• il y a 7 mois
Le professeur de biochimie, Kamel Madani, était invité dans Morandini Live, ce jeudi 23 mai, sur CNEWS. Ancien prisonnier, il a raconté son expérience carcérale et a été témoin des inégalités en centre de rétention : «La prison, c'est comme dans la vie tous les jours, les gens qui sont bien à l'extérieur seront bien à l'intérieur. Mais pour les précaires, les drogués et les alcooliques, ça va être difficile».

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Transcription
00:00 Je dis simplement, même si elle est peut-être dure la prison, la privation de liberté,
00:03 et bien après il faut mettre dans un contexte mondial, c'est tout.
00:05 Moi je dis tout le temps, on ne m'écoute pas, mais il y a des endroits où c'est plus difficile.
00:09 J'ai un ami à moi, il a été en prison en Algérie, on voit tout de suite la différence.
00:13 Donc la prison c'est dur parce qu'il y a une privation de liberté, parce qu'on est…
00:17 en fait ça dépend qui.
00:18 Si tu es blindé et que tu prends une petite peine, tu n'as pas de problème.
00:20 Si tu es dans la précarité, que tu galères, etc. la prison elle restera dure.
00:24 Tu n'as pas accès au téléphone, tu n'as pas accès au cannabis, tu n'as pas accès.
00:27 C'est comme dans la vie de tous les jours, les gens qui sont bien à l'extérieur
00:31 sont assez bien à l'intérieur.
00:33 Les gens dans la précarité, les toxico, les alcoolo, pour eux c'est dur la prison.
00:37 Voilà, pour moi c'était à la fois dur parce que j'avais besoin…
00:41 parce que je n'aimais pas la privation de liberté, donc ça a eu son rôle.
00:45 Et en même temps, vu que j'étais dans une prison avec mes amis et tout ça,
00:47 je l'ai mieux vécu.
00:49 Ça dépend des gens.
00:50 Mais oui, quand on est bien dehors, on est un peu moins mal à l'intérieur.
00:54 Et inversement, quand on est des gens d'en bas, on galère en prison.
00:58 De mon expérience à moi.
00:59 La prison recrée finalement la vie à l'extérieur.
01:05 C'est-à-dire que c'est les gens riches qui ont le plus de droits.
01:08 M. Morodini, il y a trois amis à moi qui sont morts la même année
01:11 pendus à la maison d'arrêt d'Angers, dans le "clemed", comme on dit.
01:14 Donc c'est le "clemed" à qui peut.
01:16 Voilà, simplement, les gens précaires, ils sont utilisés par les gens plus…
01:21 En fait, on utilise les "cassos", ceux qui sont toxicaux, ceux qui sont marginalisés.
01:27 On les utilise pour les téléphones, pour la drogue, pour l'entrée de tout.
01:30 On utilise les gens de la misère pour faire ces choses-là.
01:33 Et puis quand il y a des sanctions, c'est des gens d'en bas qui sont sanctionnés.
01:37 Je rentre un peu dans les détails, mais il y a des sanctions.
01:39 Celui qui se fait arrêter avec un téléphone ou de la drogue, il a une sanction.
01:42 La prison de la prison, c'est le MITA.
01:44 Mais qui va au MITA ?
01:46 C'est les gens marginaux.
01:47 Et il y en a qui se suicident.
01:48 L'autre fois, il y en a un, il s'est pendu, il était dégoûté.
01:51 Il rendait service à des gens plus aisés que lui.
01:53 Il a été mis au MITA, il ne supportait pas, il s'est pendu.
01:56 C'est en 2014.
01:58 Il y en a trois qui se sont pendus comme ça.
01:59 Ceux qui dominent à l'extérieur dominent un peu à l'intérieur.
02:04 Mais il ne faut pas oublier ceux qui galèrent, ceux qui taxent déroulés à tout le monde.
02:09 Donc ceux qui étaient bien à l'extérieur, pourquoi vous voulez qu'ils ne soient pas bien à l'intérieur ?
02:14 C'est la logique.
02:16 Ou alors il faudrait enlever les cantines à tout le monde et dire "vous mangez tous à la gamelle".
02:20 Et voilà, maintenant il y a des différences de classe sociale dehors, il y en a à l'intérieur de la prison.
02:24 Et voilà, petite pensée quand même pour les marginaux, ceux qui sont tout en bas,
02:29 et qui eux, ils vivent l'enfer, ils n'ont pas de téléphone.
02:32 Ils cachent le téléphone des gens.
02:33 Et quand même, il faut… voilà.
02:35 Il y a des gens qui ont des téléphones en télé.
02:36 – Kamel, si je tente de résumer ce que vous êtes en train de me dire,
02:39 en gros, vous me dites là, on a l'air tous de tomber des nues avec l'histoire de Mohamed Amra,
02:43 mais finalement c'est connu, ça se passe comme ça.
02:46 Et il y a d'autres Mohamed Amra aujourd'hui qui sont dans des prisons françaises
02:50 et qui gèrent leur réseau, qui font la visioconférence dans leur prison.
02:56 Il y en a d'autres, c'est ce que vous êtes en train de me dire en fait.
02:59 – Mais ça c'est comme ça, et puis de toute façon,
03:02 des fois ça ressort dans les médias et tout, c'est normal.
03:04 Mais il faut dire qu'il y a ces gens-là, il y a les gens qui sont utilisés en prison.
03:08 La drogue, elle ne rentre pas par le grand mincieux,
03:12 elle se fait rentrer par des gens précaires.
03:14 Donc les gens précaires à l'extérieur sont utilisés pour tout ce que vous me dites là,
03:18 tout ce que vous avez dit, c'est…
03:19 Les gens d'en bas sont utilisés par ceux qui ont l'argent, qui sont ultra-violent.
03:24 – Cette liste qu'on a montrée tout à l'heure sur Mohamed Amra,
03:27 vous vous dites finalement il n'y a rien de choquant dedans,
03:30 les téléphones, le trafic de drogue, la visioconférence pour diriger une action,
03:36 les enlèvements et les séquestrations dirigées,
03:38 tout ça finalement, et ça existe encore ailleurs, c'est ça ?
03:42 – Oui, et puis c'est plus facile aujourd'hui avec l'intelligence artificielle
03:46 et puis avec les drones et tout.
03:47 Donc nous c'était à l'époque des projectiles,
03:49 maintenant il n'y a plus trop de projectiles,
03:50 mais en fait c'est des choses qu'on sait,
03:52 je ne sais pas pourquoi les gens ne veulent pas dire les choses.
03:53 Aujourd'hui il faut que la police soit à la page en fait,
03:58 mais aujourd'hui avec cette histoire de drones, d'intelligence artificielle,
04:02 d'imprimant de 3D et tout, on peut même imprimer des armes.
04:05 Donc voilà, pour moi c'est cohérent avec son temps,
04:08 pour moi il fait… je ne juge pas les gens,
04:11 il a fait ce qu'il avait à faire et moi j'ai toujours,
04:14 quand je venais sur votre plateau,
04:15 j'ai toujours eu ce petit discours un peu de dire,
04:17 il faut peut-être être un tout petit peu plus dur.
04:19 Moi je ne juge pas les criminels, ils seront condamnés,
04:22 mais moi je trouve qu'il faut être un tout petit peu plus dur.
04:24 [Musique]
04:28 Merci à tous !

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