C’est à lui que Kylian MBappé vient d’acheter un portrait de Pelé, le « roi » du foot, pour un demi-million d’euros ! Le graffeur et plasticien Hopare est ce matin l'invité de Mathilde Serrell. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/nouvelles-tetes/nouvelles-tetes-du-lundi-03-juin-2024-8935900
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00:00 Il est 9h50, les nouvelles têtes Mathilde Serrel, ce matin un artiste de rue et de palais,
00:06 Alexandre Hoppard-Monterro est dans notre studio.
00:09 Portrait sonore.
00:11 Les week-ends en général, il était au stade.
00:22 Dans sa famille de l'Essonne, en banlieue parisienne, on supporte le PSG et lui-même
00:27 joue en club.
00:28 L'occasion, c'est le ballon rond jusqu'au jour où il rencontre une bombe de peinture.
00:31 Depuis quelques années, les tags ont envahi les murs de nos villes.
00:35 Mais très rapidement, ces tags mal léchés ont laissé la place aux graffes.
00:39 Cet après-midi, un groupe de graffeurs a procédé à un vernissage d'une oeuvre autorisée
00:44 par la propriétaire du mur.
00:46 Au début des années 2000, quand il tombe dedans avec ses potes, le street art commence
00:51 à s'institutionnaliser.
00:52 Mais se pratique toujours sans autorisation, ce qui lui vaudra une arrestation.
00:57 Donc son blase, c'est Shady, en référence à Eminem.
01:00 Il écope de 3000 euros d'amende et de travaux d'intérêt général, nettoyer le cimetière
01:13 de Limour, sa commune, et initier des jeunes aux graffes autorisés.
01:18 C'est même le maire qui va lui donner un atelier et organiser sa première expo.
01:22 A 21 ans, en peignant son premier mur hors banlieue, à Montmartre, il est repéré par
01:29 un galeriste qui lui passe commande.
01:31 Ses créations se font rapidement connaître sur Instagram.
01:34 Le succès à l'international suit.
01:36 New York, où le street art a connu ses maîtres comme Jean-Michel Basquiat, puis partout dans
01:44 le monde, jusque chez les moines tibétains.
01:46 Et à 35 ans, un tournant.
01:48 Et oui, le tournant, donc, il est là.
01:52 Il vient de réaliser une vente record, le portrait de Pelléchi.
01:56 Acheté un demi-million d'euros par le super-héros du foot Kylian Mbappé, la boucle est bouclée.
02:01 Alexandre Parmentero, bonjour !
02:03 Bonjour !
02:04 Alors, on n'a pas entendu le maillet de la vente.
02:06 Le marteau, c'était le 16 mai dernier.
02:09 On s'est retrouvé avec une mise de départ de 80 000 euros, puis 300 000 euros.
02:14 Et c'est Kylian Mbappé qui l'emporte avec 520 000 euros, un demi-million, pour votre
02:20 toile de Pelléchi, un grand artiste du foot, le roi du foot, on l'appelle.
02:25 Vous étiez comme un gosse, parce que c'était 20 ans après vos premiers pas en club de
02:31 foot.
02:32 Vous ne pouviez pas imaginer ça ?
02:33 Non, jamais j'aurais pu imaginer déjà me retrouver à la fondation du P&G, il y a
02:36 20 ans.
02:37 Là, c'était la cinquième année que je faisais la vente de la fondation.
02:39 Et là, j'avais l'impression que toutes les planètes étaient un peu alignées pour
02:43 voir mon tableau, surtout à Kylian, c'était l'année de son départ en plus.
02:48 C'était juste incroyable.
02:49 Votre premier choc esthétique, on parlait justement de culture et de sport, c'est un
02:54 tifo dans un stade de foot.
02:56 C'est quoi un tifo ? Et qu'est-ce que vous aviez vu ?
02:58 En fait, depuis tout petit, mon père m'emmène au stade.
03:01 Et au lieu de regarder le match, je regardais les tribunes populaires, que ce soit la tribune
03:06 au Theuil ou Boulogne au Parc des Princes.
03:08 Et en fait, les premiers chocs esthétiques, c'était de voir des grands drapeaux peints
03:12 à la main, qui étaient déployés dans les tribunes.
03:14 Et après, avec les années, je savais que tout était fait main et que les gens y passaient
03:19 des semaines et des semaines pour peut-être juste une minute de déploiement de drapeau.
03:23 J'étais sur les fesses de voir ça.
03:24 Parce que vous êtes autodidacte complet.
03:26 Vous avez donc commencé par le stade de Montgéry.
03:29 Vous êtes très déterminé.
03:30 Vous dites que rien n'aurait pu vous faire dévier de votre parcours.
03:33 Vous dites "je n'ai plus le choix, je dois y arriver".
03:35 Il y a une détermination qui ressemble à Mbappé aussi.
03:39 Quand on se retourne sur son parcours, on voit qu'il était très déterminé dès
03:42 le départ.
03:43 En fait, le fait d'avoir tout "quitté", ça veut dire que quand je me suis fait attraper
03:48 pour le graffiti, il y a maintenant plus de 20 ans, j'ai eu le diplôme que mes parents
03:52 voulaient que j'aie.
03:53 Je leur ai donné le diplôme.
03:54 Après, j'ai dit "je retourne dans la rue".
03:55 Mais de prendre cette décision, de me dire "j'arrête l'école pour vivre de la peinture",
03:58 je n'avais pas le droit d'y arriver, de ne pas faire machine arrière.
04:00 Et en fait, d'année en année, j'ai toujours eu des bonnes rencontres au bon moment.
04:05 Et du coup, aujourd'hui, je me dis que maintenant, je n'ai plus le choix de réussir pour pouvoir
04:10 continuer le plus longtemps possible.
04:11 Et le fait que vous ayez vendu cette toile pour 1,2 million d'euros à Kylian Mbappé,
04:14 ça change quoi dans votre trajectoire, dans votre carrière ? A part le symbole, bien
04:18 sûr, et le fait que vous étiez comme un gosse.
04:19 Aussi d'être vu et reconnu par mes pères aussi, parce que du coup, ça crée une sorte
04:26 de tampon pour me sauvegarder dans le milieu.
04:29 En fait, on est très vite oublié si on n'est plus acteur.
04:32 Si on ne fait pas de vente, si on n'est pas visible dans la rue, si on n'est pas mis
04:36 en avant.
04:37 Aujourd'hui, on a la force des réseaux sociaux.
04:38 Mais là, une vente comme ça, avec la visibilité que ça a eue, pour moi, c'est comme si ça
04:44 me faisait prolonger encore de 4-5 ans, voire 10 ans sur le marché de la rue.
04:48 Il faut une vente pour être relancé, sinon on est invisibilisé.
04:52 Sauf celle de Jean-Michel Basquiat.
04:54 C'est au-delà de 82 euros pour chaque toile.
04:57 Il y a le Basquiat Boom qui ne s'arrête pas.
05:00 C'est l'un de vos modèles, mais pas que.
05:02 Qu'est-ce qui l'a changé dans le rapport au street art, Jean-Michel Basquiat ?
05:06 C'est un des premiers artistes que j'ai découverts parmi le monde de l'art urbain,
05:11 dans les films et dans les reportages que je regardais.
05:13 C'était un modèle d'indépendance et d'art engagé.
05:18 C'est-à-dire qu'il avait un vrai discours.
05:20 On n'était plus sur une guerre d'ego et d'orgueil que porte le graffiti depuis des
05:24 années.
05:25 Et lui, il avait un engagement réel, que ce soit social, politique, etc.
05:29 C'était un vrai modèle pour moi.
05:31 C'était celui de la direction que j'avais envie d'avoir.
05:33 On va écouter Jean-Michel Basquiat dans Downtown 81, un film où il joue son propre rôle.
05:38 Elle ne pouvait pas se payer les peintures de Jean-Michel Basquiat à l'époque.
06:07 Mais encore moins aujourd'hui ! Downtown 81, film américain écrit par Glenn O'Brien,
06:12 réalisé par Edoberto Glio.
06:13 On le voit, il vient de se faire virer de son squat dans le Downtown new-yorkais du
06:18 début des années 80.
06:19 Et il y a eu une évolution, une explosion de sa cote sur les marchés.
06:26 Comment voyez-vous l'évolution du street art aujourd'hui, son institutionnalisation
06:33 et son avenir ?
06:34 Il y a eu un énorme boom avant le Covid, on va dire, en 2019.
06:40 En fait, l'art urbain est arrivé à bousculer tous les codes depuis quasiment dix ans.
06:45 Et aujourd'hui, il est rentré dans les musées.
06:47 C'est quelque chose qui est accepté dans quasiment toutes les grandes capitales européennes.
06:51 On voit de l'art urbain aujourd'hui sur des façades.
06:53 C'est quelque chose qui est vraiment rentré dans les mœurs.
06:55 Aujourd'hui, il a une vraie place, un vrai mouvement établi.
06:59 Maintenant, je pense qu'on est arrivé vraiment à son apogée, entre guillemets, en 2020,
07:03 en 2021.
07:04 Et ça a un petit peu écrémé.
07:05 Ça veut dire qu'à un moment donné, on n'arrivait plus trop à se situer dans le
07:08 monde de l'art urbain.
07:09 Il y avait un peu de tout.
07:10 On ne savait plus vraiment ce qu'on pouvait dire, si c'était de l'art urbain, du street
07:12 art, du graffiti, de l'art contemporain.
07:14 Du coup, c'était un peu un fourre-tout.
07:15 Et aujourd'hui, je trouve qu'on a vraiment trié et épuré le mouvement.
07:19 Et du coup, aujourd'hui, je pense que c'est quelque chose qui est vraiment établi.
07:22 On le voit dans les maisons de vente.
07:23 Il y a des records de Basquiat, de Banksy, Space Invaders, Giger et d'autres.
07:27 Et vous, en tout cas, vous allez aussi vers la sculpture.
07:30 Vous avez commencé à dessiner un petit peu Nicolas Demorand.
07:33 Il le découvrira après l'antenne.
07:35 Vous êtes également fan de Georges Baselitz et des dessins préparatoires.
07:38 C'est aussi ça, le street art.
07:40 Alexandre Ropard, Montero, vous repartez libre de ce plateau.
07:46 On pourra découvrir le 27 mai votre exposition.
07:53 Elle a démarré au Château Plessis, brillant, à côté de Compiègne.
07:56 Et puis, il y aura une nouvelle édition de 100% Paper avec des nouveaux talons le 11 janvier 2026.