Séverine Vandenhende revient sur son titre olympique de judo remporté aux JO de Sydney en 2000. Après une année 99 compliquée, l'année 2000 sonne comme une renaissance pour celle qui lança ce jour là une moisson de médailles pour le judo français.
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00:00Ça va faire 30 ans, mais je m'en souviens comme c'était hier.
00:04Je me suis fait kiffer, mais j'ai fait kiffer plein de gens et je me suis dit, c'est ouf.
00:09On a juste envie d'extérioriser ça, d'en parler.
00:30C'est une période géniale, une des plus belles en tant que sportive.
00:39J'allais dire, dès qu'on démarre un sport de compétition, l'objectif, on rentre dans
00:47la filière et on se dit, les Jeux, un jour, je veux participer aux Jeux et surtout, à
00:54chaque fois qu'on demande aux gamins, je veux être championne olympique, championne
00:56olympique.
00:57Pour moi, c'est m'être réalisée sur une première phase de ma vie.
01:02Ça a été à la fois mes premiers et mes derniers, mais c'était grandiose.
01:09Mais en fait, par rapport à la pression de l'événement, je n'en avais pas.
01:14Les souvenirs que j'ai, c'était une compète, je prends les mêmes filles, j'ai fait abstraction
01:20un peu de ce côté J.O., je sais qu'en montant sur le tapis à chaque combat, je me remémorais
01:28tout ce que j'avais fait, par où j'étais passée, je me disais aujourd'hui, t'es prête.
01:31J'ai fait la prépa à un moment sur un stage, pratiquement qu'avec des garçons.
01:37C'était un choix parce que je savais que c'est ça qu'il me fallait à ce moment-là.
01:43Sur un autre stage, je ne prenais pas les filles de ma caté, je prenais les filles
01:47de la caté du dessus.
01:48L'année 2000, je reviens de blessure, c'était déjà dans un premier temps de retrouver
01:53mon meilleur niveau.
01:55Comme j'avais foiré les mondes, je n'avais pas le côté olympique, il fallait en plus
02:01que j'aille chercher le côté olympique.
02:02On avait fait des stages vélo dans les Alpes, on disait sur l'école, on faisait l'Alpe
02:08du Nord, non, si tu poses le pied, tu ne seras pas championne olympique.
02:12C'est vraiment à ce moment-là où les Jeux, c'est devenu l'objectif et ce qui me faisait
02:18avancer.
02:20Les retours que j'avais, ce n'est pas moi, j'avais plutôt ce qu'on appelle un judo
02:26de garçon.
02:27Je trouve ça très péjoratif, enfin péjoratif, ce n'est pas… parce que pour moi, le judo,
02:34c'est le judo, que ce soit garçon ou fille.
02:36J'étais plutôt catégorisé judo garçon parce que j'avais des mouvements de contre,
02:41un judo explosif et plutôt instinctif.
02:45Ça m'est arrivé sur des compétitions de faire une technique que je n'avais jamais
02:48faite.
02:49On va dire que je ne savais pas défendre.
02:50Dès que je me mettais à défendre, ce n'était pas mon registre, plutôt un judo d'attaque.
02:57Je savais que ça allait être un match dur, peut-être long.
03:13J'étais partie, ça aurait pu durer des heures, je n'aurais pas lâché.
03:19J'avais une certaine sérénité tout en étant méfiante.
03:25Le match démarre, on sait que ça peut aller très vite.
03:27Et il y a une séquence où c'est une attaque en reprise, j'enclenche une action et ma
03:36main gauche ne tient pas, je ne l'emmène pas.
03:38Je me dis à ce moment-là, merde, tu as peut-être raté ta chance.
03:43Le match continue, il y a une première pénalité, j'en prends une, on était à 1-1.
03:50Il y a un moment où j'ai dit qu'il fallait essayer de faire la différence.
03:54Je prenais un petit peu le dessus, j'allais gagner du temps au sol.
03:58En gros, c'était le jeu du chat et de la souris.
04:02Je vais l'avoir, ce n'est pas possible sur le truc.
04:05Je mets une accélération à la saisie, même si on ne se marque pas, il y a des actions
04:09qui partent un peu dans tous les sens.
04:10À un moment, elle est un peu plus passive que moi, elle est sanctionnée une deuxième
04:14fois.
04:15Et là, il ne reste pas grand-chose.
04:16Elle va faire des attaques, elle m'attaque, je fais une fausse chute.
04:20Il ne se passe rien.
04:21Et là, je vois le chrono.
04:22Il doit rester 10 secondes ou un truc comme ça et j'ai senti ma tête changer.
04:30C'est fou.
04:31Je me dis, là, ça y est, elle est morte.
04:34En gros, le titre, il est pour moi, je me relève, ma tête change et je sais qu'elle
04:38n'a plus me toucher et que le match est fini.
04:41J'étais sereine et confiante sur le truc.
04:48Je ne pense pas avoir ressenti ça sur beaucoup de matchs.
05:06Même physiquement, j'étais brûlée sur tout un côté du visage.
05:17Je sais que quand j'étais rentrée, j'attendais qu'un truc, c'était partager ça dans la
05:21maison avec les filles, sauf que tout le monde dormait, il y avait une compète le lendemain
05:26et j'ai pris mon téléphone, je suis allée m'asseoir dans le jardin et j'ai écouté
05:30les messages.
05:31Et là, c'est vraiment là où je me suis dit, tu as quand même fait un truc énorme.
05:37Et là, tous les gens qui n'avaient pas pu venir m'ont témoigné leur affection sur
05:42un message, un texto ou un message vocal.
05:45J'ai prié, je suis restée une demi-heure, voire une heure à répondre aux gens.
05:52C'était vraiment mon moment à moi où je regardais les étoiles et je me disais, t'es bien là.