Pascal Praud et vous - «C'est le quotidien des femmes» : la journaliste Héloïse Goy évoque les agressions sexuelles subies dans les transports
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00:00En entrant dans le studio, et la première chose que vous lui avez demandé, est-ce que c'est la première fois que ça t'est arrivé ?
00:07Je lui ai demandé ça parce que moi j'ai 31 ans, ça fait quoi, 15 ans que je prends les transports en commun en région parisienne et à Paris,
00:14et que moi j'ai déjà été victime de deux frotteurs, et d'une main aux fesses dans le métro,
00:22et en fait je cherchais dans mes souvenirs, je crois qu'il y a encore d'autres choses que j'ai presque
00:27écartées de mon cerveau, tant ce que vous disiez, Géraldine, c'est ça, c'est le quotidien des femmes.
00:34Et ce que je tenais à dire aussi, ce que ne savent pas forcément les hommes,
00:38c'est que j'en suis venue, comme beaucoup de femmes, beaucoup de femmes autour de moi,
00:42à éviter de montrer mes jambes dans le métro, même quand il fait 40 degrés à Paris, je mets un pantalon,
00:47à éviter de montrer mes bras, je ne me mets plus en débardeur, je mets une veste,
00:51pour éviter de, ce mot est terrible, mais tenter, entre guillemets, certains agresseurs sexuels.
00:58Est-ce qu'il y a un profil type de celui qui va vous ennuyer dans un métro ?
01:06Je ne pense pas du tout, en l'occurrence, j'ai regardé dans les yeux ces hommes qui se sont frottés à moi,
01:13et je m'en rappelle d'un en particulier, c'était, j'ai envie de vous dire, un homme d'affaires.
01:18Il avait en costume, une petite mallette, très propre sur lui, certainement père de famille, la quarantaine,
01:25et il n'a pas non plus hésité à me regarder dans les yeux, un peu comme vous hier, Géraldine,
01:32parce qu'il avait compris que j'avais compris, et ce qui m'a le plus frappée, c'est qu'il ne semblait pas avoir honte,
01:41même quand je le regardais dans les yeux.
01:43Ça, ça s'est passé il y a combien de temps ?
01:44Il y a 2-3 ans.
01:46Est-ce que vous avez engagé la conversation avec lui pour lui reprocher son attitude, ou est-ce que vous n'avez rien fait ?
01:53C'était la deuxième fois que ça m'arrivait, et la première fois j'avais été très frustrée après rien avoir dit.
02:00Donc là oui, je lui ai parlé directement, j'ai été un peu insultante, je répéterai pas les mots ici,
02:07mais je lui ai un petit peu crié dessus, également pour alerter les gens autour de moi,
02:11parce que comme souvent, les scènes de ces frotteurs se passent dans des métros, dans des rames bondées.
02:16Donc j'ai parlé très fort en lui disant « ça va, je ne te dérange pas », et lui continuait à sourire,
02:22et évidemment à nier ce qu'il s'était passé.
02:26Je ne rentre pas dans les détails, mais je sais ce qu'il s'est passé, je sais ce qu'il faisait,
02:32et je sais que ça lui procurait du plaisir, si vous voyez ce que je veux dire.
02:36Et il m'a sourie, les gens autour de moi n'ont rien dit, je voyais que tout le monde était un petit peu gêné,
02:42il est simplement sorti à l'arrêt d'après.
02:45Parce qu'il ne voulait pas prolonger ce moment.
02:49À votre avis, qu'est-ce qu'il faut faire ?
02:51Alors vous, vous n'avez pas 20 ans, donc déjà vous pouvez répondre,
02:55ça ne veut pas dire que les gens qui ont 20 ans ne peuvent pas répondre,
02:59mais peut-être qu'ils sont plus en difficulté parce qu'ils sont plus jeunes,
03:02et notamment je pense aux très jeunes filles qui ont 14 ans, 15 ans, 16 ans,
03:05qui commencent à aller dans le métro un peu toutes seules,
03:07qui sont démunies, votre fille Géraldine...
03:11Je ne la laisse pas prendre le métro toute seule.
03:13Elle a 11 ans aujourd'hui.
03:15À son âge, je le prenais toute seule.
03:17Ah oui, ça c'est intéressant.
03:19Elle n'avait pas de téléphone portable, c'était l'insouciance, je ne sais pas.
03:22Non, c'est que l'époque était, je pense, différente.
03:25Ça ce que vous dites est décisif.
03:27J'allais sur les Champs-Elysées toute seule, je parlais avec des copines, tout se passait bien.
03:30Et c'est-à-dire que la jeunesse que vous avez eue, jamais vous n'avez été importunée.
03:35Non, c'est vrai, jamais. À son âge, non vraiment.
03:38Or, aujourd'hui, si je peux me permettre, je témoigne aujourd'hui,
03:41mais vous regardez autour de vous, j'en parle avec mes amis de mon âge,
03:46je ne connais quasiment pas une seule personne à qui ce genre d'événement n'est pas arrivé.
03:50C'est-à-dire que c'est devenu quelque chose qui fait partie du quotidien des femmes.