Une taxe sur les produits transformés trop sucrés comme les bonbons et les sodas, est envisagée dans le projet de financement de la sécurité sociale, dont l'examen a commencé lundi.
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00:00Voilà donc un potentiel nouvel impôt qui pourrait être voté par l'Assemblée nationale
00:04dans les prochaines heures, dans le cadre de l'examen sur le budget de la Sécurité
00:08sociale.
00:09Une taxe sur les produits transformés, trop sucrés, les bonbons, les sodas par exemple,
00:14des députés la proposent par amendement, la Ministre de la Santé y est favorable.
00:18Objectif, afficher la lutte contre les maladies chroniques, ça rapporterait aussi plusieurs
00:24centaines de millions d'euros par an à l'État qui, on le sait, en a bien besoin.
00:28Bonjour Dr Régina Lallouche, vous êtes médecin chercheur spécialisé dans la prévention
00:34du diabète notamment, quand on lutte comme vous contre le surpoids et l'obésité, on
00:38applaudit une taxe comme celle-là ?
00:40Alors on applaudit, on applaudit, moi j'ai le souvenir de la contribution sur les boissons
00:44sucrées qui a été votée je crois en 2012, revue en 2018 pour les quantités de sucre
00:49dans les sodas.
00:50En fait le problème c'est d'informer les gens, de les sensibiliser.
00:54Le problème du sucre c'est que c'est un ingrédient qui est considéré pour beaucoup
00:58comme un ingrédient naturel.
00:59En fait il n'existe pas un état naturel dans la nature.
01:02On l'a rajouté, c'est un produit industriel qui a été créé au 19ème siècle et en
01:06fait on le rajoute à beaucoup de préparations qui sont sucrées bien sûr mais aussi salées.
01:11Je prends l'exemple d'un bol de cornichons, dans un bocal de cornichons, l'eau est sucrée
01:17pour couvrir les acidités parce que le sucre c'est un bon conservateur, c'est un exhausteur
01:21de goût donc on en met partout.
01:22Et donc vous ne croyez pas à l'efficacité d'une taxe d'augmenter les prix pour dissuader
01:26le public d'acheter ?
01:27Alors si on parle technique des taxes, le problème c'est le fléchage de la taxe.
01:32C'est-à-dire que l'argent que rapportera cette taxe, il faut être sûr qu'elle va
01:36être fléchée vers des opérations de prévention, de sensibilisation et d'information des personnes.
01:41Parce que sinon ça va rentrer dans le pot commun et il faudra se battre encore pour
01:45qu'on ait cette prévention en place.
01:47Mais si je comprends bien, vous n'êtes pas contre le principe ?
01:50Non, je ne suis pas contre.
01:51Je dis que c'est un des éléments mais ce n'est pas l'alpha et l'oméga de la prévention
01:56à la fois de l'obésité, du surpoids et du diabète de mettre une taxe parce que qu'est-ce
02:00qui va se passer ? Les industriels eux vont être confrontés à cette taxe, pas à une
02:06norme.
02:07Je reviendrai là-dessus, c'est un peu différent.
02:08On va en parler.
02:09Et donc qu'est-ce qui va se passer ? Ils vont essayer de contourner.
02:12Peut-être par exemple d'ajouter des édulcorants qui ne sont pas obligatoirement meilleurs
02:19que le sucre, que le saccharose.
02:21Parce que j'allais vous demander, est-ce que l'augmentation des prix justement ne
02:24peut pas inciter les industriels à changer la composition des produits ? Vous nous dites
02:30que ça ne veut pas dire qu'ils seront meilleurs en fait.
02:32Voilà, c'est-à-dire qu'il faudrait que les recettes, les nouvelles recettes, parce
02:36qu'on ne change pas l'industrie, les industriels ils ont des usines, ils ont des employés,
02:39on ne va pas changer les produits du jour au lendemain pour les français et puis pour
02:43l'export de la même façon.
02:44Donc en fait ce qui va se passer c'est qu'il faut qu'il y ait peut-être que cette taxe
02:47est un début montrant une volonté politique de s'attaquer à ce problème, mais la réalité
02:53c'est qu'il va falloir accompagner les industriels, accompagner aussi les utilisateurs
02:56et les consommateurs.
02:57Donc en fait c'est le début de l'histoire mais ça ne peut pas être toute l'histoire.
03:01Ce que répondent aussi ceux qui sont opposés à cette taxe c'est qu'elle va toucher,
03:05on le sait, les familles les plus modestes qui… Il y a vraiment une histoire sociale
03:12dans l'achat du sucre ?
03:13Toujours.
03:14En fait vous savez aujourd'hui on sait que moins on a d'argent, plus on a tendance
03:19à être en surpoids ou obèses.
03:21Ça veut dire qu'on achète des calories vides, c'est-à-dire des calories qui remplissent
03:26mais qui ne vous donnent pas les nutriments nécessaires pour avoir une bonne santé.
03:30Donc en fait ça va mettre les personnes les plus défavorisées devant un dilemme et surtout
03:36avec un basculement de leur pouvoir d'achat vers des produits plus élaborés et peut-être
03:43plus naturels.
03:44Je l'espère en tout cas.
03:45Mais encore faut-il que les produits soient abordables.
03:47Vous avez commencé à en parler un petit peu mais on parle ici de la teneur en sucre
03:51des produits qui sont déjà très sucrés.
03:53Je l'ai dit on parle des sodas, des bonbons, des gâteaux.
03:56Vous en avez un peu parlé, les plats préparés par exemple, certaines conserves de légumes
04:01aussi.
04:02Il y a du sucre partout.
04:03C'est ça qu'il faut encadrer.
04:04Oui, tout à fait.
04:05Parce qu'en fait on met le sucre pour couvrir les acidités.
04:07L'acidité, si le produit de base n'est pas très bon, c'est très facile, vous mettez
04:11du sucre et le goût passe.
04:13Parce qu'on a une relation avec le goût sucré qui est une relation presque génétique.
04:17Vous savez, le lait maternel, il est légèrement sucré.
04:21Si un enfant tête le sein de sa maman et qu'il est légèrement sucré, il est bon
04:27pour la consommation.
04:28S'il est acide, c'est qu'il y a une infection.
04:29On est génétiquement programmé pour le sucre.
04:32Et donc le problème c'est que jusqu'au 19e siècle, il y avait très peu de sucre
04:36dans le commerce.
04:37C'était des cadeaux.
04:40C'était une orange à Noël, je rappelle, au 18e siècle.
04:42Aujourd'hui, on est dans un piège, c'est que le sucre ne coûte pas cher et que c'est
04:48un excellent exhausteur de goût.
04:49On en met partout et donc les gens ne se sont pas préparés à ça.
04:53Et puis il y a les complices du sucre.
04:54C'est-à-dire ?
04:55Les complices du sucre, c'est la sédentarité.
04:57C'est-à-dire qu'aujourd'hui, l'urbanisation fait que nous vivons quasiment, pratiquement,
05:03pas tous, mais dans des villes, que dans les villes, faire de l'exercice, c'est extrêmement
05:06compliqué.
05:07On fait moins ses courses, on se fait livrer, on a des transports en commun, on a des transports
05:11individuels.
05:12Et donc, en fait, cette sédentarité, couplée à un sucre qui est de l'énergie, au fond,
05:16qui est apportée, fait qu'on a des complications comme le surpoids, l'obésité et le début
05:21du diabète.
05:22Il faut voir qu'il y a une épidémie de diabète actuellement dans le monde.
05:24Moins de sucre sans bouger, ça ne sert à rien, c'est ça que vous dites.
05:27Voilà, exactement.
05:28Moins de sucre sans bouger.
05:29Et n'oubliez pas que les enfants, parce qu'on a toujours les enfants en ligne de mire, normalement,
05:33un enfant est en pleine croissance, il brûle tout.
05:35Mais s'il ne bouge pas, il ne brûlera pas et donc il grossira.