Retour de terrain : le Liban sous les bombardements, 1,2 millions de déplacés

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Transcription
00:00Avec moi sur ce plateau, Karim Yahya. Oui, bonjour Karim.
00:03Bonjour.
00:03Reporter ici à la rédaction de France 24. Vous étiez en mission au Liban, vous en rentrez tout juste.
00:08Vous pourriez utiliser deux mots pour qualifier le Bérou de ces 15 derniers jours, le chaos et la paranoïa, c'est ce que vous avez constaté.
00:15C'est vrai, c'est deux mots qui résument assez bien la situation.
00:18On est arrivé au moment de cette affaire des Bippers et de ces Talkie Walkies qui ont coûté la vie à des Libanais,
00:25notamment des membres du Hezbollah, puisque c'était eux qui étaient essentiellement visés.
00:29Et donc on est dans une logique. C'est évidemment une guerre classique avec des bombardements,
00:34même si les deux belligérants n'ont strictement rien à voir.
00:38C'est aussi une guerre technologique, mais c'est aussi une guerre psychologique pour les Libanais,
00:42parce que ça a eu un impact, ce premier épisode qui allait ensuite être suivi de frappes aériennes très intenses.
00:50Ça a eu une conséquence psychologique très importante sur les Libanais qui se sont sentis complètement vulnérables.
00:57On nous racontait à ce moment-là, les gens nous racontaient qu'ils étaient inquiets d'être dans l'ascenseur avec une personne qui avait un téléphone.
01:04Tout le monde regardait s'il y avait encore des Bippers en circulation.
01:07Et cette guerre psychologique, évidemment, elle est menée à dessein pour déstabiliser la population et pour déstabiliser le Hezbollah.
01:14Symboliquement, au moment où Hassan Nasrallah parle, au moment de cette affaire des Bippers et des Talkie Walkies,
01:21il y a deux avions de chasse israéliens qui franchissent le mur du son au-dessus de Beyrouth.
01:27Donc c'est vraiment révélateur de cette volonté d'imprimer une atmosphère d'inquiétude et de peur pour la population libanaise.
01:36Et puis évidemment, ces frappes qui vont commencer à toucher le sud, mais aussi la banlieue sud.
01:41Et puis tout récemment, on a vu qu'elles avaient touché en plein cœur de Beyrouth, avec ce sentiment que la menace est partout, elle peut venir de partout.
01:48Et même les réfugiés qui ont fui la banlieue sud découvrent qu'à Beyrouth, ils ne sont pas forcément à l'abri.
01:54Et c'est ce sentiment de peur généralisé qui gagne énormément de terrain.
02:01Et même dans les quartiers qui ont été jusqu'à présent épargnés, on sent ça suinter dans les esprits, dans les conversations.
02:09Tout le monde ne parle que de ça et tout le monde a peur.
02:12Et clairement, c'était sans doute un des objectifs aussi côté israélien.
02:16Et vous l'avez directement vécu en travaillant avec le reste de l'équipe, avec James André et Achraf Abid,
02:21cette impression particulière d'être sous surveillance finalement, en permanence.
02:26C'est sûr, parce que du côté du Hezbollah, on commençait à tout observer, à tout regarder, à avoir le sentiment qu'il y avait des espions partout.
02:32Dernier épisode en date, deux journalistes de la télévision belge qui ont été pris à partie, pas par le Hezbollah, mais par les milices Amal, qui sont des milices chiites.
02:43Et nous, on a eu parfois affaire à des gens qui n'étaient pas des gens du Hezbollah, mais qui étaient là pour contrôler un territoire, nous empêcher parfois de sortir nos caméras.
02:51Ces deux journalistes ont été pris pour des espions.
02:54Lorsqu'on était sur place, il y avait évidemment cette inquiétude-là.
02:57On a même entendu dire des gens à propos de notre équipe, qui sont-ils ? Que viennent-ils faire dans ce quartier ?
03:03Et la particularité de nos équipes, c'est que vous travaillez en français, en anglais et en arabe.
03:08En français, en anglais et en arabe, et je peux vous dire que mon collègue Achraf Abid était écouté de très très près.
03:14Lorsque nous étions au funérail d'Ibrahim Akhil, qui a été tué justement juste à sa sortie d'hôpital parce qu'il avait été blessé par son bippeur,
03:23il a été tué lors d'une réunion sans doute organisée à la hâte, parce que le Hezbollah n'était plus en capacité de communiquer véritablement,
03:30parce qu'on l'a oublié, mais avant l'affaire des bippeurs, les téléphones portables avaient été noyautés.
03:36Eh bien, au moment de ces funérailles, on a bien senti qu'Achraf était écouté de très près.
03:41On a même vu quelqu'un venir nous voir pour nous expliquer qu'il fallait utiliser le terme de martyr.
03:45On lui a expliqué que ce n'était pas un terme qu'on utilisait et qu'on était dans une logique la plus factuelle possible.
03:51On a fini par obtenir gain de cause, mais ce n'était pas forcément évident.
03:55Et lorsqu'on s'est rendu dans le sud, c'était très difficile de tourner.
03:59On était accompagnés en permanence par le Hezbollah.
04:02On a tourné les images d'une frappe. On nous a emmenés sur les lieux d'une frappe.
04:06On ne nous a pas donné l'autorisation de faire d'interview. La seule personne qui nous a parlé,
04:10c'est une personne qui nous a expliqué que les Israéliens n'avaient aucune raison de frapper à cet endroit-là
04:15et que Netanyahou était un menteur.
04:19Il y a aussi le sort des déplacés, de ces populations contraintes de fuir les bombardements.
04:24On en compte un million à ce jour.
04:26C'est tout simplement énorme. Dans un pays qui est plus petit qu'un département français,
04:31on a un million sur cinq millions et demi d'habitants.
04:34Un million deux, dit-on maintenant, des gens qui ont fui le sud.
04:38Et puis il y a tous ceux qui n'avaient pas forcément la possibilité de le faire
04:41et qui se sont retrouvés notamment du côté de Tyre, où nous nous sommes rendus,
04:45mis à l'abri dans des écoles, en vivant dans des conditions extrêmement précaires, rudimentaires.
04:52Je vous propose d'écouter un père de famille qui a trouvé refuge dans cette école.
04:56C'est tout ce qui nous reste comme lait pour enfant.
05:00J'aimerais que mon fils n'ait pas faim.
05:02Sa mère, après tout ce qu'elle a vécu, ne donne plus de lait.
05:11Les familles étaient contraintes d'utiliser ce lait en poudre.
05:14S'il y en a, parce que l'allaitement est rendu complètement impossible,
05:17vu ces circonstances, le moment le plus marquant de cette mission pour vous
05:20est l'allaitement.
05:23Le moment le plus marquant de cette mission pour vous et le reste de l'équipe, c'est la mort de Nasrallah.
05:27C'est la mort d'Hassan Nasrallah.
05:29On était en train de remonter du sud et on voit un panache de fumée s'élever au-dessus de Beyrouth.
05:33On venait de rencontrer des gens dans cette école,
05:37et notamment des personnes qui avaient chevillé au corps le guide, le seyyed d'Hassan Nasrallah.
05:43Je ne sais pas si on a le temps d'écouter très rapidement une femme qui nous explique
05:47à quel point il était important pour elle.
05:49On se sacrifie pour le seyyed Nasrallah.
05:52Notre maître, que Dieu le protège.
05:54Nos enfants, nos familles, nos hommes,
05:56on est tous prêts à se sacrifier pour toi, seyyed Nasrallah.
05:59On est prêts à se sacrifier pour tes yeux, même pour tes chaussures.

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