• il y a 4 jours
Talia, 37 ans, est l'ex-belle fille et l'une des victimes présumées de l'ex-boulanger star Frédéric Pichard, coqueluche des médias. Il l'aurait violée pendant 15 ans. Talia a attendu quatre ans un procès, en vain, puisque son violeur présumé s'est suicidé juste après sa mise en examen, le 26 octobre 2024.

Category

🗞
News
Transcription
00:00On encourage les femmes qui sont victimes de viols à porter plainte.
00:04Et au final, il ne se passe rien.
00:06Il y a beaucoup de baguettes de tradition aujourd'hui qui sont très courtes.
00:09Frédéric Pichard, un ancien boulanger star du 15e arrondissement de Paris,
00:14plusieurs fois vainqueur de concours prestigieux,
00:16a mis fin à ses jours le 26 octobre 2024.
00:20Trois jours après sa mise en examen pour défait de viol
00:23par personne ayant autorité sur son ex-belle-fille.
00:27Il s'agit de Talia, 37 ans, ex-femme de Geoffrey Pichard,
00:31le fils du boulanger avec qui elle a eu un petit garçon en 2010.
00:37Talia dit avoir vécu 15 années de viols et d'emprise au cœur de sa cellule familiale.
00:42La fameuse boulangerie Pichard, fermée en 2021 après ses accusations
00:47et d'autres d'une dizaine d'ex-employés contre le père et le fils
00:50pour des violences sexuelles et des faits d'harcèlement moral.
00:53Les deux avaient été mis en examen en février 2020
00:57pour agressions sexuelles sur mineurs de 15 ans.
01:00Pourtant, Talia ne pourra jamais affronter son violeur présumé,
01:04après quatre années d'instructions interminables ponctuées par ce suicide.
01:10Je me suis dit qu'en fait, tout s'arrêtait.
01:13Forcément, avec sa mort, il n'y a plus de procès.
01:17C'est ce que j'attends en fait, qui est une confrontation,
01:21qui est un procès, une condamnation.
01:26Donc, de se dire qu'on s'est battu pendant quatre ans, un peu pour rien,
01:30c'est...
01:32Ouais, c'est difficile.
01:34Je ne comprends pas pourquoi ça a duré quatre ans, en fait.
01:37À partir du moment où j'ai porté plainte, j'ai été entendue rapidement par la police.
01:42On a été convoqués par la juge.
01:44Et en fait, après, il ne se passe plus rien.
01:48Le fait de pouvoir être en face de lui, même de pouvoir lui poser des questions,
01:52j'aurais voulu savoir pourquoi il a fait ça.
01:56Il aurait été face à la juge, il aurait été obligé de répondre.
01:59Il m'enlève le droit de m'exprimer face à lui.
02:02Je me dis que c'est encore quelque chose qui m'interdit de faire, en fait.
02:06Dans le dossier de Talia, c'est absolument insupportable.
02:15On n'est pas quatre ans à mettre un violeur en examen.
02:18Parce qu'on attend de la justice qui nous protège.
02:19Et Talia n'a pas été protégée.
02:21En plus, elle a anéanti le travail des policiers,
02:26qui avait été minutieux, remarquablement fait.
02:29On aboutit à une situation qui est dramatique, d'abord,
02:33parce que Talia ne verra jamais éclore la vérité.
02:36On ne l'a pas protégée pendant quatre ans.
02:38Des représailles dont Frédéric Pichard la menaçait.
02:43Pendant ces quatre années, il aurait pu m'arriver n'importe quoi, en fait.
02:45Quand j'étais là-bas, il me disait « si tu pars, je te retrouve, je te tue ».
02:49Là, en fait, pendant deux ans et demi où il ne se passe rien,
02:52je me dis « on ne croit pas, en fait ».
02:57Il ne va rien se passer, il va rester libre, comme là, depuis le départ.
03:02Il ne sera jamais condamné.
03:06On l'a laissée se suicider parce qu'évidemment,
03:11il avait peur de se confronter à sa victime.
03:13Alors que si, avec une certaine célérité,
03:16j'ai vu que la justice avait fait correctement son travail,
03:20il aura été mis en examen,
03:22placé sous un contrôle judiciaire qui leur aurait empêché, effectivement,
03:25d'approcher sa victime.
03:28Et puis, il aura été soumis à un traitement.
03:31C'est tellement difficile de porter plainte que...
03:37On attend que la justice suive derrière, en fait.
03:40J'ai mis un an pour porter plainte parce que j'avais peur.
03:46J'avais peur des représailles.
03:48Ça m'a aidée à comprendre que j'étais une victime.
03:52Et puis d'être entendue par la police, d'être crue,
03:56parce que c'est quand même la chose la plus difficile, en fait.
04:00C'est qu'on ne croit pas.
04:03De comprendre que je n'avais pas à avoir honte,
04:06que j'avais le droit de parler,
04:07que ce n'était pas à moi de me cacher.
04:12Thalia vivait juste derrière la boulangerie
04:14et raconte avoir subi des viols répétés,
04:17commis dans un environnement entièrement contrôlé par son ex-beau-père.
04:21Des viols qui auraient commencé lors de l'été de ses 18 ans.
04:24La justice dispose d'enregistrements où Frédéric Pichard évoque ces viols.
04:29À 18 ans, monsieur Pichard, ce que vous avez fait, c'était un viol avec moi.
04:33Ah mais oui, on est d'accord.
04:35Puis, je t'ai encore violé la semaine dernière.
04:37Oui, parce que vous me manipulez.
04:39Vous me faites croire que c'est normal.
04:41Le lendemain du jour où vous m'avez touchée...
04:43Oui.
04:45Vous m'avez emmenée en voiture et vous m'avez dit je t'ai violée hier.
04:49Je me suis dit que ce n'était pas normal que tu te laisses faire.
04:51Voilà ce que je me suis dit.
04:53Mais j'avais 18 ans.
04:56Oui, et alors ?
04:57À 18 ans, on n'est pas adulte.
04:58La majorité sexuelle, c'est 13 ans.
05:02Le témoignage de Thalia, lui, après une expertise psychiatrique,
05:05a été jugé crédible.
05:07Mais le père et le fils ont toujours nié les faits.
05:10Quand ça est arrivé, je dissociais.
05:14Donc, en fait, je n'étais pas...
05:18Je n'étais pas vraiment là.
05:19S'il n'y avait pas eu mon fils, je serais morte là-bas.
05:24Pour moi, c'était la chose la plus difficile à faire.
05:26C'était de partir de là-bas.
05:30Il m'a toujours dit, si tu pars, je te retrouve, je te tue.
05:33Je suis partie pour survivre.
05:36Il m'a coupé de ma famille, il m'a coupé de mes amis.
05:39J'ai commencé à travailler à la boulangerie.
05:42Et à partir du moment où j'étais au travail avec eux,
05:47j'habitais sur place, il était là tout le temps.
05:50Il avait les clés de l'appartement, il surveillait tout.
05:54Je ne pouvais pas sortir comme je voulais, en fait.
05:56Quand j'allais quelque part, il fallait que je lui dise où j'allais,
06:00à quelle heure je rentrais.
06:02Je sais qu'il me suivait aussi pour vérifier si j'allais bien
06:06là où je disais que j'allais.
06:08C'est comme une secte parce qu'à partir du moment où on rentrait
06:12dans cette famille, même les employés qui travaillaient là-bas,
06:16quasiment la majorité étaient logés sur place.
06:20Il avait les clés de tous les appartements.
06:23Il surveillait, les allées et venues des boulangers, des pâtissiers,
06:27des vendeuses, des apprentis.
06:28Je sais que les gens ont du mal à comprendre l'emprise
06:32et pourquoi je ne suis pas partie avant.
06:45Je sais qu'il a eu une emprise tellement grande sur moi
06:51pendant toutes ces années qu'il a encore cette emprise-là aujourd'hui.
06:57J'arrive à m'en détacher de plus en plus.
07:07Là, je sais qu'il n'est plus là, mais c'est comme s'il était encore un peu là.
07:12Face à ces lenteurs du système judiciaire,
07:14son avocate a décidé d'engager la responsabilité de l'État.
07:18J'ai évidemment l'intention de ne pas en rester là
07:23et de montrer que cette justice est faillible.
07:28Alors la justice va me rendre des comptes
07:30et elle va surtout me rendre des comptes à Thalia.
07:32Et effectivement, il faudra que ça fasse du respect.
07:34C'est justement pour dire à la justice, faites votre boulot,
07:39parce que des victimes, il y en a plein.
07:41Et quand elle voit qu'au bout de quatre ans, ça ne sert plus à rien,
07:47elles n'ont même plus envie d'aller déposer plainte.
07:50Contactées, les avocats de Frédéric et Geoffrey Pichard
07:53nous ont indiqué que la famille demandait à ce que leur deuil soit respecté.
07:57Thalia, elle, continue à construire sa nouvelle vie
08:00aux côtés de son fils, dont elle a obtenu la garde.
08:03Mon moteur, de toute façon, ça a toujours été mon fils.
08:05Toutes les étapes que je franchis depuis que je suis partie,
08:09pour moi, c'est des batailles gagnées, en fait.
08:12Retravailler, de réussir aussi à ressortir dans la rue sans avoir peur.
08:18Je ne suis pas une bonne à rien, comme ils disaient, en fait.
08:21À chaque fois que je témoigne,
08:22c'est que j'espère que d'autres personnes, d'autres femmes qui vivent ça,
08:29c'est la force de partir et de croire en la justice
08:34et de se dire qu'il faut porter plainte.
08:37Je n'ai pas de rancœur, en fait, je crois encore en la justice.
08:42Mais oui, je suis déçue, en fait.
08:49Avec la mort de Frédéric Pichard, les poursuivres s'éteignent en ce qu'il concerne.
08:53En absence de procès, il est donc présumé innocent.
08:57Son fils Geoffray reste mis en examen pour agression sexuelle sur mineurs de 15 ans
09:01et sous statut de témoin assisté pour les viols présumés commis sur Thalia.
09:12Sous-titrage Société Radio-Canada

Recommandations