"Traverser la rue", "ceux qui ne sont rien", "Gaulois réfractaire"... Au cours de son premier mandat, les "petites phrases" d'Emmanuel Macron ont fréquemment heurté une partie de l'opinion. Certaines étaient spontanées, d'autres relevaient d'une stratégie de communication de l'Elysée. Dans cette série inédite, chaque jour de la semaine, Caroline Mier et Sandra Boulanger reviennent sur des moments forts qui ont marqué ce "septennat", de sa relation tendue avec les Français à sa confrontation avec Vladimir Poutine. 7 ans au pouvoir, les maux de Macron, une série Ligne Rouge.
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00:00 -T'as commencé ce jour-là.
00:03 Musique rythmée
00:06 -Emmanuel Macron arrive avec 5,5 % des voix.
00:10 ...
00:19 -Les gens qui réussissent, c'est les gens qui ne sont rien.
00:21 -Tension !
00:23 ...
00:26 ...
00:30 -Je vous protégerai.
00:32 ...
00:36 Musique de tension
00:39 ...
00:51 -Parce que vous aurez appris dans une gare,
00:55 et une gare, c'est un lieu où on croise.
00:59 Les gens qui réussissent, c'est les gens qui ne sont rien.
01:02 ...
01:05 -Mais qui sont ces gens qui ne sont rien ?
01:08 -Je vous porte pas dans mon coeur,
01:10 parce que vous avez des phrases qui me dépassent.
01:12 -Mais les riens lui disent,
01:13 "Nous ne sommes peut-être rien à vos yeux,
01:16 "mais demain, nous serons tout."
01:18 Applaudissements
01:19 -Ca passe très mal, d'autant que,
01:23 dans ces affaires, le messager compte autant que le message,
01:26 voire davantage. C'est lui qui le dit.
01:28 Et lui, il n'est pas rien, il n'est pas du côté des gens de rien.
01:32 Ca a l'air encore plus méprisant
01:34 que si c'était quelqu'un d'autre qui le disait.
01:37 -Ca dit qu'il vient d'une société, d'une famille bourgeoise,
01:41 et c'est une expression qu'on n'emploie pas en public
01:45 et qui s'emploie en privé.
01:47 Dire "les gens qui ne sont rien",
01:49 c'est une façon de leur infliger un statut social
01:53 non seulement inférieur, mais incompatible.
01:56 -Il y en a certains, au lieu de...
01:58 Le bordel, il faudrait aller regarder...
02:00 -Oui, mais... -Il y en a qui ont les qualifications.
02:03 -Oui, on va le faire.
02:04 -Ce peuple luthérien qui a vécu les transformations
02:07 des dernières décennies
02:09 n'est pas exactement le Gaulois réfractaire au changement.
02:14 -Il n'y a pas un endroit où je ne me dis pas qu'ils cherchent des gens.
02:18 Il y en a qui sont prêts à travailler.
02:21 -Et je ne cèderai rien.
02:23 Ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes.
02:29 -Ce type de phrases qui vont scanner le début de son mandat
02:33 vont finir par se retourner véritablement contre lui.
02:36 C'est un certain nombre de petites phrases
02:38 qui ont été prises comme du mépris par beaucoup de Français.
02:42 -Il y en a qui font bien, qui déconnent.
02:45 -Si on fait la somme des provocations
02:48 qu'il a proférées au fur et à mesure,
02:50 elles vont toutes dans le même sens.
02:53 Il faut s'occuper des premiers de cordée,
02:55 qui sont les plus importants,
02:57 mais ceux qui réussissent moins bien,
02:59 ils ont le sentiment qu'on les prend pour des idiots
03:02 ou des paresseux, des gens qui ne comptent pas.
03:06 -Macron, démission ! Macron, démission !
03:10 -Les oeufs et les casseroles, c'est pour faire la cuisine.
03:14 -C'est pas les casseroles
03:16 qui font avancer la France.
03:17 -C'est le propre de celui qui arrive à la 1re place
03:20 avant d'avoir gravi les échelons.
03:22 Comme si, au tennis, quelqu'un n'avait jamais disputé un tournoi
03:26 et gagné au Wimbledon.
03:27 C'est le cas unique de quelqu'un
03:29 qui n'a jamais vu une tête d'électeur avant d'être élu
03:32 et donc qui n'a pas parlé aux gens.
03:35 Et donc, c'est un apprentissage.
03:37 C'est une langue particulière, la langue politique.
03:40 C'est un public particulier,
03:41 c'est un public de 70 millions de personnes
03:44 et de 60 millions de personnes.
03:46 -Il commet des erreurs.
03:47 Musique de suspens
03:49 ...
03:57 -La politique, c'est ça, regardez.
03:59 On met un peu de longtemps dans des minima sociaux,
04:02 les gens sont pauvres. On n'en sort pas.
04:04 Les gens qui restent pauvres restent pauvres.
04:07 Ceux qui tombent pauvres restent pauvres.
04:09 -Il l'a fait diffuser exprès. C'est pas une erreur.
04:12 -Je pense qu'il voulait marquer le fait
04:15 qu'il y avait un déficit important des comptes sociaux.
04:19 C'est une manière de dire qu'on dépense trop.
04:22 -Il y a une discussion au cours d'un dîner de travail à l'Elysée
04:25 pour savoir si on doit ou pas mettre cette vidéo en ligne.
04:28 Richard Ferrand, président du groupe En marche à l'Assemblée,
04:32 pense que non. Il dit "vous déconnez complètement".
04:35 François Béroux, qui est là aussi, agrégé de lettres classiques,
04:38 dit "mais non, c'est bien,
04:40 "ça montre que le président parle comme tout le monde.
04:43 "Le président est au travail."
04:44 Et finalement, Emmanuel Macron tranche dans ce sens-là
04:48 et la vidéo est mise en ligne.
04:49 -On met un pognon de dalle dans les minimas sociaux,
04:52 les gens sont pauvres.
04:54 -Au-delà du problème de fond, il y a aussi un problème de forme.
04:57 Quand Emmanuel Macron parle populaire,
04:59 il n'est pas compris parce que ce n'est ni ses mots,
05:02 ni sa grammaire, ni son vocabulaire,
05:04 ni sa syntaxe habituelle.
05:06 Donc, tout simplement, ça sonne faux.
05:08 Musique de tension
05:10 ...
05:18 -Est-ce que vous rediriez ça, monsieur le président ?
05:21 -Certainement pas. Non.
05:23 J'ai acquis une chose,
05:25 c'est qu'on ne fait rien bouger
05:28 si on n'est pas pétris d'un respect infini pour chacun.
05:31 -Vous montrez de respect à l'époque ?
05:33 -Je pense que dans certains de mes propos, j'ai blessé des gens.
05:37 -On peut bouger les choses sans les blesser.
05:39 -Je pense qu'il a pris conscience de ça
05:41 et qu'effectivement, il surveille davantage son langage.
05:45 Et je ne trouve pas de traces récentes
05:48 de ce type de petites phrases.
05:50 Il n'a pas été pris en flagrant délit
05:52 depuis un certain temps.
05:54 -Je crois qu'il est trop tard,
05:56 parce que les gens pensent qu'il est d'un monde
06:00 qui n'est pas le leur.
06:01 Il peut toujours dire "oui, je vous comprends,
06:04 "je suis avec vous",
06:06 mais c'est trop tard.
06:07 Toutes ces phrases ont marqué
06:10 et sont restées dans la mémoire collective
06:13 pour les effacer ces cotons.
06:15 ♪ ♪ ♪