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00:00A 7h47, vous avez la parole ce matin.
00:02Est-ce que c'est une bonne idée, l'obligation du brevet pour passer en seconde ?
00:06Parce que ça amène du changement pour l'éducation de nos enfants, Théo.
00:09Oui, beaucoup de changements ont été annoncés hier par la ministre de l'Éducation nationale, Anne Jeuneté.
00:13Au collège, les groupes de niveau, les groupes de besoin sont étendus en quatrième et en troisième.
00:17Le brevet, vous l'avez dit Mathieu, devient obligatoire pour passer au lycée en seconde générale,
00:23mais aussi en seconde professionnelle.
00:25Et puis au bac, une épreuve de mathématiques aura lieu dès la première,
00:28comme le français, au fond.
00:30Qu'en pensez-vous de ces changements ?
00:32On attend vos appels au 04 76 46 45 45.
00:37Et qu'en pense notre invité ? Bonjour, Florian Stoker.
00:40Bonjour.
00:41Merci d'être en ligne avec nous.
00:42Vous êtes professeur en ISER, secrétaire départementale du SNES-FSU,
00:46le principal syndicat des professeurs de collège et de lycée.
00:49Alors, on a beaucoup d'auditeurs sur notre page Facebook qui jugent que c'est logique,
00:53au fond, d'avoir le brevet pour aller au lycée.
00:55Sans le brevet, on n'a pas le niveau, disent-ils.
00:58Qu'est-ce que vous en pensez ? Qu'est-ce que vous leur répondez ?
01:02Malheureusement, des fois, le bon sens apparent est un petit peu plus compliqué que ça,
01:07surtout sur les questions de pédagogie.
01:09C'est-à-dire qu'effectivement, nous, on n'est pas dans l'approche immédiate.
01:13On est tous d'accord qu'il faut qu'il y ait une vérification des compétences des élèves.
01:18Alors, il faut savoir qu'aujourd'hui, on a déjà quelques élèves qui n'ont pas le brevet qui arrivent au lycée.
01:21Et puis au final, ils peuvent quand même, des fois,
01:23réussir à trouver un chemin, on va dire, parmi les trois filières qui existent.
01:27Vous en voyez qu'ils se révèlent au lycée ?
01:30Alors, ce n'est pas la majorité, on est d'accord, mais ça peut arriver.
01:32Déjà, ce qui est intéressant, c'est de dire qu'il ne faut pas forcément mettre de fatalisme sur la destinée de chaque élève.
01:37Par contre, nous, ce qui nous intéresse le plus, c'est que par contre,
01:40aujourd'hui, ce que fait le gouvernement, c'est qu'il met une sanction,
01:42on va dire, aux élèves qui n'auraient pas le niveau à ce moment-là,
01:45mais sans donner les garanties,
01:46qu'en gros, cette sanction, on va dire, ait donné la même chance avant à chacun des élèves.
01:50Et c'est ça, nous, qui nous embête le plus.
01:51C'est-à-dire qu'on n'a pas les moyens, dans les classes, aujourd'hui,
01:53de s'assurer que tous les élèves, quelles que soient leurs origines sociales,
01:56aient les moyens, au final, de réussir.
01:58Puisqu'on voit que c'est toujours les plus défavorisés qui auront le plus de difficultés scolaires.
02:01Et d'ailleurs, quand on regarde les études pédagogiques,
02:04on se rend compte qu'en fait, souvent, un élève qui en est déjà en difficulté,
02:07par exemple, dès la sixième, quand il fait des contrôles toute l'année,
02:10alors encore plus quand il passe le bruit, il va passer son temps à se dire
02:12« mince, qu'est-ce qui se passe si je ne l'ai pas ? »
02:13Donc en fait, pédagogiquement, on a besoin de plus de travail sur le long terme,
02:17et surtout avec les moyens, ça j'insiste là-dessus,
02:19parce qu'on est parmi les classes les plus chargées d'Europe.
02:21Et ça, c'est quelque chose que le gouvernement...
02:24Voilà, on continue de supprimer des postes, comme on le fait depuis sept ans,
02:26alors qu'il nous manque 49 000 enseignants pour retrouver le taux d'encadrement qu'on avait en 2006.
02:31On va y venir, effectivement, au moyen, Florian Stocard,
02:33parce que c'est un point, effectivement, sensible.
02:35Je reste d'abord sur la question du brevet.
02:38Selon l'organisation de parents d'élèves, PEP,
02:41qui est plutôt favorable à ce changement,
02:43elle estime que ça permet d'éviter d'envoyer des élèves vers l'échec au lycée.
02:48Ça, cet argument-là, vous l'entendez ?
02:51Eh bien non, parce qu'en fait, s'il y a échec,
02:53c'est simplement parce que, justement, on n'investit pas dans le premier degré,
02:57le second degré, à la hauteur de ce qui est nécessaire.
02:59C'est-à-dire, par exemple, dans les mesures qui sont annoncées,
03:01je reviens toujours sur les moyens, parce que pour nous, c'est tellement essentiel.
03:03Dans le premier degré, on avait créé des dédoublements
03:05pour faciliter dans les REP, par exemple, des petits groupes.
03:09Eh bien là, on va perdre 3 000 postes dans le premier degré également.
03:12Donc nous, on s'attend à ce que ça se répercute ensuite sur le second degré à son tour.
03:15Et ensuite, on va nous dire, les élèves n'ont pas réussi.
03:18Si on n'investit pas, il ne faut pas s'étonner que ça ne marche pas.
03:20Les REP, les réseaux d'éducation prioritaire.
03:23Je vous propose, Florian Stoker, d'écouter Madeleine Stuny-Zerouaz.
03:27On lui a demandé son avis, justement, sur cette réforme du brevet.
03:30Écoutez.
03:31C'est archaïque, le BEPC.
03:33Effectivement, c'est un contrôle continu.
03:34Il faut vérifier que les jeunes ont le niveau tout au long de l'année.
03:38C'est pas lors d'un espèce de barrage, où tout d'un coup, on dit
03:41« Ah ben, t'as pas le niveau pour passer, tu passes pas. »
03:43Il faut s'en préoccuper quand il commence à avoir des difficultés.
03:46C'est pas à la dernière seconde, là, quand ils vont tout d'un coup.
03:49Je dis « Ah mince, j'ai pas le niveau. »
03:51Je pense que les enseignants s'en sont préoccupés avant et l'ont vu avant.
03:55Enfin, j'espère.
03:56Voilà l'avis de Madeleine, qui juge que le brevet est archaïque,
04:00que c'est une barrière qui n'a pas de sens.
04:02Selon elle, dans ce cas-là, Florian Stoker,
04:03est-ce qu'il faut le garder, ce brevet des collèges ?
04:07Je vous avoue qu'on ne s'est pas forcément posé la question
04:09au niveau de mon syndicat, dans le sens que ce soit un outil de contrôle
04:13ou que ce soit un premier réchauffement pour passer un examen.
04:16Aujourd'hui, c'est vrai que c'est 60%, si je dis pas de bêtises,
04:18de contrôle continu.
04:19Alors, moi, je suis prof au lycée, donc je vous avoue,
04:20je n'ai pas vérifié le pourcentage exact,
04:21parce qu'ils avaient prévu de le changer.
04:23Mais dans l'idée qu'il y ait plus de contrôle continu,
04:26nous, ce qui compte, c'est que ce soit plus pour entraîner la réussite.
04:29Souvent, si on donne les moyens pour que tout le monde réussisse, pourquoi pas ?
04:32Ensuite, s'il y a un moment, l'institution juge que ce n'est pas utile.
04:35Voilà, j'en laisse la question.
04:37Je vous avoue que nous, on se bat plutôt sur la question des moyens,
04:39parce qu'elle est tellement vitale aujourd'hui que c'est la grosse priorité.
04:42On va y venir dans un instant.
04:43D'abord, un petit détour au standard de France Bleu.
04:45Oui, parce que vous pouvez réagir, bien sûr.
04:48Florence Stoker nous disait, est-ce qu'obliger le brevet,
04:50ce n'est pas aussi augmenter les inégalités entre élèves ?
04:53On vous pose cette question.
04:54Est-ce que c'est une bonne idée d'avoir l'obligation du brevet pour aller en seconde ?
04:57Maria Agnès nous appelle de Biol. Bonjour, Maria Agnès.
05:00Bonjour.
05:02Alors, Maria Agnès, vous, vous avez pensé justement à ceux qui vont avoir des soucis.
05:05Voilà, je me dis, pour les séries ordinaires, il n'y a pas de problème.
05:12Il le faut, puisqu'après, il se passe un bac.
05:15Mais ceux qui vont choisir une branche technique,
05:20même s'ils ne réussissent pas dans la filière générale,
05:24il y en a beaucoup qui réussissent après dans le technique.
05:28Donc, s'ils n'arrivent pas à passer ce brevet,
05:32ils vont redoubler et après, ils vont encore redoubler.
05:36Qu'est-ce qu'ils vont faire ?
05:37La ministre de l'Éducation, elle dit que pour ceux qui n'auraient pas le brevet,
05:41il y a deux options.
05:42Soit ils vont vers une voie plus professionnelle, comme une année de CAP,
05:45soit ils entrent dans une prépa seconde pour réussir un lycée en quatre ans.
05:51Voilà sa vision, en tout cas, de la fin du collège et du début du lycée.
05:58Peut-être qu'il y en a beaucoup qui vont abandonner en quatrième
06:02parce qu'ils ont peur du brevet.
06:04Vous êtes d'accord sur le fait que ça risque de mettre pas mal de pression ?
06:09Oui, oui.
06:10Pour ceux qui ont des difficultés, je trouve que c'est dommage.
06:15Alors, on va poser la question effectivement à notre invité.
06:17Merci, Marie-Agnès, de nous avoir appelé ce matin de Biol.
06:20Florian Stoker, secrétaire départemental du SNES-FSU,
06:27principal syndicat de professeurs de collège et de lycée.
06:30L'avis de Marie-Agnès sur la pression que ressentent les élèves,
06:34est-ce que vous le vivez aussi ?
06:36Oui, c'est effectivement les retours qu'on a des professeurs de collège.
06:39Alors, ils ont une double pression aujourd'hui,
06:40c'est-à-dire qu'il y a une première stigmatisation avec les fameux groupes
06:44de niveau ou de besoin, alors besoin exprimé par le ministère,
06:47mais pas par les enseignants.
06:49On a beaucoup d'élèves qui expriment la peur d'être discriminés,
06:52désignés, mis dans le mauvais groupe.
06:54Donc, c'est déjà une première peur avec laquelle ils doivent déjà faire
06:56dès la sixième, et on sait, nous, quand on fait un peu de sciences
07:00de l'éducation, qu'il n'y a rien de pire que, justement,
07:02le fardeau, on va dire, d'être désigné, de se sentir parmi les meilleurs
07:06ou les mauvais. Par exemple, une petite expérience intéressante,
07:08c'est que quand vous prenez une classe, par exemple, en prépa,
07:09vous prenez tous les meilleurs, c'était les meilleurs de chaque lycée,
07:12vous les mettez dans la même prépa, il y a toujours des bons, des mauvais,
07:14parce qu'en fait, chacun se juge par rapport à l'autre.
07:16Donc, nous, on passe notre temps, en gros, à lutter contre ces préjugés.
07:18Donc, il y a déjà cette première pression, et il y a la deuxième pression
07:21qui est celle, effectivement, de l'examen qui pourrait arriver.
07:23Et les gamins sont lucides, c'est-à-dire qu'ils voient bien
07:26que leur avenir professionnel va peut-être se jouer derrière ça.
07:29Alors, certains n'en ont cure, mais il y en a une grande partie
07:31qui se posent la question. Et voilà, nous, on se dit,
07:34nos élèves qui doivent vivre peut-être leurs plus belles années
07:36et apprendre, en fait, sont déjà à vivre avec la peur aux ventes
07:38du marché du travail et tout ça. Voilà, ce n'est pas la meilleure entrée
07:42dans la vie qu'on peut leur souhaiter.
07:43Et alors, on va parler des moyens. Florian Stoker,
07:46vous avez mis cette question sur la table, effectivement.
07:48Il y a des problèmes d'effectifs. On a vu en Isère,
07:50notamment avant les vacances de la Toussaint, des enfants
07:53qui n'avaient pas d'enseignant depuis la rentrée,
07:55notamment en français, je pense à Accraul.
07:58Cette situation-là, est-ce que depuis le retour en classe
08:00après les vacances, est-ce qu'il y a du mieux ?
08:03Alors, il y a forcément un tout petit peu de mieux,
08:05dans le sens que le rectorat fait avec les moyens qu'on lui donne.
08:09Donc, il essaye de recruter parmi les volontaires
08:11qui veulent bien faire notre métier.
08:13Mais il faut bien sûr souligner que pourquoi il manque du monde,
08:15c'est d'abord parce que les conditions d'enseignement
08:17sont de plus en plus dégradées et que les personnels recrutés
08:20ont droit à très peu de formation.
08:21Donc, il faut tenir, déjà briser, on va dire,
08:23les illusions qu'on peut avoir sur le métier,
08:25des fois, quand on arrive dedans.
08:26Et puis, une fois qu'on décide de s'y accrocher,
08:28il faut, un, y arriver, parce que ce n'est pas toujours facile.
08:31Surtout que les endroits où on peut avoir des postes vacants,
08:32ce n'est pas forcément les conditions les plus faciles pour exercer.
08:37Et il y a également la question,
08:39parce que du coup, ça, c'est la question des postes vacants
08:41parmi les postes ouverts.
08:42Mais ensuite, il y a aussi la question du nombre de postes
08:44qui devraient être ouverts pour que ça fonctionne correctement.
08:47Voilà.
08:47Et ça, nous, on a l'air vraiment là-dessus,
08:49parce que du coup, on se réjouissait en ISER
08:50d'avoir des classes en moyenne à 25 élèves, 5,
08:54ce qui fait des classes qui vont de 22,
08:56alors souvent en REP,
08:57à en moyenne 30 élèves pour les classes les plus chargées.
08:59Et on voit que chaque année,
09:01on a de plus en plus de classes de 30 élèves
09:02et de moins en moins de classes à petit effectif.
09:04Dans l'OCDE, la moyenne, c'est 21 élèves.
09:06Donc, nous, on a l'air, à nouveau,
09:07c'est de nouveau, là, sur les économies budgétaires
09:09qui doivent être faites,
09:10l'éducation nationale qui va payer les pots,
09:12encore une fois, un service public.
09:14Alors, au lieu de faire, par exemple,
09:15alors nous, on a des hypothèses,
09:17pour avoir les sous pour financer tous ces profs qu'il nous faudrait,
09:20par exemple, je ne sais pas,
09:21on augmentait les impôts sur les plus fortunés,
09:23parce que là, j'ai vu que le gouvernement refusait
09:25de s'attaquer à ceux qui gagnent plus de 500 000 euros par an.
09:28Je pense qu'on est quand même à un niveau d'indécence
09:30sur la contribution de l'école publique,
09:33c'est-à-dire qui sert à tous ceux de notre pays.
09:36Ça pose des vraies questions de fond
09:37sur les choix de société qu'on fait.
09:39Est-ce qu'on a une école publique ou une école ?
09:41Pour quelques-uns.
09:42Plus de moyens, donc, vous réclamez pour l'école publique.
09:45Florian Stocker, secrétaire départemental du SNES-FSU,
09:48principal syndicat de professeurs de collèges et de lycées.
09:50Merci d'avoir été notre invité ce matin,
09:52monsieur Stocker, belle journée.