À 100 jours des Jeux de Paris, les sportifs alsaciens accentuent leur préparation, qu'ils soient qualifiés ou pas encore. Olivier Drentel, le responsable régional de la haute-performance dans le Grand Est, est l'invité de France Bleu Alsace ce jeudi 16 avril 2023.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Le Alsace a 100 jours du début des Jeux Olympiques, Théo, on s'intéresse à nos athlètes alsaciens.
00:05 Est-ce qu'ils vont nous rapporter des médailles ?
00:07 On aimerait bien ça, on aimerait énormément ça, mais sont-ils seulement déjà qualifiés pour les Jeux ?
00:11 On le sait, c'est un parcours semé d'embûches. Bonjour Olivier Drenthel.
00:14 Bonjour.
00:15 Vous êtes le responsable régional de la haute performance dans le Grand Est,
00:19 c'est en fait la déclinaison locale de l'Agence Nationale du Sport,
00:22 et ça veut dire que vous suivez les sportifs alsaciens qui se préparent pour les Jeux.
00:27 On est à 100 jours de la cérémonie d'ouverture et on l'entendait ce matin,
00:31 à part Sarah Balzer ou Sarah Nutschahn en escrime ou aussi Anne Muller au tiers,
00:35 on n'a pas trop d'idées de tous les Alsaciens qui seront sélectionnés, est-ce que c'est normal ?
00:39 Effectivement, tout à fait. En fait, les dispositifs de qualification sont relativement tardifs aux Jeux Olympiques,
00:45 contrairement à ce que pense la plupart des gens.
00:47 Il y a beaucoup d'athlètes sportifs en France qui sont qualifiés ou qui vont être qualifiés
00:50 seulement au courant du mois d'avril ou de mai, voire même juin pour certaines disciplines sportives.
00:54 Je prends l'exemple de l'athlétisme qui fait ses qualifications terminales au niveau des championnats de France,
00:59 et donc les derniers qualifiés aux Jeux Olympiques, notamment certains Alsaciens,
01:02 n'auront que le saint graal de la qualification à partir du mois de mai ou de juin.
01:06 Ça doit être stressant pour des sportifs de ne pas savoir jusqu'au dernier moment s'ils vont être qualifiés ou pas,
01:12 ou alors ça fait partie de la préparation mentale de l'athlète.
01:16 C'est extrêmement compliqué dans le sens où effectivement ils subissent une incertitude jusqu'au dernier moment,
01:20 alors ce n'est pas le cas dans tous les sports.
01:22 Je vais prendre l'exemple de Bassama Ouem qui est le grimpeur alsacien en escalade,
01:25 qui est qualifié depuis le mois de septembre parce qu'il a réussi un tournoi de qualification olympique
01:30 validé par sa fédération et il a été validé par le Comité national olympique et sportif français,
01:34 donc il est qualifié depuis septembre 2023.
01:37 Mais aujourd'hui on a des sportifs de très haut niveau, on a pris l'exemple d'Océane Muller
01:41 qui a débloqué un quota en tir sportif depuis longtemps pour se qualifier aux Jeux,
01:45 mais qui n'a pas encore une validation officielle de la Fédération Nationale de Tir Sportif.
01:50 Ça veut dire que dans le meilleur des cas, on attend combien de sportifs alsaciens pour les Jeux de Paris ?
01:54 Alors on peut légitimement espérer une vingtaine de sportifs olympiques et paralympiques alsaciens
02:00 qui sont susceptibles de se qualifier aux Jeux olympiques de Paris 2024.
02:04 On a des cordes qui sont relativement importantes,
02:06 notamment une bonne partie de l'équipe de Waterpolo de Mulhouse,
02:11 qui fait partie de l'équipe olympique susceptible de participer aux Jeux olympiques.
02:16 Donc on peut espérer une vingtaine d'athlètes alsaciens.
02:18 J'allais dire de cœur ou de formation, parce que certains s'entraînent à Paris, à l'INSEP,
02:23 mais en tous les cas, qui ont été formés sur le territoire.
02:25 Et puis tous ne défileront pas avec les couleurs françaises.
02:29 Certains seront aussi dans des délégations étrangères parmi ceux qui sont alsaciens.
02:32 Alors ça peut arriver dans le sens où certains ont des doubles nationalités
02:36 et ont fait le choix de représenter son pays, enfin le deuxième pays avec lequel ils ont un passeport.
02:43 Mais le principe est simple, c'est qu'à partir du moment où on a fait le choix de représenter une nation
02:47 aux Jeux olympiques, on est, j'allais dire, embarqué dans la nation dans laquelle on représente cette discipline-là.
02:53 - Alors si on schématise votre rôle, Olivier Drenthel,
02:56 vous supervisez les performances des athlètes alsaciens à 100 jours des Jeux,
03:01 on a hâte que ça arrive ou on se dit que ça arrive beaucoup trop vite ?
03:04 - On a toujours envie d'avoir plus de temps de préparation.
03:07 Donc mon rôle, effectivement, c'est d'accompagner les cellules de performance,
03:13 les athlètes et les entraîneurs, sur le territoire du Grand Est, les Alsaciens évidemment,
03:17 qui sont susceptibles de se qualifier aux Jeux olympiques et paralympiques.
03:20 On le fait toujours en relation avec la Fédération sportive,
03:22 parce que c'est elle qui est responsable du projet de performance des fédérations,
03:26 et on est en charge d'accompagner, que ce soit dans l'insertion socio-professionnelle,
03:30 l'analyse scientifique de la performance des sportifs,
03:33 comme je vais prendre l'exemple de Jules Rippstein, qui est un paratriathlète alsacien
03:37 qu'on accompagne très fortement, qui est susceptible d'être médaillable aux Jeux paralympiques,
03:41 et pour lequel on fait un suivi biologique d'analyse de performance et d'altitude
03:47 dans sa préparation aux Jeux olympiques.
03:50 - Alors ça veut dire que vous vous fixez un objectif de médaille pour les Jeux ou pas ?
03:55 - Alors au niveau territorial, on ne se fixe pas d'objectif de médaille,
03:58 parce que nos athlètes ou les athlètes qu'on accompagne ne sont pas, j'allais dire,
04:02 fixés sur un territoire propre, puisqu'ils sont amenés dans le cadre de leur carrière,
04:08 soit à être formés en Alsace, soit à y venir pour s'y entraîner et se préparer.
04:12 Donc on peut parler de sportifs qui sont licenciés en Alsace,
04:15 des sportifs qui sont formés en Alsace, mais certains s'entraînent ailleurs, en France,
04:20 des fois dans le sud de la France pour certaines conditions, ou encore à l'INSEP,
04:23 et c'est très dépendant des centres d'entraînement olympiques des fédérations.
04:27 Donc au niveau territorial, on ne se fixe pas de médaille, par contre on se doit l'obligation
04:31 d'accompagner l'ensemble des sportifs qui évoluent sur le territoire, qu'ils soient alsaciens ou non.
04:36 - 7h51, c'est France Bleu Alsace, Olivier Drenthel est l'invité du 6-9,
04:40 responsable régional de la haute performance dans le Grand Est,
04:43 à 100 jours du début des Jeux Olympiques.
04:46 - Il y a quand même une question qu'on se pose, à savoir le top 5 mondial,
04:50 comme on le souhaite pour la France, est-ce que ça vous paraît réalisable,
04:53 vous qui êtes au contact des sportifs de tous les jours ?
04:56 - Alors, effectivement, on a annoncé un top 5 mondial,
05:00 et ça nous demanderait de faire entre 54 et 58 médailles aux Jeux Olympiques,
05:06 et aujourd'hui, d'après les statistiques qu'on a en oeuvre,
05:09 on pense pouvoir atteindre cet objectif-là.
05:11 Donc oui, l'objectif d'être dans les 5 meilleures nations mondiales,
05:16 et autour de 55 à 60 médailles aux Jeux Olympiques,
05:20 il est, à mon sens, tout à fait atteignable.
05:22 - Sur le papier, en tout cas, c'est atteignable,
05:24 ça veut dire que les performances aujourd'hui des athlètes que vous suivez,
05:27 elles sont à quel niveau ? Est-ce qu'ils atteignent leur maximum de croisière,
05:30 ou est-ce qu'il y a encore besoin de les pousser pour certains ?
05:33 - Alors aujourd'hui, on a des athlètes français, et particulièrement alsaciens,
05:35 qui tiennent leur rang depuis plusieurs mois maintenant.
05:38 On a évidemment des têtes d'affiches importantes
05:40 qui sont susceptibles d'être participées aux Jeux
05:44 ou de faire une médaille depuis 6 mois, 1 an,
05:46 mais vous savez que quand on accueille un grand événement sur le territoire,
05:50 on a une pression supplémentaire,
05:52 on pense aussi à l'avantage de l'événement sur le territoire,
05:56 mais il y a toute une bulle médiatique, sportive, partenariale,
06:00 qui fait que ces sportifs-là subissent des pressions complémentaires
06:02 qu'il n'est pas facile de gérer,
06:03 mais avec l'accompagnement qui est mis en place
06:05 au travers des fédérations et de l'Agence Nationale du Sport,
06:07 on se rend compte aujourd'hui que les sportifs de premier plan
06:10 tiennent leur rang depuis longtemps et sont susceptibles, à notre avis,
06:13 d'être au meilleur niveau de leur performance aux Jeux Olympiques.
06:16 On prend l'exemple de ce qui s'est passé cette nuit,
06:18 Océane Muller, qui est première sur le tournoi de qualification olympique
06:22 qui s'est déroulé actuellement à Rio,
06:25 qui avait déjà débloqué un quota olympique,
06:27 montre qu'elle est, malgré la pression de sa précédente participation,
06:32 au rendez-vous et prête à décrocher une médaille aux Jeux de Paris.
06:34 - Vous parliez un peu de la pression que ça représente,
06:37 alors nous on entend au quotidien les questions autour de l'organisation,
06:41 il y a eu les polémiques autour des billets, autour des infrastructures,
06:44 puis même le manque d'intérêt au global,
06:46 est-ce que ça aussi, ça pèse sur les sportifs
06:48 où ils sont quand même assez immunisés de ces considérations-là ?
06:52 - C'est effectivement quelque chose qu'il faut prendre en considération.
06:55 Les sportifs de plus haut niveau sont aujourd'hui, j'allais dire,
07:00 accompagnés ou dans leur système d'entraînement à ce qu'on appelle le "media training",
07:03 et notamment aussi la gestion en termes de préparation mentale
07:06 de l'ensemble des partenaires ou de cette pression supplémentaire
07:09 qui peut graviter autour d'eux.
07:11 Des choses très banales comme "est-ce que mes parents vont pouvoir participer ?"
07:15 ou voir "les preuves à laquelle je vais participer ?"
07:17 tout ce genre de choses a été anticipé au maximum
07:20 pour sécuriser le sportif dans une bulle qui lui permet de se consacrer
07:23 non pas aux contraintes périphériques de l'entraînement,
07:26 mais bien à sa performance et à ce que lui va faire aux Jeux Olympiques.
07:30 - Donc ça veut dire qu'il ne râle pas trop comparé au reste de la population
07:33 par rapport à ces Jeux-là ?
07:34 - L'objectif premier du système, c'est que le sportif soit au cœur,
07:37 au centre et qu'il soit sécurisé.
07:39 Donc je pense vraiment que le sportif aujourd'hui, en France,
07:41 et notamment nos sportifs alsaciens,
07:43 sont dans de bonnes conditions pour participer à ces Jeux Olympiques.
07:46 - Comment un sportif vit ces critiques justement ?
07:48 Il consacre une grande partie de sa carrière à vivre un événement comme celui-ci,
07:52 quand l'ambiance générale est plutôt à "ça coûte trop cher",
07:56 "ça sert à rien", "c'est décevant l'organisation" ?
07:58 Comment il vit ces critiques ?
08:00 - Je pense qu'ils sont capables, en capacité de s'en extraire,
08:05 parce que c'est sportif de haut niveau.
08:07 Aujourd'hui on a une lumière qui est flashée sur eux
08:11 parce que les Jeux se déroulent à Paris,
08:12 mais il ne faut jamais oublier qu'ils participent à des très grandes compétitions
08:16 depuis plusieurs années, un peu partout dans le monde.
08:18 Quand on voit les agendas de ces jeunes sportifs qui ont 20-25 ans
08:22 et qui parcourent la moitié de la planète avec des enjadats incroyables,
08:26 qui sont en capacité mentale de gérer différents paramètres,
08:30 des retards, des absences...
08:32 Donc c'est des gens, c'est des sportifs qui sont en capacité de faire la part des choses,
08:36 de se concentrer de manière très précise sur un objectif qu'ils ont à atteindre
08:40 et de se dissocier du reste de la polémique
08:43 ou de l'organisation plus structurelle de l'événement.
08:46 - Alors une dernière question, on se projette un peu sur l'après-jeu
08:50 parce que votre rôle aussi c'est d'assurer le suivi des sportifs après la compétition
08:54 et on sait que le sujet de l'insertion professionnelle compte énormément pour les athlètes.
08:58 Comment est-ce que vous les accompagnez à ce niveau-là ?
08:59 - Alors je pilote aujourd'hui une équipe qui repose sur les trois crêpes du Grand Est,
09:04 c'est-à-dire à Strasbourg, à Reims et à Nancy,
09:06 dans lesquelles on a des conseillers socio-professionnels
09:08 qui accompagnent au quotidien ces sportifs-là
09:11 pendant leur préparation pour les décharger de leur système,
09:15 soit universitaire, soit scolaire, soit professionnel,
09:17 ou préparer aussi l'après-carrière en aménageant des formations.
09:20 C'est le cas par exemple de Pauline Stey,
09:22 qui est une Alsacienne marcheuse athlétique,
09:25 que vous avez vue juste maintenant, parfaitement,
09:27 qui est susceptible de se qualifier au jeu,
09:29 qui est un vrai espoir de la discipline, notamment pour Los Angeles 2028,
09:34 et qu'on accompagne de manière très pointue sur un aménagement
09:37 avec son CFA, avec son université,
09:40 son entraîneur pour lui permettre d'étaler un parcours
09:44 qui va lui permettre en post-carrière d'intégrer,
09:47 non pas un métier par défaut, mais le métier qu'elle a choisi
09:50 et dans lequel elle va pouvoir transférer ses compétences,
09:52 notamment de sportif de haut niveau,
09:54 mais également celles qu'elle aura acquises à l'université.
09:56 Tout est réfléchi, donc on l'entend,
09:58 et on a aussi entendu votre optimisme quant à ces jeux.
10:00 Merci beaucoup Olivier Drenthel d'être venu ce matin
10:02 dans les studios de France Bleu Alsace,
10:04 responsable régional de la haute performance dans le Grand Est.
10:06 Bonne journée à vous.