Finance et sciences économiques : la fin de la grande illusion [Yves Perrier]

  • il y a 4 mois
Xerfi Canal a reçu Yves Perrier, ancien président d’Amundi et actuel président du CA de la banque Rotschild, pour parler de la finance et des sciences économiques.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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00:00Bonjour Yves Perrier, auteur avec François Evald de Quelle économie politique pour la France,
00:14ouvrage préfacé par Hubert Védrine, édition de l'Observatoire. Yves Perrier,
00:17vous êtes ancien président d'Amundi et vous êtes président du conseil d'administration
00:21du groupe Edmond de Rothschild. Yves Perrier, avant de rentrer dans le cœur de cet ouvrage,
00:28j'ai envie de m'arrêter sur le titre. On avait donc oublié que l'économie c'est politique.
00:34C'est révolutionnaire d'écrire ça aujourd'hui. Alors écoutez, je ne sais pas si c'est
00:40révolutionnaire mais ça me paraît pertinent et adapté aux circonstances du moment.
00:47Oui, en effet, au cours de ces 30-40 dernières années, on a eu tendance à faire de l'économie
00:54une sorte de science dure, c'est-à-dire des règles quasi universelles qui s'appliquaient.
01:01Le paroxysme de cette vision a été dans ce qu'on a appelé la finance de marché,
01:08où on a multiplié les modèles mathématiques dont la complexité des équations, assez souvent,
01:15était inversement proportionnelle au caractère frustre des hypothèses sous-jacentes.
01:21Et vous savez, l'économie pour moi c'est quelque chose de fond très simple, c'est d'assembler du
01:31travail et du capital le plus efficacement possible pour créer de la richesse. Après,
01:38se pose la deuxième question qui est de la partager équitablement, cette richesse. Et
01:44donc l'économie, avant d'être des règles absolues, ce sont des gens, des hommes, des femmes qui
01:55entreprennent, qui innovent, qui travaillent. Et ça veut dire qu'ils sont en interaction,
02:01qu'ils ont des intérêts. Ces intérêts peuvent être contradictoires. Et la façon dont on régule
02:08cet ensemble, en réalité, c'est éminemment politique. Et je dirais que, d'une manière
02:14provocatrice, je dirais mais comment peut-on penser que l'économie n'est pas politique ? L'économie
02:19est toujours politique et il faut comprendre, en fait, justement cette logique, ces interactions,
02:29pour porter des diagnostics et comprendre ce qu'il se passe. Et c'est pour ça que dans le
02:35livre que vous mentionnez, le diagnostic que nous faisons est un diagnostic sur le déclin de la
02:44France au cours de ces quarante dernières années, qui ne porte pas sur les symptômes d'abord.
02:50Symptômes, c'est le déficit public, la dette, etc., qui porte sur le pourquoi. Pourquoi,
02:56en fait, des acteurs, quelle est la responsabilité des différents acteurs, en fait, dans cette
03:04évolution ? Et il faut comprendre cette responsabilité des acteurs pour ensuite,
03:10d'ailleurs, proposer des solutions alternatives, des caps différents.
03:17Vous n'avez de cesse, dans l'ouvrage, de rappeler la tyrannie des 15% de REE. Enfin,
03:24de dater précisément, parce qu'on a tellement de mal à parler de la crise financière. On parle
03:28toujours de l'Eman, 15 septembre 2000, vous dites non, c'est l'été 2007 que ça commence.
03:33J'en ai un souvenir très précis, puisque c'est la fermeture d'un fonds BNP Paris-Bas. Cela dit,
03:43là-dessus, on ne sait pas si c'est la fermeture du fonds qui a généré la crise ou si elle était
03:48concomitante. Mais enfin, en tous les cas, elle commence bien en août, je veux dire à ce moment-là,
03:55et crise qui a été anticipée par, au fond, très peu de monde. Et ce qui montre aussi que,
04:03je veux dire, la façon dont on a abordé ce monde économique, ce monde financier, dans ces années,
04:13était quand même assez particulière, puisque il y a quand même très peu de monde qui l'ont
04:18vu venir. Qui l'ont vu venir et qui ont quand même réalisé qu'elle se produisait. Tout à fait,
04:26je vous confirme, pour avoir été au cœur du système pendant ces périodes, et après, très
04:32peu de monde. Je me souviens de beaucoup, non seulement d'observateurs, mais d'acteurs qui,
04:38en septembre 2007, disaient non, en fait, il y a juste eu un petit coup de tabac passager,
04:45et donc on peut continuer comme avant, on réaccélérons. En tant que professeur de gestion,
04:50gérer, c'est prévoir. Donc là, c'est prévoyons, prévoyons une autre économie politique. Merci à
04:56vous Yves Perrier. Merci beaucoup.

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