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6. Premiers résultats de l’étude intitulée AFTERSEDATIO sur le deuil du conjoint après une sédation profonde et continue jusqu'au décès

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Éducation
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00:00After Sedatio, c'est le titre d'une étude qui est financée par l'INCA, l'Institut
00:12national du cancer, et qui a commencé en 2022 et qui se poursuit aujourd'hui.
00:20Cette recherche porte sur les effets du deuil d'un conjoint après cancer, mais après
00:32une sédation profonde et continue jusqu'au décès.
00:34C'est ça l'originalité, c'est qu'on a décidé d'analyser les effets affectifs
00:40mais aussi les effets psychosomatiques, puisqu'on a une échelle de santé, sur le conjoint.
00:47Donc ça peut être la femme, l'homme, ou on a quand même des couples homosexuels.
00:55Donc voilà.
00:56Et donc tout ça, après une sédation profonde et continue jusqu'au décès, donc normalement
01:02choisi.
01:03Voilà.
01:04Donc diapo suivante.
01:05Alors, nos premiers résultats, qu'est-ce que c'est ? On a rencontré des conjoints
01:14en deuil, donc 3, 6 et 12 mois après le décès.
01:19Et là, en fait, on les a interviewés d'une manière très large, avec une question toute
01:26simple, comment s'est passée la mort de votre conjoint ? Et donc, on a essayé de
01:34travailler sur des questions de communication autour de la mort et du mourir.
01:39Et en fait, notre résultat préliminaire, notre résultat fondamental, c'est que cette
01:43communication est vraiment insuffisante.
01:46Et elle est insuffisante, reconnue consciemment par les personnes interviewées, mais aussi
01:55inconsciemment.
01:56C'est-à-dire que nous, en tant que psychologues, puisque nous sommes une équipe de cinq, nous
02:01observons, nous analysons les entretiens ensemble.
02:06Bien sûr, après autorisation du comité d'éthique de la recherche, nous observons
02:11qu'inconsciemment, ça ne va pas du tout.
02:14Il y a vraiment un problème à la fois de communication, mais aussi d'écoute, de parole
02:22et également de narration.
02:23Donc, prochaine diapo.
02:25Voilà, donc la communication, c'est un échange d'informations, mais nous observons que l'approche
02:33de la mort nécessite un investissement beaucoup plus important.
02:36Et encore une fois, l'investissement, il se passe à tous les niveaux.
02:40Il se passe au niveau du proche, au niveau du conjoint, il se passe au niveau des médecins,
02:47il se passe au niveau des soignants et il se passe aussi au niveau des psychologues,
02:51puisque certains ont bénéficié de l'entretien psychologique.
02:53Diapo suivante.
02:55Donc, l'écoute, la parole et la communication, ce ne sont évidemment pas du tout les mêmes
03:03choses, les mêmes concepts et la même façon de les utiliser.
03:09Mais ces nuances, ces informations ne sont pas connues du grand public.
03:17Et donc, on a défini très simplement les choses en constatant tout simplement que l'écoute
03:24permet l'établissement de la parole du patient.
03:27Mais attention, c'est une parole pleine, c'est une parole qui est affective, c'est une parole
03:33qui peut être questionnante, c'est une parole qui peut être répondante.
03:37Mais en tout cas, c'est la parole du patient.
03:40Et on a observé et constaté que les psychologues font partie de ces professionnels formés
03:47qui peuvent écouter les demandes manifestes et les demandes latentes, et aussi formuler
03:54ce que les patients souhaitent dire à partir de leurs tentatives.
03:57Et là, j'insiste sur cette spécificité, c'est-à-dire que les psychologues sont aussi
04:04psychothérapeutes par leur titre, par leur formation.
04:08Et donc, cette écoute-là et cette méthode de la reformulation, par exemple,
04:15eh bien, personne d'autre ne peut l'employer à moins qu'il ne soit psychothérapeute,
04:21ce qui est possible aussi chez certains médecins.
04:23Mais il y a peu de médecins qui sont aussi psychothérapeutes et qui donc peuvent faire
04:28bénéficier les patients et leurs conjoints de cette écoute.
04:35Donc, de l'écoute à la narration, alors c'est vrai que cette écoute approfondie des psychologues
04:43et des personnes formées à l'écoute psychologique permet à ce moment-là la narration du patient.
04:49Et la narration des patients, elle est évidemment fondamentale pour aboutir à la demande de sédation.
04:58La narration, donc, ça ne consiste pas simplement à exposer son histoire, mais ça permet
05:04d'exprimer librement son style, son style langagier, sa personnalité, et également
05:12de créer des nouveaux liens entre les parties parfois morcelées de sa biographie,
05:17vous le comprenez, sur le plan de l'histoire de vie.
05:20Enfin, la narration a d'autres fonctions groupales.
05:23Cette fois, elle permet de tracer les contours d'une histoire intergénérationnelle
05:28qui est précurseur d'un roman familial, voire d'un mythe familial.
05:34Donc, vous voyez, j'ai tracé tout cet espèce d'environnement, j'ai brossé rapidement cet environnement
05:42simplement pour dire ce qu'il en est de la décision et de l'information.
05:50Justement, Julie Rameth vient de nous parler de ces changements de fonction,
05:55mais je pense qu'elle entend bien ce qu'est juste la communication, c'est-à-dire échange de faits,
06:04avez-vous de la fièvre aujourd'hui, comment vous sentez-vous, etc.
06:07Ça, c'est vraiment de la communication et la narration qui permet d'aboutir à la demande,
06:12et particulièrement cette fameuse demande de sédation, cette demande d'en finir,
06:17cette demande de ne plus souffrir, qui bien sûr s'exprime de façon très variée selon les patients.
06:25Donc, l'identité narrative, je ne pouvais pas ne pas citer Paul Ricoeur, bien sûr.
06:30Donc, la narration, par l'acte de faire un récit de sa vie, permet à l'humain de se construire
06:37ou se reconstruire une identité personnelle que Paul Ricoeur a appelée l'identité narrative.
06:48Donc, que permet l'approche psychothérapique en fin de vie ?
06:54Alors, justement, je différencie bien sûr les différents entretiens qu'on peut avoir
07:00avec un patient en fin de vie. Donc, il y a bien sûr les entretiens que peut avoir le médecin,
07:05que peuvent avoir les médecins, que peut avoir le soignant, que peuvent avoir les soignants,
07:11et puis enfin, il va y avoir les proches. En tout cas, la parole du psychothérapeute,
07:16ce n'est pas juste une révélation diagnostique ou une injonction à faire.
07:20Ce n'est certainement même pas une injonction à faire, mais cette parole que nous avons peut
07:28revêtir deux fonctions, permettre la poursuite du discours lorsque celui-ci est difficile ou bloqué,
07:34pour des tas de raisons, des raisons aussi physiologiques bien sûr, puisque nous intervenons
07:39par exemple auprès de nourrissons qui n'ont pas la parole, et pourtant nous sommes là,
07:44nous sommes présents, et nous pouvons effectivement nous exprimer à ce moment-là. Donc, avec un patient
07:50qui serait aphasique par exemple, nous pouvons aussi poursuivre la psychothérapie, malgré
07:56l'absence de parole de ce patient. Et d'autre part, la parole du psychothérapeute permet
08:01d'interpréter le matériel qui est apporté par le patient, sous la forme d'une question,
08:08d'un commentaire ou d'une hypothèse. Donc ça, c'est la manière dont nous allons
08:13prendre la parole auprès d'un patient, donc en le questionnant, en ouvrant un espace psychique,
08:20en faisant un commentaire parfois, et en commentant un geste, ou bien une contradiction, etc.,
08:28ou bien en faisant une hypothèse. Et dans ce cas-là, nous nous exprimons très clairement,
08:34nous disons, je vais faire l'hypothèse suivante, vous allez me dire ce que vous en pensez.
08:38Et donc, bien sûr, tout ceci concerne la question de la sédation.
08:45Donc, les ambiguïtés de la fin de vie, ça on le sait bien. À la fin de sa vie, un patient peut
08:52souhaiter en finir, tout en étant extrêmement angoissé par la sédation. De même qu'il peut
08:57désirer survivre et tolérer, paradoxalement, des douleurs atroces qui vont entraîner des plaintes
09:04et le couper de toute relation. Donc, le psychologue va pouvoir mettre le doigt, en
09:12quelque sorte, ou mettre des mots sur des situations aussi ambiguës. Et dans les réunions
09:19d'équipe, donc réunions d'équipe qui sont contrôlées toutefois d'un point de vue éthique,
09:25le psychologue va pouvoir rapporter des éléments, par exemple d'ambiguïté, qui empêchent évidemment
09:34la décision d'être prise.
09:41Je vais aborder le cas de Madame G. Égoïstement, dit-elle, elle voulait garder son mari alors que
09:48lui souhaitait et avait demandé la sédation. Après la sédation et donc la mort de son mari,
09:56Madame G est reçue par la médecin. Paradoxalement, bizarrement même, et ça c'est ce que la médecin
10:03va nous rapporter, Madame G s'accuse. Je m'en veux pour la sédation. J'ai la sédation, j'ai la
10:11sensation, pardon, que la sédation a accéléré son décès. Donc vous voyez ici, c'est tout à fait
10:18étrange, puisqu'elle ne voulait absolument pas la sédation et pourtant elle s'en accuse. Donc la
10:27médecin, et d'ailleurs c'est Madame G qui nous rapporte ses propos, la médecin va réexpliquer,
10:35et Madame G lui en sait gré. Elle nous dit « mais cette médecin, vous ne pouvez pas savoir,
10:40elle m'a reçue, elle m'a dit, si vous voulez revenir, etc. » Mais que fait cette médecin ? Elle
10:47fait bien évidemment, mais elle ne fait que répéter finalement ce qui s'est produit, pensant sans doute
10:54déculpabiliser Madame G. Mais en fait, Madame G n'est pas satisfaite, parce que ce qu'elle souhaitait,
11:02c'était que ses désirs à elle, ses désirs contradictoires, soient entendus. Et en fait,
11:07elle sort de cet entretien avec la médecin en nous disant que, évidemment, ça s'est merveilleusement
11:15bien passé, qu'elle avait été reçue, etc. Mais en fait, il n'y a eu que retour au point de départ,
11:24puisque au fond, rien n'a avancé du point de vue de Madame G, et du point de vue de la médecin
11:30non plus d'ailleurs. Donc, on se dit, qu'a-t-il manqué dans cette intervention ? Il a manqué de
11:37l'écoute, il a manqué une parole, et bien sûr, la communication, elle, n'a pas manqué du tout.
11:45Donc, diapositive suivante, comment penser la mort avant d'y être confrontée ? Et là,
11:53c'est toute notre démarche aujourd'hui, c'est qu'après les résultats de 40, donc nous avons
12:01plus de 44 entretiens au temps T1, et nous avons à peu près une vingtaine au temps T2,
12:07donc trois mois après. On a vraiment réfléchi à ce sujet, et on s'est dit, il manque quand même
12:16quelque chose de majeur, et qui évidemment préside aux attermoiements, je dirais, à la fois des
12:28médecins, de l'Assemblée nationale, du Sénat, de la Convention, etc. En fait, il manque une
12:36brique avant de prendre les décisions sur la sédation, sur l'euthanasie, sur le suicide
12:42assisté, etc. En fait, le vrai problème, de notre point de vue, c'est qu'on ne veut pas penser à la
12:50mort avant d'y être confrontée. Et donc, à défaut d'une andragogie de la mort, alors là, j'emploie
12:56un mot qui est surtout employé par les Québécois. Les Québécois parlent de pédagogie quand il
13:03s'agit bien sûr d'enseigner aux enfants, mais ils parlent d'andragogie quand il s'agit d'enseigner
13:08aux adultes, tout simplement. Donc, cette andragogie de la mort, donc cet enseignement aux adultes,
13:14manque singulièrement. Or, cette andragogie permettrait une réflexion approfondie qui
13:22mènerait littéralement à une éducation à la mort depuis, effectivement, notre plus jeune âge.
13:29Alors, je vais préciser ce que c'est que ce jeune âge, mais ce qui est patent ici,
13:35chez Madame G, c'est qu'elle n'a pas bénéficié du tout d'un questionnement psychologique aussi
13:40bien interne qu'externe, et que ceci aurait pu lui permettre d'entendre, progressivement,
13:46que son mari allait mourir. Et donc, là, elle arrive, elle débarque dans la situation où son
13:54mari va mourir, alors qu'elle-même n'a aucune formation, n'a eu aucun dialogue, ni avec sa
14:02famille, ni avec son mari, sur le sujet de la mort. Et je pense que, dans bien des cas,
14:08donc qu'on soit en soins palliatifs ou pas, on est confronté à cette absence, tout simplement,
14:15non pas tant de connaissances thanatologiques, mais ce questionnement, cette réflexion interne,
14:23cette réflexion, évidemment, que les philosophes vont me dire, mais écoutez, ça, c'est une
14:28réflexion socratique, que tout le monde devrait avoir. Eh ben non, personne ne l'a, puisque
14:35aujourd'hui, vous le savez très bien, on fuit, on fuit totalement la mort, on déplace la mort sur
14:40le vieillissement, le handicap, etc. Et ma question, d'ailleurs, sur les lois Léonetti,
14:49Claesse Léonetti, etc., c'est que, voilà, il n'y a rien sur l'amont, en amont de la mort,
14:56qu'est-ce qui se passe ? Donc, diapos suivante. Donc, la mort, qu'est-ce que c'est ? C'est une
15:05série de concepts et de faits absolument vertigineuses. En effet, la réflexion et
15:10les connaissances sur la mort reposent sur une littératie de la mort, mais pas seulement. Donc,
15:16la littératie, je vais la définir dans la diapos suivante. Donc, la littératie, c'est la capacité
15:25d'une personne à comprendre des textes ou des données qui lui permettent de fonctionner dans
15:30une société. Donc, ce peut être des textes juridiques, mais ça peut être aussi des décrets,
15:35ça peut être aussi des informations, etc. Donc, la littératie, c'est, par exemple,
15:42cette capacité à comprendre les textes ou les données sur la mort. Mais quand on regarde,
15:49par exemple, j'ai regardé l'enquête BVA 2022 sur les directives anticipées et sur la sédation
15:57profonde et continue. Par exemple, les directives anticipées ne sont signées qu'en 2022 par 18%
16:07des personnes. Et en 2019, c'était l'ancienne enquête BVA, on n'avait que 13% des personnes
16:16françaises, attention, qui signaient leurs DA, leurs directives anticipées. Donc, c'est bien la
16:22preuve que malgré, justement, cette littératie, normalement, on devrait pouvoir comprendre de
16:28quoi il s'agit, on ne peut pas, finalement, fonctionner avec des outils qui sont remis par
16:38la société, puisque, finalement, on n'a pas la réflexion sous-jacente à ce choix. Donc,
16:47l'andragogie, de plus, s'appuie également sur les représentations collectives. Les représentations
16:53collectives qui sont individuelles, qui sont inconscientes. Or, il y a des représentations
17:01collectives de la mort, donc ça, on peut les connaître plus ou moins si on est historien,
17:10ou bien si on se remémore les contes de notre enfance. Mais, en fait, les représentations
17:17individuelles, à part les situations où on peut parler de confrontations à la mort, il est rare,
17:25en fait, qu'on aborde l'andragogie sous cette forme, sous la forme des représentations de la
17:32mort. Voilà, diapo suivante. Donc, l'andragogie de la mort, elle commence par la pédagogie,
17:37forcément, de la mort. Les représentations de la mort données dans l'enfance, elles résident
17:43souvent dans la narration des contes et des histoires domestiques et fantastiques, donc les
17:48fameux Merchion, allemands, des frères Grimm, par exemple. Et donc, ça, ça permet à l'individu,
17:55donc tout petit, de se forger des connaissances complémentaires aux données objectives. Alors,
18:02vous allez me dire, mais comment un enfant a des données objectives sur la mort ? Eh bien,
18:06oui, les enfants, quand on les questionne, et donc, en tant que psychothérapeute, évidemment,
18:11je peux témoigner de cela, les enfants sont capables de dire que des fleurs fanées sont
18:16mortes ou sont capables de citer le petit hérisson mort, écrasé sur la route, ou bien le petit oiseau
18:23qui a tapé dans la fenêtre, etc. Donc, des enfants déjà très jeunes peuvent reconnaître la mort.
18:30Maintenant, est-ce qu'ils ont l'idée du concept de mort ? Certainement pas,
18:34puisqu'en réalité, le concept de mort n'est acquis que vers 6-7 ans. Donc, diapos suivante,
18:42nous avons décidé, enfin, je propose invader mes commes de la mort, c'est-à-dire que ce que
18:49je propose, c'est vraiment de pouvoir, vraiment vis-à-vis du grand public, élaborer un programme
19:00qui permettrait, finalement, d'aborder la mort, si je suis petit. Donc, par exemple,
19:08à la manière des ateliers de vie japonais, qui commencent à la maternelle, et qui proposent
19:14un apprentissage continu de la mort. Donc, cet apprentissage continu de la mort, il peut être
19:21intégré, parce qu'attention, il faut se limiter quand même, et donc, ne pas centrer les enfants
19:28sur la mort directement, ce qui pourrait constituer, peut-être, des choses qui les
19:37rendraient craintifs. Mais, au contraire, intégrer la mort à la vie. Et donc, en France, on était
19:45censé avoir un enseignement à l'école sur la vie affective. Eh bien, pour moi, typiquement,
19:53la mort, et donc les pertes, font partie de la vie affective. Et ça, on peut tout à fait l'aborder
19:59dès la maternelle. Donc, jusqu'à l'âge de 6 ans, des ateliers réflexifs, à partir d'observations
20:08dans la nature et dans la culture, pourraient être développés, à la maternelle, jusqu'au CP. Je
20:15donne l'exemple, tout simplement, des petits élevages, des élevages de criquets, parfois,
20:21on peut avoir des souris qui mettent bas, qui ont des petits, dans une classe, etc. Et tout
20:28ceci serait des observations, tout simplement, du déroulement de la vie, à partir de la naissance,
20:33on irait jusqu'à la puberté, ensuite, on aurait la grossesse, ou bien même la ponte des oeufs
20:42chez les criquets, et ainsi de suite, il pourrait y avoir observation, également, de la mort d'un de
20:49ces animaux, par exemple. Et déjà, on aurait quelque chose d'intéressant qui permettrait,
20:55à partir de 6-7 ans, de pouvoir concevoir l'universalité et l'irréversibilité de la
21:03mort, qui ne peuvent être acquises et pensées qu'à partir d'un certain niveau de développement
21:09cognitif du cerveau. Donc, c'est tout à fait normal qu'un enfant à 5 ans, par exemple, pense
21:16que son grand-père, qui est mort, revienne, va revenir. Par contre, s'il a passé, on va dire,
21:26l'âge de 6-7 ans, si de plus il a assisté à l'enterrement de son grand-père, il comprendra
21:32que son grand-père ne va jamais revenir. Et ceci va lui donner des connaissances personnelles,
21:39affectives, sur la mort. Donc, en fonction des aptitudes cognitives des enfants, la possibilité
21:46de concevoir là où les pertes de la vie peuvent se jouer en jeu de rôle ou en application dans
21:53la nature. Donc, à l'école, on va pouvoir jouer une scène, par exemple, c'est ce que nous faisons
22:00dans le cadre des groupes d'enfants endeuillés, on peut jouer avec les enfants la scène de
22:09l'enterrement, par exemple, de l'enterrement du grand-père. Et c'est vrai que ça déclenche
22:15beaucoup d'émotions, mais ça déclenche aussi des émotions positives. Les enfants vont rire,
22:20ils vont s'amuser et ils vont être ravis surtout d'avoir pu rejouer cette séquence où ils étaient
22:29particulièrement souvent choqués par la détresse de leurs parents. Donc, apprendre à connaître la
22:40mort, la perte, c'est aussi apprendre à désidéaliser les parents qui, d'un statut de protecteur ultime
22:53et général, peut passer à un statut de vulnérabilité qui peut choquer les enfants. Et donc, tout ceci,
23:00on le discute beaucoup dans nos groupes d'enfants endeuillés, par exemple. L'adolescence est une
23:08période, à mon avis, tout à fait typique dans laquelle nous pourrions, donc encore une fois là,
23:16il s'agit des éducateurs et ou des psychologues, mais en tout cas au niveau du lycée, par exemple,
23:26nous pourrions parler de la dépression et de la pensée au suicide. Et encore une fois,
23:32c'est toujours important de répéter que penser à la mort ne fait pas mourir. Donc,
23:41que nous pensions à la mort ne va pas forcément raccourcir notre vie. Même chose pour les enfants,
23:48même chose pour les adolescents. Donc, à l'adolescence, on peut profiter de ces échanges
23:55sur la dépression et la pensée au suicide pour les éliminer et parfois prévenir les passages à
24:03l'acte. Hélas, on entend souvent, on lit dans les journaux, des faits divers, entre guillemets,
24:11qui concernent des passages à l'acte suicidaire par mimétisme, par exemple. On voit des ados lire
24:19sur les réseaux sociaux qu'une telle anorexique finalement a décidé de quitter la vie et cela
24:28peut créer une épidémie, entre guillemets, de suicide, à la manière du jeune Werther, à la
24:36manière du livre de Goethe. Donc, vous voyez, pouvoir en parler librement, pouvoir en parler
24:44dans un cadre qui serait relativement structuré comme l'est l'école, à mon avis, permettrait de
24:51prévenir des passages à l'acte suicidaire. Vous avez vu que depuis la Covid, on a quand même une
24:57augmentation importante des syndromes anxio-dépressifs chez les jeunes gens. Et donc,
25:07je pense que parler de la mort peut prévenir tout à fait des passages à l'acte suicidaire et aider
25:16même les jeunes déprimés à peut-être entamer une psychothérapie, un soin psychiatrique. Donc,
25:25l'adolescence serait dédiée à cela. Et puis, enfin, l'âge adulte. Alors, moi, je verrais
25:32très très bien mon andragogie se développer, pourquoi pas, dans les entreprises, dans les
25:39administrations. On pourrait poursuivre des ateliers de réflexion et de questionnement
25:43sur la mort. Nous avons un collègue, un collègue suisse, qui a écrit un ouvrage justement sur les
25:51deuils dans l'entreprise, par exemple. Et donc, nous pourrions aborder ce sujet,
25:57puisqu'il n'est pas une carrière dans laquelle on ne rencontre un deuil, le deuil de ses parents,
26:07le deuil d'un conjoint, le deuil d'un enfant, parfois. Et ça nécessite effectivement des
26:13formations continues. Et puis donc, avec le vieillissement, l'approche des questions posées
26:19par la mort et les deuils pourrait être proposée pour permettre un questionnement,
26:25une réflexion et parfois une prise de décision. Et la prise de décision, vous voyez, quand on est,
26:31par exemple, en EHPAD, puisque j'interviens aussi dans des maisons de retraite, la prise de décision,
26:38elle est fondamentale pour certaines personnes âgées ou pas très très âgées. Mais en tout cas,
26:47la question de la prévention obsèque, la préparation des funérailles, l'écriture des
26:54directives anticipées, tout ceci est fort intéressant. Les gens âgés, très âgés,
27:01en parlent extrêmement facilement. J'anime des groupes de parole et je les ai commencés
27:06justement pendant la COVID. Et là, c'était assez délicat parce que la menace de mort était quand
27:12même partout et l'isolement était partout. Et là, j'ai vraiment pu voir que ces groupes de parole
27:19favorisaient toute cette réflexion et, encore une fois, étaient vécues de manière plutôt gaie,
27:27parfois grave, bien sûr, mais avec vraiment une grande participation.
27:34Donc, finalement, penser à sa mort peut être structuré. Alors, bien sûr, rien d'obligatoire,
27:44des propositions simples qui sont plutôt de l'ordre de la philosophie de la vie. L'idée,
27:51c'est plutôt de donner une méthode de questionnement que des faits prédigérés,
27:56un petit peu comme les livres témoins, etc. etc. Les livres de développement personnel,
28:03ce n'est absolument pas ce que je propose. Et d'autre part, je propose également de prévenir.
28:11Donc, vous voyez, prévenir quoi ? Prévenir ma mort, tout simplement. Prévenir la perte,
28:18les pertes, puisque finalement, nous abordons la mort, en général, pas par notre propre mort,
28:24notre propre menace de mort, mais plutôt par la perte, les pertes. Et donc, nous avons besoin,
28:32de réfléchir à ces thématiques. Et il me semble, donc, que sous la forme d'invader mes commes,
28:39eh bien, je vais le publier, c'est en cours de publication, mais nous pourrions simplement
28:47aborder notre propre mort, nos propres pertes. Et de mon point de vue, et c'est pour ça que
28:56je le relis, bien sûr, au collectif créé par Emmanuel, c'est que vraiment, à mon avis,
29:03nous serions déjà dans notre sujet, et nous aurions des propositions à faire,
29:13et qui seraient peut-être, pardonnez-moi, moins complexes, vous voyez, et plus touchant
29:22directement les personnes, de manière à les rendre, ben voilà, moins manichéennes.
29:30Mon impression, c'est qu'on aura moins de clivages, noir-blanc, pour, contre, etc.,
29:38mais au contraire, des gens beaucoup plus ouverts sur ce plan. Et donc,
29:45voilà ce que je vous propose ce soir.

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