Célèbre animateur de radio, il a également été producteur et a endossé de multiples casquettes durant son parcours. Il est particulièrement connu pour son engagement en faveur des cultures afro-caribéennes et africaines.
C'est Claudy Siar, et il est aujourd'hui sur Brut pour nous raconter 4 moments qui ont marqué sa carrière.
C'est Claudy Siar, et il est aujourd'hui sur Brut pour nous raconter 4 moments qui ont marqué sa carrière.
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00:00Je reçois des artistes, je reçois des gens qui ont...
00:04Et moi je me moque de savoir entre l'artiste qui est déjà primé
00:10et l'artiste qui arrive, pour moi c'est le même artiste.
00:14Alors oui, il y a les honneurs que l'on rend à celles et ceux
00:17qui ont réalisé des choses extraordinaires.
00:19Et puis il y a ceux qui ont un vrai talent.
00:22Et il faut les attraper et en faire des locomotives.
00:25Lorsque je reçois quelqu'un, c'est parce qu'il mérite d'être mis en valeur.
00:29Et moi je n'ai pas envie de recevoir des artistes pour leur dire
00:33ce qui ne va pas chez eux.
00:34Si je les reçois, et je dis souvent que le talent de notre métier
00:40résulte de notre capacité à mettre en valeur les femmes et les hommes
00:44que nous recevons.
00:45Il est là notre travail.
00:47Hello, c'est Claudiciard, Afro-Caribéen de la Guadeloupe,
00:50et je suis sur Brut.
01:00Le premier moment le plus important dans ma vie musicale,
01:05mais à l'époque je ne m'en rendais pas compte,
01:08c'est d'avoir réalisé les premières compilations de l'histoire du Zouk
01:13et de l'histoire des musiques populaires africaines.
01:16En 1991, je suis label manager chez Flarey Nash New Deal,
01:22distribué par Warner, et cela grâce à mon grand frère,
01:26Jean-Pierre Urssul, aujourd'hui décédé.
01:29On me propose justement, parce qu'on parle beaucoup de musique antillaise,
01:32de réaliser des compilations.
01:34Et je réalise 5 volumes sur la durée, 5 volumes de génération Zouk,
01:41première compilation Zouk de l'histoire de la musique.
01:45Puis je réalise dans le même temps Génération Africa,
01:48première compilation de musique africaine de l'histoire.
01:52Mais moi à l'époque, je suis jeune, je fais les choses de façon naturelle,
01:57passionné, et avec l'engagement qui m'anime,
02:01celui de mettre en valeur, en exergue, en lumière,
02:05mes cultures et à travers la musique.
02:07Je pense que ces compilations, Génération Zouk et Génération Africa,
02:11ont vraiment été utiles, locomotives même pour ces musiques-là,
02:17parce que nous faisions de la publicité à la télévision,
02:19et ça ne s'était jamais fait.
02:22Le deuxième moment important dans ma carrière,
02:25et peut-être le plus important,
02:27parce qu'il touche à mon humanité, il touche à la citoyenneté également,
02:31c'est d'avoir organisé le 23 avril 1993,
02:35la première marche de commémoration de l'abolition de l'esclavage,
02:39de l'histoire de France.
02:40Cette marche, je l'ai baptisée la Marche des Nègres Marrons,
02:44c'était une fête des Nègres Marrons,
02:46celles et ceux qui ont refusé d'accepter
02:49l'esclavage.
02:50Alors pourquoi ?
02:51L'Espagne venait de commémorer la dite découverte des Amériques
02:54par Christophe Colomb.
02:56La France s'était associée à ces festivités,
02:58ainsi que d'autres pays du monde.
03:00Tout le monde avait oublié le calvaire des peuples autochtones,
03:03que l'on appelle encore par erreur amérindiens ou indiens,
03:07le génocide de ses natifs,
03:10et puis la déportation de millions d'Africains pour être esclaves.
03:14Et moi, je voulais juste rappeler aux uns et aux autres
03:17cet épisode de l'histoire par cette marche
03:19de la place de la République à la place de la Nation,
03:21place des Antilles à Paris.
03:23Je voulais également interpeller la société française
03:25et l'Europe en général sur le modèle de société
03:29que ces pays souhaitaient pour leur population
03:33désormais métissée, en tout cas plurielle,
03:36parce que nous subissions déjà et depuis trop longtemps
03:39le racisme, les inégalités de traitement et la relégation.
03:44Et je voulais juste dire quel modèle de société
03:48souhaitez-vous pour tous les Français,
03:51au-delà de la couleur de leur peau et de leur religion ?
03:54Je n'ai pas eu la réponse.
03:56Et nous sommes en 2024 et le combat, vous le connaissez.
04:03L'un des moments importants de mon histoire,
04:06c'est d'avoir fini par accepter la proposition
04:10qui m'était faite de devenir délégué interministériel
04:13pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer.
04:16Alors au départ, je refusais parce que ça me paraissait
04:19être un autre monde, ne pas être mon monde.
04:23J'avais peur aussi, et très égoïstement,
04:26de l'image qui serait la mienne en acceptant
04:30un poste de l'administration, puisque c'est le plus haut grade
04:35de l'administration française, sous le gouvernement Nicolas Sarkozy.
04:40Et j'oubliais un peu le fait que je suis un citoyen,
04:43que je suis un citoyen engagé, et qu'on peut continuer
04:46à envoyer des pierres contre les murs de la citadelle,
04:49mais on peut aussi entrer dans la citadelle
04:52et essayer de changer les choses.
04:54Et donc j'ai accepté, et je le dis aujourd'hui,
04:57c'est un honneur que le président d'alors me faisait,
05:00en me proposant ce poste de délégué interministériel.
05:04Également d'avoir mené des actions pour les entrepreneurs,
05:07d'avoir essayé d'unir le monde de la culture,
05:11le monde de l'entreprenariat, même si tout ça, malheureusement,
05:15n'a pas eu de suite, parce que parfois on se met d'accord
05:18pour ne jamais être d'accord, nous, originaires d'outre-mer.
05:21C'est comme ça, c'est la vie.
05:23Et il y a quelque chose de très visible aujourd'hui
05:26sur les actions que j'ai menées, qui peut paraître simple,
05:28mais qui ne l'est pas.
05:30Par exemple sur France 2, vous voyez aujourd'hui
05:32une météo outre-mer.
05:34C'est ce combat que j'ai mené pour que, justement,
05:37la France voit tout l'étendue de ses frontières,
05:42même si je reste un indépendantiste dans l'âme.
05:49Le quatrième moment qui est important et fondateur pour moi,
05:53c'est le monde des médias, et c'est d'avoir intégré RFI.
05:58Moi, à l'époque, je rêvais d'être sur Africa numéro 1.
06:01Mai, fin 1994, début 1995.
06:04Moi, je vais être sur la radio africaine.
06:06Et finalement, ça ne se fait pas.
06:09Et RFI m'appelle pour me proposer de remplacer quelqu'un
06:13qui était une icône en Afrique par ses émissions,
06:17son émission phare, Canal Tropical.
06:20Cet homme, c'est Gilles Aubringé.
06:22Il décède le 4 février 1995.
06:24Et le 13 mars 1995, je suis sur RFI et je commence mon aventure.
06:29Alors, au départ, moi, je voulais changer le nom.
06:32Et je sais que la direction ne le souhaitait pas.
06:34Et je finis par trouver Couleurs tropicales.
06:37Je détestais le nom.
06:39Mais je me suis dit, ce n'est pas grave.
06:41Il y a le contenant et le contenu.
06:44Et le contenu était très militant.
06:47Très vite, je racontais des épisodes de l'histoire.
06:51Très vite, j'expliquais pourquoi tel artiste avait tel propos.
06:55Je voulais vraiment faire une émission militante.
06:58Et je recevais des centaines, des milliers de lettres par semaine
07:01où des gens en Afrique disaient,
07:03mais j'ai cru comprendre que vous êtes noir.
07:07J'ai cru comprendre que vous êtes des Antilles.
07:09Vous êtes un Africain de la Caraïbe.
07:11Et vous êtes en train de nous réveiller.
07:13Et l'émission a 29 ans aujourd'hui.
07:16Et c'est incroyable parce qu'à l'époque,
07:18il n'y avait pas de réseaux sociaux.
07:19Il n'y avait pas tout ça.
07:21Et énormément de gens que je rencontre aujourd'hui me disent,
07:23mais ma fibre militante, je te la dois.
07:26Mon réveil.
07:27Parce que je parlais de génération consciente.
07:29Et donc on le dit, on appartient à la génération consciente.
07:32On est avec toi.
07:33Oui, on a compris.
07:34On doit se réveiller.
07:35L'Afrique doit se réveiller.