Michelle Kannengieser, maire de La Wantzenau, sur le risque sismique lié à la géothermie
La centrale géothermique de Riettershoffen a provoqué une série de séismes début mai, dans le Bas-Rhin. La maire de La Wantzenau, commune touchée par un séisme lié à la géothermie est l'invitée de France Bleu Alsace ce mercredi 22 mai.
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00:00 La géothermie Théo fait ressurgir la crainte d'accentuer les séismes en Alsace.
00:05 C'est arrivé encore au début du mois, on en a obtenu la confirmation avec la centrale de Rittershofen dans le nord du Barin.
00:11 Sauf que contrairement au gros séisme de décembre 2020 à Vandenheim, c'est cette fois un opérateur mieux installé,
00:17 Électricité de Strasbourg, qui est responsable.
00:19 Bonjour Michel Kanen-Gieser.
00:21 Oui bonjour.
00:22 Vous êtes la maire de Lavandzenau près de Strasbourg.
00:24 Votre commune a été très touchée par le séisme de Vandenheim qui était causé à l'époque par les activités à Fonroche.
00:30 Depuis vous êtes aussi l'une des élus les plus mobilisés sur le sujet de la géothermie.
00:34 Quand vous entendez ce qui s'est passé à Rittershofen avec Électricité de Strasbourg, qu'est-ce que vous vous dites ?
00:38 Je vous l'avais bien dit.
00:40 Oui on est très inquiet, l'inquiétude n'a jamais diminué.
00:45 Et preuve en est, on a aujourd'hui des modèles où on nous dit systématiquement,
00:50 dès qu'on dépasse 2 sur l'échelle de Richter, on est dans une certaine gravité qui permet au préfet,
00:57 ou à la préfète en l'occurrence, d'arrêter le dispositif.
01:01 Force est de constater que ça arrive quand même souvent.
01:04 Même avec un opérateur installé, c'est-à-dire qui exploite ainsi depuis 10 ans ?
01:08 En effet, puisque c'est bien la traduction et c'est ce qui provoque aujourd'hui cette inquiétude,
01:13 puisqu'on est en capacité à nouveau de secouer ce réservoir au-delà de 2.
01:18 Ce qui est la limite encore une fois des autorisations préfectorales.
01:21 Et pourtant, depuis 2020, il y a quand même du chemin qui a été parcouru.
01:24 Les scientifiques travaillent sur cette géothermie.
01:26 Est-ce qu'on comprend quand même mieux le phénomène aujourd'hui qu'il y a encore quelques années,
01:30 il y a 3 ou 4 ans par exemple ?
01:32 Je ne dirais pas qu'on le comprend mieux,
01:34 puisque pour l'heure, il n'y a pas de rapport scientifique sur lequel on peut s'appuyer.
01:38 Et les puits de la Vend-senault, puisque en effet c'est les puits de Richter et de Mendenheim,
01:42 mais les puits sont bien sur le banc communal de la Vend-senault,
01:45 puisqu'il ne faut pas confondre profondeur et longueur d'un puits,
01:49 puisqu'en bout de puits, on est bien sur notre commune.
01:54 Et là, on voit bien l'impact énorme d'une sismicité quand on est proche de ces puits.
02:04 Et c'était notre cas.
02:06 Et c'est la raison pour laquelle nous, on n'abandonne pas.
02:09 On est bien dans une répercussion qui est large.
02:11 Ce n'est pas seulement, ça dépasse de très loin l'autorisation administrative.
02:16 Je m'explique, à l'époque de ce puits de Vendenheim,
02:20 il a fait l'objet d'une publicité, d'une analyse et d'une étude,
02:26 mais le périmètre était extrêmement restreint.
02:28 Aujourd'hui, on voit encore, le séisme a dépassé les frontières,
02:32 puisque le secousse a été également ressenti à l'époque, jusqu'à Kiel.
02:37 - Oui, ça s'étend comme ça. Il y a une mission flash qui a été dirigée
02:41 par le député du Barra, Vincent Thiebaud, à l'Assemblée nationale,
02:44 pour aller vers ce qu'il appelle une culture sismologique partagée.
02:48 Ils préconisent par exemple d'installer des capteurs chez les particuliers,
02:51 afin qu'on s'habitue finalement aux phénomènes sismologiques en Alsace.
02:55 Est-ce que c'est mieux en effet d'associer les habitants à cette industrie, à cette production ?
02:59 - Il ne faut pas confondre le contrôle de son territoire.
03:03 Nous sommes déjà dans une zone modérée.
03:05 Il me paraît quand même normal, à minima, de contrôler l'activité naturelle.
03:09 Mais là, on est dans des risques induits.
03:11 Qu'est-ce que ça veut dire de mettre en place des dispositifs de contrôle ?
03:15 Ça veut dire que le phénomène s'est produit.
03:17 C'est ça le problème du risque induit, c'est que c'est un risque industriel,
03:21 c'est un accident industriel qu'on ne peut pas prévoir.
03:24 - Vous n'acceptez pas qu'on provoque ce risque ?
03:26 - Non.
03:27 - France Bleu d'Alsace, il est 7h49.
03:30 Question que l'on vous pose ce matin. Inquiétude ou pas en lien avec la géothermie ?
03:35 Est-ce qu'il faut continuer ? Est-ce qu'il faut arrêter ?
03:37 On a quelques commentaires laissés sur le Facebook de France Bleu d'Alsace.
03:39 Tenez, Astrid écrit "Oui, évidemment qu'on est inquiets".
03:41 Même chose pour Catherine qui nous écrit "Oui, bien sûr, nous sommes inquiets avec la géothermie".
03:46 Robert, bonjour !
03:47 - Bonjour !
03:48 - Bonjour Robert.
03:49 Ravi de vous accueillir sur France Bleu d'Alsace.
03:51 Robert, vous nous appelez de Kem's, on est dans le Haut-Rhin, on longe le Rhin d'ailleurs avec vous,
03:55 non loin de Mulhouse.
03:56 Robert, inquiet ou pas avec la géothermie ?
03:58 - Bah écoutez, dans les années 1900, c'était en 2017 déjà, 2015-2017,
04:06 des revues asiatiennes avaient déjà signalé que les Allemands ont arrêté le forage profond
04:13 parce que ça causait trop de dégâts chez eux, c'est-à-dire à quelques kilomètres de la frontière.
04:19 Et nous on continue, et je crains pour notre vieille blâme de 400 ans, que j'respecte encore,
04:26 qui s'appelle l'œuvre de Notre-Dame, c'est-à-dire la cathédrale de Strasbourg,
04:30 que ce que les Allemands n'ont pas pu faire pendant la guerre,
04:33 qu'on y arrive et détruise la cathédrale.
04:36 - Vous avez peur que des secousses en lien avec la géothermie puissent avoir raison de la cathédrale ?
04:41 - C'est le bon sens, mais le bon sens n'existe plus.
04:45 - Donc on entend votre inquiétude, Robert.
04:46 - Quand j'ai voulu mettre "bon sens" sur Internet, sur un texte,
04:49 on m'a donné "non, ça n'existe plus", et ils ont proposé "non sens" en variant.
04:53 - Vous avez déjà subi des tremblements de terre ?
04:56 Est-ce que dans le coin de Kemps il y a eu quelques secousses ?
04:58 - Oui, il y a eu une secousse violente il y a six mois.
05:00 - Il y a six mois ?
05:02 - Oui.
05:03 - Qu'est-ce que vous avez ressenti ? Comment ça s'est passé ?
05:06 - Tout a tremblé, ce n'était pas long, mais c'était dur.
05:11 - Robert, on entend votre inquiétude ce matin, merci de l'avoir partagée avec nous.
05:15 Vous continuez de nous appeler au 0388 25 15 15, géothermie, stop, ou encore.
05:21 - L'inquiétude de Robert, on l'entend, la vôtre aussi, Michel Kanenguyser, maire de Lavande-Zenon.
05:26 Vous disiez, lorsque cela dépasse le seuil de magnitude de 2,
05:31 c'est-à-dire quand on commence à le ressentir, ces séismes induits,
05:34 la préfecture doit arrêter la production.
05:37 C'est ce que vous demandez par exemple pour Riters-Saufen ?
05:39 - Complètement.
05:40 - Vous demandez à ce qu'ils arrêtent la production sur le site ?
05:43 - Il faut procéder à des investigations.
05:45 Je voudrais juste aussi avoir un discours apaisant sur les conséquences sur les structures.
05:51 Nous sommes dans une zone modérée, ça veut dire aussi que les calculs parasismiques,
05:56 donc la résistance des ouvrages est calculée, et ça l'est depuis 69, puis 82, puis 92,
06:02 donc on a des règles, et aujourd'hui on est ce qu'on appelle avec l'harmonisation européenne de zéro code,
06:07 donc on a des ouvrages qui résistent,
06:09 les ouvrages qui sont dans la liste de ceux qui sont soumis aux calculs.
06:12 Mais résister, ça veut dire éviter de l'effondrement,
06:15 puisque le but de la réglementation, c'est de protéger les vies.
06:18 En revanche, ce n'est pas de protéger le bâtiment dans ses préjudices de micro-fissurations.
06:25 Et on voit bien, quand on a, et on l'a constaté sur les dossiers,
06:29 on a quand même 600 dossiers sinistres à l'avance de ce nôtre,
06:31 il y a la micro-fissuration, la fissuration préjudiciable,
06:34 quand vous avez des lézardes dans votre salon de 2 cm,
06:38 c'est quand même un réel préjudice, quand bien même votre immeuble ne s'effondre pas.
06:42 – Les députés dans leur mission Flash y restaient aussi assez prudents,
06:47 c'est-à-dire qu'ils voudraient faire évoluer la police des mines,
06:50 donner le pouvoir à la préfecture pour ordonner l'arrêt de travaux lorsque c'est nécessaire,
06:55 c'est une bonne chose d'aller dans ce sens-là ?
06:58 – Oui, parce que le droit minier, il faut le dépoussiérer,
07:01 il est trop puissant, clairement,
07:04 et les territoires ont d'ailleurs peu de choses à dire,
07:07 et on l'a vu dans le cas de l'autorisation du puits de Rasted-Wendenheim.
07:11 – Et donc c'est ce que vous demandez pour Rittersoffen aussi,
07:13 alors que Rittersoffen, ça fait quand même 10 ans qu'elle est en exploitation,
07:15 c'est le premier incident majeur qui a lié à cette centrale.
07:19 – Oui, on nous a toujours dit que ce n'était pas possible
07:21 et que le puits fonctionnait correctement.
07:23 Donc ça veut dire que l'activité industrielle, elle sort du champ,
07:26 elle sort de ce qu'on a comme modèle sur les zones naturelles,
07:30 on a déjà une sismicité naturelle, mais ça c'est l'aléa,
07:33 là on est dans risque induit de par l'opérateur et le mode de fonctionnement.
07:37 – Est-ce que ce pouvoir qui revient à la préfecture d'arrêter par exemple l'exploitation,
07:42 ça a été le cas à Fonroche, également ici vers d'autres sites,
07:47 est-ce qu'il est bien entre les mains de la préfecture ?
07:50 Est-ce que vous demanderiez à ce qu'il soit aussi entre les mains des élus locaux ?
07:53 – Alors il est bien entre les mains de la préfecture,
07:55 mais en concertation avec les élus locaux évidemment,
07:58 puisque la Vente-Sonneau n'avait pas été du tout concertée pour une fin du puits
08:04 qui atterrissait sur son banc communal.
08:06 En tout cas ça n'a pas fait l'objet d'une quelconque publicité.
08:09 – Direction Oberhausbergen à 7h54 où nous attend Lucienne,
08:13 ravie de vous accueillir, chère Lucienne, bienvenue.
08:16 – Oui bonjour, je vais me permettre de m'exprimer,
08:20 parce que ces dernières années on a eu des séismes naturels,
08:24 et il n'y a jamais eu de problème dans la maison,
08:28 et j'étais assez surprise que quelques temps après le problème géothermie de Rajdhet,
08:35 il y avait des fissures dans le bas de la maison,
08:38 dans le garage qui venait justement de cette prolongation.
08:41 C'étaient des fissures très récentes, puisque elles étaient propres.
08:45 – Vous les avez fait constater Lucienne ?
08:47 – Non je ne les ai pas fait constater, je les ai photographiées,
08:50 et disons que ça a traversé le mur du voisin aussi,
08:54 il y a un petit muret au bord de la route, il était aussi fendu.
08:58 – Oberhausbergen-Rajdhet, on est… c'est dire…
09:03 – Vraiment dans la lignée, ça a traversé, je vois,
09:07 tout le garage il est fissuré, légèrement,
09:11 comme si ça avait traversé la maison.
09:14 Et je vous dis qu'il y avait des séismes naturels
09:17 qui n'ont jamais provoqué aucun décadre.
09:19 – Donc on imagine Lucienne, qu'en constatant ces dégâts,
09:22 vous la géothermie ce n'est pas quelque chose qui vous rassure ?
09:24 – Ah non pas du tout.
09:25 – Vous souhaiteriez qu'on arrête ?
09:27 – Je vous dis que les séismes naturels n'ont fait aucun dégât.
09:31 Alors que je ne sais pas si c'est la puissance superficie,
09:34 ou je ne sais pas ce que vous allez avoir.
09:36 – On entend votre crainte Lucienne, effectivement,
09:39 Oberhausbergen c'est au nord-ouest de Strasbourg,
09:43 et on entend donc Lucienne que vous n'êtes pas des plus rassurées
09:47 quant à la géothermie.
09:49 On continue la discussion 0388 25 15 15 si vous souhaitez échanger.
09:52 Merci Lucienne, belle journée.
09:53 – Voilà, merci beaucoup, bonne journée au revoir.
09:55 – Bonne journée Lucienne.
09:57 Alors Michel Kanenguyser, le rapport il suggère de limiter la géothermie
10:00 à la production d'électricité et de chaleur,
10:03 et à faire de très rares exceptions pour le lithium.
10:06 On sait que le lithium est de plus en plus exploité en Alsace.
10:10 Est-ce qu'on peut quand même continuer la production d'extraits de chaleur
10:13 quand on sait qu'on cherche une énergie plutôt propre,
10:16 plutôt qui me permettrait d'être souverain, qui est produite au niveau local ?
10:19 Est-ce qu'on peut se passer de la géothermie vraiment aujourd'hui ?
10:21 – Alors on est bien conscient qu'il faut trouver un mix énergétique
10:25 pour l'indépendance énergétique,
10:27 et on l'a bien vu au travers des crises successives,
10:30 notamment la guerre en Ukraine.
10:33 On a des alternatives, mais on est resté un peu dans l'inertie
10:38 depuis ces séismes de Rajdhet-Vandenheim.
10:42 On est resté dans l'inertie parce qu'on reste encore manifestement braqué
10:47 sur la géothermie profonde.
10:49 Et quand vous soulevez le lithium, c'est l'or blanc.
10:54 Et clairement aujourd'hui, le mot d'ordre, même au niveau national,
10:58 c'est l'autonomie pour l'alimentation des batteries.
11:01 – Oui, le gouvernement compte sur la géothermie pour dans les années à venir.
11:04 Vous vous dites qu'il ne faut pas insister dans cette voie-là,
11:08 qu'il faudrait suspendre les projets de géothermie ?
11:11 – En tout cas, pas dans notre réservoir.
11:13 On voit bien qu'il n'y en a aucun, aucun ne peut démontrer aujourd'hui
11:16 une stabilité de notre réservoir et une capacité à maîtriser le risque.
11:21 La difficulté, pour l'instant, elle est là.
11:23 – Un dernier mot, parce qu'on a dit, votre commune,
11:25 Lavendzenand a été très touchée par ça.
11:27 Où en sont les dossiers d'indemnisation des habitants
11:29 par rapport aux fissures qui ont été causées par le séisme de 2020 ?
11:32 – Alors, la majorité ont été indemnisées.
11:34 Il reste quelques dossiers en suspens, mais il y a eu un accompagnement
11:38 et aussi un accompagnement important de la préfecture
11:41 pour l'aboutissement de ces dossiers.
11:43 – Merci beaucoup Michel Kenning-Guisard d'être venu ce matin
11:45 dans l'Istudio de France Bleu Alsace pour nous parler de la géothermie
11:48 et du risque sismique que cela engendre.
11:50 Merci aussi aux auditeurs qui nous ont appelés.