La commission des finances du Sénat a conclu son cycle d’auditions sur le dérapage du déficit ce vendredi 15 novembre en entendant l’ancienne Première ministre, en responsabilité de mai 2022 à janvier 2024.
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00:00Madame la Première Ministre.
00:03Merci Monsieur le Président, Monsieur le Rapporteur Général, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur.
00:08Donc vous avez souhaité m'auditionner dans le cadre de votre mission sur la dégradation des finances publiques depuis 2023.
00:16Je ne m'exprimerai naturellement que sur les actions que j'ai eues à conduire pendant les 20 mois que j'ai passé à Matignon,
00:23comme vous l'avez rappelé sur ce chevalet, du 16 mai 2022 au 9 janvier 2024.
00:29Et ceci dans un contexte inédit de majorité relative.
00:35Alors je ne vais pas revenir sur les éléments détaillés de construction des hypothèses de recettes
00:41sur lesquelles vous disposez du rapport de l'Inspection générale des finances.
00:45Et vous avez également, comme vous l'avez rappelé, déjà auditionné les services,
00:50ainsi que le ministre de l'Économie et les ministres des Comptes publics qui ont été en fonction pendant cette période.
00:57Peut-être rappeler que pendant les 20 mois que j'ai passé à Matignon, le Parlement a adopté de nombreux textes,
01:03près d'une centaine, dont deux budgets, ceux de l'année 2023 et de l'année 2024,
01:10ainsi que la loi de programmation des finances publiques pour la période 2023-2027 que mes gouvernements ont donc eu à préparer.
01:18En préambule, je pense qu'il est important de se rappeler que la préparation de ces budgets
01:25s'est faite dans un contexte qui était marqué par la guerre en Ukraine, par la crise énergétique,
01:32avec le retour d'un niveau d'inflation que la France n'avait plus connu depuis des décennies.
01:38Et c'est ce qui avait conduit mon gouvernement à présenter deux textes d'urgence dès l'été 2022 pour le pouvoir d'achat.
01:46La volonté de protéger nos concitoyens dans cette période était largement partagée sur tous les bancs,
01:52si bien ici au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, ce qui a notamment conduit à augmenter fortement au cours des débats le coût de certaines mesures.
02:01Je pense par exemple à la remise carburant, qui est passée au cours des débats de 18 centimes d'euro par litre à 30 centimes d'euro.
02:10Et je pense qu'on peut aussi rappeler que sur la période 2021-2024,
02:16ces différentes mesures de soutien à la fois à nos entreprises, à nos collectivités, à nos concitoyens représentent un coût de 85 milliards d'euros,
02:26dont 33 milliards d'euros pour l'année 2023.
02:30Néanmoins, les deux budgets qui ont été préparés par mes gouvernements traduisaient la volonté de repasser sous la barre des 3% de déficit en 2027
02:42et d'amorcer une baisse de la dette à partir de 2026.
02:46Et évidemment, ces budgets prenaient en compte les engagements qui avaient été pris par le Président de la République lors de sa campagne,
02:53en particulier la volonté de renforcer les moyens de nos armées, de nos forces de sécurité intérieure,
03:00de notre justice, qui ont été traduites dans trois lois de programmation.
03:04Et je voudrais noter que dans le contexte de majorité relative que je mentionnais,
03:09j'ai dû m'engager personnellement sur chacune de ces lois de programmation pour contenir le niveau des dépenses.
03:16Je me rappelle en particulier des débats qu'on a pu avoir sur les marches qu'il fallait réaliser chaque année sur la loi de programmation militaire.
03:25Dans le même temps, moi j'ai pleinement porté la volonté de maîtriser nos dépenses publiques,
03:33notamment au travers de différentes réformes structurelles.
03:36Je pense en particulier à l'assurance chômage, avec une loi qui a été adoptée à la fin de l'année 2022,
03:44dans le prolongement de la réforme que j'avais pu porter comme ministre du Travail,
03:49de l'accompagnement des bénéficiaires du RSA avec la création de France Travail,
03:54là encore une loi adoptée à la fin de l'année 2023, ou encore la réforme des retraites.
04:00Ces réformes structurelles, elles sont essentielles.
04:03Les trois que je viens de mentionner génèrent une économie de l'ordre de 30 milliards d'euros à l'échéance 2030.
04:11Ces réformes, elles sont donc nécessaires.
04:15Chacun se souvient qu'elles n'étaient pas populaires et qu'à défaut de trouver une majorité à l'Assemblée nationale,
04:21j'ai dû engager la responsabilité de mon gouvernement pour faire adopter la réforme des retraites.
04:27J'ai par ailleurs porté la nécessité d'une maîtrise des dépenses publiques par l'ensemble des ministères dans la durée.
04:35C'est par exemple le sens des lettres de cadrage que j'ai adressées début 2023 pour le budget 2024 à l'ensemble des ministres,
04:45en demandant à chacun de proposer des économies à hauteur de 5% de ses dépenses, hors ma salariale.
04:53C'est aussi le sens des messages que j'avais portés lors de la clôture des assises des finances publiques en juin 2023,
05:01en insistant sur les différents leviers nécessaires pour diminuer nos déficits et résorber notre dette,
05:09qu'il s'agisse du renforcement de notre potentiel de croissance, des réformes structurelles,
05:16de la lutte contre les fraudes fiscales et sociales qui se sont traduites notamment dans le plan qui a été présenté
05:22par le ministre en charge des Comptes publics à l'époque, Gabriel Attal,
05:26ou enfin de l'évaluation de l'efficacité de nos politiques publiques.
05:31Et puis, pour identifier d'autres réformes structurelles, j'ai par ailleurs lancé au printemps 2023 des revues de dépenses.
05:41Cet exercice qui est désormais inscrit dans le dispositif que nous avons introduit dans la loi de programmation des finances publiques
05:50qui a été adoptée à l'automne 2023, prévoit chaque année un exercice d'évaluation des politiques qui me semble crucial
05:58pour renforcer l'efficacité et l'efficience de nos politiques publiques, tout en générant des économies structurelles.
06:05Et de façon inédite, en tant que Premier ministre, j'ai personnellement tenu des réunions à mon niveau avec l'ensemble des ministres
06:14pour leur faire partager nos objectifs d'économie et notre volonté de respecter nos cibles de finances publiques.
06:21Je rappelle que j'avais également saisi le premier président de la Cour des comptes, ainsi que les présidents des commissions
06:28et les rapporteurs généraux, donc vous-même, pour recueillir le cas échéant vos demandes sur les revues de dépenses
06:36qu'il paraissait pertinent de lancer. De fait, ces missions, elles ont montré toute leur pertinence et je note qu'elles ont été utilisées
06:45par mes successeurs, notamment pour préparer le budget 2025, qu'il s'agisse par exemple de la revue de dépenses sur les indemnités journalières,
06:54de la revue de dépenses sur les emplois francs ou encore du niveau de trésorerie des opérateurs de l'État.
07:01Donc peut-être pour conclure, l'ensemble de ces éléments ont permis de construire des budgets pour 2023 et 2024
07:09avec une hypothèse de déficit de 5% pour le premier et de 4,4% pour le second, compte tenu des prévisions de recettes
07:18qui étaient alors estimées par le ministère de l'Économie et des Finances.
07:23Vous l'avez mentionné, mais je pense que c'est un point important dans un contexte de majorité relative.
07:29J'ai dû engager dix fois la responsabilité de mon gouvernement sur chacun des budgets en devant à chaque fois résister
07:37à la fois contre la demande des ministres et de leurs écosystèmes, je pense notamment à la sphère sociale,
07:44et puis par ailleurs dans le cadre des 49.3, en écartant des amendements des oppositions
07:50et dans une moindre mesure de l'ex-majorité qui visait systématiquement à augmenter les dépenses.
07:57Malheureusement, on a pu constater que les hypothèses de recettes se sont avérées largement erronées en 2023 comme en 2024.
08:09En 2023, je reviendrai sur le moment où j'ai été alerté,
08:15mais pour sécuriser une exécution maîtrisée des dépenses de l'État, moi j'avais signé en septembre 2023
08:23un décret qui prévoyait l'annulation de 5 milliards d'euros de crédit de paiement et de 4,8 milliards d'euros d'engagement.
08:31Et de fait, les dépenses pour 2023 ont été tenues.
08:35Et comme le ministre de l'Économie a dû vous l'indiquer, il m'a alerté mi-décembre
08:42sur les interrogations des services concernant les recettes 2023
08:47sans que nous disposions à ce stade d'une évaluation de l'ampleur du risque.
08:53Cette alerte est intervenue alors que le projet de loi de fin de gestion 2023 était déjà promulgué, puisqu'il a été promulgué le 30 novembre.
09:08Et comme me l'avait proposé le ministre de l'Économie, l'alerte m'a conduit à introduire,
09:16et on était dans les dernières lectures du projet de loi de finances pour 2024,
09:21au moment où cette alerte a été portée par le ministre de l'Économie.
09:28Donc, dans les nouvelles lectures et lectures finales qui sont intervenues juste à ce moment-là,
09:38j'ai prévu la possibilité d'augmenter par voie réglementaire, avant le 31 janvier 2024,
09:44la TICFE, donc la taxe intérieure sur la consommation finale d'énergie,
09:49en complément de ce qui était prévu pour la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel,
09:56ce qui a permis de générer une recette nouvelle de l'ordre de 5 milliards d'euros pour l'année 2024.
10:03Et puis, l'alerte faite mi-décembre par le ministre de l'Économie a par ailleurs conduit à se préparer à annuler,
10:11début 2024, jusqu'à 10 milliards d'euros de crédit qui étaient mis en réserve dans le cadre du PLF 2024,
10:18décision qui a ensuite été mise en œuvre par mon successeur.
10:22Et puis donc, vous aurez noté qu'à partir du 9 janvier, je n'étais plus en responsabilité,
10:26et donc je ne peux pas vous éclairer sur la suite.