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Ce matin, Anne-Cécile Mailfert nous parle d’un film qu'elle ne recommande pas : "Le dernier tango à Paris", pourtant projeté dimanche prochain à la Cinémathèque.

"Ce week-end, à l'occasion d'une rétrospective Marlène Brando, la Cinémathèque française projettera "Un dernier tango à Paris", un film de 1972 signé Bertolucci, dont une scène de viol a marqué le cinéma. Je me souviens avoir été sidérée lorsque je l'avais vu il y a des années."

Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/anne-cecile-mailfert-en-toute-subjectivite

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Transcription
00:00En toute subjectivité avec vous Anne-Cécile Maïfert et donc ce matin vous nous parlez
00:10d'un film que vous ne recommandez vraiment pas.
00:13Ce week-end, à l'occasion d'une rétrospective Marlon Brando, la Cinémathèque française
00:17projettera Un dernier tango à Paris, un film de 1972 signé Bertolucci, dont une scène
00:23de viol a marqué le cinéma.
00:24Je me souviens avoir été sidéré lorsque je l'avais vu il y a des années, le corps
00:28de Marlon Brando, quinquagénaire, terrassant celui de Maria Schneider, 19 ans, sur le
00:32parquet du grand appartement parisien où se déroule l'intrigue, et le beau visage
00:36de la jeune fille saisie d'effroi.
00:38Je n'arrivais pas à comprendre ce que je voyais, ou peut-être avais-je compris.
00:41Rien n'est joué, tout a été imposé à Maria Schneider.
00:45Le réalisateur l'admettra sans gêne, la scène de viol n'existait pas dans le scénario
00:49et c'est avec l'acteur au petit déjeuner qu'ils l'ont prémédité.
00:51Ce crime, la caméra l'a capté sur l'instant, le public l'a consommé et l'industrie
00:56l'a récompensé.
00:57Un dernier tango à Paris montre cela, une jeune femme sacrifiée sur l'autel de la
01:01toute puissance masculine.
01:02Et il ne faudrait plus le montrer ce film selon vous ?
01:04En tout cas, certainement pas comme ça.
01:06Sur le site de la Cinémathèque Française, le film n'est présenté sans aucun contexte.
01:10Il est question d'odeur de soufre, d'objets de scandale et d'une passion dévastatrice.
01:14Le viol n'est pourtant pas le reclet de la passion mais de la domination.
01:17S'il y a une odeur qui s'en dégage, c'est celle du crime.
01:20Et s'il est un scandale, c'est de faire passer nos viols pour de l'art et du divertissement.
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01:54Et il lui a répondu ? Et oui, ses justifications sont peut-être plus hallucinantes encore
01:59que la programmation elle-même.
02:00Selon lui, il aurait été impensable de ne pas projeter ce film dans le cadre d'un
02:05hommage à Marlon Brando, un acteur à la filmographie pourtant prolifique.
02:08Et depuis quand une scène de viol rend hommage à celui qui le commet ? Selon lui, il serait-il
02:14respectueux du talent de Maria Schneider de ne pas diffuser ce film ? Pourtant, lorsqu'elle
02:18est violée face caméra, cette jeune femme ne joue pas.
02:21Plus tard, elle ne pouvait plus voir ce film.
02:23Elle l'avait dit, face caméra là aussi, s'il vous plaît.
02:26Non.
02:27Si cette œuvre est le point culminant de sa carrière, c'est qu'il fut le linceul
02:31de ses rêves, comme l'écrira plus tard sa cousine Vanessa Schneider dans « Tu t'appelais
02:35Marie Schneider », un livre adapté au cinéma en juin dernier.
02:38L'excuse de l'art est alors le cache-sexe d'une tentative désespérée de garder
02:42la main sur cette puissance phénoménale du cinéma, celle de fasciner les imaginaires.
02:47Il serait temps que la cinémathèque vive avec son temps, car le mouvement est en marche,
02:51grâce aux femmes qui parlent, qui s'organisent, qui refusent de danser au rythme imposé par
02:56les puissants.
02:57Et ce dernier tango-là, c'est elles qui vont le mener.

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