Ophélie Roque : «Il y a une espèce de grande solitude, de trahison. [...] On nous demande de l'abnégation, mais les ministres ne nous la montrent pas forcément en exemple.»
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00:00Je pense qu'on est tellement lassés, je veux dire en moins de deux ans on a quand même, c'est notre cinquième ministre depuis 2022,
00:08je pense qu'on se sent de plus en plus finalement,
00:12on se dit mais à quoi joue-t-il en fait, à quoi joue-t-il ? C'est-à-dire qu'on a vraiment le sentiment qu'on tente
00:19d'appliquer des réformes, qu'on souvent ne nous
00:22demande rien d'ailleurs, elles sont là, et on se retrouve du jour au lendemain avec
00:26« ah non finalement, ça ce que vous avez fait, non non non, c'était pas une bonne idée,
00:30vous avez essayé de jouer le jeu mais finalement on va tout détricoter ». Donc je pense qu'il y a une espèce de grande solitude, il y a
00:35sans doute pour certains
00:37ministres, une espèce de, je pense pour beaucoup beaucoup beaucoup de collègues, c'était la première fois que je le ressentais,
00:41une espèce de trahison, c'est-à-dire de se dire « il y en a qui viennent,
00:44ils prennent leur poste, ils sont contents, et après ils repartent quand il y a un poste qui est un peu plus gros ».
00:49Mais on peut pas en fait tenir ce discours-là, et ensuite
00:53nous toujours nous imposer, en fait, que ce soit nous qui portons la charge.
00:58C'est vrai qu'il y en a eu quand même beaucoup beaucoup, avec à chaque fois en plus, si vous voulez,
01:02des ministères qui ne se suivent pas forcément. C'est-à-dire qu'on est passé de Jean-Michel Blanquer, qui était quand même
01:08relativement, alors lui c'était quand même celui qui a duré le plus longtemps avec quasiment cinq ans, donc lui au moins on savait à
01:13peu près où on allait, on était d'accord ou pas avec lui selon les
01:17enseignants, mais au moins on savait un petit peu où se diriger.
01:20Ensuite on a eu Papendia, qui nous a fait un petit peu peur en tout cas, avec cette espèce
01:26d'approche un petit peu wokies de l'école, où on s'est dit « oh mon dieu, à quelle sauce on va être mangé ? ».
01:30Et puis finalement on a eu le Tony Truant, mais tout de même des missionnaires,
01:34Gabriel Attal, qui a duré six mois, qui nous a fait plein de promesses, et lui je pense que beaucoup de professeurs lui en veulent encore,
01:41de dire « mais vous êtes venus, et puis finalement on vous a proposé mieux ailleurs, vous partez ». Mais nous c'est à chaque fois qu'il y avait,
01:47on nous demande de l'abnégation, mais l'abnégation, les ministres ne nous la montrent pas forcément
01:53en exemple. Ensuite on a eu une comète, quelque chose d'assez proche finalement d'un cycle lunaire, on a eu
02:00Amélie Oudéa-Castera, qui est restée 28 jours, donc le temps de rotation, enfin bon bref,
02:04c'était quand même assez étonnant, on n'a pas eu le temps de trop la tester. Ensuite on a eu
02:10Nicole Belloubet, qui,
02:11bon, on ne savait pas trop à quoi s'attendre, mais on s'est dit « peut-être qu'il va y avoir quelque chose de l'ordre d'un petit peu d'un
02:17dialogue renouvelé ou d'une remise un petit peu en marche », et puis bon, après on a eu la reine des helpers,
02:23Anne Jeuneté, qui, bon, pour l'instant, ça fait un seul mois qu'elle est là,
02:29on n'a pas le sentiment, si vous voulez, pour l'instant, de voir exactement
02:34ses marques.
02:36Donc, alors, pour répondre à votre question, revenir, je saute un peu du coq à l'âne, mais
02:42on est à la fois très seuls et en même temps, du coup,
02:45j'ai envie de vous dire, à force d'avoir des injonctions contradictoires, ça nous offre une liberté énorme,
02:49puisqu'on nous dit une chose et une autre. C'est à nous, en fait, de choisir.
02:54Donc c'est peut-être, finalement, l'éducation nationale, à force de nous dire des messages contradictoires, elle laisse les professeurs seuls
03:01à eux-mêmes.
03:06Merci.