Le "nouveau Front populaire" veut indexer les salaires sur l'inflation: bonne ou mauvaise idée ?
Les forces de gauche réunies dans le Nouveau Front populaire ont annoncé jeudi soir, après quatre jours de négociations, avoir "scellé" un "programme de gouvernement", dont l'indexation des salaires sur l'inflation.
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00:00Stéphane Pédrazi est avec nous ce matin. Stéphane, Fabien Roussel a donc dévoilé hier soir sur BFM TV quelques orientations du programme du Nouveau Front Populaire.
00:08L'accord est intervenu en fin de journée et il y a notamment au programme l'indexation des salaires sur l'inflation.
00:14Oui, le principe de l'indexation, c'est d'aligner les hausses de salaire sur la hausse des prix à la consommation.
00:20Par exemple, lorsque les prix dans les magasins augmentent de 5 %, automatiquement les salaires sont relevés de 5 %, ce qui évite de perdre du pouvoir d'achat.
00:28Alors, ça existe déjà en France pour le SMIC qui est automatiquement indexé sur l'inflation et d'ailleurs, il a été augmenté à 6 reprises depuis 2022.
00:37Il est passé de 10,48 euros de l'heure à pratiquement 11,65 euros aujourd'hui, ce qui représente une augmentation de 11,2 % sur deux ans.
00:46Bon, sur le papier, ça paraît relativement simple. Sur le plan économique, est-ce qu'il y a des risques ?
00:51Oui, alors il y a plusieurs risques. Le premier, c'est d'alimenter l'inflation puisque lorsque vous augmentez les salaires, ce n'est pas l'État qui paye la facture,
00:57ce sont les entreprises et pour pouvoir financer les hausses de salaires, beaucoup d'entreprises vont en réalité être obligées d'augmenter leurs tarifs
01:04et donc au final, les prix dans les magasins. Ça crée ce que les économistes appellent une boucle prix-salaire qui peut devenir dans certains cas incontrôlable.
01:12Donc, ça alimente l'inflation et puis ça pose aussi un problème aux entreprises qui exportent parce qu'avec les hausses de salaires en France,
01:18elles vont rapidement devenir moins compétitives à l'international. Leurs produits seront trop chers et donc le risque dans les cas extrêmes,
01:25c'est de devoir supprimer les emplois, voire de se retrouver tout simplement en faillite. Donc non, ça n'est pas sans risque effectivement d'un point de vue économique.
01:33Alors, il y a quand même des pays européens qui indexent les salaires sur l'inflation. Comment ça se passe chez eux ?
01:37Oui, il y en a beaucoup. Il y a la Belgique notamment, mais il y a aussi le Luxembourg, Malte, Chypre.
01:42Mais ce ne sont pas des gros pays.
01:43Oui, mais tous ces pays indexent, c'est intéressant, pratiquement l'ensemble des salaires sur l'inflation et pas uniquement les petits salaires.
01:50Alors, la France avait tenté l'expérience, rappelez-vous, début des années 80 lors de l'élection de François Mitterrand, expérience qui avait été quand même
01:56rapidement abandonnée en 1984 parce que justement, il y avait des effets collatéraux. En fait, pour que ça reste contrôlable, il faut savoir jusqu'à quel niveau
02:05on indexe les salaires. Et ça, c'est une information essentielle qui n'a pas été précisée par Fabien Roussel. Est-ce qu'on indexe les salaires jusqu'à une fois et demi le SMIC,
02:15deux fois, trois fois ? Ça, c'est vraiment important de savoir où est-ce qu'on place le curseur parce que là aussi, il y a un risque, c'est celui des effets de seuil.
02:22Si vous indexez les salaires jusqu'à deux fois le SMIC, les personnes qui gagnent juste au-dessus de deux fois le SMIC vont rapidement se faire rattraper par les augmentations.
02:31Et ça se produit. Ça s'est produit actuellement avec le SMIC. Les personnes qui étaient au-dessus se sont fait rattraper. Et au final, vous avez un sentiment de déclassement,
02:39un sentiment d'appauvrissement, ce qui est exactement l'effet inverse que celui qui est recherché. Donc vraiment, le diable est dans les détails, mais ça va être vraiment intéressant
02:47de savoir jusqu'où est-ce que le nouveau Front populaire veut indexer les salaires sur l'impression.
02:52A priori, on le saura à midi avec la grande conférence de presse de ce Front populaire. Merci Stéphane.