Pascal Praud et vous - Sonia Mabrouk raconte son «parcours de la combattante» pour obtenir la nationalité française
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00:00Moi je suis un oubli, j'ai une obligation de payer mes impôts, si demain je ne les paye pas, je vous garantis qu'ils ne vont pas mettre 6 mois pour me retrouver et pour me les faire payer.
00:07Mais je voudrais réagir à ce que vous dites, je crois qu'on a tous partagé l'envie de hurler,
00:11quand on a d'abord appris évidemment le meurtre de Philippine et puis les circonstances et le profil du suspect,
00:16envie de hurler d'abord son émotion par rapport à la famille, envie de hurler sa colère par rapport aux failles,
00:23c'est un fossé de ce système vérolé.
00:26Est-ce que vous permettez que je vous raconte une anecdote personnelle parce que ça m'a renvoyé à un parcours
00:31et sans doute je pense que beaucoup de nos auditeurs qui ont été naturalisés, qui ont eu de la nationalité,
00:37qui sont là depuis un certain temps, peut-être qu'ils ont ressenti la même chose.
00:40Je me suis posé comme tous la même question, j'ai dit comment cet individu qui a été condamné pour viol
00:45et qui est sous le coup d'une OQTF a pu rester sur le sol français ?
00:49Alors vous parlez des failles et moi je me suis dit, je me suis rappelé mon parcours,
00:53j'ai été naturalisé il y a quinzaines d'années et je vous assure, ça a été un parcours du combattant et de la combattante en l'occurrence.
01:02J'étais à l'époque, je me souviens, inscrite en thèse de doctorat, c'était très compliqué d'avoir les places,
01:09elles étaient très chères pour les non-français, les non-européens et j'avais réussi, je me rappelais de l'émotion,
01:14de la fierté de ma mère et mon titre de séjour arrivait à expiration quinze jours après.
01:20Donc je vais à la préfecture de police comme tout le monde, je me réveille à 5h du matin pour un rendez-vous aux alentours de 10h30,
01:27c'est normal, il y avait des files d'attente de centaines de mètres et j'étais munie de tous mes papiers.
01:31Plus j'approchais, plus mon tour approchait, plus une angoisse m'a saisi, je me suis dit j'espère que j'ai tous mes papiers,
01:36je révérifie, frénétiquement j'ai tout, j'ai une inscription en thèse, je me dis que pour moi c'est entre guillemets,
01:42je me suis dit c'est la voie royale, si la France n'accepte pas les enfants d'autres pays qui ont sublimé ce pays,
01:48qui ont adoré son passé et qui adorent et pratiquent sa langue, alors qui accepte-t-elle ?
01:55J'arrive devant un fonctionnaire, Pascal dirait au costume gris, et qui me dit mais madame on ne peut pas renouveler vos papiers.
02:04C'était un titre de séjour étudiant, je lui dis mais monsieur regardez j'ai tout, j'ai l'inscription,
02:09il me dit mais ça fait deux ans que vous faites la même chose, non ça fait quelques mois que vous faites la même chose,
02:13oui mais je suis en thèse monsieur, ça dure au minimum trois ans, c'est un doctorat, il me dit c'est pas possible madame.
02:20Et ce jour-là je suis sortie, je n'avais pas dit encore à mes parents que je n'avais pas obtenu mes papiers,
02:25je me suis dit mais quel est donc ce pays ? Quel est donc ce pays où j'ai tellement sublimé la France,
02:32je montre tout, pas de blanche, et je n'ai pas eu mes papiers.
02:35Et voyez-vous après le destin m'a tendu la main et j'ai pu travailler au magazine Jeune Afrique,
02:42c'était la voie du journalisme, mais à ce moment-là je me suis dit c'est pas possible, c'est pas les mêmes droits et devoirs.