D'après les chiffres publiés vendredi par l'INSEE, le chômage reste stable pour le premier trimestre 2024, autour de 7,5%. Les prévisionnistes s'attendaient à une hausse, mais le taux d'emploi résiste. Vladimir Passeron, chef du département de l'Emploi et des revenus d'activité à l'Insee, est l'invité de franceinfo.
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00:00 L'invité éco, Camille Revelle.
00:04 Bonsoir à toutes et à tous, nous parlons emploi en France ce soir.
00:07 Bonsoir Vladimir Passeron.
00:08 Bonsoir Camille.
00:09 Vous êtes chef du département de l'emploi et des revenus d'activité.
00:12 Aline, c'est le taux de chômage au sens du BIT.
00:15 Le Bureau international du travail reste stable à 7,5% au premier trimestre 2024.
00:20 Ce sont vos chiffres publiés aujourd'hui et c'est mieux que vos prévisions.
00:24 Je vous confirme, on avait prévu une petite hausse.
00:26 C'est une quasi-stabilité, mais à 7,6% entre le dernier trimestre et le premier trimestre 2024.
00:32 Et donc, on a cette relative bonne nouvelle où le taux de chômage se stabilise quasiment sur le trimestre.
00:38 Bonne nouvelle, mais relative. Pourquoi relative ?
00:40 Alors relative bonne nouvelle, c'est qu'évidemment, il faut regarder aussi sur un peu plus longue période.
00:44 Et quand on regarde sur un an, le taux de chômage, on confirme que le taux de chômage a réaugmenté sur un an.
00:50 Il est 0,4 points au-dessus de son niveau du premier trimestre 2023.
00:54 Sachant que ce niveau-là, c'était si je ne me trompe pas, le plus bas depuis 1982, c'est ça ?
00:58 Exactement. Sur les 40 dernières années, on avait atteint ce plus bas niveau au quatrième trimestre 2022 et au premier trimestre 2023.
01:09 Et puis, ça a lentement redémarré, enfin réhaussé sur une année.
01:14 Donc, on confirme la hausse, mais en même temps, globalement, c'est plutôt une résilience du marché du travail
01:19 compte tenu du fort ralentissement de l'activité qu'on constate par ailleurs.
01:23 On est toujours dans une situation de ralentissement du marché du travail ?
01:27 C'est notre diagnostic principal. Si on regarde les données, les différentes données qu'on a publiées récemment,
01:33 on a un emploi qui augmente encore un peu, mais pas aussi fort que sur les années précédentes.
01:39 Et puis, on a ce taux de chômage qui a réaugmenté, même si sur le trimestre, il est quasi stable.
01:44 Alors, si on regarde, quelles sont les catégories d'âge qui remontent ?
01:47 Alors, quand nous, on a trois grandes catégories d'âge, quand on publie, on a déjà les jeunes, les 15-24 ans,
01:53 pour lesquels on a une petite hausse sur le trimestre, +0,6 points.
01:58 Mais après, il faut effectivement toujours comparer sur notre métrique principale, c'est par rapport à l'avant-crise.
02:07 Donc, par rapport à fin 2019, on a toujours un taux de chômage des jeunes qui est beaucoup plus bas.
02:13 Donc, pas d'alerte ?
02:14 Pas d'alerte particulière sur les jeunes. Ça reste globalement sur les séries plutôt bien orientées,
02:21 même si c'est un taux de chômage qui est bien plus élevé que les autres.
02:24 Si on regarde le taux de chômage des classes d'âge intermédiaire, 25 à 49 ans, là,
02:30 c'est un peu baissé sur le trimestre, 0,2 points. Mais là aussi, c'est le principal facteur du chômage
02:40 et qui contribue à l'ensemble. Et là, on est 0,4 points au-dessus de son niveau de l'année dernière.
02:46 Et est-ce qu'on sait pourquoi il y a plus de seniors en emploi aujourd'hui ?
02:51 Alors, c'est une bonne nouvelle qu'il y a aussi dans notre batterie d'indicateurs que nous avons publiés ce matin.
02:58 Il y a le taux de chômage, mais également le taux d'emploi.
03:00 D'ailleurs, est-ce qu'on peut rappeler brièvement ce que c'est, peut-être ?
03:02 Alors, le taux d'emploi, c'est, on regarde sur une population de néerlandais, la population résidente en France,
03:07 et on va regarder le nombre de personnes qui sont en emploi et on rapporte ça au nombre de personnes qui résident.
03:12 Et donc, on peut comparer le taux d'emploi des jeunes, le taux d'emploi des classes d'âge intermédiaire
03:16 et le taux d'emploi des seniors. Et quand on regarde le taux d'emploi des 15-64 ans,
03:21 il est à un niveau historique depuis que nous le mesurons à l'INSEE, c'est-à-dire depuis 1975.
03:28 Et comment ça s'explique ? Ce sont les réformes, le recul de l'âge de départ à la retraite ou il y a autre chose ?
03:33 Alors, pour les seniors, c'est très clairement l'effet des réformes successives.
03:37 On était sur une tendance haussière avant la réforme de 2023.
03:40 Puis, la réforme de 2023, qui est mise en œuvre à partir de septembre, a un effet net également sur la hausse du taux d'emploi.
03:48 On parle aussi du taux d'activité. Si on prend toutes les personnes qui sont à la fois en emploi
03:53 et qui sont actives à la recherche d'un emploi, c'est-à-dire au chômage,
03:56 le taux d'activité et le taux d'emploi des seniors atteint un nouveau niveau historique, le plus haut depuis 40-50 ans.
04:07 Il y a une autre donnée dont on parle souvent, c'est celle du halo autour du chômage. Est-ce qu'on peut repréciser ce que c'est ?
04:13 Alors, le halo autour du chômage, ce sont des personnes qui sont proches du chômage, mais pas tout à fait.
04:19 C'est-à-dire que ce sont des personnes qui sont sans emploi, mais qui ne remplissent pas tous les autres critères,
04:25 des critères de recherche effective d'emploi ou des critères de disponibilité d'emploi.
04:31 Donc, ce sont des personnes qu'on considère comme inactives au sens du Bureau international du travail,
04:36 mais qui sont très proches du chômage, on dit à la frontière du chômage, on dit le halo autour du chômage.
04:42 On suit depuis des décennies également cet indicateur pour être sûr que quand il y a une évolution forte du chômage,
04:51 ce n'est pas une évolution en contrepartie qui se passe sur le halo.
04:57 Et donc, on surveille aussi, comme le nez sur le feu, l'évolution du halo autour du chômage chaque trimestre.
05:03 Et donc, ce trimestre, qu'est-ce que ça donne ?
05:05 Alors, sur le trimestre, la part de halo autour du chômage dans la population baisse aussi, et elle baisse là aussi sur une année.
05:14 Donc, c'est plutôt un indicateur favorablement orienté si on cumule halo et chômage.
05:22 Et est-ce que vous avez aussi des indicateurs sur le chômage longue durée ?
05:26 Alors, c'est un autre indicateur qu'on regarde parce qu'effectivement, c'est différent quand on est dans des transitions
05:31 entre l'emploi et le chômage et quand on est plus durablement dans le chômage longue durée.
05:34 Donc, c'est le chômage de plus d'un an, les personnes qui sont au chômage depuis plus d'un an.
05:39 Et là, également, on est sur une évolution globalement favorable où là, c'est stable sur le trimestre.
05:47 Alors, j'ai bien conscience que ni vous ni moi n'avons de boule de cristal, mais à quoi peut-on s'attendre pour les prochains mois ?
05:53 Alors, nous, à l'INSEE, on ne fait pas de prévision à moyen, long terme. On se contente de prévision de très court terme.
06:00 A l'heure de la note de mars dernier, on avait prévu une légère remontée du taux de chômage à 7,6 au premier trimestre et 7,6 au deuxième trimestre.
06:10 Donc, on était quand même dans quelque chose qui n'évoluait pas très fortement.
06:13 On va réactualiser nos prévisions en juin. Là, on poussera un petit peu. On ira jusqu'à la fin de l'année.
06:20 Mais c'est des prévisions de très court terme sur lesquelles on ne sait pas les termes donnés par rapport à des questions de plein emploi ou autre.
06:32 On verra ça le mois prochain. Alors, merci beaucoup, Vladimir Passeron.
06:35 Vous êtes chef du département de l'Emploi et des Revenus d'Activité à l'INSEE. Vous étiez l'invité d'Echo de France Info.