Amine Elbahi, juriste et auteur, revient sur les propos de Bruno Retailleau suite à la fusillade à Poitiers. «La police ne peut pas régler tous les problèmes sociaux dans les quartiers sociaux», selon lui.
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00:00Oui, bien sûr, c'est dramatique, vous l'avez parfaitement rappelé, Anthony.
00:04Il faut également déplorer le fait que ce soit les mineurs qui sont les plus exposés face à ces guerres entre bandes rivales.
00:13Pourquoi les mineurs ? Parce que les mineurs sont exploités,
00:16elles sont instrumentalisées par ces filières de narcotrafic,
00:19puisque ces filières de narcotrafic savent pertinemment que les mineurs seront impunis par la justice.
00:25Ils ont droit à l'excuse de minorité.
00:28C'est l'angle mort de la justice, c'est la justice des mineurs.
00:31Oui, c'est l'angle mort de la justice, d'autant plus que les parents ne sont pas assez responsabilisés,
00:37d'autant plus que vous constatez par-delà même une démission,
00:41une démission de l'État à l'intérieur même de ses quartiers.
00:44J'ai entendu les mots de Bruno Rotailleau.
00:46Bien sûr que ce sont des mots réconfortants pour les électeurs, mais ce n'est pas suffisant.
00:50Le ministère de l'Intérieur ne pourra pas à lui seul régler le problème du narcotrafic.
00:55Il faudra également un engagement beaucoup plus ferme de l'État dans les quartiers,
01:00en mobilisant l'appareil administratif de l'État, les impôts, l'URSAF, la Sécurité sociale, la CAF,
01:06pour aller valoriser, chercher où vient l'argent et intégrer cet argent sale
01:11dans le train de vie de ces familles de dealers, de ces familles de délinquants.
01:15Aujourd'hui, vous avez des milliers d'euros, des milliers d'euros,
01:19qui dorment entre les murs, plâtrés, de l'espèce plâtrée,
01:23qui sera réinjectée demain dans l'économie réelle.
01:26Vous avez également, et ça c'est extrêmement important,
01:29vous avez également des services de police qui ne peuvent plus aller dans les quartiers
01:34sans intervention préalable de drones.
01:37Par exemple, à Rennes, la police nationale ne peut plus intervenir dans les quartiers
01:41pour disséminer, démanteler les trafics de drogue sans faire passer au préalable des drones
01:46pour détecter où se trouvent les dealers.
01:48Tout cela nécessite en fait une action coordonnée de l'État.
01:52État, collectivité, bailleurs sociaux, c'est extrêmement important.
01:57Le dernier point, c'est qu'aujourd'hui, vous avez également des municipalités
02:01qui ne jouent pas le jeu.
02:02Certes, il y a le débat sur la police municipale armée, mais ce n'est pas suffisant.
02:05L'autre débat sur le narcotrafic, c'est le blanchiment de l'argent sale.
02:09Regardez ce qu'il se passe à Anvers.
02:10Regardez nos voisins belges.
02:11Nos voisins belges sont en train de démanteler à côté du port d'Anvers
02:14tous ces petits commerces locaux, les night shops, vous savez, les supermarkets de nuit.
02:18Moi, je ne connais personne qui se lève à 3h du matin pour aller acheter des yaourts.
02:21Ces night shops, on sait pourquoi ils existent dans les quartiers.
02:23C'est d'abord et avant tout pour blanchir l'argent sale.
02:25Il faut une action coordonnée de l'État.
02:27C'est très intéressant.
02:28L'exemple belge est très éclairant.
02:30Mais oui, c'est extrêmement important parce que lutter contre le blanchiment du narcotrafic,
02:35lutter contre le blanchiment de l'argent sale, nécessite une action de l'État
02:39qui va au-delà même du bleu partout.
02:41La police ne peut pas tout.
02:42La police ne peut pas régler tous les problèmes sociaux dans les quartiers populaires.
02:45Il faut envoyer également le ministère de l'Économie et des Finances
02:48et envoyer les ministères sociaux.