Entre traditions séculaires et modernité triomphante, le Japon conjugue passé et avenir de façon unique. Pénétrez l'âme de cette nation, de ses mégapoles futuristes à la quiétude de Kyoto préservée. Dans cette ville chargée d'histoire, rencontrez les dernières gardiennes de savoir-faire ancestraux. Suivez une école réputée perpétuant depuis des générations l'art délicat des Geisha. Entre cours de danse et cérémonie du thé, immergez-vous dans la formation exigeante d'apprenties.
Découvrez aussi le quotidien de célèbres Geishas, entre rigorosité des règles et émancipation moderne.
Dans cet univers clos, admirez la grâce de ces femmes maîtresses en arts traditionnels.
Leur parcours initiatique révèle les richesses insoupçonnées d'une culture millénaire.
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00:006 heures du matin, temple bouddhiste du Shishakuin de Kyoto, c'est l'office.
00:08Il y a 120 ans, cette même cérémonie, ces mêmes chants bouleversent Temel Gime. D'autant plus
00:32qu'à l'époque, les bouddhistes sont menacés par l'empereur Meiji qui impose le shintoïsme,
00:37une religion animiste comme religion d'état. Les statues de Bouddha sont détruites,
00:49les moines poursuivis, les temples fermés. Emile Gime s'arrête ici dans le temple du
01:01Toji à Kyoto où se trouve la plus vieille et la plus haute pagode du Japon. Le moine
01:06Miura nous accompagne sur ses pas. C'est la cinquième construction de cette pagode puisqu'elle a
01:13été brûlée quatre fois par la foudre. Elle a été reconstruite en 1644 et c'est exactement la même
01:20que celle que Gime a vue. Depuis qu'il est venu ici, la pagode n'a pas changé. Cette pagode était
01:31un cimetière. Tout en haut de la tour, il y a les ossements de Shiaka. De n'importe quel endroit
01:38où l'on se trouve à Kyoto, on peut la voir. On a construit cette pagode de 50 mètres de haut
01:43pour montrer à toute la population que le Bouddha dort là et que ses regards règnent sur Kyoto.
01:48Ce patrimoine est menacé. Gime a donc l'idée d'un musée pour sauver ce qui peut l'être.
02:01Au Toji, on se souvient encore de ce français qui a acheté des centaines d'oeuvres d'art et qui fit
02:06copier une pièce maîtresse de ce temple. Le moine Miura nous fait découvrir l'original.
02:10C'est un mandala, un ensemble de 21 statues de Bouddha et divinités.
02:17Voilà, ça c'est le schéma du mandala tel que vous pouvez le voir ici au-dessus.
02:23Ces statues sont disposées selon une figure géométrique représentant symboliquement
02:29l'univers. Gime est subjugué. Cette copie deviendra une pièce maîtresse de son musée parisien.
02:44Emile Gime quitte le Japon inquiet. L'empereur veut moderniser très vite son pays.
02:57Son maître mot, techniques occidentales, esprit japonais. Le Japon va-t-il y perdre son âme ?
03:09120 ans plus tard, Tokyo.
03:10Un pays deux fois plus petit que la France, mais deux fois plus d'habitants. Le Japon,
03:28c'est l'une des plus fortes concentrations de population au monde.
03:31Pression démographique, niveau de vie très élevé. Résultat ici, le mètre carré se vend jusqu'à
03:38100 000 euros. Le grand Tokyo, c'est aujourd'hui plus de 30 millions d'habitants. Nous sommes dans
03:51le quartier d'Akihabara, le quartier haute technologie de la capitale. Pour attirer le
03:55client, on les appâte au porte-voix. Tomoko a 30 ans. Aujourd'hui, avec son petit ami Ryota,
04:04elle vient voir les nouveautés. Ce qui se vend le plus ici, ce sont les téléphones portables. 75%
04:14des Japonais, enfants et personnes âgées compris, en possèdent un. C'est un record mondial.
04:27Et bien sûr, les téléphones de Tomoko et Ryota comportent un appareil photo intégré.
04:31Tomoko est une jeune femme moderne. Elle fait partie de cette nouvelle génération
04:40de femmes qui travaillent, qui sont autonomes, libres et qui le revendiquent. Et pourtant,
04:48deux fois par mois, elle se rend au 8e étage de cette gare pour suivre une formation un peu
04:52particulière. Bonjour. Bien, aujourd'hui, on va reprendre exactement ce qu'on a fait la
05:07dernière fois. On va procéder comme d'habitude. Mais cette fois-ci, on va utiliser le coussinet.
05:15Tomoko a fait le choix d'apprendre à se vêtir de l'habit traditionnel japonais, le kimono.
05:23Le nœud avec le petit coussinet, c'est quelque chose qu'elle a dans le dos. Donc,
05:28il faut bien le préparer avant de commencer à s'habiller. Tomoko étudie depuis cinq ans le
05:34port du kimono. Il lui reste encore plusieurs années d'apprentissage, car la technique est
05:38complexe. À chaque fois, ce sont les mêmes gestes. Et pourtant, le résultat n'est pas encore parfait.
05:52Puisqu'on a affaire à une jeune femme, il faudrait normalement que le nœud soit plus haut.
06:00Elle serait bien plus belle. Qu'est-ce que ça vous fait de porter ce kimono ? J'ai l'impression
06:12de marcher avec les pieds à l'intérieur. Mais bon, je me sens plus femme. Dans l'histoire du
06:20kimono japonais, rien n'a changé. La façon dont on le porte aujourd'hui est exactement la même que
06:26celle des femmes d'il y a 250 ans. Tomoko suit ses cours, car un jour, elle va certainement se
06:36marier. Et ce jour-là, comme toutes les filles de bonne famille, elle portera un kimono. Moi,
06:46en tant que professeure, j'essaie de perpétuer cette tradition. Mais à vrai dire, ces manches,
06:52ce n'est vraiment pas pratique. Donc on porte de plus en plus de vêtements occidentaux. Rares
06:58sont ceux qui le portent dans la vie quotidienne. En fait, on le met surtout pour les grands
07:02événements de la vie. Pour la jeune femme moderne, les occasions de se vêtir du kimono seront donc
07:12assez rares. Miroko, en revanche, le porte tous les jours pour aller en cours. Comme tous les
07:27matins, elle se rend dans la plus célèbre école de geisha du Japon, à Kyoto. C'est exceptionnel
07:32de pouvoir y filmer. Petit particularisme, ici, on ne dit pas geisha, mais geiko. Miroko est maiko,
07:40c'est-à-dire apprentie. Dans cette école, elle étudie les arts traditionnels japonais. Kargeiko,
07:48littéralement, veut dire femme des arts. Femme de compagnie, capable d'improviser
07:52des spectacles pour leurs clients. Aujourd'hui, ça commence par un cours de danse.
08:10Plus haut, plus haut. Regardez par là-bas. Là, ça ne va pas. Attention à la hauteur de l'éventail.
08:19Miroko a 19 ans. Elle doit étudier encore au moins trois ans avant de devenir geiko. Ensuite,
08:34elle l'aura, ses talents. Depuis qu'elle est enfant, ce métier la fait rêver.
08:41Est-ce que quelqu'un dans votre entourage avait un lien avec le monde des geiko ?
09:04Non, absolument pas. Ma famille n'a aucun rapport avec ce monde. D'abord, tout le monde a été surpris
09:17de ma décision de devenir maiko. Ma mère, consciente des difficultés, m'a dit pourquoi
09:25pas et m'a encouragée. Mon père s'est senti triste parce que je ne serai plus là.
09:31Et puis, tout autour de moi, ma grand-mère, mon grand-père, qui ne connaissent pas ce monde,
09:39étaient absolument contre. Ils étaient contre ? C'est vraiment un monde à part ? Oui, vous savez,
09:51parce que je ne peux plus trouver de sujet de conversation commun avec les jeunes de mon âge.
09:55Deuxième enseignement de la journée de miroko, la cérémonie du thé. Alors ça,
10:01il faut le reculer à côté de vous. Un peu de côté. Et vos mains, il faut les mettre comme ça,
10:08devant, avant de prendre les baguettes. Cette cérémonie, qui vient de Chine,
10:15a été introduite au Japon au XIIIe siècle par un grand sage bouddhiste zen, Esai. Elle
10:22est extrêmement codifiée. Versez l'eau chaude, maintenant. Tous les objets utilisés doivent
10:33impérativement être faits de bois, de terre ou de fer, matériaux en harmonie avec la nature.
10:39Et les dimensions de la pièce répondent aussi à des normes très précises. Cette cérémonie est
10:51encore pratiquée aujourd'hui par les classes aisées de la population japonaise. Mais quand
10:56elle est arrivée ici, miroko ne connaissait rien à toutes ces subtilités. Maîtriser tout cela,
11:01cela lui prendra encore des années. Un peu plus loin, dans les couloirs de l'école,
11:17nous rencontrons ainsi des geiko professionnelles. Elles continuent à venir ici pour se perfectionner.
11:23Makoto a une trentaine d'années. Elle est geiko depuis dix ans et se plie quotidiennement à un
11:33entraînement intensif pour se maintenir à niveau. L'entraînement, c'est dur de temps en temps,
11:46c'est vrai, ce n'est pas facile. Mais vous savez, c'est le plaisir d'être sur scène,
11:52devant le public, qui permet de surmonter cet aspect difficile.
11:56Les geiko comme Makoto sont de plus en plus rares. Il y en a 248 à Kyoto. C'est deux fois
12:14moins qu'avant la seconde guerre mondiale. C'est à cause des contraintes que cela implique.
12:19Est-ce que vous pensez que vous êtes une femme moderne ? Oui, mais bien sûr,
12:29je suis une femme moderne. Vous savez, ce n'est pas une contradiction.
12:34La geiko, même si elle s'entraîne tous les jours aux arts traditionnels japonais,
12:45vit quand même dans un monde moderne. Par exemple, je lis les journaux, je regarde la télévision.
12:52Mais c'est vrai que, comme toutes les geiko, je vis dans un univers au style forcément très
13:03traditionnel. Si une geiko se marie ou si elle veut avoir un enfant, peut-elle continuer à
13:15exercer son métier ? Non, si la geiko se marie, elle doit arrêter le métier. C'est la règle.
13:24Elle arrête ? Ah oui, si elle se marie, elle arrête, bien sûr. Makoto et Miroko ont accepté
13:34ce type de sacrifice. Miroko travaille dur et espère qu'elle sera assez douée pour devenir
13:42un jour professionnelle. Des apprentis comme elle, il en existe 62 à Kyoto.
13:55On les croise fréquemment dans les rues du centre-ville.
13:59Elles habitent des okiya, ce sont des petites maisons de bois. Elles y sont
14:08pensionnaires et vivent sous la houlette d'une patronne qui gère leur formation.
14:12Madame Kaomura est l'une de ces patronnes. Elle nous reçoit dans son okiya. Par ici,
14:33entrez, c'est par là. Madame Kaomura a 70 ans. Elle a formé une vingtaine de maïkos et pour
14:41elle, rien n'a changé ces 50 dernières années. A l'étage, les deux maïkos dont elle s'occupe
14:50se préparent. Madame Kaomura les a choisis avec soin. Pour choisir une maïko, il faut bien sûr
15:03qu'elle soit douée pour les arts, chanter, danser, jouer d'un instrument et faire la conversation.
15:08Plutôt que la beauté, nous privilégions les femmes qui ont des aptitudes artistiques et
15:13également les qualités morales, aimables, douces, serviables. Quand on veut devenir maïko,
15:22il y a des règles ? Oui. Comment faut-il s'y prendre ? D'abord, les jeunes femmes doivent
15:32passer un test qui dure de trois à quatre mois et on juge leurs compétences artistiques de danse
15:38et de chant dans le centre de formation de maïkos que vous avez vu là. Après, on décide de garder
15:46la jeune femme pour la former et si ça ne va pas, malheureusement pour elle, c'est fini.
16:09Il est 17 heures, Yuki et Nami, les deux maïkos, se maquillent. Ce soir, elles vont travailler.
16:25L'argent qu'elles vont gagner reviendra à Madame Kaomura car Yuki et Nami ont une dette envers
16:30elles. Madame Kaomura paie en effet toutes leurs formations. Elle les nourrit, les loge,
16:37subvient à leurs besoins et cette dette, les maïkos doivent ensuite la rembourser.
16:42Madame Kaomura trouve des clients pour Yuki et Nami. Plus elles travaillent, plus elles
17:00remboursent rapidement. Mais attention, Yuki et Nami ont un contrat en bonne et
17:05due forme. Aujourd'hui, plus de confusion, ce ne sont pas des prostituées.
17:12Autrefois, il pouvait y avoir confusion. Au Japon et jusqu'en 1958, il y avait deux quartiers. Le
17:33quartier des prostituées et le quartier des geikos et on pouvait confondre les deux mondes car c'était
17:39des quartiers très très proches. Et c'est très exactement en 1958 que d'un coup, tout a changé.
17:48La prostitution a été interdite par la loi et aujourd'hui, on ne peut plus mélanger les deux
17:55mondes. Comment vous vous sentez habillée comme ça ? Je me sens comme quelqu'un qui va travailler.
18:16Une maïko est payée environ 400 euros de l'heure. Yuki travaille depuis cinq ans. Dans six mois,
18:25elle aura remboursé sa dette. Ensuite, elle n'est pas sûre de vouloir devenir geiko. Elle trouve
18:29finalement tout cela extrêmement difficile. Vous savez, on commence très tôt le matin. On finit
18:39tard le soir. Ça recommence tous les jours. On est toujours en manque de sommeil. Vous savez,
18:47parfois, on en a assez. On n'a pas envie d'aller travailler, mais il faut y aller.
18:54Est-ce que vous savez ce que vous allez faire quand vous aurez fini votre contrat de maïko ? Dans six
19:04mois, j'aurai du temps libre pour réfléchir. C'est moi qui dois faire ce choix. C'est moi seule.
19:17Pour Yuki et Nami, c'est l'heure d'aller travailler. Il est 18 heures. Elles quittent l'okiya.
19:41Nous ne saurons rien de leurs clients. Le secret à Kyoto est une tradition qui ne se perd pas.
19:47Tout au plus peut-on imaginer qu'elles les retrouveront dans un de ces restaurants du bord
19:52de la rivière. Ici, rien n'a changé ou presque depuis le 19e siècle, car Kyoto a miraculeusement
19:58survécu au bombardement de la seconde guerre mondiale grâce à la volonté d'un français,
20:03Serge Elissef, qui a supplié les alliés de l'épargner. Kyoto incarne depuis le visage
20:08traditionnel du pays. Il n'en va pas de même pour Tokyo, réduite en cendres lors de la guerre.
20:1860 ans plus tard, voilà la face moderne du Japon. Une ville verticale, un choc visuel.
20:25Tokyo s'est transformée en terrain de jeu des architectes du monde entier. Le japonais Kenzo
20:31Tange pour la mairie de Tokyo et le siège de la télé Fuji. Ce building signé Renzo Piano,
20:38l'italien. Celui-ci par les Suisses Meuron et Herzog. Et celui-là par le japonais d'Osaka,
20:47Tadawondo. Au Japon, les architectes sont des stars. Tadawondo signe même des autographes
20:55dans la rue. Il nous reçoit à Collectionne, un centre commercial qu'il a récemment conçu. Son
21:07matériau de prédilection, c'est le béton. Résolument moderne, il s'inspire pourtant
21:12avant tout de la tradition japonaise. La maison japonaise de bois et de papier repose sur le
21:21principe des portes coulissantes qui permettent de moduler l'espace entre l'intérieur et l'extérieur.
21:27Les différents espaces d'habitation sont reliés par des galeries qui intègrent en partie le jardin.
21:33Une architecture qui permet de vivre au rythme de la lumière et des saisons. C'est sur ces
21:38fondements que Tadawondo a créé son style et son succès. Ce bâtiment, si on le regarde de
21:44l'extérieur, a l'air bien fermé. Mais en fait, il y a beaucoup d'espaces vides à l'intérieur.
21:48Cet espace vide, comme l'angawa de la tradition japonaise, permet d'aller ici et là. C'est un
22:01espace neutre, ni intérieur, ni extérieur. A partir de cet espace neutre, on bouge à droite,
22:10à gauche, on l'utilise comme on veut. Venez. Voilà, comme ici. Cet espace ni extérieur,
22:25ni intérieur, c'est un exemple. Ce côté-là, ça continue vers le haut. On va y aller. Bonjour,
22:41on peut rentrer là, ça ne vous dérange pas ? Ah oui, si, excusez-moi. Maintenant,
22:49ici, c'est un salon de coiffure. Cet espace de travail continue à l'extérieur.
22:54Il n'y a pas de mur entre l'intérieur et l'espace extérieur. Ça, c'est l'esprit de la maison
22:59japonaise traditionnelle. Et j'ai profité de cet esprit pour une construction moderne. Le salon
23:10de coiffure, l'ensemble de la construction et le paysage de la ville, ces trois choses sont
23:15bien accordées, à mon avis. Ce salon de coiffure a bien utilisé l'espace. Dépouillement, travail
23:24sur le vide, l'esprit de Tadao Ando est partagé par beaucoup de Japonais, car il repose sur les
23:30enseignements bouddhistes qui ont profondément imprégné la société. Nous sommes de retour au
23:35temple Shishakuin de Kyoto. Le grand prêtre Miyasaka officie ce matin. Il dirige plus de
23:543000 temples au Japon, mais continue à consacrer une grande partie de son temps à la méditation et
24:00à la quête du satori, la quête du vide intérieur. Ses temps de méditation se déroulent le plus
24:05souvent possible au contact de la nature, et notamment dans les jardins zen qui bordent les
24:10temples. Dans le zen, ce jardin nous sert à la méditation. La nature et le temps deviennent
24:27la même tout dans ce jardin. On ne fait plus qu'un avec la nature. On laisse échapper le temps,
24:36telle est la signification du jardin. Il y a deux types de jardins japonais. Le premier,
24:44appelé le jardin sec, symbolise un paysage. Les pierres sont la montagne, le sable blanc le courant
24:49de la rivière. Le deuxième est une reproduction, mais en modèle réduit, de la nature. L'agencement
24:58de ces jardins répond à des critères extrêmement stricts inscrits dans une série de traités
25:03élaborés depuis le XIIe siècle. Objectifs, contemplation poétique et travail intérieur.
25:09Les japonais conservent encore aujourd'hui un lien très spirituel avec la nature, mais comme
25:16dans tous les pays occidentaux, la vie moderne a gommé certains repères.
25:19Ce qui n'est pas bien à mon avis, c'est que le coeur du sentiment religieux se perd aujourd'hui
25:35au Japon. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les japonais ont perdu l'éthique,
25:45le sens de la morale, les valeurs.
25:57Parc de Yoyogi, Tokyo, un dimanche matin. Une fois par semaine, des centaines de jeunes
26:03se travestissent et se donnent rendez-vous ici. On est loin, très loin, du minimalisme zen.
26:08Fan de manga, de jeux vidéo, de monde virtuel, ces jeunes japonais rejettent le monde des adultes.
26:19Ils sont parfois attirés par l'autodestruction et toujours fascinés par l'apparence.
26:26Gros consommateur, très à la mode, ils mélangent les genres, les styles, tout le style.
26:39Surfant sur cette passion du look, les plus grandes enseignes du monde se sont installées ici.
26:46Créateurs japonais y compris. Nous sommes à la galerie d'Araxis au coeur de Tokyo.
26:54C'est ici qu'Issey Miyake prépare une exposition. Une nouvelle ligne de vêtements baptisée
26:59Epoch, a piece of clothes, une pièce de tissu en français. Aujourd'hui, le designer est accompagné
27:06de son bras droit. Ce n'est ni un styliste ni un couturier, mais un ingénieur textile d'Aifujiwara.
27:12Héritier d'un style traditionnel, Issey Miyake n'en est pas moins passionné de technologie.
27:17Cette nouvelle ligne fait d'ailleurs appel à une technique de pointe qui permet de réaliser
27:22un vêtement complexe en une seule et même pièce.
27:29De haut en bas, il faut réfléchir à tout. Jusqu'au col et aux manches.
27:35Et dans ce vêtement, il faut aussi penser à la robustesse du tissu. Regardez cela, cette partie du tissu.
27:43Elle est solide et extensible. Et puis en plus, unie et aussi rayée.
27:51Il y a aussi des motifs. Tout cela est intégré dans une seule et même pièce de tissu.
27:59Pour réaliser cette prouesse technologique, Dai a mis au point dans le secret de son atelier
28:04un système informatique ultra perfectionné qui commande un métier à tisser.
28:09Cette maille est fabriquée par une machine. On réalise un tube en mettant des fils de différentes couleurs
28:16Certains fils sont extensibles, d'autres pas. Et on tisse tout cela ensemble.
28:21Ce qui au final forme un tissu d'un seul tenant.
28:25Cela donne de grands rouleaux de tubulaire dans lesquels les vêtements sont tissés.
28:29Il ne reste plus qu'à découper selon les pointillés.
28:35Ça c'est la base. C'est ce que l'on fait de plus simple.
28:41Rien n'est cousu, ce n'est que du tissage.
28:45On découpe et voilà le résultat.
28:50Issey Miyake, c'est l'alliance du futur et des racines.
28:55Il veut réussir la synthèse de la technologie, du design et de la tradition.
29:03Certains voient dans mon travail une certaine tradition japonaise.
29:08A mon âge, Slam Flat.
29:12Je crois surtout que le fait d'avoir travaillé avec des artisans qui fabriquaient du tissu traditionnel
29:18m'a apporté un certain état d'esprit.
29:22Un état d'esprit que l'on peut qualifier de traditionnel.
29:28Quoi qu'on y fasse, je crois que de toute façon la tradition coule dans nos veines.
29:39Ce soir, le vernissage de son exposition rassemble-le tout Tokyo.
29:48Venu en Ami, nous retrouvons l'architecte Tadao Ando, qui volerait presque la vedette au maître de cérémonie.
29:58Vous êtes une star ici ?
30:03Oui, c'est à peine croyable.
30:07Moi je suis un gars de la province, mais dès que je mets un costume, c'est comme ça.
30:11Incroyable, non ?
30:14A Tokyo désormais, les lumières de la ville ne s'éteignent plus.
30:19A Kyoto, les geikos respectent scrupuleusement les traditions.
30:24La pensée de l'empereur de l'ère Meiji semble avoir été suivie au pied de la lettre
30:28Techniques occidentales, esprit japonais.
30:31Ou comment tout changer sans rien abîmer.