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« La chaleur de l’un, c’est la survie de l’autre » Michel a été abandonné à 5 ans dans la forêt avec son frère. Pour neo, il a accepté de nous partager son histoire.
L’histoire de Michel de Robert et de son frère Patrice est racontée dans le film "Frères" d’Olivier Casas au cinéma le 24 avril.

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Transcript
00:00 Je dis à ma mère "Pourquoi tu nous as fait ça ?"
00:02 Et elle me répond "Mais Michel, je ne vous ai jamais voulu."
00:05 Bonjour Michel, vous avez été abandonné dans la forêt à l'âge de 5 ans
00:08 avec votre frère qui en avait 7.
00:09 Vous avez réussi à survivre seul pendant 7 ans.
00:11 Comment ça se fait que vous ayez été abandonné à ce moment-là ?
00:13 Mon frère et moi, on a été abandonnés, on était dans un home d'enfants.
00:17 Donc ça se passe en 49, juste après la guerre.
00:19 Personne ne vient nous chercher.
00:20 C'est-à-dire que ma mère, elle nous a mis dans ce home d'enfants
00:23 et elle n'est pas revenue nous chercher.
00:24 Donc ça veut dire qu'elle nous a carrément abandonnés.
00:26 Elle nous a abandonnés parce qu'elle est partie pour un reportage, elle est partie en Amérique du Sud.
00:30 Elle a dit à ma grand-mère qu'elle nous avait emmenés alors que c'était faux.
00:33 Et puis dans ce home d'enfants arrive un drame.
00:35 Le propriétaire se suicide et Patrice le voit rendu au bout de sa corde.
00:41 Il essaye de le détacher et la corde se casse évidemment.
00:44 Il tombe et il voit cette mare de sang.
00:46 Il prend peur, il se dit qu'il a fait quelque chose de très grave.
00:49 Et on s'enfuit.
00:50 Donc on court, on court, on court, on court, on court et on finit par se cacher dans un bois.
00:54 C'est pas vraiment une forêt, c'est un bois qui se trouve à Châtelayon.
00:58 C'est en dessous de la Rochelle, à peu près 1,5-2 km de ce village, mais en pleine nature.
01:04 Donc quand on est parti, j'ai 4 ans et demi et lui 6 ans et demi.
01:07 Moi je suis vraiment tout petit.
01:08 Il est donc vraiment en charge de son petit frère.
01:10 Et là on va rester quand même assez longtemps.
01:14 Donc on va vraiment vivre en se nourrissant de ce qu'on peut trouver.
01:18 Au départ on a mangé des limaces, on a mangé des escargots, on a mangé aussi pas mal de feuilles.
01:23 L'adaptation s'est faite très rapidement à ce milieu de la forêt.
01:27 Et ensuite j'ai tout de suite construit une cabane.
01:30 Donc j'ai tout de suite compris avec les branches comment on abritait en superposant les couches de feuilles et de fougères.
01:35 Il y avait quand même pas mal de fuites.
01:37 La deuxième cabane, elle est déjà beaucoup plus élaborée.
01:40 Elle a un peu la forme d'une tente.
01:41 Et elle je l'ai faite avec des mousses.
01:43 Je fabrique des tuiles avec les bidons d'huile que Patrice me ramène de la décharge, que j'écrase et que j'aplatis.
01:50 On se lave dans la rivière, on se coupe les cheveux nous-mêmes.
01:54 On a une telle fusion parce que pour vous dire, on dort l'un contre l'autre.
02:00 Je vais aller très loin, la chaleur de l'un c'est la survie de l'autre.
02:06 C'est pas "je dors contre toi pour avoir chaud".
02:09 C'est plus que ça.
02:10 C'est ta chaleur, c'est ma survie.
02:13 C'est comme des jumeaux quoi.
02:15 Donc c'est très fort.
02:16 Et cet amour, il va perdurer tout le temps.
02:19 Comment êtes-vous revenu à la civilisation ?
02:21 Ma grand-mère qui croyait qu'on était parti avec ma mère, elle revient sur cet endroit-là et elle voit les deux gosses.
02:27 Elle va repartir vers sa fille et elle va lui dire "écoute, je suis sûr que tu as abandonné tes gosses.
02:32 Si tu ne vas pas les chercher, je te dénoncerai à la police".
02:35 Et donc elle vient nous chercher.
02:37 Mais nous ça ne nous fait absolument rien.
02:38 Votre mère, ça ne nous parle pas.
02:40 Ça marque la vie parce que le manque d'amour quand vous êtes enfant, il est totalement traumatisant.
02:45 Tu sens que personne ne t'a voulu et que si tu es là, c'est parce que ça a été une obligation.
02:51 Mais tout le monde s'en fiche, tu n'intéresses personne.
02:53 C'est-à-dire que tu regardes les autres s'aimer et tu ne dis personne d'eux-mêmes.
02:56 Et en même temps, cette enfance, c'est aussi une joie et une liberté tellement extraordinaires, tellement fantastiques,
03:04 que mon frère me dit "Michel, on a commencé par la fin".
03:07 Il dit que dans cette société bourrée de contraintes et de problèmes,
03:11 cette liberté pendant toutes ces années, elle a été fantastique.
03:15 Elle a été extraordinaire et que la légèreté de vivre, il ne la retrouve plus.
03:20 [Sonnerie]
03:22 [Musique]

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