Le sénateur Joël Guerriau, soupçonné d'avoir drogué la députée Sandrine Josso afin de l'agresser sexuellement, s'est défendu de manière étonnante devant les magistrats.
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00:00La politique avec vous, Mathieu Croissando, et ce matin vous avez choisi de nous parler d'un sénateur, le sénateur de Loire-Atlantique, Joël Guerriot.
00:07Soupçonné, vous vous souvenez évidemment de cette histoire, d'avoir voulu droguer une députée pour abuser d'elle, c'était déjà il y a un an.
00:13D'abord, première question, Mathieu, est-ce que Joël Guerriot est toujours sénateur ?
00:17Oui, alors je rappelle qu'il est mis en examen pour administration d'une substance afin de commettre un viol ou une agression sexuelle,
00:23est placé sous contrôle judiciaire, je rappelle les faits, le 14 novembre 2023, Sandrine Jossot, qui est députée modem,
00:31se rend au domicile parisien de son amie politique, sénateur Guerriot, qu'il avait invitée pour célébrer sa réélection au Sénat.
00:40Elle était la seule invitée, elle en était ressortie dans un état second, effrayée, choquée, avec 388 nanogrammes par millilitre d'ecstasie dans le sang.
00:50Alors la députée avait expliqué aux enquêteurs avoir vu le sénateur avec un sachet de poudre blanche, qu'il leur ait incité à boire vite,
00:56qu'il leur ait allumé et éteint plusieurs fois la lumière, comme pour créer un effet stroboscopique bien connu des consommateurs de drogue.
01:03Et une première confrontation aura lieu dans le bureau du juge le 6 novembre prochain pour leur permettre de confronter leur version.
01:10Depuis un an, Joël Guerriot, il s'était mis en retrait du Sénat. Il est en arrêt de travail, il n'est donc pas revenu siéger au palais d'Huxembourg,
01:17mais il est toujours sénateur, pour répondre à votre question, Christophe. Et jusqu'à ventière, il était toujours vice-président de la commission des affaires étrangères
01:23et secrétaire du Sénat aux grands dames de ses collègues, scandalisés à l'idée qu'ils puissent en théorie revenir siéger à leur côté,
01:30je vais dire en particulier dans un moment marqué par une aussi tragique actualité que l'affaire des viols de Mazan.
01:36Mercredi donc, Gérard Larcher s'est expliqué avec Joël Guerriot, le président du Sénat a souhaité le voir démissionner de son mandat,
01:42mais Joël Guerriot n'a accepté que de se mettre en retrait, donc de continuer à ne pas venir siéger, et s'il a accepté de mettre fin à ses fonctions de vice-président de la commission des affaires étrangères,
01:51en revanche, pour ce qui est de son poste de secrétaire du Sénat, il continue à réfléchir, selon ses dires, et donc voilà, il n'est toujours pas démissionné de cette fonction-là.
02:00On est en plein dans le fléau de la soumission chimique dont on parle évidemment beaucoup avec le procès de Mazan. Comment est-ce qu'il se justifie, s'il peut y avoir une justification ?
02:09Alors, le sénateur explique ce matin à Ouest France qu'une démission serait « injuste » et « contraire au principe de la présomption d'innocence ».
02:16Je rappelle que la présomption d'innocence veut que toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits qui lui sont reprochés, tant qu'elle n'a pas été déclarée coupable.
02:24Mais la présomption d'innocence n'interdit pas la décence, et de ce point de vue, la défense lunaire, pour ne pas dire fantaisiste, de Joël Guerriot en a singulièrement manqué.
02:34Je rappelle qu'il avait expliqué dans un premier temps cette procurée de la drogue pour se remettre d'une campagne sénatoriale éprouvante, et puis ensuite de la mort imminente de son vieux chat, Papicha, âgé de 20 ans, et puis ensuite de l'annonce d'un cancer d'un de ses amis.
02:47Il avait expliqué avoir versé de la drogue dans une coupe de champagne pour sa propre consommation, avant d'y avoir renoncé, et puis d'utiliser par erreur cette coupe pour servir du champagne à Sandrine Josseau, ce que son avocat de l'époque avait qualifié de « dramatique désagrément ».
03:01Devant les enquêteurs, il a enfin expliqué avoir éteint et allumé la lumière plusieurs fois pour lui faire un tour de magie, oui oui, un tour de magie, et quand les enquêteurs ont retrouvé sur son portable une vingtaine de recherches contenant les mots « drogue » et « viol », ou sur le GHB, il a affirmé avoir effectué ces recherches après avoir entendu parler d'une relation proche de quelqu'un de son entourage.
03:20Vous conviendrez que cet enchaînement d'explications est au minimum baroque, ou pour le dire autrement, il faut être né avant la honte pour sortir des trucs pareils.
03:30Donc il est toujours sénateur, mais Gérard Larcher souhaite qu'il s'en aille, on ne peut pas le forcer à démissionner ?
03:35D'un point de vue juridique, non. Seul le Conseil constitutionnel pourra décider de le démettre de son mandat s'il est condamné. La seule pression que l'on puisse exercer sur Joël Guerriot est donc une pression politique, au nom de principes simples, éthiques et déontologiques, au premier rang desquels l'exemplarité.
03:52Cette exemplarité qui veut que, particulièrement pour les élus qui fabriquent la loi, qu'ils soient les premiers à la respecter. Mais voilà, autant de principes que Joël Guerriot a manifestement oubliés, ou ça peut-être quelque part dans une coupe.