vous dites quoi ? Il a raison, il n'a pas raison ? Vous êtes du côté du président américain ?
10:02Ce que nous avons toujours dit, en tout cas, ce que le président de la République a exprimé
10:07avec beaucoup de clarté, avec beaucoup de force, dès le mois de mai dernier, et c'est
10:11le premier à l'avoir dit, c'est que l'utilisation par les Ukrainiens de missiles longue portée
10:16qui toucheraient sur le territoire russe des cibles à partir desquelles, des cibles militaires
10:21à partir desquelles les Russes harcèlent et agressent les Ukrainiens, c'est un principe
10:26de légitime défense qui est acceptable.
10:28C'est ce que nous avons dit et cela tient toujours.
10:32Donc il y a une réunion tripartite à Paris, ça, ça n'a pas été abordé.
10:34Donald Trump, aujourd'hui, peut dire ce qu'il a dit cette semaine dans le Time.
10:38La réunion tripartite a permis d'affirmer qu'un accord qui serait au détriment des
10:46Ukrainiens ne pourrait en aucun cas être bénéfique ni pour les Américains ni pour
10:52les Européens.
10:53Non mais là, on a quand même l'impression que la réunion tripartite n'a servi à rien
10:55du coup.
10:56Mais vous savez, bien sûr que si, elle a servi à quelque chose et la preuve, c'est
11:00que jusqu'à présent, on nous disait, vous allez voir, Donald Trump va régler cette
11:04affaire-là en lien direct avec Poutine et ce que l'on constate, c'est que la première
11:09visite à l'étranger de Donald Trump est à Paris et qu'au cours de cette visite,
11:13il a évidemment assisté à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame, mais il a
11:17aussi consenti à un échange avec la France et l'Ukraine et ça, c'est évidemment
11:23très positif pour la suite et c'est d'une certaine manière un succès diplomatique
11:27pour la France.
11:28– Allez, on n'a pas manqué d'images très politiques également cette semaine
11:30en France.
11:31Françoise, qu'est-ce que vous avez repéré en particulier ?
11:33– Alors, j'avais repéré une réunion mais il n'y a pas d'image.
11:36– Mince.
11:37– Donc, je vais un peu fausser le jeu en montrant Emmanuel Macron devant l'Elysée
11:42la veille de cette réunion, au fond, le chef de l'État a décidé de réunir les
11:48partis politiques hors Rassemblement National et LFI pour essayer d'esquisser une sortie
11:54de crise.
11:55Il prolonge par ce biais ce qu'il avait initié avec les entretiens de Sainte-Denis,
12:00c'est-à-dire essayer de faire un consensus le plus large possible dans le pays alors
12:05qu'on est dans une situation où il n'y a pas de majorité.
12:07Et au fond, ce qui est intéressant dans cette réunion, c'est que c'est la gauche qui
12:11lui ouvre un peu la porte en lui demandant une rencontre et en disant, ben voilà, nous,
12:16la gauche réformiste, on est prêt au compromis et on vient discuter.
12:18Et je pense qu'à ce moment-là, il y a sans doute l'illusion chez le chef de l'État
12:22qu'il va pouvoir peut-être remodeler, garder la main, essayer de remodeler la scène politique
12:29en prenant un Premier ministre qui ne sera qu'un animateur et c'est l'hypothèse
12:32le corps nu.
12:33Et puis, vendredi, tout éclate en morceaux et c'est François Bayrou qui va s'imposer
12:38comme l'homme de Matignon en faisant valoir au chef de l'État que ce n'est pas à lui
12:42de faire ça, c'est au Premier ministre.
12:44Et donc, François Bayrou a une méthode un peu différente.
12:48Lui, c'est plutôt d'essayer de constituer un gouvernement resserré avec des fortes
12:51personnalités incarnant la voix de François Bayrou, c'est-à-dire la réconciliation
12:55gauche-droite.
12:56Ce n'est pas exactement les rencontres avec les chefs de parti où on essaye de négocier.
13:00Donc, il y a une tension entre les deux têtes de l'exécutif et je pense que la réunion
13:05de l'Élysée, c'était la dernière tentative d'Emmanuel Macron d'essayer de garder la
13:09main totale sur le jeu politique.
13:11Et de cette tension, on va évidemment en reparler pendant l'interview avec Jean-Noël
13:15Barraud.
13:16Dernière image, la vôtre, Nathalie ?
13:17Oui, c'est Olivier Faure en train de parler à côté de Boris Vallaud et de Patrick Caner.
13:21Alors, moi, l'image n'est pas absolument passionnante et puis en plus, elle ne dit pas grand-chose.
13:25Ce qu'il faut savoir, c'est ce qu'il y a derrière.
13:26Alors, à la sortie de la réunion, on est en train de parler, effectivement, et puis
13:29surtout, on va juste rappeler, Boris Vallaud, c'est le patron d'Élysée.
13:32C'est le secrétaire du groupe socialiste.
13:33Et Patrick Caner, c'est le…
13:34C'est le sénat.
13:35C'est le secrétaire des sénateurs socialistes.
13:36Merci beaucoup pour un mot de bas de page.
13:37Les propos d'Olivier Faure sont d'une obscure clarté, c'est-à-dire qu'on croit
13:42comprendre un certain nombre de choses et en fait, c'est beaucoup plus compliqué.
13:44Non pas que je sois un génie du décryptage ou un champollion quelconque, mais voilà,
13:49on entend Olivier Faure dire « pas de Bayrou ». Et puis, si on écoute bien la voix de
13:53l'interview, on se dit, quand on lui demande si on lui le censurerait, c'est plus compliqué.
13:57Après, on entend « on sera constructif, mais on ne sait pas si on le censurera pas ».
14:02Et puis après, on entend « s'il n'y a pas de 49.3, on pourrait ne pas être désagréable
14:06et lui laisser sa chance parce que nous sommes des gens constructifs ».
14:09Donc, ce que je voulais dire en clair, on dit pas de Bruno Retailleau, mais enfin, s'il
14:13y avait Bruno Retailleau et pas de loi immigration, ça pourrait le faire.
14:16Donc, ce qui est en train de se passer, c'est que petit à petit, au nom de ce fameux bougé
14:20qui est insupportable en termes de vocabulaire, mais qui est un glissé des socialistes, on
14:25va véritablement vers une fracture avec les filles, enfin, une espèce de déchirement
14:31qui, eux, de toute façon, ont des idées de censurer tout le monde et sont à temps
14:35de censurer tes vues aiguës, que ce soit un ours polaire ou une chèvre en m'attignant.
14:38De toute façon, ils censurent.
14:39Et Karine, je vois que vous ne l'appréciez pas, votre image.
14:43Non, mais voilà, il ne faut pas s'exprimer comme ça.
14:45Vous êtes journaliste politique, Nathalie.
14:47Ah ben justement.
14:48Et de toute façon, ce qui est très intéressant, c'est de voir François Hollande qui va prendre
14:51la parole, un certain nombre de leaders socialistes ou ex-socialistes, déjà comme François
14:54Psamen, Stéphane Le Foll, déjà comme Bernard Cazeneuve, pour voir si finalement ce centre
14:59dont parlait François tout à l'heure ne peut pas se constituer.
15:02Et ça sera très intéressant de voir ce groupe, 66 députés, qui deviendra finalement
15:07lui l'arbitre et non pas le censeur, mais celui qui peut aider ou ne pas aider François
15:13Bayrou à constituer son action et à constituer son gouvernement.
15:16Je n'ignore rien de l'Himalaya qui se dresse devant nous, de difficultés de toute nature,
15:28la première est budgétaire, naturellement, puis politique, et puis de l'éclatement
15:33de la société où nous sommes.
15:35Je sais tout ça.
15:36Je pense qu'il faut essayer.
15:38Et je pense que si on essaie, peut-être pourra-t-on trouver un chemin inédit.
15:44Et ce chemin, en tout cas, je sais de quoi il est marqué.
15:48Il est marqué de la volonté de réconciliation.
15:52Si je peux, à mon tour, j'essaierai de servir cette réconciliation nécessaire.
15:59Et je pense que c'est là le seul chemin possible vers le succès.
16:05Voilà, François Bayrou, vendredi soir, lors de la cérémonie de passation de pouvoir
16:10sur le perron de Matignon, il a été nommé Premier ministre quelques heures plus tôt
16:15par le Président de la République, bien sûr, une nomination que j'ai envie de qualifier
16:18de douloureuse, arrachée par le Président du MoDem, Jean-Noël Barraud.
16:23Emmanuel Macron ne voulait pas de François Bayrou comme Premier ministre.
16:27Comment vont-ils travailler ensemble ?
16:29Ils vont travailler très simplement et en complémentarité, comme le Premier ministre
16:34l'a clairement exprimé dans les colonnes de certains de vos confrères.
16:38Ils ont une relation personnelle, il l'a dit aussi, qui s'est nouée au fil des années.
16:44Et donc, ne vous faites aucun souci là-dessus.
16:47Mais vous reprenez qu'une partie, c'est en complémentarité, mais il a dit…
16:50De plein exercice, bien sûr.
16:51Voilà, de plein exercice.
16:52De plein exercice, en complémentarité, et de manière très simple, fondée sur la relation
16:57personnelle qui s'est tissée au fil des années entre ces deux hommes.
17:01Et donc, du coup, qu'est-ce qui va rester comme rôle à jouer pour Emmanuel Macron ?
17:04Mais vous savez très bien, et les Français savent très bien, que nos institutions, si
17:09je puis dire, confient au Président de la République des prérogatives, aux Premiers
17:15ministres d'autres prérogatives, et qu'ils sauront, parce qu'ils ont une hauteur de
17:18vue et un sens aigu de l'équilibre institutionnel, mettre en œuvre pleinement les règles du
17:25jeu démocratique.
17:26Mais en termes d'image, un Président de la République qui a décidé quelque chose
17:28à 6h le matin, et qu'on vient menacer pendant 1h45, ou menacer, en tout cas rappeler
17:33légèrement à l'ordre, en menaçant de quitter la majorité, et qui change d'avis
17:37sous la menace, est-ce que ce n'est pas quelque chose qui l'affaiblit terriblement ?
17:40Pardon, mais je ne vais pas commenter des propos rapportés, si vous voulez, on peut
17:44parler des vrais sujets et des sujets qui…
17:46On va parler des vrais sujets.
17:47C'est important aussi.
17:48La manière dont il a été nommé malgré tout.
17:50C'est-à-dire, en gros, je quitte la majorité si ce n'est pas moi.
17:54Je ne veux pas commenter ce type de propos.
17:56Et vous savez, je pense que ça n'intéresse pas tellement les Français, et que ça les
18:01exaspère.
18:02Et donc, je ne veux pas ajouter de l'exaspération à l'exaspération.
18:04Alors maintenant, comment fait-on ? Parce qu'on voit quand même qu'il y a une différence
18:08de conception chez Emmanuel Macron, qui se disait au fond, il faut essayer de prénégocier
18:15un contrat de coalition pour que ce soit le plus stable possible.
18:17Et du côté de François Bayrou, c'était plutôt de dire, je vais faire un gouvernement
18:23resserré, avec des fortes personnalités qui incarnent cette voie que je préconise.
18:28C'est-à-dire, au fond, on dépasse les clivages gauche-droite et on essaye de trouver
18:31un chemin qui est sur la réduction de la dette et sur essayer de redonner un peu la
18:36chance à chacun.
18:38Quelle est la bonne méthode aujourd'hui, à votre avis ?
18:41Je pense qu'il faut allier le dialogue et le travail sur le fond et sur la ligne.
18:47C'est ce que le Premier ministre a déjà commencé à faire en recevant les présidents
18:52de l'Assemblée nationale et du Sénat, ce qu'il va continuer à faire la semaine prochaine
18:55en recevant l'ensemble des groupes parlementaires à l'Assemblée, et puis en parallèle s'atteler
19:01effectivement à constituer une équipe de personnalités susceptibles d'incarner.
19:06Mais est-ce que l'un précède l'autre ou pas ? Est-ce que c'est le gouvernement qui
19:08impulse ou est-ce que ce sont les chefs des groupes parlementaires qui disent au gouvernement
19:13voilà ce qu'il faut faire ?
19:14Je pense que c'est une alchimie que le Premier ministre saura trouver et proposer au président
19:22de la République avec des personnalités qui sont reconnues, qui sont capables aussi
19:29d'exprimer, il a insisté là-dessus pendant son discours de passation vendredi, d'exprimer
19:33de manière claire et compréhensible le diagnostic qui est posé sur la situation du pays, les
19:40exigences que cela impose, et puis l'alchimie entre ces personnalités et la ligne qui sera
19:48tenue. Ensuite, est-ce que l'exercice va être facile ? Non, nous avons une Assemblée nationale
19:54qui est aujourd'hui fragmentée. Mais est-ce que c'est déshonorant aujourd'hui pour la
19:59gauche modérée, la droite républicaine et le centre de pouvoir s'accorder, de pouvoir
20:05faire des compromis dans la situation politique que nous vivons, situation politique qui s'inscrit
20:11dans un contexte où la guerre est à nos portes, où la planète est en ébullition,
20:15où la Chine et les Etats-Unis nous prennent de vitesse ? Je crois que, vous avez cité
20:20tout à l'heure, certains signaux d'ouverture venant du Parti socialiste, j'estime qu'il
20:29est possible, et c'est évidemment souhaitable, que ces responsables politiques prennent ce
20:34chemin du compromis. Dans les signaux, il y a le fameux 49-3. Est-ce que François Bayrou
20:39est prêt à renoncer, à utiliser le 49-3 ? C'est une des conditions qui est donnée
20:44par la gauche. Donc si François Bayrou veut se réconcilier avec le PS, est-ce qu'il
20:48doit accepter de renoncer à l'outil 49-3 de la Constitution ? D'abord, je le redis,
20:56est-ce que la situation aujourd'hui est une situation facile sur le plan politique ? Non.
21:01C'est l'Himalaya, comme l'a dit François Bayrou. Est-ce qu'il y a eu une majorité
21:06pour voter la censure ? Oui, on s'en est aperçu. Est-ce qu'aujourd'hui il y a une majorité
21:13susceptible de permettre aux pays d'avancer ? Je veux le croire, parce qu'il faut rappeler
21:18quand même ce que sont les conséquences de cette censure. Elles sont graves. Les conséquences
21:23de la censure, c'est qu'on s'aperçoit que la censure a des conséquences. Mais là, vous
21:26ne répondez pas à ma question. C'est au Premier ministre, lorsqu'il aura engagé ses consultations
21:32avec les présidents de groupe, qu'il appartiendra de définir la ligne. Mais ça vous semblait
21:35être une marche trop haute à franchir ou pas ? Où est-ce que c'est possible ? Moi,
21:38je veux espérer que, pour ce qui concerne l'essentiel, les formations politiques que
21:45j'ai évoquées puissent se montrer responsables. Personne ne leur demande de renoncer à leur
21:50identité. Personne ne leur demande de faire le serment qu'elles se retrouveront aux élections
21:56présidentielles de 2027. Ce qui est demandé, ce qui est attendu aujourd'hui des responsables
22:02politiques, c'est de se lever au-dessus des calculs partisans, des calculs de boutique,
22:07des calculs électoraux, pour permettre au pays de ne pas sombrer dans la division et
22:12l'instabilité dans un moment où nous devons éviter à tout prix l'affaiblissement et
22:16la vulnérabilité. Vous le sentez, vous l'avez dit vous-même. Vous avez dit, nous avions
22:26un parti socialiste qui, jusqu'à présent, semblait presque captif de l'idée qu'il
22:31fallait, à un moment ou à un autre, censurer le gouvernement. Et vous avez vu une évolution
22:36dans le discours que je salue et qui montre que ce parti, que le parti socialiste, a conservé
22:42dans ses gènes le sens des responsabilités et l'intérêt du pays.
22:45Mais le même parti socialiste dit aujourd'hui qu'il est dans l'opposition, qu'il aurait
22:49dû être à Matignon, et que pour conclure quelque chose avec François Bayrou, les enchères
22:55vont monter très haut. Parmi les enchères, il y a effectivement que le Premier ministre
23:00renonce au 49-3, qui est une des prérogatives des gouvernants sous la Ve République.
23:04Pas seulement, ils acceptent Retailleau, mais ils ne veulent pas d'une nouvelle loi
23:09sur l'immigration. C'est ce que dit ce matin Olivier Faure dans Le Parisien. Donc les enchères
23:13commencent à monter très très haut, comme dit très justement François Sressoz. On
23:17fait comment là ?
23:18On adopte la méthode Bayrou. Le dialogue et le respect. Et pour François Bayrou, et
23:25je le dis en connaissance de cause, ce ne sont pas que des mots. Et donc, dans les
23:31consultations qu'il aura avec les uns et les autres, il aura évidemment le souci d'entendre
23:36ce que sont les exigences des uns et des autres, de respecter les différences, de respecter
23:42aussi les identités plurielles qui sont aujourd'hui représentées à l'Assemblée.
23:46Il va trop loin l'Olivier Faure quand il dit pas de loi immigration sinon c'est de la censure
23:49immédiate. C'est ce qu'il dit clairement ce matin dans Le Parisien, aujourd'hui en
23:52France.
23:53Ce qui est certain, c'est que pour que cela fonctionne, pour que cet élan de responsabilité
23:58après un acte politique grave qui est celui de la censure, pour que cet élan puisse être
24:02suivi d'effets, c'est-à-dire la stabilité pour un temps de notre pays avant que ne reviennent
24:08les grandes confrontations, il faut se concentrer sur les convergences plutôt que sur les lignes
24:12rouges. Je crois que tout le monde aura bien compris que c'est là qu'il faut mettre,
24:18si je puis dire, tout le poids de la discussion.
24:19Et vous, vous pensez qu'il en faut une loi immigration ou pas, par exemple ? Vous, Jean-Noël
24:23Barraud, il en faut une loi immigration ?
24:24Sur l'immigration, je pense que c'est un sujet de préoccupation majeure de nos compatriotes,
24:30de nos concitoyens et qu'ils ont raison parce que nous ne savons pas suffisamment bien intégrer
24:35les étrangers qui arrivent, nous ne savons pas suffisamment bien éloigner les étrangers
24:39qui n'ont pas vocation à rester en France. Et c'est pourquoi nous avons d'ailleurs,
24:43l'année dernière, cette année, au mois de janvier, adopté un texte. C'est pourquoi
24:47au niveau européen, après dix ans de travail, nous avons adopté un texte. Je crois qu'il
24:50faut aller jusqu'au bout, évidemment, de ces exercices-là.
24:53Oui, dont on dit, ce texte, que sa transposition en droits français serait finalement une
24:57loi immigration déguisée qui pourrait faire qu'on n'en fait pas vraiment une, mais
25:01qu'on prend quand même des mesures. Et on n'a pas forcément besoin d'une loi immigration.
25:05Le pacte sur les migrations et l'asile, ce pacte européen que nous avons, et je veux
25:09juste simplement vous dire à quel point ces affaires étrangères sont parfois si proches
25:13du quotidien de nos compatriotes. Si nous avons mis dix ans à conclure ce pacte sur
25:18les migrations et l'asile, qui est majeur, qui va progressivement changer nos politiques
25:21migratoires, c'est parce qu'en 2015, Bachar al-Assad, avec l'oppression féroce qu'il
25:29a imposée à son peuple, a poussé des millions de familles syriennes à l'exil et qui sont
25:35évidemment venues chercher réfugiants en Europe.
25:37Juste savoir, est-ce qu'en gros, on pourrait très bien faire avec cette transposition
25:41sans forcément faire une loi immigration ?
25:42Je pense que c'est un texte majeur qui va nous permettre de reprendre possession de
25:47notre politique migratoire.
25:48Et ce matin, Olivier Faure, dans l'interview que citait Karine, laisse entendre qu'il
25:52peut y avoir une conférence de financement sur les retraites et qu'on peut repousser
25:55le moment où on abrogerait, bref, c'est une espèce de gel qui ne dit pas son nom.
25:58Ça aussi, c'est une façon d'ouvrir sur les retraites ?
26:02La suspension, c'est possible ou pas ?
26:04C'est effectivement un changement de tonalité par rapport à ce qu'on a pu entendre par
26:08le passé, que je trouve encourageant et je souhaite que ces signes d'ouverture sur
26:17le fond puissent être partagés avec le Premier ministre dans ses consultations et
26:22poursuivis évidemment.
26:23Alors, avant tout ça, il y a le budget, on n'en a pas encore vraiment parlé, est-ce
26:27que François Bayrou doit préparer un nouveau budget ou est-ce qu'il doit s'appuyer sur
26:31le précédent budget, celui de Michel Barnier ?
26:33Ce qui est certain, c'est qu'il faut au pays un budget, puisque, on le disait, la
26:38censure a des conséquences graves et pas seulement l'augmentation de l'impôt sur
26:42le revenu, les mesures pour les agriculteurs ou pour la Nouvelle-Calédonie qui vont se
26:47faire attendre, ou les mesures pour d'autres entrepreneurs, mais encore des sujets qui
26:52touchent à la vie quotidienne de nos concitoyens, comme les tickets restaurant ou la défiscalisation
26:58des pourboires.
26:59Donc il nous faut évidemment un nouveau budget.
27:00Plus la dégradation d'une agence de notation qui souligne que l'instabilité politique
27:05rend au fond la France moins crédible dans ses capacités de remboursement de la dette.
27:11Certes, Françoise Fressoz, mais on ne conçoit pas un budget et je suis convaincu que le
27:18Premier ministre ne formera pas ou ne dessinera pas son budget en fonction des agences de
27:26notation.
27:27Parce que si François Bayrou, dès 2007, a exprimé avec force qu'il nous fallait reprendre
27:33le contrôle de nos finances publiques, ça n'est pas une élégance comptable, ça n'est
27:38pas une obsession financière, c'est une obligation morale.
27:42Et je sais qu'il aura, dans les jours qui viennent, à cœur de pouvoir exprimer cette
27:47conviction si forte qu'il a incarnée dans des mots simples que tous les Français peuvent
27:52comprendre.
27:53Parce que quand les fins de mois sont difficiles dans les familles françaises, on fait un
27:56peu plus d'efforts à la dépense.
27:58Et je sais que François Bayrou aura à cœur que ce principe-là soit partagé dans l'ensemble
28:05de l'appareil de l'État pour que nous puissions faire ces efforts et que ces efforts soient
28:09équitablement répartis.
28:11Mais cette obligation morale, ça veut dire qu'il faudra faire plus de 60 milliards d'économies
28:15ou pas ?
28:16Cette obligation morale, c'est celle, non seulement pour ce budget, mais pour les autres,
28:23de reprendre cette maîtrise de nos finances publiques pour être indépendants et pour
28:28éviter...
28:29Plus ou moins 60 milliards, c'est important pour les gens ?
28:32Je pense que ce qui est important pour les gens, c'est qu'on puisse les convaincre que
28:36ces efforts que nous demandons au pays ne sont pas, comme je le disais, des élégances
28:41comptables, mais bien le résultat d'une conviction très forte sur notre indépendance, sur notre
28:49solidarité vis-à-vis des générations futures et la conviction que les efforts qui seront
28:53demandés seront équitablement, seront justement répartis.
28:57Et vous avez entendu le Premier ministre lors de sa discours de passation, c'est dans cet
29:01esprit-là qu'il y travaille.
29:02Et justement, vous qui êtes ministre de l'Europe également, est-ce que vous pensez qu'à l'échelon
29:07européen, avec les changements qu'il va y avoir en Allemagne, il y a une phrase de François
29:11Bayrou qui a été reportée par nos confrères du Monde sur « on demande peut-être beaucoup
29:15très vite en matière de déficit ». Est-ce que vous pensez qu'il y a une tendance générale
29:20et celui qui pourrait être le futur chansonnier allemand l'a dit également, à espacer un
29:26peu plus, c'est-à-dire pas en gros mettre le couteau sous la gorge tout de suite et
29:29négocier à l'échelon européen, non pas un moratoire mais que le fait que ce soit
29:32étalé, que ce ne soit pas 2029 mais 2030, je ne sais pas.
29:36Est-ce que vous sentez ça ?
29:37Ce que je sens, c'est que vous avez raison.
29:40Dans beaucoup de pays européens, parce qu'on est engagé dans des investissements très
29:45importants pour la transition écologique, parce qu'on est engagé dans des investissements
29:49nouveaux pour assurer notre défense, eh bien la contrainte budgétaire se fait sentir.
29:54Et donc cela interroge de plus en plus dans les capitales européennes sur la pertinence
30:00de notre pacte de stabilité et de croissance, de ces règles de déficit et de dette qui
30:05s'imposent au pays.
30:06Mais ça interroge aussi sur la nécessité que l'Europe, comme elle a su le faire pendant
30:11la crise de la Covid, soit en capacité à son tour de lever l'emprunt pour pouvoir
30:17financer certaines de ces dépenses qui pèsent sur notre budget mais qui sont indispensables.
30:21On ne va pas renoncer à nos ambitions climatiques et on ne va pas renoncer à assurer la sécurité
30:26des Français.
30:27Le vice-président du MoDem, Jean-Noël Barraud, est notre invité dans Question Politique
30:30ce dimanche jusqu'à 13h.
30:32Vous êtes aussi, Jean-Noël Barraud, le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères,
30:36on l'a bien compris, ministre des Missionnaires, bien sûr, compte tenu de la situation politique.
30:40Mais vous surveillez forcément et de très près tout ce qui se passe en Syrie en particulier.
30:45Je voudrais vous faire écouter le nouvel homme fort du pays, Abou Mohamed Aljolani,
30:51le chef du groupe terroriste Hayat Tahrir al-Sham.
30:53Je veux féliciter, je le traduis, je veux féliciter le peuple syrien pour la victoire
31:05de la révolution et je les appelle à descendre dans la rue pour exprimer leur joie sans
31:12tirer de balle ni effrayer les gens.
31:15Après, il faudra aller de l'avant, reconstruire ce péri et comme nous l'avons dit depuis
31:20le début, nous vaincrons si Dieu le veut.
31:23Quelle est la position de la France, Jean-Noël Barraud, vis-à-vis de la Syrie, vis-à-vis
31:27du nouveau pouvoir en place ? Est-ce qu'il y a des échanges, directs ou pas ? Et est-ce
31:32que nous sommes en voie d'une reconnaissance ?
31:35D'abord, comment ne pas se réjouir de la chute du régime criminel, tortionnaire de
31:42Bachar al-Assad qui a causé la mort de plus de 400 000 Syriens, qui a utilisé la torture
31:49à l'échelle concentrationnaire, qui a conçu des armes chimiques, qui l'a retourné contre
31:54son propre peuple, qui a poussé, on le disait tout à l'heure, des millions de Syriens
31:59vers l'exil et pour certains d'entre eux qui sont arrivés en Europe, qui a aussi instrumentalisé
32:07le terrorisme qui s'est beaucoup développé en Syrie sans que ce régime ne le combatte.
32:12Vis-à-vis des nouvelles autorités à Damas, nous n'avons aucune naïveté et nous sommes
32:18parfaitement lucides. Nous connaissons le passé, j'oserais dire le passif de certains
32:23de ces groupes islamistes et c'est pourquoi nous nous abordons cette période nouvelle
32:31qui s'ouvre pour la Syrie avec l'espoir que la Syrie puisse être restituée aux Syriens,
32:38mais avec beaucoup de vigilance. Et nous nous mobilisons. Nous mobilisons d'abord de manière
32:42inconditionnelle sur l'aide humanitaire qui doit continuer à parvenir aux Syriens qui
32:48en ont besoin et qui doit même s'amplifier puisque les hostilités militaires ont causé
32:53des déplacements de population et il est bien naturel. Ensuite nous nous mobilisons
32:58pour préparer l'avenir de la Syrie et notamment sur le plan de la sécurité, les armes doivent
33:04se taire et la menace terroriste qui reste très présente doit être contenue. Et puis
33:10sur le plan politique puisque les autorités de fait, les autorités nouvelles à Damas
33:16doivent très vite céder la place à une autorité de transition qui soit représentative
33:22de l'ensemble des communautés, des confessions de la Syrie et qui puisse progressivement
33:29faire avancer la Syrie vers une nouvelle constitution et à terme vers des élections. Comment est-ce
33:33qu'on se mobilise très concrètement ? J'étais hier en Jordanie avec les pays arabes de la
33:38région et avec certains des pays occidentaux qui entretiennent avec la Syrie des liens
33:43historiques pour que pour la première fois, nous puissions établir les conditions dans
33:49lesquelles nous pouvons engager le dialogue avec les nouvelles autorités à Damas. C'était
33:56très important de le faire parce que vous savez que dans ce genre de situation, quand
34:01la confusion s'installe, chacun est tenté d'aller de son côté, commencer à discuter
34:08parfois à négocier avec les nouvelles autorités. Mais là pour le coup les Etats-Unis par exemple
34:11ont déjà établi des contacts, c'est ce que dit Anthony Blinken, le secrétaire d'Etat
34:15américain. Donc on a l'impression quand même que la voie est un peu dégagée.
34:18L'important c'était d'abord que la communauté internationale, même si elle n'était pas
34:24tout entière représentée, j'y étais moi-même pour représenter la France, puisse établir
34:28de manière très claire les conditions. Respect des minorités, de toutes les minorités. Respect
34:33des droits de l'homme, respect des droits des femmes. Aucune exaction acceptable. Luttre
34:39contre la résurgence de Daesh et du terrorisme, etc. Dès la semaine prochaine, mardi pour
34:46être précis, une mission diplomatique française se rendra en Syrie. Pour la première fois
34:52depuis 12 ans. Pour reprendre possession de nos emprises sur place, pour pouvoir établir
34:59de premiers contacts et pour pouvoir mesurer, si je puis dire, à la fois les besoins urgents
35:06de la population syrienne, notamment en matière humanitaire, mais aussi pour pouvoir vérifier
35:11si, oui ou non, les premières déclarations de cette nouvelle autorité, qui était plutôt
35:15encourageante, qui appelait au calme, qui apparemment ne s'est pas livrée à des exactions,
35:21sont bien suivies des faits sur le terrain.
35:23Qui Iran en particulier ?
35:24C'est une équipe de quatre diplomates qui se rendra sur place.
35:28Si vous deviez résumer la position de la France vis-à-vis de nouveaux pouvoirs syriens,
35:33on a eu l'impression qu'au cours des jours, c'était de plus en plus inquiétant.
35:36Au début, tout le monde était enchanté.
35:38Et puis là, c'est quoi ? C'est une vigilance inquiète, une vigilance confiante.
35:43Ce n'est pas la première fois qu'un pouvoir islamiste arrive en se montrant à visage humain
35:48et tourne différemment.
35:49Après, on a été payé pour le savoir en Afghanistan.
35:51Si je dois résumer notre position, c'est une position d'une grande lucidité.
35:56Il y a des besoins d'urgence.
35:57Je parlais de l'humanitaire.
35:58Je voudrais ajouter à cela, puisque vous me relancez, l'expertise technique que nous
36:03pouvons apporter de manière inconditionnelle pour relever les preuves qui concernent les
36:09personnes disparues ou les victimes du régime de Bachar Al-Assad, puisqu'à terme, il
36:13n'y aura pas de paix et d'apaisement en Syrie s'il n'y a pas la justice.
36:17Ensuite, pour l'avenir, pour activer les leviers dont nous disposons pour accompagner
36:21la Syrie sur le chemin de son avenir.
36:24Et ce sont les leviers financiers pour l'aide à la reconstruction.
36:28Ce sont les décisions que nous serons un jour amenés à prendre, peut-être pour lever
36:32certaines sanctions que l'Union européenne a prises à l'encontre de la Syrie.
36:36Et bien, nous entendons que certaines conditions soient respectées.
36:39Et parmi ces conditions, il y a la nécessité que ces nouvelles autorités comprennent
36:44qu'elles devront prochainement céder la place à une autorité plus représentative
36:50et plurielle, dans laquelle elles auront toute leur place, mais dans laquelle les Druzes,
36:54les Chiites, les Alaouites, les Ismaéliens, les Kurdes, les Chrétiens, dans laquelle
36:59chacun, chacune des communautés qui forment la Syrie puisse être représentée.
37:02Alors, vous parlez beaucoup de la France, l'Union européenne dans cette affaire qui,
37:06à mon avis, pèserait beaucoup plus si elle parlait d'une même voix, si elle était
37:09en opposition.
37:11Est-ce que c'est elle qu'il faut mettre en avant maintenant ou est-ce qu'on peut
37:14parler d'une façon commune sur les questions syriennes ?
37:17Vous avez raison.
37:18Les questions syriennes et notamment les questions migratoires, parce qu'en fait,
37:21c'est de ça dont on parle.
37:22Absolument.
37:23Le fait qu'on ait tout de suite bloqué les portes et qu'on ait pas souhaité que
37:25les Syriens entrent.
37:26C'est un rôle très important de l'Union européenne depuis 12 ans, depuis le début
37:30de la guerre civile, puisqu'une partie importante de l'aide humanitaire, c'est
37:34presque 10 milliards d'aides humanitaires qui ont été apportées à la Syrie par l'Union
37:38européenne dans cette période.
37:39Et c'est aussi l'Union européenne qui a pris les sanctions à l'encontre de la
37:43Syrie.
37:44Voilà.
37:45Donc, est-ce qu'elle est partie prenante dans le processus que vous décrivez ?
37:46Elle est tout à fait partie prenante, puisqu'hier, en Jordanie, j'avais à mes côtés Cara
37:51Callas, la nouvelle haute représentante à la politique étrangère.
37:56Et c'est important qu'elle soit là pour les sujets de sanctions, pour les sujets d'aides
38:02humanitaires, pour les sujets aussi qui touchent à la politique migratoire, puisque l'Europe
38:08a accueilli plus de plusieurs millions, plus d'un million en tout cas, de réfugiés syriens.
38:13Mais pourquoi on a tout de suite fermé les portes ? En quoi ça se justifie ? On a suspendu
38:17l'offre.
38:18L'OFRA était en train d'analyser un certain nombre de demandes d'asile.
38:21Il y avait 700, je crois, dossiers en attente.
38:24Tout a été suspendu.
38:25D'ailleurs, est-ce que vous confirmez qu'on est effectivement dans une suspension des
38:29dossiers qui sont normalement traités ?
38:30L'OFRA, qui est donc l'office qui traite de la demande d'asile dans notre pays, lorsqu'une
38:37situation comme celle qu'on a connue en Syrie se manifeste, prend en général des mesures
38:43de suspension et de prudence qui sont des mesures temporaires.
38:47Ce qui se produira, je le souhaite, c'est ce à quoi nous allons travailler.
38:52Si effectivement la Syrie s'engage résolument sur le chemin d'un pouvoir respectueux des
39:01minorités, respectueux de toutes les confessions, etc., c'est sans doute que l'OFRA révisera
39:06sa doctrine, plus généralement, qui concerne l'asile.
39:09Mais là, on ne se cache pas derrière l'OFRA.
39:10Parce qu'on a quand même le sentiment que toute l'Europe a fermé ses portes.
39:13On a un autre sentiment, c'est que ça fait monter l'extrême droite.
39:16Non, je veux le redire.
39:18Non, parce que, alors là, je pense qu'il faut rassurer tout le monde, quels sont les
39:23flux, quels sont les déplacements que nous voyons aujourd'hui ?
39:27D'abord, nous en voyons très peu en direction de l'Europe, puisque, pardon de le redire,
39:33et même si je vous ai exprimé ma vigilance vis-à-vis des nouvelles autorités, cette
39:39chute du régime torsionnaire de Bachar al-Assad va permettre à des familles syriennes, à
39:44des enfants, à des adolescents syriens qui n'ont jamais vu leur pays, d'y revenir.
39:48Et ce qu'on voit, c'est qu'effectivement, des réfugiés syriens en Turquie sont en train
39:54de rentrer en Syrie.
39:56Et on le voit aussi en provenance de la Jordanie.
40:00Et c'est plutôt un retour vers la Syrie que l'on va observer, et je le souhaite en tout
40:04cas, si nous parvenons à éviter que la situation ne se dégrade, et que la Syrie sombre dans
40:11l'instabilité, dans l'islamisme, ce qui a été son triste sort pendant de trop nombreuses
40:17années.
40:18Mais est-ce que vous déplorez ce qu'il s'est passé dans l'Union Européenne, c'est-à-dire
40:19ce premier réflexe d'essayer de découper les flux, comme s'il y avait un...
40:23Et de soulager, en clair, Jean-Paul Henry.
40:25Alors, je ne veux pas parler pour les autres pays européens.
40:28Ce que je veux dire, c'est que la mesure que l'OFPRA a prise est une mesure tout à fait
40:33habituelle lorsque vous avez des bouleversements politiques de cette ampleur.
40:37Jean-Noël Barreau, quelle est la relation aujourd'hui entre le président Macron et
40:41Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission Européenne ? Elle est allée en
40:45Amérique du Sud il y a une dizaine de jours pour signer la fin des négociations sur le
40:49traité du Mercosur.
40:50Est-ce que la communication entre ces deux dirigeants est restaurée ?
40:53D'abord, sur le Mercosur, rien n'est signé.
40:57La fin des négociations ?
40:59Rien n'est signé.
41:00Un accord a été trouvé entre des équipes de négociateurs.
41:03Et si je puis dire, c'est maintenant que les choses commencent.
41:06Soyons vraiment clairs, elle est allée signer quoi précisément Ursula von der Leyen quand
41:09elle est allée ?
41:10Elle est allée acter l'accord entre les équipes de négociations sur une nouvelle
41:16version du Mercosur.
41:18Mais rien n'est signé et c'est maintenant que les choses commencent.
41:21Nous avons pris connaissance de ce document qui n'intègre toujours pas une clause qui
41:30est essentielle pour nous, ce qu'on appelle la clause de sauvegarde.
41:33Qu'est-ce que c'est que la clause de sauvegarde ?
41:35C'est un frein d'urgence.
41:36On en a parlé un peu il y a quelques mois au moment où certaines filières françaises
41:42étaient fragilisées par les importations de volailles notamment en provenance d'Ukraine.
41:46Mais est-ce qu'elle se fiche pas de nous en clair ?
41:47En gros, elle ne profite pas de la pagaille institutionnelle, de la pagaille de l'exécutif.
41:51Tout le monde dit « off », qu'elle se fiche éperdument de nous et qu'elle nous
41:56a fait un bras d'honneur.
41:57Ce n'est pas pour être vulgaire dans cette émission, mais pour dire ce qui est la vérité.
42:00Est-ce que vous considérez que c'est rattrapable vraiment, à savoir ces quatre pays
42:0435% de la population ?
42:06Est-ce que c'est rattrapable sérieusement ?
42:08Vous avez fait la réponse à votre propre question.
42:12Nous avons une exigence, c'est cette clause de sauvegarde.
42:15C'est une exigence qui est partagée par un certain nombre de grands pays européens.
42:21L'Italie, la Pologne, les Pays-Bas, la Lituanie.
42:24Et c'est sur cette base-là que nous allons exprimer avec force notre réprobation à
42:29un accord qui n'intégrerait pas cette clause-là.
42:31Mais enfin, on pourrait prouver, ça ne devrait pas bien se passer.
42:33Nous n'acceptons pas que, et c'est la France qui le dit, mais d'autres pays européens
42:39se sont joints à nous.
42:40Nous n'acceptons pas que les agriculteurs soient la variable d'ajustement, tout convaincu
42:45que nous soyons de l'importance d'entretenir avec les pays du Mercosur les meilleures relations
42:50possibles.
42:51Toute dernière question.
42:52Vous avez des nouvelles de cet écrivain franco-algérien, Boalem Sansal ?
42:57Vous avez des nouvelles de lui ?
42:59J'ai appris avec consternation le rejet par la cour d'appel d'Alger de sa demande
43:07de mise en liberté.
43:08Je suis très préoccupé par son emprisonnement.
43:11Je rappelle que Boalem Sansal a 80 ans.
43:14Et les services de l'État sur place sont pleinement mobilisés pour suivre sa situation
43:20et pour lui offrir la protection consulaire à laquelle il a droit.
43:24Vous avez des discussions avec les autorités algériennes ou pas sur ce sujet ?
43:28Nous utilisons tous les canaux à notre disposition pour faire passer ces messages.
43:32Merci Jean-Noël Barraud.
43:33L'émission continue bien sûr.
43:34Vous restez avec nous.
43:35Il est grand temps d'accueillir notre seconde invitée d'emprisonnement politique.
43:40France Inter.
43:44Questions politiques.
43:47Karine Bécard.
43:49Prenez votre temps pour vous installer.
43:51Bonjour Michel Cotin.
43:52Mais prenez votre temps.
43:53Soyez bien installés, c'est important.
43:54On a quand même dix minutes pour discuter.
43:56Très honoré en tout cas de vous recevoir sur le plateau de questions politiques.
43:59C'est moi qui suis contente d'être là.
44:00Vous êtes une grande dame du journalisme, une très fine observatrice et depuis très
44:05longtemps du jeu politique.
44:06Et vous venez de sortir un livre, Les Derniers Grands, aux éditions Plon.
44:10Alors je vais forcément vous demander pourquoi la dernière génération d'hommes et de
44:14femmes politiques n'a pas la même trempe, n'a pas la même épaisseur que François
44:18Mitterrand et Jacques Chirac puisque ce sont eux qu'on voit sur la couverture de votre
44:23livre.
44:24Michel Cotin, François Bayrou, enfin nommé à Matignon, depuis sept ans il l'espérait.
44:29Est-ce que vous avez été surprise par cette nomination ?
44:33Non, je n'ai pas été du tout surprise qu'il soit nommé parce que je trouvais que d'une
44:36certaine façon, encore que ce n'est pas un cadeau qu'on lui fasse, c'était un peu
44:40l'homme de la situation.
44:41On sait qu'il est négociateur, etc.
44:43J'ai été surprise que ça se passe comme ça ou comme on l'a dit ou comme on l'a
44:47su avec le président de la République.
44:49Mais vous le placez où, François Bayrou ? Est-ce qu'il fait partie des Derniers
44:52Grands puisque c'est le titre de votre livre ?
44:54On va voir justement.
44:56Il sait bien qu'on l'attend, même si on ne lui a pas donné toutes les chances d'une
45:01survie extraordinaire.
45:02Mais enfin, on va voir.
45:04Simplement, quand je dis les Derniers Grands, ça veut dire que je trouve que c'est les
45:09derniers fauves d'abord.
45:11C'est-à-dire que Mitterrand a dominé la vie politique à gauche dans l'opposition
45:18de 1965 à 1981.
45:20C'est quand même beaucoup.
45:21Même chose pour Jacques Chirac qui, finalement, de 1974 à 2007, ne quitte pas la scène.
45:27Et il ne l'avait pas quitté avant.
45:29Donc, ils ont pour eux, d'abord, une longévité.
45:34Ils ont pour eux d'avoir, au fond, décliné la Ve République dans la cohabitation.
45:43Ça veut dire quoi ? Ça a décliné ?
45:45Oui, ça veut dire que la Ve République n'était pas faite au début pour la cohabitation.
45:48C'est pour ça que quand j'entendais votre échange sur le 49-3, le 49-3 fait partie
45:55essentiellement de la Constitution.
45:57Parce que ça donne la priorité à l'exécutif.
46:02Donc, lui, il a à la fois montré qu'on pouvait faire fonctionner la Ve République
46:10quand il y a une majorité alternative.
46:12On voit en ce moment que quand il n'y a pas de majorité alternative, c'est difficile.
46:16Et enfin, c'était un monde où la politique avait un rôle complètement différent.
46:22Je crois que la parole politique était différente.
46:26Bien sûr, tous les hommes politiques ont toujours été critiqués en France.
46:29Mais quand ils disaient quelque chose, en tout cas, il n'y avait pas cette mise en cause,
46:33cette remise en cause de la classe politique totale.
46:36Et ça, ça change beaucoup.
46:38Et ça explique les derniers grands.
46:40Parce que c'est très difficile d'être grand.
46:42Mais vous en parlez comme des fauves, quand même.
46:44Il y a des coups de griffes, voire un peu plus que des coups de griffes.
46:46Ah oui, et puis des petits S aussi.
46:47Les grands ont toujours des petits S.
46:49Alors, il y en a.
46:50Est-ce que les petits ont de la grandeur ?
46:51C'est ça le vrai sujet.
46:52Est-ce que vous considérez qu'aujourd'hui, il y a une baisse de niveau en clair ?
46:56Pour résumer, parce que quand vous dites les derniers des grands,
46:58ça s'est teinté d'une sorte de nostalgie d'une époque où il y avait un peu plus.
47:02Est-ce que c'est eux qui sont moins bons ?
47:04Est-ce que c'est les Français qui sont plus difficiles ?
47:06Est-ce que c'est les temps qui sont durs ?
47:07Je pense que c'est les deux, en général.
47:09C'est vraiment les Français qui sont plus difficiles.
47:11Et parce que, sans doute, les canaux de communication ont beaucoup changé.
47:16La parole a été diffusée par 3 télévisions et qu'elle l'est maintenant par 2500.
47:22Enfin, on ne sait rien.
47:24Donc ça, ça change beaucoup.
47:25Par les réseaux sociaux, chacun prend sa part à la politique.
47:30Et au fond, il y a autant d'électeurs que de gens qui sont…
47:35Mais vous dites quoi ? Elle n'a plus le niveau ou quoi ?
47:38Pardon ?
47:39Vous dites quoi ? Elle n'a plus le niveau ?
47:40Ou si elle l'a, mais elle est dépassée par autre chose.
47:42Franchement, le niveau du Parlement aujourd'hui, je ferai les plus grandes réserves.
47:45Et ça, je crois que ce n'est pas un problème.
47:47Quant au niveau des dirigeants, ça, les dirigeants dépendent aussi beaucoup de circonstances difficiles.
47:53Je ne dirais pas qu'ils sont petits, mais c'est-à-dire qu'ils ne sont pas encore grands.
47:56Alors quand on dit pas le niveau, j'ai quand même envie de poser la question à notre invité Jean-Noël Barreau.
48:00Vous appréciez ou pas quand on vous dit que vous n'auriez peut-être pas le niveau ?
48:03Non.
48:04Des fonctions que vous occupez.
48:05Non, ce qui a été dit, c'est que nous sommes petits, mais que nous ne sommes pas encore grands.
48:08Voilà.
48:09Tous les espoirs sont permis.
48:10Voilà, c'est ça.
48:11Ceci étant dit, je pense que ce qui a profondément changé, c'est aussi le médium de la parole politique,
48:21qui aujourd'hui est beaucoup plus fractionné qu'auparavant,
48:23et qui conduit à des surgissements, comme on en a vu par le passé,
48:27qui remettent en question un certain nombre de situations ou de positions établies.
48:32Ceci étant dit, c'est aussi aux responsables politiques de notre époque
48:36de s'adapter à la donne nouvelle pour pouvoir être utile au pays et aux Français.
48:42Françoise ?
48:43Oui, est-ce que la question de fond, c'est pas ce qui s'est passé aussi
48:46dans cette espèce de délégation de pouvoir qu'on a donnée à l'Union européenne,
48:50et dont on voit aussi que l'Union européenne est absolument cruciale
48:53sur la résolution des problèmes de Covid, d'investissement ?
48:57Et est-ce qu'au fond, c'est pas ça aussi qu'on vit ?
48:59C'est Sarkozy qui dit que le président de la République n'a pas suffisamment de pouvoir
49:05parce qu'il dépend d'un tas de données qui n'existaient pas du temps de Sarkozy.
49:10Sarkozy dit dans une émission récente…
49:13Rapprochez-vous du micro, Michel.
49:15Sarkozy dit dans une émission récente, en fait, avec Patrice Gemmell sur la dissolution,
49:21il dit « Qu'est-ce que vous racontez ? Le président n'a pas assez de pouvoir.
49:27Il est soumis au contrôle de l'opinion publique qui est consultée 12 500 fois par mois.
49:33Il est suivi de près par une assemblée qui, en ce moment, est quand même incouvernable.
49:39Bon, non, c'est vrai, peut-être qu'on arrive à une période
49:43où le rôle du président de la République est en train de changer.
49:46Mais est-ce que l'Europe, Jean-Noël Barreau, je retourne vers vous,
49:48puisque vous êtes le ministre, certes des missionnaires, mais des affaires européennes,
49:51est-ce que l'Europe, finalement, enlève du pouvoir de l'espace de jeu pour les politiques d'aujourd'hui ?
49:57Je pense que le président de la République n'a pas perdu de pouvoir en soi.
50:02Mais qu'il faut être lucide sur le fait que la France, l'Europe et en réalité l'Occident,
50:09sur la scène internationale, à l'échelle planétaire, ont perdu du poids.
50:14On a été, si je puis dire, rattrapés par un certain nombre de grandes puissances émergentes.
50:20Et je crois qu'il faut être totalement lucide là-dessus.
50:22Et si nous défendons l'Europe, c'est précisément parce que, évidemment,
50:27à condition de pouvoir impulser, infuser, faire infuser en Europe les idées françaises,
50:32ça nous permet de conserver des marges de manœuvre.
50:35Et si aujourd'hui, pardon de cette petite parenthèse internationale,
50:39si aujourd'hui la France défend ardemment une réforme du conseil de sécurité de l'ONU
50:44pour permettre à des pays africains notamment d'y être représentés,
50:48c'est précisément parce que nous avons la conviction que si nous ne voulons pas perdre toute influence,
50:52il nous faut nous assurer que cet ordre international au sein duquel la France a joué un rôle essentiel
50:58conserve une forme de crédibilité.
51:01Ceci étant, pour répondre plus précisément pour l'Europe,
51:03il est évident que l'Europe n'est pas en pleine forme.
51:06Moi je suis plutôt étonnée par la réaction d'un côté d'Ursula von der Leyen
51:12qui fait vraiment ce qu'elle veut et en gros quand même pour les intérêts de l'Allemagne.
51:17Je suis fascinée par la Hongrie d'Orban qui envisage des négociations,
51:23par la Pologne qui envisage la guerre.
51:25On est quand même dans un moment où l'Europe elle-même ne donne pas,
51:30à la France en tout cas, un cadre directif facile.
51:35Et donc vous dites que vos derniers grands, ils auraient su reprendre les choses en main à ce moment-là, c'est ça ?
51:40Il ne faut pas faire du chrony.
51:43C'est toujours facile de dire eux, ils auraient su.
51:45En tout cas, ils n'ont pas eu à faire face aux mêmes problèmes.
51:47Donc c'est peut-être pour ça qu'ils sont grands.
51:49Mais ils n'ont pas eu, François Mitterrand, c'est la construction de l'Europe,
51:53après une hésitation d'ailleurs en 1983, c'est la construction.
51:56Au fond, la période de construction était plus facile.
51:58Ou la période de l'euro était plus facile que la période que nous vivons aujourd'hui.
52:02Et vous croyez que ça va, qu'il y a une possibilité,
52:05vu l'évolution des pouvoirs, des médias, que ça s'arrange ?
52:08Ou encore on risque d'être condamné à avoir une classe politique
52:11où il y a des gens qui font ça parce qu'ils ne peuvent pas faire autre chose ?
52:13Non, vous parlez en France ou en Europe ?
52:15Je parle en France, là.
52:17En Europe, parce que j'ai l'impression que le phénomène est le même.
52:19Je pense quand même que tout ce que vous avez dit tout à l'heure sur le Parti Socialiste
52:22et sur certaines personnalités du Parti Socialiste est vrai.
52:27Et que quand même, c'est important et que ça décolle.
52:32Je ne sais pas exactement, effectivement, si…
52:34D'ailleurs, je n'arrive pas à suivre le cours d'Olivier Faure.
52:38Parce qu'un jour, il dit qu'il est d'accord.
52:40Un autre jour, un Parisien, il dit…
52:42C'est vraiment compliqué.
52:43Et on le sent un peu sensible aux sirènes de la France insoumise.
52:48Mais enfin, voilà, il y a une chance que ça marche.
52:51Un minimum de temps peut-être.
52:53Mais le temps, en tout cas, qu'on n'ait pas l'impression
52:56que l'agence Moody va nous déprécier de semaine en semaine.
53:00Une dernière question.
53:02C'est une dépêche qui vient de tomber, Jean-Noël Barrault,
53:05qui concerne l'Algérie.
53:06On en parlait tout à l'heure.
53:07Le ministère algérien des Affaires étrangères,
53:09donc j'imagine que vous le connaissez bien,
53:11c'est votre homologue, qui vient de convoquer
53:13l'ambassadeur de France, Stéphane Romathé,
53:18que vous devez connaître évidemment,
53:20au sujet de la participation des services de renseignement français
53:22à des projets visant à déstabiliser l'Algérie.
53:25Qu'est-ce que vous répondez aux autorités algériennes ?
53:27Que ce sont des accusations infondées et fantaisistes.
53:30Que j'ai évidemment eu notre ambassadeur au téléphone
53:34pour lui assurer de notre soutien.
53:37Et que s'agissant de notre relation avec l'Algérie,
53:40nous avons dit, nous avons même écrit en 2022,
53:43le président Tebboune, le président Macron,
53:45une feuille de route qui projette la relation
53:48entre nos deux pays sur l'avenir.
53:51Et nous souhaitons que cette relation,
53:54c'est l'intérêt de la France et de l'Algérie, puisse se poursuivre.
53:58Vous confirmez cette convocation ?
54:00Je la confirme.
54:01Vous en étiez informé ?
54:02Absolument.
54:03Et vous la contestez ?
54:04Je la regrette.
54:07Merci à tous les deux.
54:09Merci infiniment Michel Cotta.
54:11Je rappelle le titre de votre livre,
54:12Les Derniers Grands, sorti chez Plon.
54:14Merci infiniment également à Jean-Noël Barraud.
54:16Sans oublier toute l'équipe de Questions Politiques.
54:18Je vous souhaite bien sûr une très belle fin de week-end
54:20et je vous dis à la semaine prochaine.