"On m'a annoncé une espérance de vie comprise entre 15 et 20 mois".
Gauthier a 52 ans et il est atteint d'un cancer du cerveau : le glioblastome, une tumeur agressive de stade 4. Mais comment fait-on pour vivre normalement quand on apprend une nouvelle comme ça ? On l’a rencontré avec sa famille, plus de 20 mois après le diagnostic.
Gauthier a 52 ans et il est atteint d'un cancer du cerveau : le glioblastome, une tumeur agressive de stade 4. Mais comment fait-on pour vivre normalement quand on apprend une nouvelle comme ça ? On l’a rencontré avec sa famille, plus de 20 mois après le diagnostic.
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00:00On se dit souvent, si jamais on m'annonce que je vais mourir demain,
00:03j'aimerais bien m'acheter une belle voiture, faire le tour du monde.
00:06Non, en fait, on ne fait pas ça du tout.
00:08Déjà, il faut l'argent.
00:10En janvier 2023, en allant travailler, en conduisant,
00:15je me suis rendu compte que mon bras et ma jambe gauche
00:22ne fonctionnaient plus comme il faut.
00:23Je n'arrivais plus à chercher les manettes avec mon bras gauche
00:27et je n'arrivais plus à débrayer.
00:30Je me suis inquiété, je suis revenu à la maison
00:35et mon épouse qui était là m'a emmené tout de suite aux urgences.
00:39Tout de suite, eux, on pensait à un AVC
00:41parce que les symptômes que je décrivais, problèmes de motricité...
00:44Côté gauche, c'est après, parce qu'ils ont fait des examens complémentaires,
00:49un scanner et une IRM de contrôle,
00:52où là, ils ont vu qu'il y avait ce qu'ils appelaient une masse tumorale pour l'instant.
00:56La partie opération et post-opératoire, une semaine.
00:59Je crois que c'est six heures ou huit heures de bloc opératoire, il me semble,
01:04avec une belle cicatrice avec 25 agrafes.
01:08Ils ont ouvert comme ça, là.
01:11Ils ont fait un carré sans ouvrir pour soulever.
01:14Ils ont soulevé la peau, ouvert la boîte crânienne.
01:17On était à deux dans le bureau.
01:19Elle m'a dit tout de suite,
01:21« Bon, je n'ai pas une bonne nouvelle pour vous.
01:24C'est une tumeur cérébrale.
01:26C'est un glioblastome, donc une tumeur de haut grade, de grade 4. »
01:31Et donc, là, elle m'a tout de suite dit, « C'est incurable. »
01:35Alors, la première question que je lui ai posée,
01:38ça peut être bête, mais c'est « Combien de temps il me reste ? »
01:40Elle était un peu étonnée par la question.
01:42Elle m'a dit, « Combien de temps ? En quoi ?
01:43Combien de temps il me reste à vivre, puisque c'est incurable ? »
01:46Elle m'a dit, « Voilà, à peu près 16 à 20 mois,
01:48mais bon, ça reste des statistiques et d'une personne à une autre,
01:53ça peut être très différent, mais bon, la moyenne, en gros,
01:56c'était 15 à 16 mois.
01:59Donc, c'est sûr que ça fait un choc, forcément, quand on nous apprend ça.
02:04Surtout qu'on était à deux, donc on est tous les deux
02:07à apprendre la nouvelle en même temps.
02:09C'était dur parce que, déjà pour lui,
02:13c'est déjà lui, comment il allait l'accepter.
02:16Et après, moi aussi, mais bizarrement,
02:20je pensais plus à mes filles.
02:22Comment leur dire ?
02:24Parce que ce n'est pas évident d'annoncer une mauvaise nouvelle comme ça.
02:28Que ce soit moi ou même ma soeur qui n'est pas là aujourd'hui,
02:30mais c'est beaucoup plus compliqué.
02:32Nous, on est encore jeunes et on a encore toute notre vie à faire.
02:35Et la peur que papa ne soit pas forcément là
02:39à des moments importants qu'on va vivre.
02:41Aujourd'hui, vous avez déjà dépassé ce chiffre.
02:44Oui, donc les 20 mois, on va dire que c'était le 15 octobre.
02:50Déjà, les 16 mois, ça a été une victoire.
02:52C'était au mois de juin.
02:53Les 20 mois, c'était une plus grosse victoire.
02:55Pour moi, c'était déjà les 12 mois.
02:58Et puis, je vais approcher en début d'année.
03:0124.
03:02Je vais arriver, oui, aux deux ans.
03:05Est-ce que vous avez le sentiment que chaque minute compte encore plus maintenant ?
03:11Ou vous essayez de ne pas y penser ?
03:13On voit les choses différemment.
03:14Je pense qu'on relativise beaucoup plus sur des fois des petits détails.
03:18Comme j'ai une maladie grave,
03:20les gens puissent se plaindre.
03:21Mais je leur dis, ce n'est pas parce que j'ai une maladie grave et que...
03:25Limite, ils s'empêchent d'être malades parce qu'il y a pire.
03:28Ils ne veulent pas se plaindre parce qu'ils ont une grippe,
03:30ils sont enremis, ils ont mal au dos.
03:32Je dis, ce n'est pas parce que je suis malade,
03:34tu as le droit d'être malade.
03:35Tu as le droit d'avoir mal.
03:37Si on veut se faire plaisir, partir en vacances, un week-end,
03:40on ne va pas se poser les questions pendant des jours et des jours
03:43à savoir si on va le faire ou pas.
03:45Avant, c'est vrai qu'on prenait peut-être plus le temps de la réflexion
03:48pour des vacances, pour des week-ends, pour des achats un peu importants
03:52que maintenant, on se décide plus vite.
03:54Tu te décides plus vite.
03:56Depuis mi-janvier 2023, j'ai arrêté de travailler.
04:00Je suis en arrêt de travail depuis cette période-là.
04:03À l'époque, je me posais la question d'arrêter et puis non,
04:07j'avais besoin de voir autre chose, donc j'ai continué à travailler.
04:09Gauthier restait tout seul à la maison, l'année dernière, ça a été.
04:14Là, depuis cette année que ses symptômes s'accentuent,
04:19ça fait un mois que je suis à la maison avec lui
04:21parce que je voulais être rassurée, même pour lui,
04:24parce qu'il y a beaucoup de déplacements à faire et comme il n'a pas pu conduire.
04:27À partir de la semaine prochaine, je vais reprendre le travail,
04:30mais en mi-temps thérapeutique.
04:31Je me donne des dates, un peu.
04:34On a fêté nos 50 ans, tu as eu ton anniversaire au mois de juillet,
04:38il y a eu l'anniversaire des filles.
04:39Là, c'est Noël.
04:40L'espoir est toujours là parce qu'il y a, comme je disais tout à l'heure,
04:45il y a toutes les personnes qui sont autour de nous qui comptent pour nous
04:49et nous, on compte pour eux et il faut se battre pour elles.