Louise Bourgoin

  • il y a 2 mois
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00:00Bonjour Louise Bourgouin. Bonjour. Alors oui, le public vous a découvert notamment en tant que Miss Météo
00:05dans le grand journal de Michel Deniso sur Canal+. C'était en 2006. Mais comme l'indique votre prénom,
00:09qui est donc un pseudo, car c'est votre deuxième prénom, vous êtes forte au combat et celui de faire de votre vie
00:15un havre de paix vous anime depuis très longtemps. Le vecteur d'apaisement reste votre métier de comédienne.
00:20Il est votre point d'équilibre, évidemment, avec votre famille. Il est surtout votre principal moyen de vous réaliser
00:25en tant que femme. Chaque rôle vous permet de vivre d'autres vies, de changer de personnalité.
00:29C'est d'ailleurs ce qu'il s'est passé avec la série Hippocrate et votre rôle de Chloé ou alors avec votre premier rôle
00:35de cagole un peu perverse dans La Fille de Monaco. C'était en 2008 ou encore en tant qu'héroïne insolente de la Belle Époque
00:40dans Les Aventures Extraordinaires d'Adèle Blansec. C'était en 2010. La diplômée des Beaux-Arts que vous êtes
00:46a trouvé sa place tranquillement et durablement. Aujourd'hui, vous êtes à l'affiche du film Le Médium d'Emmanuel Lascar.
00:52Vous êtes Alicia, une femme perturbée par le décès de son époux et par un sentiment profond de ressentir sa présence.
01:00Vous allez rencontrer Mickaël. Malgré la disparition de sa mère, il est un peu perturbé. Il va décider effectivement de prendre
01:08la relève, ce qu'il refusait de faire auparavant, d'assumer ce don qu'on lui a transmis pour pouvoir vous conquérir,
01:14parce que c'est quand même de ça qu'il s'agit. C'est une parabole sur la mort, engommant l'esprit sérieux. On rit du désastre.
01:21Est-ce que c'est ce qui vous a plu dans le scénario, finalement ?
01:24Ce qui m'a attirée tout de suite à la lecture, c'est plusieurs scènes que j'avais très, très, très envie de jouer, notamment des scènes
01:32justement de possession où cet homme qui a hérité des talents de médium de sa mère, comme vous le dites très bien, rencontre mon personnage
01:39qui vient de perdre son mari. Et il va accepter que mon mari, le fantôme de mon mari, s'installe en lui pour me parler. Et comme il est en même
01:47temps amoureux de moi, c'est une sorte de mélange entre le film Ghost et In the Mood for Love, c'est-à-dire que c'est un amour un peu
01:54contrarié. C'est un dialogue un petit peu comme ça, biaisé par justement les revenants, les gens qui nous hantent. Et j'ai trouvé que c'était
02:04une très belle parabole de ce que c'est aussi que de débuter une nouvelle histoire d'amour, parce qu'il y a toujours les fantômes de nos ex qui nous hantent.
02:13Bon, lui, il a perdu sa mère dans le film. Elle est toujours là. Ils sont aussi sa présence. Vous, c'est votre époux. J'ai l'impression qu'il y a une caisse de résonance
02:21par rapport à votre vie. Louise Bourgoin, vous avez perdu votre papa très, très jeune. Il est 62 ans, d'un infarctus. On sent aussi à travers ce film à quel point les gens
02:30qui ont disparu continuent de faire partie de nous. Est-ce que ça vous a marqué, ça aussi ?
02:35Bien sûr. Moi, ce qui m'avait beaucoup marqué à l'époque, c'est que j'avais fait beaucoup de choses pour lui plaire, pour lui faire plaisir et que du coup, sans ce regard-là,
02:43il fallait me réinventer une vie, faire les choses pour moi-même. Mais j'étais tellement conditionnée que je n'avais pas forcément envie de le faire pour moi.
02:50Donc, j'étais un peu déboussolée, je me souviens. Et c'est le cas du personnage dans le film. Elle dit à un moment que peut-être qu'elle-même, elle est morte aussi,
03:00et qu'il n'y a que lui qui la voit parce qu'il est médium, mais elle se sent en déconnexion avec la vie, avec le monde. Et donc, c'est quelque chose qu'on doit réapprendre à retrouver.
03:11Est-ce que la fragilité de l'existence, qui apparaît au moment du deuil, oblige à changer de regard sur la vie, sur l'essentiel ?
03:22Est-ce que cette fragilité nous oblige à avoir un nouveau regard ? De fait, je ne crois pas que ça nous oblige. C'est quoi qu'il arrive, on ne peut qu'avoir un nouveau regard.
03:31Je pense que cet état de vulnérabilité, il peut durer un an, deux ans. Il est assez long, c'est une assez longue période. Et c'est pour ça qu'il y a d'ailleurs plein de gens qui se font avoir dans ces moments-là,
03:42qui sont dans un état de vulnérabilité. C'est comme une sorte de reconstruction. Mais on peut le ressentir aussi quand on vient d'avoir un enfant. Sur de longs mois, on n'est encore pas tout à fait nous-mêmes.
03:54C'est un état un peu analogue, je trouve.
03:56La femme que vous êtes devenue, on sent qu'elle s'épanouit de plus en plus. J'ai eu l'impression qu'il y a eu un déclic avec Hippocrate et Chloé, qu'il s'est passé quelque chose avec ce rôle-là.
04:07Oui, c'est vrai, parce que d'abord, c'était la première fois que je jouais dans une série. Et le fait de développer un personnage comme ça pendant des années, parce que ça a quand même commencé il y a plus de six ans,
04:18et puis de pouvoir lui faire jouer énormément de choses. J'ai l'impression que j'ai balayé toutes les possibilités avec Chloé Antovska.
04:26C'est quelque chose qui vous comble en tant qu'acteur, parce que très souvent, on arrive pour un second rôle, un troisième rôle, et on vient, on repart.
04:35On n'a pas eu le temps de tout développer. On n'a pas bien cerné notre personnage. Et là, au contraire, avec une série, on connaît sur le bout des doigts son personnage.
04:43Et donc, on peut aller affiner, creuser. C'était vraiment une chance. Et c'est en plus une série qui a eu beaucoup de succès. Donc souvent, dans la rue, on parle de la série.
04:53Emmanuel Lascar, quand il parle de ce film, Le Médium, il explique qu'il s'est beaucoup inspiré de sa propre histoire.
04:59Enfant, en fait, par exemple, il était rejeté par les autres beaucoup parce qu'il aimait la lecture, il aimait le théâtre.
05:07Et donc, il n'était pas du tout... Il était complètement exclu du groupe. Et c'est en racontant ses propres histoires qu'il a réussi à s'épanouir.
05:15Je me posais la question de savoir ce que vous avez apporté le théâtre. Louise, vous étiez très timide. Et c'est en CM1 que vous avez découvert le théâtre.
05:22Oui, c'est vrai.
05:23Est-ce que ça vous a permis également, vous, de vous trouver ?
05:26Ça a été une vraie révélation pour moi, parce qu'effectivement, je me sentais un peu à part et trop sensible par rapport aux autres.
05:33Honnêtement, j'ai compris aujourd'hui que j'étais hypersensible à l'époque, mais en CM1, je pensais que j'avais un problème.
05:41Quand j'étais plus émue que les autres, en entendant une poésie, etc. Souvent, on se moquait de moi, d'ailleurs. C'était un motif de raillerie.
05:49Et puis, au théâtre, j'ai compris que c'était un atout. Donc, tout d'un coup, c'était devenu une qualité. C'est ça qui a complètement changé mon regard sur moi-même.
05:59Malheureusement, après, en sixième, ma mère a voulu que j'arrête de prendre des cours. Donc, ça a été une grande frustration. Et finalement, ça m'a rattrapée, âgée.
06:06Vous dites que vous dégagez une certaine violence.
06:08Ah oui, quand je souris pas, j'ai remarqué.
06:10Mais que cela n'a pas encore été exploité au cinéma. Ça veut dire quoi ?
06:13Un peu non-hypocrate, parce qu'elle peut être très dure, Chloé Antosca.
06:16Souvent, on m'a employée pour des rôles de maman qui assume qu'on a la tête sur leurs épaules. On m'a employée pour des rôles de fille plutôt sympathique, extravertie et joyeuse.
06:34Et puis, je trouve que j'ai une part un peu plus violente qui n'a pas encore été exploitée. J'adorerais jouer dans un film d'action.