• il y a 6 mois
Quel homme, et quel parcours ! Fils d’un grand commis de l’Etat qui fut notamment préfet de Région, consul général, directeur adjoint du cabinet de Pierre Mendès-France, aux confins du Quercy et de la Corrèze, le jeune Alain est aussi le neveu de Pierre Juillet, éminence grise et toujours énigmatique de Georges Pompidou, grand ami de Marie-France Garaud - précisions que cette première conversation fut enregistrée quelques jours avant la disparition de Marie-France Garaud, dont le nom est plusieurs fois évoqué ici. Bachelier à 14 ans et déjà intrépide, Alain Juillet se lance très tôt dans l’armée dans la vie professionnelle chez Pernod-Ricard, où Charles Pasqua le recrute, et s’engage parallèlement dans une carrière militaire qui ne tarde pas à glisser discrètement au renseignement, sa véritable passion. Pendant plus d’un demi siècle, il va poursuivre une double carrière « d’espion », et de cadre puis de chef d’entreprise : excellentes couvertures pour voyager, comprendre le monde, fournir du « renseignement », notamment économique.. Le Président Jacques Chirac le nomme en 2002 directeur du Renseignement à la DGSE, puis lui confie peu après la mission capitale de créer un service de "renseignement économique », qu’il va mettre en place et qui va devenir sa passion. Il découvre année après année de multiples « pots aux roses », et ce qu’il nomme "les guerres non déclarées", guerres hybrides, à la fois économique et militaires, que nous mènent des alliés devenu concurrents et souvent adversaires...

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00:01:01A l'injuillé, je suis très heureux, je le dis avec un grand sourire parce que c'est vrai, un peu intimidé de vous recevoir parce que vous avez un côté monstrueux, vous savez tellement de choses.
00:01:11Il reste beaucoup à apprendre.
00:01:14Il reste beaucoup à apprendre, c'est vrai, mais on a beaucoup à apprendre de vous. Tout le monde sait que vous avez été directeur du renseignement, direction générale des services extérieurs, des GSE.
00:01:27Vous étiez déjà quelque chose au SDEC, on va voir tout cela, et puis vous avez lancé un concept d'intelligence économique.
00:01:34Vous avez créé le service et même créé la discipline, on peut dire, et qui est le capital pour déjouer des entreprises amies ou ennemies sur notre sol, sur notre appareil productif.
00:01:49Vous avez un concept qui m'intéresse beaucoup, notamment, c'est les guerres non déclarées.
00:01:55On va parler des guerres non déclarées, parce que ce sont les guerres que nous déclarent pas nos amis.
00:02:01Il y a les États-Unis, sur lesquels vous êtes très lucide, ce qui n'est pas fait pour nous déplaire, et puis même l'Allemagne.
00:02:07On verra comment l'Allemagne est intriguée contre le nucléaire français, mais avec vous, on apprend quantité de choses, quantité de choses.
00:02:15J'ai même envie de commencer par quelque chose, j'improvise, qui m'a sidéré.
00:02:21Après, on parlera un peu de votre vie, parce que les parachutistes, Pernod Ricard, tout ça, ça me passionne.
00:02:29Vous m'avez appris, récemment, que les services secrets français pendant la Deuxième Guerre mondiale,
00:02:37alors, on fait des trémolos sur le BCRA, créé à Londres, confié à de Vavrin, alias Passy, puis ensuite au général Vibault,
00:02:49qui sera directeur ensuite de l'Université. Mais, j'ai appris que pendant ce temps, les services français restés en France,
00:03:01sous l'autorité du gouvernement de Vichy, étaient extrêmement actifs, très malins, très patriotes, et qu'ils travaillaient pour les alliés,
00:03:13avec l'accord du gouvernement de Vichy. C'est passionnant ! Racontez-moi ça, parce que c'est après le 18 juin,
00:03:21c'est très intéressant, parce que l'histoire de la France pendant la Deuxième Guerre mondiale a été réécrite par les gaullistes, après la guerre.
00:03:34– Attention, moi, je suis gaulliste. – Mais attendez, j'ai une famille de gaullistes, moi aussi, je peux panier.
00:03:39– Mais on a raconté des bobards. – Oui, mais on a raconté des bobards,
00:03:42parce qu'il fallait raconter une histoire qui s'est révée, la légende.
00:03:47On a fait les mémoires d'outre-tombe, si vous voulez, de Napoléon, on les a refait un peu sur l'histoire de la guerre,
00:03:55la geste gaulliste, qui est exceptionnelle, bien entendu, mais on a volontairement oublié beaucoup d'autres choses.
00:04:03Et alors, quand vous connaissez les services en particulier, avant la guerre, il n'y avait pas de DST, il n'y avait pas de service de sécurité intérieur, extérieur,
00:04:13il y avait un deuxième bureau qui était chargé du contre-espionnage et qui était chargé du renseignement, dans tous les domaines.
00:04:20Le deuxième bureau a subi la défaite, comme les autres, et le 25 juin, donc 8 jours après l'appel du 18 juin,
00:04:34mais vous allez voir que ça n'a pas grand-chose à voir, mais ça s'est passé en même temps.
00:04:38Il y a eu l'armistice entre-temps.
00:04:40Oui, il y a l'armistice, et le colonel Rivet, qui commandait le deuxième bureau, réunit tout son personnel dans une petite ville près d'Agin qui s'appelle Bonne-Encontre.
00:04:51Bonne-Encontre.
00:04:53Bonne-Encontre. Et devant le Monument aux Morts, il leur fait jurer à tous qu'ils vont continuer le combat jusqu'à la victoire.
00:05:00Et j'ai découvert après qu'ils l'avaient fait avec l'accord du général Weygand.
00:05:05Weygand, qui était son chef dans la hiérarchie militaire, lui avait dit « Allez-y ».
00:05:10Donc à Bonne-Encontre, le deuxième bureau va se mobiliser en disant « Maintenant, on continue à se battre ».
00:05:16Et ils vont s'organiser, c'est très intéressant, ils vont s'organiser pour continuer la bataille avec...
00:05:22Alors ils sont en zone non occupée au départ, bien sûr. La zone de Vichy, que la partie nord est envahie par les Allemands.
00:05:30Et ils vont mettre la partie contre-espionnage à Marseille, avec à l'époque le capitaine-commandant Payolle.
00:05:38Et ils vont mettre le deuxième bureau, proprement dit, à Clermont-Ferrand, à côté de Clermont-Ferrand.
00:05:43Ils vont mener la bataille jusqu'à l'invasion de la zone libre par les Allemands, en 1942, là où le BCRA va devenir officiellement le truc.
00:05:53Eux, ils vont se battre. Et alors, qu'est-ce qu'ils vont faire ?
00:05:57Eh bien d'abord, ils vont faire du renseignement. Et même de Gaulle a dû reconnaître dans ses mémoires les mémoires de de Gaulle.
00:06:03Il le dit à un moment, il dit « Pendant les premiers temps », il ne dit pas que ça a duré deux ans,
00:06:09les Alliés n'ont disposé que des renseignements fournis par le deuxième bureau français.
00:06:14Pourtant, le général n'était pas très disposé à rendre hommage au gouvernement français.
00:06:18Là, il est obligé. Et les Anglais et les Américains appréciaient énormément le deuxième bureau.
00:06:25Ils avaient une grande confiance en lui.
00:06:27Ça s'appelait le SR, le service de renseignement.
00:06:29Oui, le service de renseignement, le SR, le deuxième bureau.
00:06:32Et ils ont fait des choses extraordinaires pendant cette période-là, les gens ne le savent pas.
00:06:37La fameuse machine Enigma, vous savez, on en parle beaucoup.
00:06:40C'était la machine servie à coder pour les Allemands.
00:06:43On n'en parle pas, mais c'est eux qui ont trouvé la machine et qui l'ont amenée.
00:06:46Ce n'est pas les Anglais.
00:06:48Les Anglais, ils ont découvert à la fin que le code en ayant les machines...
00:06:51Mais ils prétendent que c'est eux.
00:06:53Mais c'est absolument faux. C'est un mensonge éhonté.
00:06:56Encore un.
00:06:57Encore un. Alors qu'ils n'ont fait, eux, que...
00:07:00Comprendre, au point de vue codage mathématique, comment ça fonctionnait.
00:07:04La machine elle-même, la première machine qui a été ramenée d'Allemagne,
00:07:08c'est les Français qui l'ont ramenée.
00:07:10Les premiers qui ont entendu parler de cette machine, c'est les Français.
00:07:15Vous voyez, c'est des trucs comme ça.
00:07:17On a eu, par exemple, on a eu Keller, un ingénieur en télécom, en 40,
00:07:23qui a réussi, personne n'en parle, à se brancher
00:07:28sur les communications entre l'état-major allemand à Paris
00:07:31et Berlin, le PC d'Hitler.
00:07:34On savait toutes les communications.
00:07:37Quand ils ont eu le gouvernement Bouchy.
00:07:39Est-ce que c'était transmis à Londres ?
00:07:41Et ça partait à Londres.
00:07:43Donc si vous voulez, c'était...
00:07:45A tel point qu'en 42, quand la rivée, avec le deuxième bureau,
00:07:52ils sont tous partis à Alger, quand il y a eu l'invasion.
00:07:56Ils ont gardé leur réseau, mais là c'était des réseaux à ce moment-là.
00:08:00Et ils sont partis là-bas.
00:08:03Ils ont continué à travailler depuis Alger avec tout le monde.
00:08:06Et en 44, on l'oublie toujours, enfin on le sait pas.
00:08:10En 44, quand Eisenhower, le général Eisenhower,
00:08:14qui préparait le débarquement avec les Anglais,
00:08:17lui l'Américain et avec les Anglais.
00:08:19Ils ont convoqué Payolle, qui était le deuxième bureau,
00:08:24qui était à Alger, avec 30 officiers.
00:08:26Ils l'ont convoqué à Londres en lui disant, en lui montrant,
00:08:31alors que les Français ne le savaient pas.
00:08:33Le BCA ne l'avait pas vu.
00:08:35De Gaulle ne le savait pas.
00:08:37Ils ont montré les plans du débarquement en disant,
00:08:40voilà, il faut activer les réseaux tout autour,
00:08:43parce que voilà, on va débarquer, il faut qu'on sache ce qu'il se passe.
00:08:46Et ce sont les gens du deuxième bureau qui ont fait ça.
00:08:50Vous voyez, c'est...
00:08:52Sous l'autorité de Vichy, je continue à...
00:08:54Et c'était les anciens Vichy.
00:08:56Enfoncer mon clou, oui, parce que c'est intéressant sur le deuxième bureau.
00:08:59Et Rivelle a écrit après.
00:09:01Il l'a très bien expliqué.
00:09:04Il a dit, bon, il y a ceux qui sont partis à Londres
00:09:06pour faire la guerre contre l'Allemand de l'extérieur.
00:09:09Nous, nous sommes restés à l'intérieur pour la faire en France
00:09:12parce que nous avions, en tant qu'officiers, donné notre parole
00:09:15de toujours servir l'État français.
00:09:18Le respect de la parole de l'État.
00:09:20C'est la grande question du 18 juin, ça.
00:09:22Oui, mais c'est la grande question du 18 juin.
00:09:24Et on revient aussi, souvenez-vous, à l'époque de l'Algérie,
00:09:27les officiers qui ont lâché par rapport à ceux qui sont restés.
00:09:30À chaque fois, c'est les tiraillements dans l'armée
00:09:33entre ceux qui disent, non, j'ai donné ma parole, je ne peux pas.
00:09:35Dits traîtres, mais qui étaient tiraillés.
00:09:37Ils sont tiraillés.
00:09:38Et ça a été un tiraillement terrible.
00:09:40Vous voyez ?
00:09:41Et alors, il y a une femme aussi qui a donné beaucoup de renseignements.
00:09:43Ah, Marie-Hélène Fourcade.
00:09:45Celle-là, c'était le réseau Allianz.
00:09:47Oui.
00:09:48Et le réseau Allianz, c'est un réseau qui a été créé en 1940,
00:09:51dès le départ, par l'Ustono-Lako.
00:09:53Marie-Madeleine Fourcade, elle s'appelait Mérique au départ,
00:09:56c'était la secrétaire d'Ustono-Lako.
00:09:58Et quand l'Ustono-Lako a été prise, c'est elle qui a pris le relais.
00:10:01C'est devenu un des plus gros réseaux de résistance français.
00:10:05Toute la guerre, ça a fourni des informations aux Anglais et aux Américains tout le temps.
00:10:10À la fin de la guerre, on ne reconnaissait pas ce réseau.
00:10:14C'est-à-dire que les Français se sont battus.
00:10:16Il n'était pas BCRA ni Gaulliste.
00:10:18Il n'était pas Londres.
00:10:20Après, au bout de quelques années...
00:10:22Tout ça, ça veut dire que tous les Français se sont battus.
00:10:24L'immense majorité des Français n'ont pas accepté la défaite
00:10:27et ont aussitôt essayé là où ils ont pu.
00:10:30Mais chacun avec ses moyens.
00:10:32Ça, c'est formidable.
00:10:34Moi, ce n'est pas du tout dire qu'on ne va pas diminuer les uns ni les autres.
00:10:37Les gars qui ont été au BCRA ou ailleurs,
00:10:40les gars de Leclerc et autres, c'est formidable.
00:10:43C'est une aventure extraordinaire.
00:10:45Il faut aussi le voir que de l'autre côté,
00:10:47il y en a qui se sont battus tout le temps.
00:10:49Il y a une chose qu'on oublie.
00:10:51Là, il ne faut pas faire les comptes.
00:10:53Là, on ne compte pas les morts, comme on dit.
00:10:56Mais il faut quand même savoir que pendant la guerre,
00:10:59le deuxième bureau français,
00:11:01il y a un mémorial qui le rappelle à Ramatuelle, près de Saint-Tropez,
00:11:04il y a eu quand même 352 officiers, sous-officiers,
00:11:09des services de renseignement qui ont été tués par les Allemands,
00:11:13pris et exécutés.
00:11:15Parce qu'il y avait des sous-marins qui venaient prendre des filtres.
00:11:17Oui, alors Ramatuelle, c'est parce que le sous-marin Casabianca,
00:11:19il y avait plusieurs.
00:11:21Il y avait le Mars 1, il y en avait trois.
00:11:25Le Mars 1, il y avait la Perle,
00:11:27et le Casabianca qui venaient débarquer,
00:11:29prendre des agents, les emmener là,
00:11:31et débarquer tout le temps.
00:11:33Il y a toujours eu ces navettes.
00:11:35On n'a pas fini d'écrire l'histoire de la deuxième guerre.
00:11:37Ah oui, c'est extraordinaire.
00:11:39On a commencé au Nouveau Conservateur
00:11:41avec notre ami commun, François Martin.
00:11:43Bien sûr.
00:11:45À gommer quelques mensonges.
00:11:47Mais je crois qu'il faut, c'est d'autant...
00:11:49Il faut le savoir.
00:11:51C'est d'autant plus beau, j'ai oublié qu'on se dit,
00:11:53il y a eu tellement de gens formidables, il faut les saluer.
00:11:55Alors qu'on a tellement sali les Français.
00:11:57Exactement.
00:11:59Paxton et autres.
00:12:01Ils ont tiré dessus, c'est une honte.
00:12:03C'est une façon de diminuer la France.
00:12:05Bien entendu, comme toujours.
00:12:07Mais on a marché.
00:12:09C'est pour ça qu'il y a un devoir
00:12:11de mémoire et de vérité pour dire
00:12:13ne croyez pas tout ce qu'on vous a dit.
00:12:15Il y a des choses formidables qui ont pu être faites
00:12:17par les uns et par les autres, des hommes et des femmes incroyables.
00:12:19Saluez-les, respectez-les.
00:12:21Pensez que les gens se sont battus.
00:12:23C'est le devoir de vérité.
00:12:25Alors, continuons.
00:12:27Il y a un paradoxe chez vous, je trouve.
00:12:29C'est que vous avez occupé,
00:12:31je n'ai pas tout dit,
00:12:33parce que la liste de vos...
00:12:35Il y a beaucoup de choses.
00:12:37Vous avez été enseignant,
00:12:39vous avez été chef d'entreprise.
00:12:41On va avoir ça autant qu'on le peut
00:12:43en égrenant votre vie.
00:12:45Mais vous êtes sorti de l'ombre,
00:12:47si on peut dire, depuis quelques années.
00:12:49Et alors là, maintenant,
00:12:51on vous voit beaucoup dans les médias,
00:12:53plutôt les médias de réinformation.
00:12:55En effet, il faut que les Français,
00:12:57les bons Français,
00:12:59comme on disait Naguère,
00:13:01comme il faut continuer à dire d'ailleurs,
00:13:03qui veulent servir leur pays,
00:13:05le pire des mots
00:13:07qui accablent notre pays,
00:13:09c'est le mensonge, au fond.
00:13:11C'est la désinformation.
00:13:13C'est la fabrication de toute pièce
00:13:15d'une opinion par les médias.
00:13:17Je sais que vous vous y intéressez beaucoup.
00:13:19D'ailleurs, ça fait partie de votre métier.
00:13:21Absolument.
00:13:23C'est ce qu'on appelle nous l'influence
00:13:25et la désinformation.
00:13:27Ça fait partie de la guerre.
00:13:29Et si nous voulons faire quelque chose
00:13:31pour notre pays, il faut investir
00:13:33dans des entreprises comme la vôtre.
00:13:35Des entreprises, des médias,
00:13:37Télé Liberté ou autres.
00:13:39Mais c'est là que se situe
00:13:41le programme de la résistance.
00:13:43Et c'est très intéressant.
00:13:45Oui, parce qu'il faut donner les moyens.
00:13:47Il faut donner à ces médias,
00:13:49modernes, nouveaux,
00:13:51de s'exprimer.
00:13:53Parce qu'ils sont en concurrence
00:13:55avec des gens qui n'hésitent pas
00:13:57à écraser sous leur puissance
00:13:59tout ce qui existe.
00:14:01Vous êtes sorti du bois un peu tard.
00:14:03Oui.
00:14:05Mais vous avez toute votre expérience.
00:14:07Sur Wikipédia,
00:14:09on dit que vous êtes
00:14:11complotiste.
00:14:13Oui.
00:14:15C'est ridicule.
00:14:17C'est un véritable scandale.
00:14:19On dit même que vous êtes un agent russe.
00:14:21Quand on me connaît,
00:14:23quand on sait,
00:14:25quand on sait tout ce que j'ai fait,
00:14:27dire que je suis un agent russe,
00:14:29c'est quand même invraisemblable.
00:14:31Je vais vous raconter l'histoire.
00:14:33Voilà un bel exemple des informations.
00:14:35Je connais les journalistes de Challenge
00:14:37depuis des années
00:14:39et régulièrement ils m'appellent,
00:14:41comme beaucoup d'ailleurs, en me disant
00:14:43vous qui connaissez un certain nombre de choses,
00:14:45est-ce que vous êtes au courant de ça ?
00:14:47Et en général, je leur donne les tuyaux.
00:14:49Il y en a un qui s'appelle Isambard.
00:14:51Je l'ai donc aidé un certain nombre de fois.
00:14:53Et je découvre
00:14:55dans un article de Challenge
00:14:57que j'étais classé comme pro-russe,
00:14:59enfin en gros agent russe.
00:15:01Alors je suis
00:15:03scandalisé.
00:15:05J'envoie une lettre aux deux journalistes
00:15:07dont Isambard en disant
00:15:09écoutez, je ne comprends pas
00:15:11parce que vous me connaissez depuis longtemps.
00:15:13Et vous leur rendez service ?
00:15:15Vous savez très bien que je n'ai rien à voir avec les russes.
00:15:17Et vous me parez
00:15:19vraiment
00:15:21d'affirmations pour le moins discutables.
00:15:23Et alors
00:15:25la réponse, ils me disent
00:15:27oui mais vous comprenez, il y a deux choses.
00:15:29D'abord, vous avez fait des émissions
00:15:31sur RT, la télévision russe,
00:15:33en France.
00:15:35À quoi je vous réponds ? Je vous rappelle qu'à cette
00:15:37époque-là, le président de la République
00:15:39recevait M. Poutine à Versailles.
00:15:41Donc j'étais
00:15:43à la ligne du parti,
00:15:45d'autant plus que
00:15:47on voulait, à l'époque,
00:15:49on voulait resserrer les liens avec la Russie.
00:15:51Donc vous ne pouvez pas me dire.
00:15:53D'une part, dans mon émission, je ne parlais jamais
00:15:55de la France, je parlais de l'international.
00:15:57Et il me dit, oui mais alors
00:15:59en plus, vous fréquentez des gens,
00:16:01des complotistes. J'ai dit, pardon, je fréquente
00:16:03des complotistes ? Il me dit, oui,
00:16:05vous avez fait une émission
00:16:07avec
00:16:09l'amiral
00:16:11Dufourque,
00:16:13qui est un complotiste notoire.
00:16:15J'ai dit, comment ? Dufourque,
00:16:17il était
00:16:19amiral à la
00:16:21stratégie, à l'OTAN, à Naples
00:16:23et vous dites que c'est un complotiste
00:16:25au pro-russe ? Non mais attendez, là on est fou.
00:16:27C'est n'importe quoi.
00:16:29Mais voyez l'amalgame.
00:16:31Donc vous fréquentez
00:16:33quelqu'un, donc vous êtes comme lui.
00:16:35L'essentiel, c'est votre courage.
00:16:37Parce que je ne vais
00:16:39pas vous déplaire, j'espère, en disant
00:16:41que vous avez beaucoup vécu,
00:16:43vous avez votre âge,
00:16:45vous êtes octogénaire,
00:16:47vénérable.
00:16:49Enfin, on verra,
00:16:51quoi vénérable, aussi.
00:16:53Et puis,
00:16:55vous êtes non seulement grand-père, mais arrière-grand-père.
00:16:57Oui, absolument. Combien de fois ?
00:16:59Une fois. Ah, une fois.
00:17:01C'est pas mal.
00:17:03Vous êtes un arrière-grand-père.
00:17:05C'est rare, votre âge
00:17:07n'est quand même pas très avancé.
00:17:0925 ans.
00:17:11Et ça donne un poids extraordinaire
00:17:13à ce que vous dites. C'est pour ça que c'est
00:17:15ridicule l'accusation.
00:17:17Parce que
00:17:19vous avez décidé, vous auriez pu vous retirer,
00:17:21mais non.
00:17:23Vous servez le pays jusqu'au bout, et là,
00:17:25vous voulez dire les vérités
00:17:27que vous savez. Ça, c'est formidable.
00:17:29Vous continuez. Je suis logique.
00:17:31J'ai donné des cours pendant un certain
00:17:33nombre d'années dans ma vie, dans des grandes
00:17:35écoles. Partout, à Sciences Po, à l'ENA,
00:17:37à l'école de la Banlieue francaise.
00:17:39À des universités françaises, étrangères, j'en étais partout.
00:17:41Et je l'ai fait
00:17:43parce que j'aimais bien transmettre.
00:17:45J'ai toujours aimé transmettre le peu
00:17:47que je sais, et essayer de le transmettre aux autres
00:17:49pour qu'ils soient meilleurs que moi.
00:17:51Parce que c'est le but de l'histoire.
00:17:53Il faut qu'on aide nos concitoyens
00:17:55et les plus jeunes à devenir meilleurs.
00:17:57Et quand j'ai arrêté
00:17:59mes activités, je me suis dit,
00:18:01bon, qu'est-ce que...
00:18:03Et je me suis dit, il y a une chose sur laquelle je peux
00:18:05être encore utile, c'est d'expliquer
00:18:07un certain nombre de choses, parce qu'avec mon expérience,
00:18:09effectivement, je suis capable
00:18:11d'abord d'identifier
00:18:13les faits, j'ai un bon réseau d'informateurs,
00:18:15donc j'ai des bonnes informations,
00:18:17je suis capable de les recouper
00:18:19pour arriver à me faire une idée factuelle
00:18:21de ce qui se passe, et tenter
00:18:23d'expliquer les choses de manière claire.
00:18:25– Et puis Alain Juillet, vous avez une boussole extraordinaire.
00:18:27C'est le service du pays.
00:18:29– Ah oui.
00:18:31– Vous l'avez biberonné.
00:18:33– Oui, mais ça, je suis né là-dedans.
00:18:35– C'est votre famille. Vous parlez de la transmission,
00:18:37mais vous êtes transmis.
00:18:39– Mais moi, je suis né là-dedans, moi.
00:18:41– Mais oui, alors votre père était…
00:18:43– Vous savez, mon arrière-grand-père maternel…
00:18:45– Alors, commençons par votre grand-père,
00:18:47si vous voulez.
00:18:49– Mon arrière-grand-père paternel,
00:18:51oui, arrière-arrière-grand-père paternel,
00:18:53non, arrière-grand-père paternel,
00:18:55oui, c'est ça,
00:18:57était sous-officier
00:18:59puis officier de gendarmerie,
00:19:01il avait fait la conquête de l'Algérie, c'est vous dire,
00:19:03il est mort à 99 ans,
00:19:05quand même,
00:19:07et c'était…
00:19:09Et quand j'étais tout petit,
00:19:11il me racontait
00:19:13les batailles de Napoléon,
00:19:15parce qu'il l'avait entendue par ses parents,
00:19:17c'est vous dire que j'ai
00:19:19biberonné la France.
00:19:21– C'est vraiment la transmission,
00:19:23la transmission en grandeur nature.
00:19:25– Voilà, et du côté
00:19:27de ma famille, de ma mère,
00:19:29alors là, c'est encore
00:19:31deux générations avant, j'en ai un,
00:19:33quand même, qui était capitaine de huissard de Napoléon,
00:19:35qui a été fait chevalier de légion d'honneur,
00:19:37et on a tous ses mémoires
00:19:39où il raconte
00:19:41Moscou, il raconte tout.
00:19:43– Bon sang ne saurait mentir.
00:19:45– C'est vrai, alors mon grand-père paternel,
00:19:47lui, c'était un militaire,
00:19:49il avait été avec De Gaulle
00:19:51à Saint-Cyr, à l'époque,
00:19:53on ne s'appelait pas comme ça,
00:19:55il avait fait l'école des officiers.
00:19:57– En 1910, oui. – Oui, exactement.
00:19:59Ensuite, il a fait la première guerre mondiale,
00:20:01il a été grièvement blessé,
00:20:03fait prisonnier par les Allemands,
00:20:05après, il est devenu préfet,
00:20:07parce que les officiers
00:20:09qui avaient été grièvement blessés,
00:20:11s'ils pouvaient travailler encore,
00:20:13on les mettait dans d'autres postes dans l'administration,
00:20:15il a été préfet, il a été chef de cabinet,
00:20:17directeur de cabinet d'un premier ministre,
00:20:19Tardieu, André Tardieu, donc si vous voulez,
00:20:21il y avait tout ça, voilà.
00:20:23Mon oncle, Pierre-Juillet,
00:20:25lui, il a été le conseiller.
00:20:27– Est-ce qu'on peut parler un peu de Pierre-Juillet ?
00:20:29D'abord votre père, votre père aussi était au fonctionnaire,
00:20:31ministre du potentiel, il a été préfet de région.
00:20:33– Préfet de région à Limoges
00:20:35et à Orléans,
00:20:37il a été préfet de région,
00:20:39il a été aussi diplomate,
00:20:41enfin, si vous voulez,
00:20:43je suis d'une famille, moi.
00:20:45– Et le frère de votre père,
00:20:47Pierre-Juillet,
00:20:49c'est une célébrité de la Ve République,
00:20:51il vous a transmis quelque chose,
00:20:53j'imagine que vous l'avez bien connu.
00:20:55– Non seulement je l'ai bien connu,
00:20:57mais c'était mon parrain,
00:20:59et dans la famille, on vous dira,
00:21:01je suis celui qui lui ressemble le plus,
00:21:03alors c'est très prétentieux de ma part,
00:21:05parce que c'était un très grand monsieur,
00:21:07mais c'est vrai que j'étais très très proche de lui.
00:21:09– Attention, vous dites que vous lui ressemblez,
00:21:11mais,
00:21:13personnage formidable,
00:21:15de lucidité politique,
00:21:17de rapidité de jugement,
00:21:19– Il était exceptionnel.
00:21:21– Et qui a été conseiller de Pompidou,
00:21:23à la fois à Matignon,
00:21:25et ensuite à l'Elysée,
00:21:27puis un peu conseiller de Chirac.
00:21:29– Oui, avec Marie-France Garot,
00:21:31ils ont fait Chirac.
00:21:33– Ils ont fait la politique de la France,
00:21:35et ils ont fait Jean Chirac.
00:21:37Bref, vous dites que vous lui ressemblez,
00:21:39mais je ne crois pas,
00:21:41parce qu'il passe pour avoir eu
00:21:43très mauvais caractère.
00:21:45Il se fâchait quand on ne le suivait pas,
00:21:47oui c'est ça, je crois que vous êtes
00:21:49beaucoup plus gentil,
00:21:51parce que Marie-France Garot,
00:21:53qui est une de nos amis communs,
00:21:55m'a dit, c'était drôle d'ailleurs,
00:21:57parce qu'il conseillait,
00:21:59il allait voir ses moutons,
00:22:01disait Marie-France Garot.
00:22:03– C'est le seul conseiller,
00:22:05à ma connaissance en tout cas,
00:22:07qui était proche du pouvoir,
00:22:09il était avec Pompidou.
00:22:11– Importantissime au cœur de la République.
00:22:13– Il a été avec Pompidou,
00:22:15il a été avec Chirac,
00:22:17et quand on ne l'écoutait pas,
00:22:19quand il voyait qu'on ne l'écoutait pas,
00:22:21il faisait une colère,
00:22:23il partait chez lui,
00:22:25et puis il partait voir ses moutons,
00:22:27il y restait.
00:22:29Et après, à chaque fois c'était la même chose,
00:22:31ce n'est pas lui qui revenait.
00:22:33– On l'appelait.
00:22:35– On l'appelait, on disait,
00:22:37arrête de bouder, arrête de faire ton mauvais caractère,
00:22:39il faut que tu reviennes.
00:22:41– Alors ils étaient ses moutons.
00:22:43– Ils s'occupaient de ses moutons.
00:22:45– Mais où sont-ils, à Saint-Cervé ?
00:22:47– Dans la Creuse, mon grand-père paternel
00:22:49avait une très belle propriété dans la Creuse,
00:22:51qu'il avait eu achetée quand il était préfet,
00:22:53il n'avait jamais payé,
00:22:55par rapport à maintenant.
00:22:57– Quand il était préfet de Limoges ?
00:22:59– Le préfet c'est quelque chose.
00:23:01Et donc mon grand-père avait acheté cette propriété,
00:23:03dans la Creuse.
00:23:05– Ah, votre grand-père ?
00:23:07– Mon grand-père, et il l'a donnée,
00:23:09et dans l'héritage, si vous voulez,
00:23:11c'est mon oncle qui a eu la propriété.
00:23:13– Pierre Juillet.
00:23:15– Pierre Juillet.
00:23:17Et il avait développé cette propriété,
00:23:19en particulier en faisant de l'évelage de moutons
00:23:21– Comme Marie-France Garot d'ailleurs.
00:23:25– Mais elle a été inspirée par lui.
00:23:27– Mais oui.
00:23:29Moi je l'ai bien connue quand elle était députée,
00:23:31et sur les fiches d'hôtel à l'époque à Bruxelles,
00:23:33on avait le même hôtel, Marie-France Garot et moi,
00:23:35sur les fiches d'hôtel,
00:23:37elle mettait…
00:23:39– Elle vendait moutons ?
00:23:41– Non, agricultrices.
00:23:43C'était les noix.
00:23:45Elle avait d'immenses hectares de noix
00:23:47dans le sud de la Vendée.
00:23:49Et Marie-France Garot m'a décrit toujours votre rôle
00:23:51comme un personnage auquel il ne fallait pas trop toucher,
00:23:53mais très lucide.
00:23:55– Oui, mais de une lucidité terrible.
00:23:57C'est un homme extrêmement cultivé,
00:23:59qui était un passionné d'histoire.
00:24:01Il lisait énormément, comme toujours.
00:24:03– C'est ça la politique.
00:24:05– Donc il connaissait l'histoire,
00:24:07toute l'histoire politique du monde,
00:24:09tous les grands hommes, leurs pensées,
00:24:11il connaissait tout.
00:24:13Il avait une très bonne mémoire,
00:24:15et il avait une capacité à lire.
00:24:17Et il avait une capacité d'analyse,
00:24:19il fait partie des rares individus,
00:24:21j'en ai eu quelques-uns dans ma vie
00:24:23qui m'ont impressionné sur le plan de l'analyse.
00:24:25Mais lui, c'était incroyable.
00:24:27– Et Marie-France Garot aussi vous a impressionné, non ?
00:24:29– Ah oui, mais c'était…
00:24:31– Moi, il m'a beaucoup appris, je dois dire.
00:24:33– Il faisait une équipe très intéressante.
00:24:35Parce qu'elle, elle parlait beaucoup.
00:24:37– Un couple terrible.
00:24:39– Lui, il parlait peu.
00:24:41Lui, il n'aimait pas qu'on le voit.
00:24:43Si vous voyez, on le voit pratiquement
00:24:45il n'y a pas de photo où on le voit.
00:24:47– Si on le voit avec sa cape de dos.
00:24:49– Avec la cape de dos, parce qu'il a été pris comme ça.
00:24:51Mais en général, il n'aimait pas qu'on prenne en photo,
00:24:53il n'aimait pas qu'on le voit,
00:24:55il aimait rester en arrière.
00:24:57– Déjà les services secrets presque.
00:24:59– D'ailleurs, il a été un moment.
00:25:01Et elle, par contre, c'était celle qui était devant
00:25:03parce qu'elle aimait bien prendre la lumière,
00:25:05comme on dit.
00:25:07Et puis elle n'avait vraiment pas peur.
00:25:09Elle ne loupait pas les gens
00:25:11quand il s'agissait de leur dire leur cas de vérité.
00:25:13Ça ne l'impressionnait pas du tout.
00:25:15C'était une équipe très intéressante.
00:25:17– Et qui ont fait Chirac, comme vous dites.
00:25:19Et puis après, ils ont perdu la maîtrise, hélas.
00:25:21– Oui, oui.
00:25:23Mais je crois que ça a été...
00:25:25Bon, à l'époque,
00:25:27quand on regarde l'histoire,
00:25:29c'est après l'appel de Cochin.
00:25:31Vous savez, quand Chirac a eu un accident de voiture
00:25:33en Corrèze.
00:25:35Il a glissé sur une plaque de verglas.
00:25:37Il a été accidenté.
00:25:39Il a été mis à l'hôpital.
00:25:41Et à l'époque, ils lui ont fait faire un...
00:25:43Ils avaient préparé pour lui
00:25:45une déclaration qui était évidemment
00:25:47anti-jusquardienne, ça c'est clair.
00:25:49– Oui, et très anti-fédéraliste aussi.
00:25:51– Oui, mais derrière Jusquard,
00:25:53c'est ça. Derrière Jusquard, c'était l'Europe
00:25:55qui était visée, le système européen
00:25:57dans lequel on allait.
00:25:59Les collègues, ils étaient vraiment contre.
00:26:01Et ça a été...
00:26:03Je pense que moi, quand on voit maintenant
00:26:05ce qui se passe...
00:26:07– C'était la vérité.
00:26:09Ils désignaient les Etats-Unis, d'ailleurs.
00:26:11Derrière l'Europe, ils désignaient déjà
00:26:13la main des Etats-Unis.
00:26:15– Exactement, c'était clair.
00:26:17– L'appel de Cochin.
00:26:19– Exactement, c'était très clair.
00:26:21Ils avaient raison.
00:26:23Une fois de plus, à long terme,
00:26:25ils avaient raison.
00:26:27Mais à l'époque, c'est vrai que Mme Chirac
00:26:29qui ne pouvait pas voir Marie-France Garot...
00:26:31– Elle avait peut-être quelques raisons.
00:26:33– Vous savez, avec le président Chirac,
00:26:35de toute manière...
00:26:37Et tout était possible.
00:26:39Mais c'est certes qu'elle ne pouvait pas la voir.
00:26:41Et elle en a profité.
00:26:43Elle a profité en disant
00:26:45« Comment tu as pu signer un truc pareil ?
00:26:47Ce sont des affreux ».
00:26:49Et du coup, elle a réussi,
00:26:51c'est la première fois,
00:26:53à pousser son mari à lâcher
00:26:55ses conseillers.
00:26:57– Et puis c'était le prélude
00:26:59à une élection européenne.
00:27:01Déjà, la première, c'était en 79.
00:27:03Et le RPR, à l'époque,
00:27:05n'a pas fait un gros score. Ils ont fait 15%.
00:27:07– Non, non, non, pas du tout.
00:27:09– Donc, Chirac s'est dit « Je ne peux pas continuer sur cette ligne. »
00:27:11– Chirac, à l'époque...
00:27:13– Et après sont arrivés Juppé, Balladur, etc.
00:27:15– Et puis, je vais vous dire une chose.
00:27:17Chirac, quand Pompidou,
00:27:19ça c'est sûr,
00:27:21a dit à mon oncle
00:27:23et à Marie-France Garot
00:27:25« Occupez-vous de Chirac.
00:27:27On va en faire un Premier ministre. »
00:27:29Il ne parlait pas de président.
00:27:31Donc, ils ont commencé à lui faire faire
00:27:33des postes de ministre.
00:27:35– L'agriculture, c'est très formateur.
00:27:37L'archaïque.
00:27:39– Oui, mais à l'époque, c'était un poste très important.
00:27:41Un poste stratégique.
00:27:43Parce qu'une bonne partie de la France était intéressée par ça.
00:27:45Et il a fait l'intérieur.
00:27:47Ils l'ont fait faire une progression
00:27:49dans les ministères
00:27:51pour le préparer à être Premier ministre.
00:27:53– Avec l'accord de Pompidou.
00:27:55– Avec l'accord de Pompidou qui poussait derrière.
00:27:57Parce que Pompidou disait « Celui-là, c'est le meilleur.
00:27:59On va en faire un Premier ministre.
00:28:01»
00:28:03Ça arrivait à un certain moment.
00:28:05Chirac avait suffisamment d'expérience.
00:28:07Il a dit « Maintenant, je prends ma liberté. »
00:28:09Normal.
00:28:11Même si eux ne l'ont pas appréciée.
00:28:13– Vous l'avez bien connu, Chirac ?
00:28:15– Très bien. Il m'aimait bien.
00:28:17Il m'appelait Alain, moi.
00:28:19– Pour vous confier le renseignement,
00:28:21il fallait avoir confiance en vous.
00:28:23Parce que c'était un des postes
00:28:25les plus névralgiques de la République.
00:28:27Et vous êtes très enraciné aussi.
00:28:29C'est très intéressant.
00:28:31Votre oncle, Pierre,
00:28:33qui était au sommet du pouvoir,
00:28:35dans les couloirs.
00:28:37– Oui, très puissant.
00:28:39– Et qui garde le contact.
00:28:41Comme Marie-France Garot, d'ailleurs.
00:28:43Elle, avec la Vendée, s'est noyée.
00:28:45Et sa culture de noyer,
00:28:47que ce soit les choses.
00:28:49Et lui, avec ses moutons,
00:28:51dans la creuve.
00:28:53Vous êtes resté enraciné aussi.
00:28:55– Moi, je suis…
00:28:57– Lotois, un peu ?
00:28:59– Ah oui, absolument.
00:29:01Je me sens très lotois.
00:29:03Je suis très fier.
00:29:05J'habite un petit village
00:29:07à côté de Saint-Cyrène,
00:29:09à côté de Rocamadour.
00:29:11– Oui, Rocamadour, au nord de Figeac.
00:29:13– Au nord de Figeac, Rocamadour,
00:29:15Panirac, le bout de Panirac,
00:29:17Rocamadour, le pèlerinage.
00:29:19– Pas très loin du Cantal.
00:29:21– Pas loin du tout.
00:29:23Je suis à 40 km du Cantal,
00:29:25je suis à la pointe de l'Auvergne.
00:29:27Le Quercy, vous savez, cette partie-là,
00:29:29c'est presque la pointe de l'Auvergne.
00:29:31C'est pas l'Auvergne, mais c'est juste à côté.
00:29:33– C'est cette partie merveilleuse de la France.
00:29:35– C'est un coin magnifique.
00:29:37Moi, j'adore ce coin parce qu'il est beau.
00:29:39– Il y a le Rouergue au sud, le Tarn.
00:29:41– L'architecture est belle.
00:29:43– C'est le cœur.
00:29:45– Le pays est magnifique.
00:29:47Les gens, moi, j'aime bien les gens
00:29:49avec leur côté à la fois un peu rugueux,
00:29:51mais en même temps…
00:29:53J'adore ses racines, si vous voulez.
00:29:55– Vous y allez souvent ?
00:29:57– Oui, j'ai ma maison, j'y suis,
00:29:59j'essaie d'y aller 20-30% de mon temps, quand même.
00:30:01– Ah oui, c'est bien.
00:30:03– Et vous voyez, à côté de chez moi,
00:30:05il y a un petit village qui s'appelle Carénac.
00:30:07Et à Carénac, il y avait,
00:30:09à l'époque du roi,
00:30:11il y avait le précepteur Fennelon,
00:30:13le précepteur des enfants du roi,
00:30:15qui était là-bas,
00:30:17qui vivait là-bas et qui a écrit Télémac.
00:30:19– Ah, mais il y a le château de Fennelon,
00:30:21évidemment, évidemment.
00:30:23Ça, c'est du côté de Souillac, alors.
00:30:25Magnifique château de Fennelon.
00:30:27À visiter, d'ailleurs, je l'ai dit en passant.
00:30:29– Oui, c'est du château à visiter.
00:30:31– Superbe, j'adore.
00:30:33– C'est la vraie France, si vous voulez.
00:30:35Pour moi, c'est la vraie France, avec ses châteaux.
00:30:37– Ses côtés d'Ordogne, ses côtés Périgordes.
00:30:39– Oui, côté Périgordes, côté Quercy.
00:30:41– C'est les confins du Quercy et du Périgordes.
00:30:43– Vous savez, les gens étaient très pauvres dans ces coins-là.
00:30:45Très pauvres.
00:30:47Ils partaient se battre.
00:30:49Beaucoup ont fait fortune en allant comme militaires.
00:30:53Ils revenaient, ils se construisaient un petit manoir.
00:30:55Et c'était devenu des notables du coin.
00:30:57– On se demande pourquoi les Français vont partir en vacances.
00:31:01– Je pense que…
00:31:03– En France, ils ont les plus beaux endroits du monde.
00:31:05– Exactement, exactement.
00:31:07Je ne comprends pas.
00:31:09Les écologistes devraient faire la promotion du tourisme en France,
00:31:11au lieu de nous raconter n'importe quoi.
00:31:13– Ça vaudrait promotion de la France.
00:31:15– Oui, ça, c'est insupportable.
00:31:17C'est insupportable.
00:31:19C'est là qu'on voit bien qu'il y a un problème.
00:31:21Il y a un problème.
00:31:23– Mais vos études, vous ne les faites pas là-bas.
00:31:25Vous ne les faites pas dans le Lot, quand même.
00:31:27– Je fais une partie parce que je travaille.
00:31:29J'ai mon bureau là-bas.
00:31:31J'ai pas mal de bouquins aussi là-bas.
00:31:33Maintenant, on a l'Internet qui nous permet d'avoir des liaisons.
00:31:35– C'est drôle ce que vous venez de dire.
00:31:37Parce que je parle de vos études comme étudiants.
00:31:39Et vous, vous avez compris ma question, comme les études,
00:31:43vous restez, vous continuez à étudier.
00:31:45– Je continue à étudier.
00:31:47– C'est formidable.
00:31:49– Tout le temps, je m'informe, j'essaie de comprendre,
00:31:51de compléter des choses que j'ai apprises dans le temps.
00:31:53Je suis très curieux de nature.
00:31:55J'ai envie d'apprendre en permanence.
00:31:57En permanence, je me dis,
00:31:59il y a des choses à apprendre
00:32:01qui me permettront de mieux comprendre.
00:32:03– C'est la phrase de Montaigne.
00:32:05La vieille ne voulait pas mourir
00:32:07car elle en apprenait tous les jours.
00:32:09Apprendre, c'est vivre.
00:32:11– Oui, mais c'est ça.
00:32:13J'apprends mes études.
00:32:15Moi, j'ai été…
00:32:17– Vous n'étiez pas au lycée à Saint-Cyril.
00:32:19Il ne doit pas y avoir de lycée à Saint-Cyril.
00:32:21– Non, parce que mon père était diplomate.
00:32:23À cette époque-là, il était préfet, puis diplomate.
00:32:27Dans la préfectorale, puis dans la diplomatie.
00:32:29Moi, je voyageais si vous voulez.
00:32:31Quand j'étais gosse,
00:32:33j'étais en Algérie,
00:32:35j'étais à Constantine avec mon père.
00:32:37J'ai été au Brésil.
00:32:39Ça, c'était une aventure à l'époque.
00:32:41Dans les années 1952, j'étais au Brésil.
00:32:43– Quel Brésil ? Rio ?
00:32:45– Les deux.
00:32:47Rio et São Paulo.
00:32:49J'étais au lycée à São Paulo.
00:32:51J'ai passé un an à l'lycée à São Paulo.
00:32:53Vous voyez ?
00:32:55Ça, c'était sympa.
00:32:57– Vous passez votre bac à Barcelone.
00:32:59– Oui, parce qu'après, mon père a été…
00:33:01Il est revenu en France.
00:33:03À un moment, on est partis à Barcelone.
00:33:05Mon père a été consul général à Barcelone.
00:33:07J'ai passé mon bac à Barcelone.
00:33:09J'avais un peu moins de 15 ans, oui.
00:33:11– Vous avez été bachelier à 15 ans ?
00:33:13– Oui.
00:33:15Mais je n'étais pas un grand travailleur.
00:33:17– Mais il y avait quelque chose quand même.
00:33:19C'est la soif d'apprendre.
00:33:21– Vous savez, j'étais à l'époque…
00:33:23– Quand on aime apprendre, on apprend vite.
00:33:25– Oui, mais voilà.
00:33:27D'un, j'apprenais vite.
00:33:29D'une part.
00:33:31Parce que j'ai bien vécu.
00:33:33Moi, Barcelone, j'ai vraiment bien vécu.
00:33:35C'était une vie formidable.
00:33:37– Vous étiez très libre en Espagne,
00:33:39sauf si vous parliez de politique.
00:33:41On faisait ce qu'on voulait en Espagne.
00:33:43Sauf si on parlait de politique.
00:33:45Alors là, par contre, les problèmes commençaient.
00:33:47– Je voulais parler de politique contre Franco.
00:33:49– Contre Franco, bien sûr.
00:33:51Ah ben là, si vous étiez pour Franco,
00:33:53il n'y avait aucun problème.
00:33:55– Le dernier voyage du général
00:33:57est une visite à Franco,
00:33:59quelques mois avant de mourir.
00:34:01C'est le dernier acte public du général.
00:34:03Il est allé passer…
00:34:05– Plus d'un mois.
00:34:07En Espagne, il a rencontré Franco.
00:34:09Il lui a dit,
00:34:11vous avez été positif pour l'Espagne.
00:34:13– Mais oui.
00:34:15– Ça a rendu Malraux fou de rage.
00:34:17– Mais non, mais il avait raison.
00:34:19– Mais c'était intéressant.
00:34:21– Le général de Franco disait,
00:34:23il a évité de mettre son pays dans la guerre.
00:34:25À l'époque.
00:34:27– Il a rendu service.
00:34:29– Il a rendu service à tout le monde.
00:34:31Parce que si l'Espagne avait été en guerre
00:34:33avec l'Italie et l'Allemagne contre nous,
00:34:35le problème n'aurait pas été le même.
00:34:37– Oui, et puis l'Allemagne passait par l'Espagne,
00:34:39prenait l'Afrique du Nord,
00:34:41et nous coupait nos bases.
00:34:43L'armistice de ce point de vue-là,
00:34:45je parle angoliste, n'a pas été inutile.
00:34:47– Ah non, mais bien sûr.
00:34:49– Ça n'avait pas pris des ambiguïtés.
00:34:51– Ça a permis de l'arrêter.
00:34:53Et après,
00:34:55Franco a eu ses défauts et ses qualités.
00:34:57Mais après, il a modernisé l'Espagne
00:34:59qui était un pays très pauvre.
00:35:01À l'époque, on l'appelait Paco la grenouille,
00:35:03sur le son en espagnol.
00:35:05Paco la rana.
00:35:07Parce qu'il construisait des barrages partout.
00:35:09Alors non, il était fou.
00:35:11Mais non, il n'était pas fou.
00:35:13Parce que ça mettait de l'eau dans un pays sec.
00:35:15Et ça permettait d'avoir l'électricité.
00:35:17Donc s'il voulait,
00:35:19il construisait les infrastructures du pays.
00:35:21– Et les gens que l'on créé, on a fait de Franco.
00:35:23– Mais il n'y avait pas que ça, s'il voulait.
00:35:25Alors je ne dis pas que Franco,
00:35:27il n'y avait pas des trucs terribles.
00:35:29Et donc j'ai passé une très bonne époque là-bas.
00:35:31Et c'est vrai, moi j'avais un avantage,
00:35:33j'ai toujours un avantage,
00:35:35c'est que je travaille vite et je retiens bien.
00:35:37– Bah je lis à 14 ans.
00:35:39– Oui.
00:35:41– C'est incroyable.
00:35:43– Écoutez, à 15 ans,
00:35:45j'avais 15 ans,
00:35:47quand je suis parti à Paris.
00:35:49– Eh oui.
00:35:51– Comme étudiant.
00:35:53– Très jeune.
00:35:55Pourtant vous n'avez pas fait…
00:35:5760 ans d'études,
00:35:59mais sur le moment, l'université, ça ne vous a pas pris des années.
00:36:01– Mais non, parce que quand je suis arrivé à Paris,
00:36:03mon père était diplomate, donc il était à Barcelone.
00:36:05Il m'a envoyé à Paris,
00:36:07j'avais une chambre de bonne, sympa,
00:36:09je n'avais pas beaucoup d'argent.
00:36:11– Vous avez fait la fête.
00:36:13– J'ai fait la fête, en plus je jouais de la guitare,
00:36:15à l'époque ce n'était pas comme aujourd'hui,
00:36:17à l'époque c'était très nouveau.
00:36:19Donc j'étais invité partout pour jouer de la guitare,
00:36:21leur faire chanter des trucs,
00:36:23c'était sympa.
00:36:25Et moi je complétais en plus,
00:36:27comme mon père ne m'enlait pas beaucoup d'argent,
00:36:29je complétais mes ressources,
00:36:31en chantant de la guitare, dans les cafés, partout.
00:36:33– Mais à 18 ans,
00:36:35c'est 1960,
00:36:37vous n'êtes pas parti en Algérie ?
00:36:39– Ah non, justement,
00:36:41parce que je n'étais pas 18 ans,
00:36:43à l'époque c'était 20 ans.
00:36:45– Ah c'était 20 ans.
00:36:47Donc vous avez échappé en 62.
00:36:49– Non, justement,
00:36:51mais je me suis préparé quand même,
00:36:53parce que je faisais des études,
00:36:55j'ai fait du droit, j'ai fait des lettres,
00:36:57mais en réalité je ne faisais pas grand-chose,
00:36:59je faisais la fête,
00:37:01j'étais bien heureux,
00:37:03c'est un bon moment.
00:37:05– C'est quoi la fête ?
00:37:07C'était des boîtes de nuit ?
00:37:09– Oui, comme je jouais de la musique en plus,
00:37:11les boîtes de nuit, les filles,
00:37:13c'était la belle vie,
00:37:15on n'avait pas d'argent mais on s'amusait bien,
00:37:17c'était la bohème.
00:37:19– Et puis c'était une France qui était en pleine montée de sève,
00:37:21et puis après il y a l'an 58,
00:37:23c'était l'an de la Ve République
00:37:25qui a redonné un cap à la France.
00:37:27– Exactement,
00:37:29et puis la France marchait très bien à l'époque,
00:37:31ça redémarrait bien s'il voulait.
00:37:33Bon, après 58,
00:37:35ça repartait.
00:37:37– Le même sur la IVe République,
00:37:39il s'est passé beaucoup de bonnes choses.
00:37:41On était injustes, enfin passons.
00:37:43– Et moi, à un moment,
00:37:45je suis allé à Toulouse,
00:37:47j'étais étudiant à Toulouse,
00:37:49j'étais étudiant à Paris,
00:37:51je ne pouvais pas grand-chose, c'était pas terrible,
00:37:53je suis parti à Aix-en-Provence,
00:37:55là c'était le pied,
00:37:57parce qu'Aix-en-Provence c'était encore une ville étudiante,
00:37:5950% d'étudiants dans la ville,
00:38:01c'est pas comme aujourd'hui.
00:38:03– La moitié ?
00:38:05– La moitié, donc les étudiants dominaient la ville,
00:38:07c'était extraordinaire.
00:38:09– Et puis la ville est formidable.
00:38:11– C'est une belle ville en plus, c'est magnifique.
00:38:13Donc là j'ai passé des grands moments,
00:38:15et puis après je suis parti à Toulouse,
00:38:17et là, en même temps que je faisais mal mes études,
00:38:21j'ai fait une PM para,
00:38:23parce que je voulais voir,
00:38:25j'avais envie de faire du parachutisme.
00:38:27– Et alors là, ça dure plusieurs années ?
00:38:29Vous vous engagez ?
00:38:31– Je me suis engagé,
00:38:33parce qu'il fallait que je fasse mon service militaire,
00:38:35comme je ne foutais rien,
00:38:37en étudiant je ne faisais rien,
00:38:39je me suis dit je vais faire mon service militaire,
00:38:41donc je me suis engagé pour faire mon service,
00:38:43donc j'étais deuxième classe,
00:38:45j'ai fait à l'époque,
00:38:47on appelait ça le peloton pour être élève sous-officier,
00:38:51j'ai fait sous-officier au para,
00:38:53au régiment para bien sûr,
00:38:55puisque j'avais pris mon brevet parachutiste avant.
00:38:59– Vous avez fait votre premier saut à quel âge ?
00:39:01Vous étiez autorisé si jeune ?
00:39:03– 18 ans,
00:39:05donc j'ai fait l'endurance d'une unité parachute,
00:39:09le 9ème RCP à Toulouse,
00:39:11donc j'ai fait mes classes comme on dit,
00:39:13j'ai devenu sous-officier,
00:39:15j'ai fait les EOR,
00:39:17je suis parti à Montpellier,
00:39:19je suis devenu officier.
00:39:21– Toujours au sud ?
00:39:23– Toujours au sud,
00:39:25après j'ai été affecté aux premières CP qui étaient à Pau,
00:39:27et là je suis rentré vraiment dans l'armée,
00:39:29après mon stage j'ai fait un stage d'officier para à Pau,
00:39:31et là j'ai eu une révélation,
00:39:33c'est là où je suis devenu vraiment militaire,
00:39:35dans la main,
00:39:37mais en définitive…
00:39:39– Il faut vous appeler colonel d'ailleurs ?
00:39:41– Oui.
00:39:43– Vous voulez dire que j'ai oublié de vous appeler colonel, pardon.
00:39:45– Non, non, mais si vous voulez,
00:39:47moi je suis content d'une chose, c'est vrai,
00:39:49c'est que j'ai commencé deuxième classe,
00:39:51j'ai terminé colonel,
00:39:53c'est pas si mal,
00:39:55mais surtout ce qui m'a marqué,
00:39:57puisqu'on parle d'histoire de vie,
00:39:59c'est quand j'étais officier,
00:40:01jeune officier,
00:40:03donc au 1er RCP,
00:40:05on a fait une manœuvre dans la neige,
00:40:07à la courtine, au camp de la courtine,
00:40:09il faisait un froid de gueule.
00:40:11– Quel mois, c'était en plein hiver ?
00:40:13– En plein hiver, on se gelait,
00:40:15c'était effrayant,
00:40:17et mon grand-père,
00:40:19paternel,
00:40:21donc qui était dans la Creuse,
00:40:23dans sa propriété de la Creuse,
00:40:25j'ai demandé à mon colonel à ce moment-là,
00:40:27à l'époque je lui ai dit un soir,
00:40:29on n'était plus en manœuvre ce soir-là,
00:40:31je lui ai dit est-ce que je peux prendre une Jeep
00:40:33et aller voir mon grand-père qui est à côté,
00:40:35je sais que ça lui ferait plaisir,
00:40:37ce type m'a dit aucun problème,
00:40:39le grand-père, quand officier de la Légion d'honneur,
00:40:41c'était sérieux, on ne dit pas non.
00:40:43Donc j'ai été voir mon grand-père,
00:40:45en tenue de combat,
00:40:47avec ma Jeep,
00:40:49et je sais que ça a été la dernière grande joie de sa vie,
00:40:51parce qu'il est mort 6 mois après,
00:40:53il a vu son petit-fils,
00:40:55qui était comme lui, un vrai soldat,
00:40:57ça ça a été, pour lui,
00:40:59– La transmission.
00:41:01– La transmission était faite.
00:41:03– Mais alors, je ne sais pas quand commence,
00:41:05mais peut-être que vous ne le direz pas,
00:41:07la grande glissade,
00:41:09si on peut dire,
00:41:11vers le renseignement.
00:41:13Là, c'est l'armée,
00:41:15les paras,
00:41:17dans les années 60, on peut dire,
00:41:19début des années 60.
00:41:21La guerre d'Algérie est terminée,
00:41:23la Vème République prend son essor,
00:41:25vous auriez pu faire
00:41:27n'importe quel métier en réalité,
00:41:29vous auriez pu être magistrat,
00:41:31vous auriez pu être avocat,
00:41:33vous auriez pu être énarque,
00:41:35pire encore, énarque !
00:41:37– Oui, pire encore.
00:41:39– Mais là, vous faites un autre choix.
00:41:41Alors franchement,
00:41:43je n'ai pas compris,
00:41:45j'ai beau regarder votre vie,
00:41:47quel est ce choix ?
00:41:49Le choix, c'est le renseignement
00:41:51ou l'entreprise ?
00:41:53Parce que vous avez jugé des entreprises
00:41:55à foison après.
00:41:57– Non, le choix au départ,
00:41:59il est clairement, c'est le renseignement.
00:42:01C'est l'action.
00:42:03C'est ça.
00:42:05– Service d'action,
00:42:07vous avez été plus tard au service d'action.
00:42:09– C'est-à-dire que si vous voulez,
00:42:11quand j'étais au premier régiment de chasseurs-parachutistes,
00:42:13avec plein de copains,
00:42:15j'ai encore de bons copains
00:42:17qui ont hâte d'inquiéter comme moi,
00:42:19je me suis dit,
00:42:21dans le fond,
00:42:23les paras,
00:42:25on fait la guerre,
00:42:27mais il y a encore plus,
00:42:29il y a encore plus fort,
00:42:31c'est le service d'action.
00:42:33– De servir.
00:42:35– Tout petit, tout seul ou en groupe.
00:42:37Et là, je pense que j'ai été influencé
00:42:39par des gens que j'ai connus,
00:42:41par mes parents, par mon oncle,
00:42:43par ma famille,
00:42:45des anciens résistants, des gars qui avaient fait le BCRA
00:42:47et autres, et qui m'ont raconté des choses.
00:42:49– Et qui vous ont éveillé.
00:42:51– Et ça m'a éveillé.
00:42:53Mon oncle avait été aussi,
00:42:55mais il n'en parlait pas.
00:42:57– C'était un taiseux, de toute façon.
00:42:59– Mais il y en a d'autres qui m'en avaient parlé vraiment.
00:43:01Et surtout,
00:43:03j'avais eu quelqu'un
00:43:05que j'ai retrouvé après,
00:43:07qui était dans cette mouvance,
00:43:09c'était de Maranches.
00:43:11Le fameux Alexandre de Maranches,
00:43:13qui a été le patron des services,
00:43:15après.
00:43:17– Le ZEC, à l'époque.
00:43:19– Comment ?
00:43:21Oui, c'est le ZEC.
00:43:23– Tous Giscard.
00:43:25– Et quand j'étais au premier RCP,
00:43:27au bout de quelques temps, au bout de deux ans,
00:43:29un an et demi,
00:43:31j'ai dit, je voudrais aller au service d'action.
00:43:33Alors les types m'ont dit, les militaires,
00:43:35c'était très mal vu chez les militaires.
00:43:37Le service d'action, c'était un truc à part.
00:43:39Donc on m'a dit, tu ne vas pas
00:43:41sacrifier une carrière,
00:43:43tu fais une carrière magnifique, tu commences très bien,
00:43:45tu es vraiment, regarde ce que tu fais,
00:43:47tu ne vas pas partir chez Zélocteux.
00:43:49En gros, c'était ça.
00:43:51Et j'ai insisté,
00:43:53j'ai vraiment insisté.
00:43:55Là, mon oncle m'a aidé,
00:43:57parce que c'est le seul qui m'appuyait là.
00:43:59– Dans la famille ?
00:44:01– Ah oui, parce que les autres disaient,
00:44:03tu ne vas pas quitter quand même,
00:44:05tu es dans une unité.
00:44:07– Alors que tu pourrais être préfet,
00:44:09ministre, député, tout.
00:44:11– Tu ne vas pas partir, tu ne vas pas faire ça.
00:44:13Et j'ai dit, si, si, si, je veux y aller.
00:44:15Et donc mon oncle m'a aidé,
00:44:17effectivement, je suis arrivé au service d'action,
00:44:19où là, j'ai découvert que j'adorais ça.
00:44:21L'enseignement, l'action.
00:44:23– L'action secrète.
00:44:25– L'action secrète, dans des conditions très compliquées.
00:44:27Et là, ça m'a passionné.
00:44:29– Très jeune, on vous confie des missions dangereuses déjà,
00:44:31c'est dangereux d'être dans cette action.
00:44:33– Non, mais ce n'est pas dangereux,
00:44:35si on les prépare bien, ce n'est pas dangereux.
00:44:37Le risque est très calculé,
00:44:39il ne faut pas croire non plus.
00:44:41Mais surtout,
00:44:43ce que je trouvais,
00:44:45ce qui en plus était formidable,
00:44:47c'est que j'ai rencontré là-bas des gens extraordinaires.
00:44:49Certains qui étaient des types extraordinaires.
00:44:51– Des serviteurs.
00:44:53– Ah oui, des grands serviteurs de l'État.
00:44:55Des gens qui étaient prêts à jouer,
00:44:57vraiment, leur vie,
00:44:59pour la France, pour l'État.
00:45:01Vraiment, c'est ça.
00:45:03Et je me suis dit,
00:45:05ça, c'est vraiment un monde que j'aime.
00:45:07C'était mon monde.
00:45:09– Tout pour l'État ?
00:45:11– Oui, tout pour la France.
00:45:13Pas l'État, la France.
00:45:15Tout pour la France.
00:45:17– La République, c'est déjà ça.
00:45:19– Oui, mais la République,
00:45:21c'est une partie de la France,
00:45:23mais pour moi, c'est le pays.
00:45:25– C'est un mot qui ne veut plus dire grand-chose.
00:45:27– Voilà exactement, c'est pour ça que c'est tellement galvanisé
00:45:29aujourd'hui qu'on ne peut pas dire…
00:45:31– Tout pour la France, magnifique réponse.
00:45:33– Et là, j'ai eu la chance d'avoir,
00:45:35j'ai connu des gens fantastiques,
00:45:37méconnus ou mal connus ensuite.
00:45:39Il y en a un,
00:45:41on a beaucoup parlé à un époque,
00:45:43avec les procès qu'il y a eu, c'est Rondeau,
00:45:45grand serviteur de l'État lui aussi.
00:45:47– On a commencé ensemble,
00:45:49on a continué toute notre vie ensemble.
00:45:51Toute notre vie, on est restés amis,
00:45:53et très amis, et quand il a eu ses problèmes…
00:45:55– Grand connaisseur du président.
00:45:57– Oui, exactement.
00:45:59– Moi, j'ai rencontré en Égypte,
00:46:01l'ambassade de France en Égypte,
00:46:03il était impressionnant ce personnage.
00:46:05– Même quand il était poursuivi par tout le monde
00:46:07avec les histoires de Claire Strymer.
00:46:09Moi, je continue à le voir, à discuter,
00:46:11à l'aider et tout, un type extraordinaire.
00:46:13Un type fantastique.
00:46:15Le général de Marolles, pour moi,
00:46:17le meilleur agent français qu'il y a eu depuis la guerre.
00:46:19Un type extraordinaire.
00:46:21Avec une capacité géopolitique.
00:46:23Alors là, on voit des gens
00:46:25qui mélangent l'action et la géopolitique.
00:46:27– Il faut le faire.
00:46:29– Il est exceptionnel.
00:46:31Quand vous voyez des gens comme ça,
00:46:33ça vous donne une autre vision du monde.
00:46:35– Il y a quelque chose qui m'intrigue un peu,
00:46:37je crois que le général de Gaulle,
00:46:39à ce moment-là président de la République,
00:46:41ne portait pas une attention
00:46:43plus dirigée aux services…
00:46:45– Ah non, il méprisait les services.
00:46:47– Bizarre.
00:46:49– Tous les militaires,
00:46:51je peux vous dire que les militaires à 99%,
00:46:53méprisaient le renseignement.
00:46:55– Ah c'est ça.
00:46:57C'est incroyablement néfrageux.
00:46:59– Quand j'ai voulu y aller,
00:47:01on m'a dit qu'est-ce qu'il va foutre là-dedans,
00:47:03c'est pas vrai.
00:47:05– C'est pourtant un des services
00:47:07les plus importants aux services de l'État.
00:47:09On avait besoin d'un service action,
00:47:11on avait besoin de charme,
00:47:13on avait besoin de renseignements,
00:47:15mais c'était mal vu, c'était pas bien vu.
00:47:17Et le politique a toujours eu peur,
00:47:19en disant, ces gens-là, ils sont très bien formés,
00:47:21ils pourraient me renverser,
00:47:23ou ils pourraient me créer des problèmes.
00:47:25Ils s'en méfiaient comme de la peste.
00:47:27– Ils s'en méfient toujours.
00:47:29– Ils s'en méfient toujours, ça n'a pas changé.
00:47:31– Dans certains pays, il faut qu'ils s'en méfient d'ailleurs.
00:47:33Qu'on fasse ce qui est arrivé à Poutine il y a quelques mois.
00:47:35– Non, non, non, mais ils n'ont pas totalement tort.
00:47:39– Alors, là s'ouvre une autre page de votre très riche histoire.
00:47:45Vous vous engagez dans de très grandes entreprises,
00:47:47que vous finissez par diriger,
00:47:49il y en a plusieurs, il y a Pernod, il y a Suchart.
00:47:51– Oui.
00:47:53– Là encore, l'union laitière normande,
00:47:59à un moment où on vous trouve président de France Champignon.
00:48:03C'est extraordinaire.
00:48:05Alors là encore, on ne peut pas énumérer.
00:48:07Mais est-ce que c'était des couvertures ?
00:48:11– Alors, au départ…
00:48:13– Parce que vous ne quittez pas l'enseignement.
00:48:15– Ah, jamais.
00:48:17– Tout en étant chef d'entreprise.
00:48:19– Absolument, ça oui.
00:48:21Mais au départ, si vous voulez,
00:48:23mon départ des services et de l'armée,
00:48:27mon départ officiel si vous voulez,
00:48:29ça a été quand, après l'affaire Ben Barca,
00:48:33le général de Gaulle était convaincu
00:48:35que nous étions coupables,
00:48:37le service Action,
00:48:39les services, le service,
00:48:41c'était coupable d'avoir monté l'affaire Ben Barca.
00:48:43Ce qui est maintenant prouvé qu'il est archi faux.
00:48:45Ce n'était pas du tout le SDEC qui avait monté ça.
00:48:47– C'était les Marocains.
00:48:49– C'était les Marocains, Oufkir avec Edlimi,
00:48:51qui avait monté ça,
00:48:53avec l'aide d'un rapport correspondant
00:48:55qui était des gars de la préfecture de police de Paris.
00:48:57– Donc pas les services.
00:48:59– Non, rien à voir.
00:49:01Il y avait un correspondant du service,
00:49:03c'était un gars qui était à l'aéroport d'Orly,
00:49:05qui avait servi sur un petit morceau de l'histoire.
00:49:09À cause de ça, il nous en a voulu à mort.
00:49:11Je pense que parce qu'il cherchait une occasion
00:49:13de reprendre en main le service,
00:49:15il trouvait qu'il y avait trop,
00:49:17à l'époque, les gaullistes trouvaient
00:49:19qu'il y avait trop de socialistes au SDEC.
00:49:21– C'est l'héritage de la quatrième, ça.
00:49:23– Et en réalité, c'est pourquoi,
00:49:25je vais vous raconter l'histoire,
00:49:27elle est énorme, c'est que,
00:49:29quand il y a eu la fin de la guerre d'Algérie,
00:49:31quand de Gaulle est arrivé,
00:49:33il y avait l'OS,
00:49:35et il y a, à l'époque,
00:49:37le général commandant du SDEC s'appelait Grossin,
00:49:39c'était un socialiste,
00:49:41mais qui avait fait une guerre magnifique,
00:49:43un homme de renseignement, très bien,
00:49:45et de Gaulle l'a convoqué,
00:49:47il lui a dit, vous allez mettre
00:49:49vos officiers du SDEC
00:49:51pour aller chercher les OS partout.
00:49:53Et Grossin a dit,
00:49:55jamais, moi, officier français,
00:49:57je n'enverrai des officiers français
00:49:59contre des officiers français.
00:50:01Alors Grossin a été viré, ça, ça ne vous étonnera pas,
00:50:03mais, et de Gaulle a dit…
00:50:05– Pourtant, il s'est très bien comporté.
00:50:07– Oui, il s'est très bien comporté.
00:50:09De Gaulle a pénalisé, ensuite, tous les gens du service.
00:50:11Il y a eu une grande purge.
00:50:13Moi, on m'a dit,
00:50:15tu ne peux plus rester au service,
00:50:17parce que tu fais partie des gens de l'action,
00:50:19les gens de l'action,
00:50:21de l'EOR, enfin, à l'époque, Orsa,
00:50:23on l'appelait Orsa, officier de réserve
00:50:25en situation d'activité,
00:50:27tu ne peux pas rester.
00:50:29Donc, il faut que tu partes dans un régiment normal.
00:50:31Et moi, je leur ai dit, vous êtes gentils,
00:50:33moi, tous les matins, aux couleurs,
00:50:35saluer le drapeau et faire du maniement d'armes,
00:50:37non, ce n'est pas mon truc,
00:50:39moi, ce qui m'intéresse, c'est l'action.
00:50:41Donc, je pars.
00:50:43Je ne suis pas le seul, on est partis à plusieurs.
00:50:45Et j'ai été recruté chez Ricard,
00:50:47parce que le père Ricard,
00:50:49je l'avais rencontré il y a 5 ans,
00:50:51avec mon père, un jour, dans un déjeuner
00:50:53chez mon père, j'avais rencontré Ricard,
00:50:55qui m'avait dit, qu'est-ce que vous faites ?
00:50:57Je suis militaire, parachutiste,
00:50:59je fais un peu de tout.
00:51:01Vous ne lui parliez pas durant 7 jours à ce moment-là ?
00:51:03Non, pas du tout, moi, je lui parlais,
00:51:05en tant que commando, force spéciale.
00:51:07Et Paul Ricard me dit, ah, c'est bien ce que vous faites,
00:51:09si un jour vous quittez l'armée, venez me voir.
00:51:11Et moi, innocent,
00:51:13je quitte l'armée, je l'appelle,
00:51:15je lui dis, voilà monsieur, je vous ai vu il y a 5 ans,
00:51:17il m'a dit, je suis là,
00:51:19il m'a dit, allez voir mon directeur général,
00:51:21et on va voir ce qu'on peut faire de vous.
00:51:23C'était Pascua.
00:51:25Ah, mais vous l'avez rencontré très tôt alors !
00:51:27Bien sûr, bien sûr !
00:51:29Alors j'ai failli vous poser une question,
00:51:31alors du coup je vous la pose.
00:51:33C'est comme ça que j'ai commencé, dans le privé.
00:51:35Vous dites,
00:51:37le service de renseignement refuse
00:51:43pour chasser l'OS.
00:51:45Oui.
00:51:47Mais est-ce que ce n'est pas ça l'origine du SAC ?
00:51:49La création du service ?
00:51:51Non, alors il y avait...
00:51:53C'était pas fait pour suppléer ?
00:51:55Le SAC avait été créé à côté.
00:51:57Le SAC avait été créé effectivement par les gaullistes.
00:51:59Contre l'OS.
00:52:01Contre l'OS, c'est clair.
00:52:03Dont Pascua.
00:52:05Bien sûr, il y avait Pascua, il y avait Le Marchand,
00:52:07il y avait toute une série de gens qui étaient très mouillés
00:52:09pour diriger le SAC qui était une officine gaulliste
00:52:11contre l'OS.
00:52:13Probablement, parce qu'en particulier,
00:52:15il y avait des gars qui ne voulaient pas le faire.
00:52:17Voilà, c'est bien ce que je dis.
00:52:19Il y en a eu 2 ou 3 qui ont fait des mauvais coups,
00:52:21qui ont accepté de travailler
00:52:23pour les gaullistes
00:52:25dans le cadre de la lutte anti-OS.
00:52:27Et ces types-là,
00:52:29après ils ont été définitivement enarmés,
00:52:31ils ont été rejetés par tout le monde.
00:52:33Tout le monde a dit, c'est des traîtres.
00:52:35Et moi, je suis avec Pascua.
00:52:37Vous, là, devant Pascua.
00:52:39Je suis recruté, mais je savais rien faire.
00:52:41Et à ce moment-là, Pascua non plus ne savait pas
00:52:43que vous étiez déjà un peu un pion d'enseignement.
00:52:45Non, non, non, Pascua, il me savait simplement
00:52:47qu'il connaissait par contre bien mon oncle,
00:52:49pour cause.
00:52:51Voilà, évidemment.
00:52:53Donc, il y a eu un côté sympathique
00:52:55et surtout, moi, j'ai dû voir ce qui est marrant.
00:52:57Et Marie-France Garou.
00:52:59Ça, je me souviendrai toujours.
00:53:01Le conciliabule au Parlement européen.
00:53:03J'avais été élu avec Pascua
00:53:05et Marie-France Garou,
00:53:07bien que je ne sois pas le sujet.
00:53:09L'occasion, c'est de là.
00:53:11Là, on était en l'an 2000, beaucoup plus tard.
00:53:13Ils se mettaient dans un coin,
00:53:15ils déjeunaient à part, l'un avec l'autre, etc.
00:53:17Je me disais, mais qu'est-ce qu'ils peuvent bien se raconter ?
00:53:19Ils avaient toute l'histoire de la Vème République
00:53:21dans la tête.
00:53:23Mais ils avaient tout vécu.
00:53:25J'aurais bien voulu être une petite souris
00:53:27pour savoir de quoi ils parlaient.
00:53:29Mais bon, il n'y avait pas de micro caché.
00:53:35Oui, c'est intéressant parce que
00:53:37c'est très scruté.
00:53:39Qu'est-ce que je savais faire ?
00:53:41Je parlais langue étrangère.
00:53:43J'avais un avantage.
00:53:45Je parlais anglais, espagnol, français.
00:53:47Je suis trilingue.
00:53:49Je ne comprenais pas le portugais.
00:53:51Vous avez tellement voyagé avec votre père.
00:53:53Je me débrouillais bien.
00:53:55On m'a dit, on va te mettre à l'export.
00:53:57Je me suis retrouvé inspecteur export.
00:53:59Se promener dans le monde entier,
00:54:01c'est un formidable avantage.
00:54:03Pour enseigner.
00:54:05Vous tombez dans la géopolitique.
00:54:07On ne parlait pas de géopolitique à l'époque.
00:54:09Vous commencez à comprendre
00:54:11le monde et les forces
00:54:13qui le dominent.
00:54:15Exactement.
00:54:17J'ai fait cette carrière.
00:54:19J'ai fait 19 ans chez Ricard.
00:54:21Vous finissez directeur commercial.
00:54:23J'ai terminé directeur général commercial.
00:54:25Je devais être président de Ricard France.
00:54:27Comme on a fait la fusion Pernod-Ricard,
00:54:29pour des raisons d'équilibre,
00:54:31il fallait mettre quelqu'un de Pernod
00:54:33à la présidence de Ricard.
00:54:35Et moi qui étais désigné officiellement
00:54:37pour la prendre,
00:54:39Evrain m'a dit, tu n'as plus le poste.
00:54:41C'est normal, c'est une partie des jeux.
00:54:43Alors là, j'ai dit, je m'en vais.
00:54:45Et je suis rentré chez les Allemandes
00:54:47Jacob Suchart.
00:54:49Ça a été formidable.
00:54:51C'était une boîte allemande et suisse-allemande.
00:54:53Allemande au départ de Hambourg.
00:54:55Ils étaient en Bourg.
00:54:57Ils s'étaient installés en Suisse.
00:54:59Vous n'avez pas encore travaillé pour les Allemands.
00:55:01C'est une couverture là encore.
00:55:03C'était très intéressant.
00:55:05Très très intéressant.
00:55:07Parce que c'était un type,
00:55:09le patron Klaus Jacobs,
00:55:11c'était un gars qui était,
00:55:13il pensait que tout se résolvait,
00:55:15il pensait que les gens
00:55:17étaient des mercenaires.
00:55:19Son concept de la vie,
00:55:21c'est-à-dire que vous arrivez en disant,
00:55:23écoutez, mon collaborateur, il n'en peut plus.
00:55:25On travaille 15 heures par jour.
00:55:27Il est mort, il est en train de perdre sa femme
00:55:29en burn-out, donnez-lui une prime.
00:55:31C'était tout.
00:55:33Oui, il disait, donnez-lui une prime.
00:55:35Et le pire, je me suis rendu compte,
00:55:37c'est que quand la prime était grosse,
00:55:39ça arrangeait les choses.
00:55:41C'est horrible.
00:55:43Oui, parce qu'il n'en continuait pas moins à travailler.
00:55:45C'était affreux.
00:55:47Mais j'ai beaucoup appris.
00:55:49L'Allemagne et le management,
00:55:51il y a beaucoup à dire là-dessus.
00:55:53C'est pas terrible.
00:55:55Il y a des vraies questions à se poser.
00:55:57Oui, et ça m'a beaucoup appris pour la suite.
00:55:59Quand j'ai fait de l'intelligence économique
00:56:01et que je me suis rendu compte
00:56:03qu'un des ennemis était l'Allemagne,
00:56:05un des grands ennemis de la France était l'Allemagne.
00:56:07Un des grands ennemis de la France était l'Allemagne
00:56:09dans les années 60, 70, 80.
00:56:11Et aujourd'hui encore.
00:56:13Et encore aujourd'hui, ça continue.
00:56:15Et là, justement,
00:56:17ayant l'expérience des Allemands,
00:56:19ayant travaillé dans une boîte allemande,
00:56:21je les comprends, je sais comment ils fonctionnent.
00:56:23Et on comprend vite.
00:56:25Puisqu'on parle de l'Allemagne,
00:56:27le grand ennemi de la France,
00:56:29je suis ravi de vous entendre dire ça,
00:56:31parce que je ne cesse pas de l'écrire,
00:56:33mais ce n'est pas très bien vu.
00:56:35Deux questions.
00:56:37La première, comment avez-vous compris
00:56:39cet emportement de courte durée du général
00:56:41pour imposer, au fond, à marche forcée,
00:56:43la réconciliation franco-allemande
00:56:45et créer un espèce de couple
00:56:47d'autant plus stupide,
00:56:49le géopoliticien que vous êtes va me comprendre tout de suite,
00:56:51que l'Allemagne était déjà mariée.
00:56:53Une belle Allemagne
00:56:55qui était déjà mariée
00:56:57avec les Etats-Unis, en fait.
00:56:59Il y a eu un hiatus, dès le début,
00:57:01dans ce faux couple franco-allemand.
00:57:03Pourquoi le général est tombé là-dedans ?
00:57:05Il s'est ravisé très vite,
00:57:07dès 1964, dans un conseil des ministres.
00:57:09Alors, moi, ce que me...
00:57:11Je vais répondre
00:57:13à une réponse que m'a donnée mon grand-père.
00:57:15Mon grand-père,
00:57:17qui connaissait bien De Gaulle,
00:57:19et pour cause...
00:57:21Pierre, mon grand-père,
00:57:23le militaire.
00:57:25Et qui m'avait dit, quand je lui avais posé la question...
00:57:27Il a connu la Saint-Cyr, vous disiez.
00:57:29Oui, c'est ça.
00:57:31Comment toi, par exemple, tu peux être
00:57:33pour ce rapprochement ? Tu t'es battu,
00:57:35tu as perdu une jambe, tu as été prisonnier,
00:57:37et tout ça. Et il m'a dit, tu ne peux pas comprendre,
00:57:39mais ceux qui ont fait la guerre,
00:57:41cette première guerre mondiale,
00:57:43et qui ont vécu la deuxième derrière,
00:57:45il faut empêcher
00:57:47que la guerre rééclate de nouveau
00:57:49entre la France et l'Allemagne.
00:57:51C'était par peur d'un nouveau conflit.
00:57:53Et moi, je pense que De Gaulle, dans sa tête,
00:57:55une grande partie de l'histoire, c'était,
00:57:57on ne va pas recommencer une guerre avec l'Allemagne.
00:57:59Oui, mais il y a une terrible erreur.
00:58:01Non, mais c'est une erreur. Moi, je pense que c'est une erreur.
00:58:03L'erreur, c'est qu'ils n'ont pas compris que l'Allemagne
00:58:05continue à faire la guerre par d'autres moyens.
00:58:07Oui, mais c'est ça.
00:58:09Envoyer les chars et tout ça.
00:58:11Mais l'Allemagne continue à faire la guerre à la France.
00:58:13Mais vous savez, quand vous avez...
00:58:15Mais je pense que De Gaulle, il le savait aussi,
00:58:17parce que quand De Gaulle a essayé avec les Russes,
00:58:19par exemple, quand il a été voir les Russes,
00:58:21il avait fait un rapprochement
00:58:23avec la Russie.
00:58:25Intéressant.
00:58:27Le voyage, le fameux voyage en Russie de 1966.
00:58:29Vous l'avez vu à Stalingrad, là.
00:58:31De Gaulle disait,
00:58:33il faut qu'on ait un lien
00:58:35avec les Russes
00:58:37pour pouvoir contrôler
00:58:39l'Allemagne au milieu.
00:58:41Et Mitterrand a dit la même chose
00:58:43en disant, il faut absolument,
00:58:45pour éviter que l'Allemagne devienne trop puissante
00:58:47et nous crée des problèmes,
00:58:49il faut qu'on soit bien avec les Russes.
00:58:51C'est l'alliance de revers, c'est la politique capétienne,
00:58:53c'est Jacques Vanille, c'est la tradition française.
00:58:55Complètement oubliée.
00:58:57Mais on l'a complètement oubliée.
00:58:59Et alors, c'est allé très loin.
00:59:01Je suis très content de ce que vous me dites sur l'Allemagne.
00:59:03C'est très courageux parce qu'on entend souvent
00:59:05des chansons différentes.
00:59:07À la décharge du général De Gaulle,
00:59:09il finit par dire à Peyrefitte, sidéré,
00:59:11qu'il lui dit, mais on est quand même très engagé
00:59:13c'est-à-dire le traité de 63,
00:59:15janvier 63,
00:59:17les Allemands ne jouent pas le jeu, il y a ce fameux
00:59:19protocole, avant de ratifier
00:59:21le traité de 63,
00:59:23le Bouddhastag proclame
00:59:25sa fidélité à l'OTAN,
00:59:27c'est-à-dire aux Etats-Unis.
00:59:29C'est pour ça que je dis, elle était déjà mariée.
00:59:31Et De Gaulle s'aperçoit
00:59:33que ça ne mène pas à grand chose.
00:59:35Et Peyrefitte dit, mais maintenant
00:59:37on est engagé, comment tout ça va finir ?
00:59:39Mais De Gaulle répond, par la guerre,
00:59:41comme d'habitude.
00:59:43Oui, mais à la fin, oui.
00:59:45Et ça a été la guerre, mais il n'a pas compris dans quelle mesure.
00:59:47C'était la guerre économique.
00:59:49Exactement, ce qu'il n'avait pas compris.
00:59:51Je pense que De Gaulle, là-dessus,
00:59:53je ne suis pas sûr que...
00:59:55De Gaulle a développé des grands projets
00:59:57formidables pour la France, pour refaire
00:59:59de la France une grande puissance,
01:00:01mais je ne suis pas sûr
01:00:03qu'il ait compris, effectivement,
01:00:05que la guerre était en train
01:00:07de se transformer, devenir une guerre hybride,
01:00:09dans laquelle il y avait une partie militaire,
01:00:11mais, contrairement à ce que disait
01:00:13Clausewitz, ce n'était pas la finalité.
01:00:15Ce n'est pas la guerre militaire.
01:00:17Aujourd'hui, la finalité, c'est la guerre économique.
01:00:19C'est la guerre économique. Et vous êtes un des premiers
01:00:21à comprendre ça, puisque c'est à vous que Chirac
01:00:23crée en 2004
01:00:25le service d'intelligence économique.
01:00:272002, 2003.
01:00:29Fin 2003.
01:00:31Ils ont l'idée de
01:00:33créer un service qui va s'occuper de ça.
01:00:35Mais le Premier ministre à l'époque
01:00:37était Raffarin.
01:00:39Il jouait le jeu Raffarin, il comprenait ça.
01:00:41Ah oui, totalement.
01:00:43Parce que Raffarin, il venait du commercial.
01:00:45Il avait été
01:00:47chez Jacob Suchart,
01:00:49comme chef de produit marketing.
01:00:51Donc il comprend l'importance
01:00:53de l'intelligence économique. Il comprend très bien.
01:00:55La forme moderne de la guerre. Il comprend.
01:00:57C'est très curieux, parce qu'on a vu
01:00:59Raffarin comprenait très bien
01:01:01l'intelligence économique, très très bien. Il avait tout compris.
01:01:03Il n'a pas besoin d'expliquer.
01:01:05Villepin, il avait beaucoup plus
01:01:07de mal. Fillon, ils s'en foutaient.
01:01:09Ah bon ? Totalement.
01:01:11Vous faites de la peine. Non, mais franchement.
01:01:13Mon petit Fillon. Oui, mais il est gentil.
01:01:15Je n'ai pas dit qu'il n'était pas gentil.
01:01:17Non, non, non. Je n'aime pas les gens gentils, moi.
01:01:19Non, mais il faut ressentir que c'était pas...
01:01:21Il n'avait pas compris l'importance. Ah non, c'est pas son truc.
01:01:23Parce que vous avez eu trois premiers ministres
01:01:25comme responsable de l'intelligence économique.
01:01:27J'allais dire trois premiers ministres et trois directeurs de cabinet,
01:01:29parce que les directeurs de cabinet jouent un rôle essentiel
01:01:31auprès des premiers ministres.
01:01:33Quelquefois, ils sont même imposés.
01:01:35Oui, justement.
01:01:37C'est pour poser des problèmes. Passons.
01:01:39Enfin, ne passons pas.
01:01:41C'est un autre sujet avec vous. Il y en a tellement.
01:01:43Mais restons sur l'Allemagne, alors.
01:01:45Cette guerre économique, elle va très loin.
01:01:47Par exemple, notre dispositif
01:01:49nucléaire a été torpillé
01:01:51par l'Allemagne. Exactement, j'allais vous dire.
01:01:53Le plus bel exemple récent
01:01:55qu'on ait sur l'Allemagne... Et on paye aujourd'hui.
01:01:57Très cher. On s'est fait manœuvrer
01:01:59complètement sur le nucléaire
01:02:01par les Allemands.
01:02:03L'idée, quand Schröder...
01:02:05Il faut remonter l'histoire à Schröder.
01:02:07Fin des années 90.
01:02:09Il est chancelier
01:02:11et il voit l'Allemagne
01:02:13à l'époque à un déficit.
01:02:15Pas comme aujourd'hui. Elle a un déficit.
01:02:17Elle ne va pas bien.
01:02:19Et Schröder dit, il faut changer
01:02:21toutes les règles pour relancer
01:02:23l'Allemagne.
01:02:25C'est les politiques de son parti...
01:02:27Franck Chancelier.
01:02:29Et les politiques lui disent, vous êtes fous,
01:02:31si on fait ça... Vous allez voir.
01:02:33Si on fait ça,
01:02:35vous êtes virés. On est tous virés.
01:02:37Parce que les Allemands vont voter contre nous.
01:02:39Si on prend des mesures où il faut serrer la vis
01:02:41de l'un côté, de l'autre,
01:02:43les Allemands vont nous virer.
01:02:45Et Schröder en dit, l'intérêt de l'Allemagne
01:02:47passe avant notre intérêt. Je mets en marche
01:02:49le truc. Et il lance
01:02:51une politique
01:02:53à trois axes.
01:02:55Les énergies avec la Russie.
01:02:57La défense avec les Etats-Unis.
01:02:59L'économique avec la Chine.
01:03:01C'est lui qui a lancé.
01:03:03Évidemment, il est bâti aux élections.
01:03:05C'est une vision, ça.
01:03:07Un visionnaire. Il est bâti
01:03:09aux élections. Arrive Merkel.
01:03:11Merkel, elle ne va rien
01:03:13pendant tous ses mandats.
01:03:15Elle ne va pas changer un iota
01:03:17de la stratégie de Schröder.
01:03:19C'est important.
01:03:21Mais on est dans le collimateur.
01:03:23Vous allez voir la suite.
01:03:25C'est que dans le cadre, je vous l'ai dit,
01:03:27les énergies, c'est
01:03:29la Russie. Et dans ce cadre-là,
01:03:31il est décidé, entre les Allemands
01:03:33et les Russes, et Schröder est
01:03:35toujours dans le coup, mais là non plus comme chancelier,
01:03:37mais comme homme politique
01:03:39et homme d'affaires. Et puis Gazprom.
01:03:41Chez Gazprom, c'est ça. Ils construisent
01:03:43le Nord Stream 2.
01:03:45Le Nord Stream 2, c'est un piège.
01:03:47Énorme.
01:03:49Parce que, au départ,
01:03:51les pipelines, ils passent
01:03:53par les pays, la Pologne,
01:03:55l'Ukraine, et ça passe. Il y a des pipelines
01:03:57qui passent vers l'Europe.
01:03:59Quand ça passe, le flot
01:04:01de pétrole ou de gaz passe,
01:04:03vous payez une royalty au pays
01:04:05qui a traversé. C'est normal, un péage.
01:04:07Donc ça rapporte.
01:04:09Ça rapporte à la Pologne, ça rapporte à l'Ukraine.
01:04:11Donc, premier truc,
01:04:13ils disent, on va faire un pipeline
01:04:15par la Baltique, directement
01:04:17de Russie vers l'Allemagne.
01:04:19À ce moment-là, on ne paye plus de péage.
01:04:21Ça tombe sous le sens.
01:04:23Et on se partagera le bénéfice entre l'Allemagne
01:04:25et la Russie.
01:04:27Ensuite, comme tout arrive
01:04:29en Allemagne,
01:04:31de l'Allemagne, on enverra du gaz
01:04:33dans toute l'Europe. Donc on devient
01:04:35le fournisseur et on contrôle.
01:04:37Donc c'est génial, leur truc.
01:04:39Mais à deux, c'était une
01:04:41manœuvre géniale.
01:04:43Russo-allemand.
01:04:45Les Allemands
01:04:47ont un problème, c'est que
01:04:49en France, il y a le nucléaire.
01:04:51Le nucléaire, il est moins cher
01:04:53et on peut en vendre partout.
01:04:55Donc ça casse cette idée du monopole des Allemands.
01:04:57Donc, qu'est-ce qu'ils vont faire ?
01:04:59Ils vont demander à deux instituts
01:05:01d'État,
01:05:03financés totalement par l'État, un de Richembourg
01:05:05et puis un autre,
01:05:07de lancer des campagnes
01:05:09en France pour casser le nucléaire
01:05:11français. On a toutes les preuves.
01:05:13Et comment ils vont le faire ?
01:05:15Ils vont financer des OIG
01:05:17et ils vont
01:05:19financer des ONG.
01:05:21Alors là, c'est facile.
01:05:23Vous voyez les ONG qui ont été antinucléaires
01:05:25en France. Elles sont financées
01:05:27par les Allemands à travers les deux instituts
01:05:29pour démolir
01:05:31le nucléaire français. Et on va
01:05:33avoir en France des gens qui vont jouer
01:05:35dans le cadre écologique cette politique-là.
01:05:37La plus célèbre, c'est
01:05:39Mme Bouhanné. Bouhanné s'est
01:05:41vantée dans un interview.
01:05:43Elle avait reçu l'ordre de son premier ministre
01:05:45de lutter
01:05:47pour imposer le nucléaire
01:05:49au niveau européen. Et elle dit
01:05:51on se veut surtrouver le ministre
01:05:53allemand de l'économie. On a
01:05:55fait copain-copain et on s'est mis
01:05:57tous les deux d'accord pour démolir la proposition
01:05:59française.
01:06:01Elle l'a racontée. Elle était ministre du gouvernement français.
01:06:03Elle l'a racontée.
01:06:05C'est de la haute trahison. Il n'y a pas de terme.
01:06:07Elle l'a racontée. Donc moi là, c'est plus un
01:06:09vente-passe. C'était des interviews là-dessus.
01:06:11Mais c'était du temps de Hollande alors.
01:06:13C'était même avant.
01:06:15Parce qu'elle était ministre. Je ne sais plus quand elle a été
01:06:17ministre. Mais c'était, si vous voulez,
01:06:19il y a eu
01:06:21une pression allemande
01:06:23terrible. Et on voit bien que...
01:06:25C'était du temps de Jospin alors.
01:06:27J'ai dit une bêtise.
01:06:29Il y a plus de 20 ans là.
01:06:31Déjà l'Allemagne est à la main d'oeuvre.
01:06:33Parce que c'est maintenant qu'on paye.
01:06:35Maintenant qu'on paye.
01:06:37Et ils ont hétérité un travail
01:06:39de fonds, si vous voulez, pour démolir.
01:06:41Ils ont été un triomphe.
01:06:43Puisqu'on a abandonné la filière.
01:06:45Et au niveau européen, il y a eu la pression aussi.
01:06:47Grâce à eux. Ils ont mis la pression
01:06:49par l'Europe. Ils ont mis la pression directe
01:06:51par les ONG.
01:06:53Par tous les moyens. Par les journalistes.
01:06:55Par tout ça. Et on a obtenu que...
01:06:57On a supprimé nos programmes de recherche.
01:06:59Nos réacteurs de recherche. On a tout arrêté.
01:07:01On a arrêté Fessenheim et autres.
01:07:03C'est une opération...
01:07:05Bravo, les Allemands ont réussi à nous foutre en l'air
01:07:07les nucléaires français. Parce qu'ils n'étaient pas chers.
01:07:09Qu'on pouvait le vendre un peu partout.
01:07:11C'était une arme énorme.
01:07:13L'énergie. Loïc Leflocq-Prigent
01:07:15était à vos places il y a quelques semaines.
01:07:17Il nous a expliqué.
01:07:19Il vous l'a expliqué.
01:07:21Quand vous voyez
01:07:23qu'aujourd'hui...
01:07:25C'est là où ça devient très grave.
01:07:27C'est qu'à l'Europe,
01:07:29au niveau européen, avec Mme von der Leyen,
01:07:31ils ont réussi à faire passer
01:07:33un accord dans lequel
01:07:35tous les pays européens
01:07:37ont payé le prix de l'énergie par rapport au gaz.
01:07:41C'est un triomphe total de l'Allemagne.
01:07:43Nous avons voté
01:07:45pour approuver la politique allemande.
01:07:47Et on le voit bien, puisque nous payons...
01:07:49Parce que l'industrie française,
01:07:51elle est traditionnellement...
01:07:53Elle était moins compétitive que l'industrie allemande.
01:07:55Mais, au point de vue des coûts...
01:07:57On avait l'énergie.
01:07:59A cause des taxes et autres.
01:08:01En compensation, on avait le coût de l'énergie.
01:08:03Comme c'était moins cher au point de vue de l'énergie,
01:08:05on a compensé les coûts de la main-d'oeuvre
01:08:07et les taxes et les impôts.
01:08:09A partir du moment
01:08:11où on est au même niveau que les autres,
01:08:13on nous ramène au niveau du gaz,
01:08:15le seul avantage compétitif
01:08:17qu'on avait par rapport aux autres, on l'a plus.
01:08:19Donc c'est de l'assassinat.
01:08:21Là, on est dans la guerre économique.
01:08:23Oui, typiquement.
01:08:25Mais c'est la guerre.
01:08:27C'est la guerre que nous mènent les alliés.
01:08:29Mais les pires, vous savez,
01:08:31les pires ennemis
01:08:33sont souvent à côté de nous.
01:08:35Evidemment, quand on veut mettre un coup de pied à quelqu'un,
01:08:37il vaut mieux être à côté de lui, sinon on tombe dans le vide.
01:08:39C'est pas à distance.
01:08:41Et il y a d'autres ennemis.
01:08:43Le Frock-Prigent nous a raconté
01:08:45comment les Etats-Unis l'ont torpillé
01:08:47à partir du moment où il a voulu faire
01:08:49de Helf la première
01:08:51entreprise pétrolière du monde.
01:08:53Il l'avait développée.
01:08:55On est toujours dans l'énergie, là.
01:08:57On est bien d'accord.
01:08:59Il y avait l'Allemagne d'un côté, sur le nucléaire,
01:09:01et le pétrole
01:09:03torpillé par les Etats-Unis,
01:09:05jaloux du poids.
01:09:07Je crois qu'il a multiplié par sept
01:09:09ou huit le chiffre d'affaires de Helf.
01:09:11Et donc il a fini en prison,
01:09:13le pauvre le Frock-Prigent.
01:09:15Quand l'histoire
01:09:17Helf a démarré
01:09:19sur l'Afrique avec Guillaumet,
01:09:21c'était remarquable.
01:09:23Mais après, c'est vrai que le Frock-Prigent,
01:09:25lui, il a développé ça au niveau mondial.
01:09:27L'objectif était bien
01:09:29d'en faire un major
01:09:31au niveau mondial.
01:09:33Et là, évidemment, on lui a tiré dessus.
01:09:35Les pro-américains
01:09:37se sont chargés.
01:09:39Mais alors, comment comprenez-vous,
01:09:41Alain Juillet, que ce pauvre
01:09:43pays
01:09:45soit victime de ses alliés
01:09:47sans qu'il s'en aperçoive ?
01:09:49En tous les cas, sans que ses élites s'en aperçoivent ?
01:09:51Ou alors, s'en apercevant,
01:09:53joue le jeu de l'ennemi
01:09:55contre leur propre pays ?
01:09:57Là, je vais vous dire,
01:09:59c'est toujours été comme ça.
01:10:01Jean Monnet, qu'on célèbre chaque année,
01:10:03était un agent américain.
01:10:05J'étais même le directeur d'une banque en Californie.
01:10:07C'était un agent d'influence américain.
01:10:09Il a toujours défendu
01:10:11les intérêts américains par rapport aux intérêts français.
01:10:13Vous revenez à son histoire, c'est clair.
01:10:15Mais il n'y a pas que ça.
01:10:17En permanence,
01:10:19on a eu des gens qui ont défendu
01:10:21les intérêts d'un pays étranger.
01:10:23Qui s'appelait le parti de l'étranger, traditionnellement.
01:10:25Mais seulement, le problème, c'est que
01:10:27quand c'est l'ennemi,
01:10:29l'ennemi vrai, si vous voulez.
01:10:31On le voit.
01:10:33Mais quand ce sont des gens qui sont censés être nos alliés ?
01:10:35Oui.
01:10:37Alors, on reviendra tout à l'heure
01:10:39sur notre affaire Alstom.
01:10:41Racontez-moi une histoire d'abord.
01:10:43On parlera d'Alstom après, mais je veux aussi revenir
01:10:45au cours de votre vie.
01:10:47Une petite histoire pour vous montrer.
01:10:49Quand on a eu,
01:10:51c'est pas secret,
01:10:53J'adore les histoires.
01:10:55Arrivent les incidents du 11 septembre
01:10:57aux Etats-Unis.
01:10:59Vous vous en souvenez ?
01:11:01Les Français, Chirac dit,
01:11:03nous les Français, on a toujours été auprès des Américains
01:11:05quand ils ont eu des problèmes.
01:11:07Donc, on est avec eux et ils envoient une délégation
01:11:09aux Etats-Unis pour dire aux Américains
01:11:11dont je faisais partie,
01:11:13on est avec vous.
01:11:15Pour montrer que
01:11:17nous, on peut être pas d'accord sur un certain point.
01:11:19Et il l'avait été avec l'histoire d'Irak
01:11:21en particulier, mais
01:11:23quand il s'agit de choses comme ça, on est clairement.
01:11:25Dans l'avion,
01:11:27dans l'avion,
01:11:29il y avait le leader
01:11:31de la Confédération Paysanne.
01:11:33Bovet, M. Bovet.
01:11:35Alors, très bien.
01:11:37On arrive
01:11:39à l'aéroport à Washington
01:11:41et, aux surprises,
01:11:43nous, bien sûr, on passe
01:11:45par les contrôles de douane, de police,
01:11:47et tout, et on voit les officiers
01:11:49américains,
01:11:51d'immigration, qui viennent prendre Bovet
01:11:53à l'entrée de l'avion et qui
01:11:55l'emmènent sans passer les contrôles.
01:11:57C'est fascinant.
01:11:59C'est que, je rappelle
01:12:01quand même que nos écologistes
01:12:03ont coupé
01:12:05tous les plans d'OGM
01:12:07en France qui étaient développés par l'INRIA
01:12:09pour trouver des blés
01:12:11qui pouvaient, enfin des céréales
01:12:13qui pouvaient pousser en terrain très sec dans le Sahel
01:12:15pour apporter de la nourriture
01:12:17pour produire du sel.
01:12:19On a tout détruit.
01:12:21Nos gars ont tout détruit.
01:12:23La Confédération Paysanne
01:12:25a tout détruit.
01:12:27OK ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
01:12:29Il y avait une autre société
01:12:31qui avait développé des recherches,
01:12:33c'était Monsanto.
01:12:35Et comme les Français ne pouvaient plus vendre, on n'avait plus rien,
01:12:37c'est Monsanto qui a été acheté
01:12:39par les pays sahéliens.
01:12:41Merci les écologistes.
01:12:43Et c'est là, vous voyez...
01:12:45Les Français peuvent-ils ne pas avoir conscience
01:12:47qu'ils desservent leur pays
01:12:49consciemment au bénéfice de puissances étrangères ?
01:12:51Par idéologie ?
01:12:53Oui, mais c'est...
01:12:55C'est comme les communistes, en fait.
01:12:57Oui, mais je pense que c'est par idéologie.
01:12:59Je pense que c'est par idéologie, mais c'est vrai que...
01:13:01C'est-à-dire qu'il y a plus important que la France.
01:13:03Maintenant, d'un autre côté,
01:13:05il y a deux choses.
01:13:07Il y a ce que Lénine appelait les idiots utiles.
01:13:09C'est ça.
01:13:11Il y a ceux qui pensent sincèrement
01:13:13que ça, c'est peut-être mieux,
01:13:15ça va peut-être améliorer les choses.
01:13:17Il y en a, des gens, des idéalistes et autres.
01:13:19Mais la grande majorité,
01:13:21ils ne se rendent pas compte qu'ils sont manipulés.
01:13:23C'est terrible ce que vous dites.
01:13:25J'aimerais qu'on dise deux mots
01:13:27de l'histoire de l'affaire Alstom,
01:13:29qui est aussi très significative.
01:13:31Dans l'affaire Alstom, il y a plusieurs éléments
01:13:33très intéressants. Il y a le fait que
01:13:35les Américains sont leaders
01:13:37dans le marché des turbines,
01:13:39sauf dans une catégorie,
01:13:41les turbines arabelles,
01:13:43où les Français sont là.
01:13:45C'est insupportable pour les Américains.
01:13:47Ils doivent être premiers partout.
01:13:49Très utile, notamment pour les sous-marins.
01:13:51C'est le premier point.
01:13:53Deuxième, si on prend l'affaire Alstom,
01:13:55c'est que la vente des turbines arabelles
01:13:57sont celles qu'on utilise
01:13:59pour les sous-marins atomiques.
01:14:01En vendant les turbines aux Américains
01:14:03et sachant qu'à ce moment-là,
01:14:05ils peuvent nous empêcher,
01:14:07ils peuvent ne pas les fournir,
01:14:09on se met sous la dépendance des Américains
01:14:11pour le nucléaire.
01:14:13C'est insupportable, inacceptable.
01:14:15C'est la France qui l'a accepté.
01:14:17Je ne vous dis pas le contraire.
01:14:19C'est des gouvernements français
01:14:21qui a fermé les yeux.
01:14:23Même avant, parce que c'était avant
01:14:25que Macron arrive au pouvoir.
01:14:27Le troisième boulot,
01:14:29dans l'affaire Alstom,
01:14:31qui est aussi non négligeable,
01:14:33c'est Pierucci, le vice-président
01:14:35qui a été arrêté et qui a passé
01:14:37sa vie en prison.
01:14:39C'est le numéro 2 ou le numéro 3
01:14:41d'Alstom.
01:14:43C'est le vice-président essentiellement
01:14:45pour l'Asie.
01:14:47Un jour, il fait une escale aux Etats-Unis
01:14:49et on lui passe les menottes.
01:14:51On lui dit,
01:14:53vous avez corrompu en Indonésie
01:14:55ou aux Philippines.
01:14:57Vous êtes coupable de corruption
01:14:59donc on vous met en prison.
01:15:01Il dit, vous êtes fou, je suis en escale
01:15:03pour aller en France.
01:15:05Les Américains nous autorisent,
01:15:07la corruption c'est interdit chez nous.
01:15:09Ça ne les regardait pas ?
01:15:11Bien sûr.
01:15:13Ils arrêtent, ils le mettent en prison
01:15:15et après commence l'opération.
01:15:17Mais ce qui est intéressant,
01:15:19c'est que quand il est en prison,
01:15:21il est convoqué par le juge.
01:15:23Le juge dit, vous accusez de corruption.
01:15:25Il dit, ce n'est pas vrai.
01:15:27Le juge sort 2 mètres d'écoute.
01:15:31Pierucci se rend compte
01:15:33que depuis 2 ans,
01:15:35on écoute et ils enregistrent
01:15:37tout ce qui se passe
01:15:39entre lui et sa direction à Paris.
01:15:41C'est la fameuse question,
01:15:43j'aimerais qu'on en parle aussi,
01:15:45mais c'est tellement vaste.
01:15:47Les satellites contrôlés par les Etats-Unis
01:15:49contrôlent le monde entier,
01:15:51ils savent ce qui se passe dans
01:15:53quelque entreprise que ce soit.
01:15:55On découvre qu'ils écoutent tout,
01:15:57c'est la confirmation qu'ils écoutent tout.
01:15:59Ce qui est quand même inacceptable
01:16:01c'est qu'ils écoutent les entreprises.
01:16:03En plus c'est les entreprises,
01:16:05c'est quand même pas très bien.
01:16:07Nous on accepte, un Etat accepte
01:16:09de vendre un truc qui est stratégique
01:16:11pour les sous-marins nucléaires.
01:16:13Deuxième truc.
01:16:15Et troisièmement, on n'est pas capable
01:16:17de défendre un secteur du marché
01:16:19dans lequel on est livré en banlieue.
01:16:21Restons sur Pierucci,
01:16:23parce que c'est un acte de guerre,
01:16:25d'arrêter le numéro 3 d'une des plus
01:16:27grandes entreprises françaises.
01:16:29Le président de la société va négocier
01:16:31à M.Cron. Pourquoi ?
01:16:33Parce que les américains lui disent
01:16:35M.Cron, vous avez bien compris que
01:16:37vous allez avoir
01:16:39une énorme amende,
01:16:41et puis non seulement vous allez avoir
01:16:43une énorme amende, mais on va interdire
01:16:45vous et vos actionnaires,
01:16:47votre comité de direction,
01:16:49d'aller dorénavant aux Etats-Unis.
01:16:51Donc il y a une autre solution
01:16:53bien sûr, c'est que vous nous vendiez
01:16:55les turbines Arabel.
01:16:57Ça va être au passage, pour M.Cron,
01:16:59quelques bénéfices financiers.
01:17:01Pour M.Cron, en plus, il y a un petit pourcentage
01:17:03financier qui va lui être donné,
01:17:05qui va être versé hors de France.
01:17:07Pas si petit que ça.
01:17:09Et là,
01:17:11c'est Bercy qui va accepter
01:17:13la vente,
01:17:15et qui va accepter
01:17:17que M.Cron touche de l'argent.
01:17:19Ça c'est Bercy à l'époque
01:17:21de Macron.
01:17:23Ça c'est la trahison nationale
01:17:25dans toute sa splendeur.
01:17:27Ça pose un problème.
01:17:29Si vous voulez, on peut habiller ça,
01:17:31on peut appeler ça trahison, incompétence,
01:17:33tout ce que vous voudrez,
01:17:35mais il y a un vrai problème de fond.
01:17:37Et c'est la guerre.
01:17:39C'est ce que je vous disais.
01:17:41Pour moi, si vous voulez,
01:17:43et ça c'est ce qu'on découvre quand on travaille dans l'intelligence économique,
01:17:45c'est que la guerre,
01:17:47elle est partout, elle est permanente.
01:17:49Tout est bon.
01:17:51Le jeune Alain Juillet,
01:17:53à 19 ou 20 ans,
01:17:55tellement précoce au 21 ans,
01:17:57dit non, non, non, je ne préparerai pas
01:17:59les nains,
01:18:01je ne lancerai pas dans une grande
01:18:03carrière
01:18:05brillante,
01:18:07mais je ferai du renseignement.
01:18:09Et l'intuition que vous aviez
01:18:11très jeune, à 20 ans,
01:18:13s'est révélée la bonne pour servir le pays.
01:18:15Il n'y a rien
01:18:17de plus important à faire que ça.
01:18:19C'est-à-dire suivre ce qui se passe
01:18:21dans les coulisses, on peut dire,
01:18:23et le déjouer.
01:18:25Et si on n'arrive pas à le déjouer, le mettre sur la place publique.
01:18:27Absolument.
01:18:29C'est ce que vous faites.
01:18:31C'est le travail de la recherche du dessous des cartes,
01:18:33la compréhension du dessous des cartes.
01:18:35Maintenant, on commence à comprendre ce que ça veut dire.
01:18:37A l'époque, c'est vrai que c'était
01:18:39peu compris.
01:18:41Je suis citateur de ma rôle.
01:18:43De ma rôle, il a été
01:18:45le patron du service Action,
01:18:47directeur du renseignement de la DGSE,
01:18:49et après, il est venu conseiller de ELF,
01:18:51en géopolitique et en stratégie.
01:18:53Et il avait écrit un bouquin,
01:18:55à l'époque, un petit bouquin sur le monde,
01:18:57l'évolution du monde,
01:18:59qui était prémonitoire,
01:19:01et je vous dis, ce genre de trucs,
01:19:03en lisant des choses comme ça,
01:19:05en discutant avec l'auteur,
01:19:07on se rendait compte qu'il y a quand même,
01:19:09il faut avoir une vision,
01:19:11il faut sortir
01:19:13de la pensée préconçue
01:19:15qu'on nous balance.
01:19:17Alors, c'est neuf, ça,
01:19:19parce que vous citiez tout à l'heure
01:19:21un grand chef du SDEC,
01:19:23à l'époque du renseignement français,
01:19:25Alexandre de Marranches.
01:19:27Lui était obsédé par le danger communiste.
01:19:29Mais il ne s'intéressait pas à l'intelligence économique.
01:19:31Absolument pas.
01:19:33Et les Français ne s'y intéressaient pas.
01:19:35On leur tondait la laine sur le dos.
01:19:37De Marranches, il était
01:19:39moitié français, moitié américain.
01:19:41Avec sa femme, il était anglais.
01:19:43Il était atlantiste.
01:19:45C'est pour ça que Giscard l'a nommé.
01:19:47Exactement. Il était atlantiste.
01:19:49Mais il faisait le boulot.
01:19:51Contre les communistes.
01:19:53À l'époque,
01:19:55le problème, c'était les communistes.
01:19:57Donc, c'était la lutte
01:19:59contre le communisme.
01:20:01Mais c'était le problème.
01:20:03C'était un problème parmi tant d'autres.
01:20:05Mais on a laissé passer d'autres choses.
01:20:07On est trompé par l'alliance.
01:20:09L'intelligence économique dans les services,
01:20:11c'est très récent qu'ils s'en occupent.
01:20:13C'est un peu à l'origine du développement.
01:20:15Oui, mais moi, j'ai eu énormément de mal à l'époque
01:20:17dans les services.
01:20:19Parce que, je me souviens, là, c'est pas un secret
01:20:21de dire que beaucoup de mes collaborateurs
01:20:23me disaient, enfin, monsieur,
01:20:25on va quand même pas donner à des sociétés privées
01:20:27des informations qu'on a recueillies au nom de l'État.
01:20:29À quoi je leur disais,
01:20:31mais attendez, qui paye les impôts ?
01:20:33Est-ce que vous avez un verre cher ?
01:20:35Qui est-ce qui vous paye ?
01:20:37C'est bien les bénéfices aux entreprises privées.
01:20:39Et puis l'entreprise privée, c'est l'emploi.
01:20:41C'est l'emploi français, donc c'est du niveau de vie.
01:20:43C'est du PIB et tout.
01:20:45Mais les gens, ils voulaient pas l'admettre.
01:20:47Il y a que, si vous voulez, l'évolution
01:20:49a été très progressive.
01:20:51Il y a que depuis peu de temps, il faut bien le dire,
01:20:53que les services ont compris
01:20:55que c'était un élément essentiel du problème.
01:20:57Alors, donc, on en arrive
01:20:59à cette période
01:21:03qui vous met
01:21:05à la tête du service
01:21:07renseignement de la DGSE.
01:21:09L'ancienne SNES devenue DGSE.
01:21:11Et là, vous découvrez
01:21:13des services secrets,
01:21:15comme on dit au langage courant français,
01:21:17dans quel état ?
01:21:19Est-ce qu'on est bon ?
01:21:21En gros, pardon de la question un peu bébête.
01:21:23Oui, oui, on est bon.
01:21:25Si vous voulez, le problème des services...
01:21:27Les Anglais sont bons, les Russes sont bons,
01:21:29les Chinois sont bons, les Israéliens sont bons,
01:21:31les Américains sont bons.
01:21:33On se situe où dans cette fabuleuse...
01:21:35On est dans les cinq premiers quand même.
01:21:37On est bien meilleur que les Allemands, par exemple.
01:21:39Alors là, oui, dans ce domaine,
01:21:41on est meilleur que les Allemands, il n'y a pas de doute.
01:21:43Ah oui, ils ont des vertus de management,
01:21:45d'organisation.
01:21:47Par contre, je pense que vous avez
01:21:49les Chinois, les Russes,
01:21:51les Américains, les Américains, les Chinois,
01:21:53les Russes, les Israéliens,
01:21:55les Anglais et nous.
01:21:57C'est le top 6.
01:21:59Mais les États-Unis et les Chinois sont beaucoup mieux dotés.
01:22:01Bien sûr, parce qu'ils ont des moyens.
01:22:03Combien aviez-vous de personnel ?
01:22:05Plus de 5 000.
01:22:07Non, même pas, on n'était même pas ça.
01:22:09Maintenant, ils sont 7 000, mais en époque,
01:22:11on était beaucoup moins que ça.
01:22:13Les États-Unis,
01:22:15c'est plus de 100 000 agents, la CIA,
01:22:17et puis la nébulose des renseignements.
01:22:19Les États-Unis, rien qu'en clandestin,
01:22:21ils sont à plus de 60 000.
01:22:23Ah oui, et les officiels ?
01:22:25Pareil ?
01:22:27Plus, beaucoup plus.
01:22:29Ça explique bien des choses.
01:22:31C'est comme les Chinois.
01:22:33C'est le gouvernement du monde, presque.
01:22:35Les Américains ont parfaitement compris
01:22:37tout ce qu'ils pouvaient tirer parti.
01:22:39Comment ils pouvaient tirer parti des services.
01:22:41En plus, ils ont une quantité de services.
01:22:43Ils ont 11 services différents.
01:22:45On parle de la CIA,
01:22:47de la NSA,
01:22:49mais il y a plein d'autres services.
01:22:51Ne serait-ce qu'à Paris,
01:22:53je crois qu'on a l'honneur
01:22:55d'avoir le plus gros service
01:22:57de la CIA d'Europe.
01:22:59Ils écoutent bien aussi.
01:23:01C'est effrayant.
01:23:03Nos grands amis...
01:23:05Oui, mais si vous voulez...
01:23:07C'est de Gaulle qui disait...
01:23:09Les grands États n'ont pas d'amis.
01:23:11Exactement, on n'a pas d'amis.
01:23:13Émitterand a dit des choses.
01:23:15Je ne vais pas répéter cette phrase.
01:23:17C'est intéressant d'ailleurs à entendre.
01:23:19Nous sommes en guerre avec les États-Unis.
01:23:21Une guerre impitoyable,
01:23:23mais vitale.
01:23:25Sans mort, apparemment.
01:23:27Oui, mais les États-Unis...
01:23:29Ce qu'il faut bien voir...
01:23:31Je crois que c'est important dans le cadre du monde
01:23:33quand vous travaillez sur ce domaine-là.
01:23:35Il ne s'agit pas de haïr
01:23:37ou détester l'autre.
01:23:39Chacun joue son jeu.
01:23:41Et pas nous.
01:23:43Quand les Américains réussissent leur coup,
01:23:45je dis bravo, chapeau, ils ont fait un joli coup.
01:23:47J'applaudis.
01:23:49Quand les Allemands réussissent un bon coup,
01:23:51je dis bravo les Allemands, ils ont réussi.
01:23:53Mais j'aimerais aussi qu'on puisse dire
01:23:55qu'on a réussi aussi.
01:23:57Insuffisamment, en tout cas, par rapport à d'autres.
01:23:59Elle est vraie donc cette phrase de Mitterrand.
01:24:01Ah oui, mais il le savait très bien.
01:24:03Nous sommes en guerre avec les États-Unis.
01:24:05Mais il le savait très bien.
01:24:07Si les gens sont honnêtes,
01:24:09ils vous le disent.
01:24:11Ils vous le disent qu'il y a une tension permanente.
01:24:13Vous savez,
01:24:15ce qu'il y a, c'est que nous, on avale les couleuvres.
01:24:17Regardez ce qui se passait au Niger.
01:24:19Très intéressant.
01:24:21Le Premier ministre du Niger, il y a deux ou trois jours...
01:24:23Je vais parler d'Afrique avec vous.
01:24:25Si vous voulez.
01:24:27Le Niger, il y a trois jours,
01:24:29on dit au Premier ministre du Niger,
01:24:31vous virez les Américains du Niger.
01:24:35Et il dit oui.
01:24:37Ils nous ont parlé de manière insupportable.
01:24:39Alors on dit, qu'est-ce qu'ils vous ont dit ?
01:24:41Ils disent, ben voilà, il y a une secrétaire d'État,
01:24:43je ne sais pas quoi, qui est arrivée,
01:24:45qui lui a dit,
01:24:47si jamais vous ne faites pas ce qu'on vous dit,
01:24:49vous aurez des sanctions.
01:24:51Et l'autre a dit, mais c'est inacceptable.
01:24:53Je suis souverain.
01:24:55Des menaces, je suis souverain.
01:24:57C'est inacceptable.
01:24:59Ce que nous ne savons pas dire.
01:25:01Je vous vire.
01:25:03Et la base d'Agadez que vous avez montée
01:25:05avec vos mille militaires américains
01:25:07pour espionner toute la région,
01:25:09elle dégage.
01:25:11Au revoir.
01:25:13Ce que nous ne savons pas dire.
01:25:15La Générale l'a dit pour l'OTAN.
01:25:17Oui, mais justement,
01:25:19De Gaulle avait eu le courage
01:25:21de rentrer dans l'OTAN.
01:25:23Nicolas Sarkozy, au lieu de rentrer dans l'OTAN,
01:25:25nous avait laissé dans la position qu'on avait avec De Gaulle.
01:25:27Est-ce que vous vous rendez compte ?
01:25:29La position qu'on avait aujourd'hui
01:25:31pour mettre le médiateur dans les négociations,
01:25:33dans l'affaire russe en Ukraine.
01:25:35On devenait des négociateurs hors pair
01:25:37pour pouvoir le faire.
01:25:39Et on pouvait même jouer un rôle à Gaza.
01:25:41Alors, écoutez,
01:25:43est-ce que vous acceptez de revenir ?
01:25:45Parce que je ne veux pas interrompre.
01:25:47Si vous voulez.
01:25:49C'est une conversation très riche.
01:25:51Je m'y attendais.
01:25:53Je voudrais reparler avec vous d'Afrique.
01:25:55Je voudrais reparler de Nouvelle-Calédonie.
01:25:57Parce qu'on est en train de nous préparer
01:25:59une petite opération
01:26:01qui pourrait mal finir.
01:26:03Je me demande si M. Macron
01:26:05et ceux qui l'ont inspiré
01:26:07pour dire les choses,
01:26:09pour parler par images,
01:26:11ne souhaitent pas liquider
01:26:13une de nos grandes forces dans notre territoire maritime,
01:26:15c'est-à-dire l'outre-mer français.
01:26:17Nous avons encore des choses à nous dire à la juillet.
01:26:19Sans nul doute.
01:26:21Merci beaucoup pour tout ce que vous nous avez déjà dit.
01:26:23Révélez sur votre vie, sur votre passion,
01:26:25votre capacité à servir la France,
01:26:27quoi qu'il arrive.
01:26:29Vous l'avez prouvé de mille façons.
01:26:31Je suis très ému
01:26:33et content que cette conversation
01:26:35n'ont pas s'achève,
01:26:37mais se prolonge.
01:26:39Merci à la juillet.
01:26:41Merci à vous et à bientôt.
01:26:47Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org

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