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00:00On accueille notre invité, c'est vous, Reed Brody, bonjour à vous.
00:03Vous êtes procureur spécialisé dans les crimes de guerre, ancien avocat.
00:06Vous êtes avocat américain, ancien substitut du procureur de New York, ancien conseiller juridique à Human Rights Watch.
00:13Merci d'être sur le plateau de France 24.
00:15Avant de vous faire réagir à la situation à Gaza, une première question autour des assassinats ciblés menés par Israël.
00:23Alors, on précise que Yahya Sinouar n'a pas été directement ciblé.
00:26Sa mort est presque due au hasard.
00:28En revanche, il y a eu Hassan Nassrallah avant lui, Ismail Haniyeh, Salah Haruri, éliminés par l'armée israélienne.
00:34Que dit le droit international en matière d'assassinats ciblés, Reed Brody ?
00:38Alors, le droit international en matière d'assassinats, enfin, il n'y a pas de cas de figure d'assassinats ciblés.
00:46Le droit international, d'ailleurs, d'abord, c'est une violation.
00:51Là, je ne parle pas même du droit pénal, c'est une violation du territoire, dans le cas de Nassrallah, de Haniyeh, de la souveraineté d'Iran.
01:05Et c'est surtout ça qui est en jeu.
01:11Le droit international permet, évidemment, d'attaquer des combattants.
01:19Et on peut considérer probablement que Nassrallah était combattant.
01:27Et donc, le fait d'attaquer à une personne qui n'est pas civile, enfin, le droit de la guerre fait la distinction entre civil et militaire.
01:43Le plus important des conventions de Genève et les droits de la guerre, c'est de faire cette distinction entre des personnes et des objets civils et des personnes et des objets qui prennent part au combat.
01:57Et donc, dans la mesure où quelqu'un participe au combat ou est dans la direction militaire, cette personne peut être un cible légitime.
02:08Donc, la justice le permet, d'un point de vue de la justice, c'est permis. Est-ce que ça ne risque pas de se banaliser à l'avenir ?
02:15Évidemment. Là, je ne parle pas en tant que politique. Je ne dis pas que c'était une bonne chose ou une mauvaise chose.
02:23Non, bien sûr, c'est ces volumières de spécialistes du droit dont on a besoin absolument.
02:26Il est évident que des personnes comme Hanéa en Iran, enfin, le leader de Hamas à Qatar, mais qui était en Iran, étaient clés dans les négociations.
02:40Mais est-ce que ça le rend justifié pénalement ? Ça dépend. Ça dépend s'il peut être considéré comme une personne ayant pris part au combat.
02:55Ou les avoir ordonnés.
02:57Pour avoir ordonné des crimes. Par exemple, on prête à Sinoir les attaques du 7 octobre.
03:08Et donc, il peut être considéré comme un objet militaire, une personne ayant pris part au combat.
03:15Alors, Hiryasi Noir, au même titre qu'Ismail Haniyeh, était visé par une réquisition du procureur de la CPI pour l'émission d'un mandat d'arrêt, au même titre que Benyamin Netanyahou et son ministre de la Défense.
03:26Ismail Haniyeh a été tué. Hiryasi Noir a été tué. Qu'en est-il maintenant en ce qui concerne Benyamin Netanyahou et son ministre de la Défense ?
03:33Et ces mandats n'ont pas été émis à notre connaissance.
03:36Voilà. Et ça, c'est très important. Vous savez qu'en mai, quand le procureur a demandé ces mandats, c'était vraiment, dans la justice internationale, un moment historique.
03:49Parce que jamais un procureur d'un tribunal international n'avait demandé des mandats contre un allié de l'Occident.
03:59On avait toujours, et moi le premier, dit qu'il y avait un double standard dans la justice internationale, que depuis la Deuxième Guerre mondiale,
04:09les instruments de la justice internationale n'étaient bons que contre des ennemis vaincus, comme à Nuremberg ou à Tokyo,
04:23contre des impuissants comme les rebelles ou les dictateurs africains, ou comme des adversaires de l'Occident, comme Vladimir Poutine ou Slobodan Milosevic.
04:34Alors, tout le monde, d'ailleurs, on ne pensait jamais voir le jour où un procureur de la Cour pénale internationale allait émettre un mandat contre un ami des États-Unis.
04:47Il a valu d'être menacé aussi.
04:49Et voilà. Il faut aussi préciser que pendant neuf ans, d'après les révélations du Guardian et de la revue israélienne 972,
05:01pendant neuf ans, les trois procureurs de la Cour pénale internationale ont subi des pressions, je dirais, mafieuses, d'Israël.
05:14Nous, disons aux procureurs des messages que pour votre famille, ce serait mieux en essayant de...
05:25De les pousser à renoncer. Est-ce que cette pression, elle est aussi exercée sur les trois juges qui doivent émettre ces mandats d'arrêt?
05:32Voilà, c'est la question. C'est la question. Donc, le procureur a demandé, finalement, en mai de cette année, des mandats.
05:40C'est assez intéressant. Déjà, le fait qu'il ait annoncé publiquement.
05:44Je pense qu'il a annoncé publiquement pour que les gens arrêtent de mettre la pression sur lui.
05:50Mais justement, maintenant, les pressions sont sur les trois juges.
05:54Et on est en octobre. Ça fait déjà cinq mois.
05:58Normalement, évidemment, je ne suis pas dans l'intimité ni des juges, ni du...
06:05Le mandat, enfin, la requête du mandat n'est pas publique. On ne sait pas ce qui est derrière.
06:11Mais on peut imaginer qu'il n'ait pas pris cette décision à la légère et qu'il a de quoi.
06:18Donc, on peut imaginer, d'abord, qu'il y a probablement beaucoup de pression.
06:23Et c'est un juge français, une juge béninoise et une juge romaine.
06:28En plus, il y a beaucoup de manœuvres dilatoires qui ont été intentées par des États, légitimement.
06:37Et alors, pardon, j'avance un peu parce qu'on va être pris par le temps.
06:40Et ça, ça dit quoi alors du rapport de l'État d'Israël au droit international ?
06:44Écoutez, ça dit qu'Israël est un cas à part.
06:49C'est-à-dire ?
06:50C'est-à-dire que lorsqu'on touche à Israël, lorsqu'on touche à un allié aussi intime des États-Unis, il faut faire attention.
07:01Ça veut dire qu'il y a un effondrement du droit international ? Il s'applique à certains États, pas à d'autres ?
07:06Écoutez, il y a mon ami Raji Sarani, le grand avocat gazoïde des droits humains,
07:11qui dit que Gaza risque d'être la cimetière du droit international.
07:15Ça dépend. On va voir les juges.
07:17Le problème, c'est que des institutions ont répondu.
07:21Il n'y a pas seulement la Cour pénale internationale.
07:24Il y a aussi la Cour internationale de justice qui a déclaré que l'occupation d'Israël, des territoires, est illégale, qu'il faut mettre fin,
07:33que les colonies sont illégales, qu'il faut les mettre fin.
07:38Mais maintenant, c'est aux États d'appliquer ces décisions historiques.
07:42Est-ce qu'ils se rendent ? Est-ce qu'ils peuvent être considérés comme partie prenante à ce conflit ?
07:47Dans la mesure où on voit les images de Gaza, l'enclave est détruite, la population, et c'est documenté, est privée d'eau, de nourriture, de médicaments.
07:55Il y a des destructions méthodiques de certaines infrastructures, d'hôpitaux.
07:59Comment est-ce que vous qualifiez ce qui s'y passe ?
08:01Et pourquoi est-ce que les États ne prennent pas de mesures pour arrêter ça ?
08:06C'est la question la plus importante.
08:08C'est clair que ce sont des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité.
08:13La Cour internationale de justice va décider s'il s'agit de génocide.
08:17Mais derrière, il y a les autres États qui le soutiennent.
08:21Donc les États-Unis, par exemple, ces bombes-là qui tombent sur les hôpitaux à Gaza, c'est des bombes américaines.
08:28Si quelqu'un commet des crimes et vient chez vous pour alimenter des armements,
08:34vous êtes complice de ces crimes, dans un sens pénal.
08:38Soit votre État est complice, soit vos décideurs sont complices pénalement.
08:42Vous parlez de crimes. Crimes de guerre, il y a eu un débat autour des mots employés.
08:45Crimes, crimes de guerre, génocide, nettoyage ethnique, en un mot.
08:49Comment vous qualifiez la situation dans l'enclave palestinienne et ce qui s'est passé le 7 octobre ?
08:53D'un mot, s'il vous plaît.
08:54Des deux côtés, ce sont des crimes contre l'humanité.
08:58Merci beaucoup, Reid Brody, parce que nous sommes pris par le temps.
09:01Merci beaucoup d'être passé par le plateau de France 24.
09:03C'est moi.