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Le risque est systématiquement associé au danger, mais s’il est librement choisi, il peut être perçu comme un motif d’épanouissement. David Le Breton le présente comme un outil pour bouleverser la fixité des choses, les positions établies et ouvrir de nouvelles pistes.Par David Le Breton, professeur de sociologie à l'université de Strasbourg, membre de l'Institut Universitaire de France. 

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Transcription
00:00:00 (Applaudissements)
00:00:02 Bonjour à tous et à toutes, merci beaucoup d'être ici.
00:00:11 On va passer deux jours ensemble à parler d'enfance et de culture.
00:00:16 Je m'appelle Brune Bottero.
00:00:18 Je vous donne quelques petites informations pour que tout se passe bien.
00:00:21 Alors déjà, c'est un colloque qui est international,
00:00:24 donc vous allez entendre du français et de l'anglais.
00:00:27 Pour ceux qui ne seraient pas à l'aise dans une de ces deux langues,
00:00:30 il y a des casques à l'entrée que vous pouvez récupérer
00:00:33 pour pouvoir entendre une traduction simultanée.
00:00:36 Ensuite, petit détail aussi, il y a le Wi-Fi.
00:00:40 Donc le nom du réseau, c'est "Faire grandir les enfants",
00:00:43 le mot de passe, désolé de vous l'annoncer comme ça,
00:00:46 c'est FGE en majuscule, @2024, si vous voulez vous connecter.
00:00:51 Voilà, et puis on va commencer direct par accueillir David Le Breton,
00:00:55 que j'appelle à me rejoindre.
00:00:58 Bonjour David.
00:01:04 Alors David Le Breton, vous êtes professeur de sociologie
00:01:07 à l'université de Strasbourg.
00:01:09 Vous travaillez beaucoup sur les souffrances adolescentes, notamment.
00:01:12 Vous êtes l'auteur de plusieurs livres, dont "Dévisage, une anthropologie",
00:01:16 paru récemment chez Métaillé,
00:01:18 et "Conduite à risque, des jeux de mort aux jeux de vivre", au PUF,
00:01:21 et aussi "Sociologie du risque", dans la collection "Que sais-je".
00:01:24 Ce sont des livres que vous pourrez retrouver à la boutique
00:01:26 de la Cité des sciences et de l'industrie.
00:01:28 Je vous laisse la parole, c'est vous qui commencez.
00:01:31 Bien, merci infiniment pour cette invitation.
00:01:34 Merci aux organisatrices, Brune, Lisa, Margot,
00:01:39 et puis merci à toutes et à tous de cheminer un petit moment avec moi
00:01:43 lors de mon exposé.
00:01:46 D'abord, je voudrais rappeler que les sociétés accordent
00:01:50 une marge de manœuvre très différente aux enfants,
00:01:52 d'un lieu à l'autre, d'une époque à l'autre.
00:01:55 Je prendrais pour démarrer l'exemple que donne Jared Diamond,
00:02:00 un anthropologue américain, qui a réfléchi un peu sur la question
00:02:04 et qui observe en Nouvelle-Guinée une société où les enfants
00:02:08 comme les adultes se sont extraordinairement contraints
00:02:11 par toute une série d'interdits, de contrôles, etc.
00:02:14 Et il se trouve qu'à l'intérieur de cette société, un enfant va partir,
00:02:18 enfin, de cette société, un enfant va partir dans une autre famille,
00:02:23 dans un autre lieu, mais tout proche, à quelques dizaines de kilomètres.
00:02:27 Et là, c'est absolument l'inverse.
00:02:29 C'est-à-dire que les enfants sont totalement livrés à eux-mêmes,
00:02:32 totalement. Il n'y a aucun contrôle des adultes.
00:02:35 Et Jared Diamond observe d'ailleurs avec étonnement que les enfants
00:02:39 jouent avec le feu sans qu'aucun adulte ne vienne les empêcher
00:02:43 de se brûler, par exemple.
00:02:45 Il voit d'ailleurs que beaucoup d'adultes portent des cicatrices.
00:02:48 Voilà donc deux modalités extrêmement différentes d'éduquer les enfants
00:02:54 et notamment de les préparer à la question du risque.
00:02:57 Finalement, ce sont aussi d'ailleurs des modalités éducatives
00:03:01 que nos sociétés réprouvent un peu.
00:03:04 Ce serait d'un côté le laisser-faire complet,
00:03:07 ou alors de l'autre côté une surveillance absolument vétilleuse.
00:03:11 La plupart du temps, on est plutôt à mi-chemin de ces manières de faire.
00:03:17 Il y a des sociétés évidemment où le danger dans l'environnement
00:03:21 implique en revanche une très grande attention des adultes.
00:03:25 Par exemple, dans la forêt amazonienne,
00:03:28 je prendrais l'exemple des Indiens Woyaki,
00:03:32 c'est très, très difficile de laisser un enfant tout seul dans la forêt
00:03:35 parce qu'il va être détruit par les animaux, par les serpents, etc.
00:03:39 Donc dans cette société, jusque vers 3 ou 4 ans,
00:03:42 les enfants sont portés sur le dos de leur mère ou de leur père
00:03:45 et ils commencent vraiment à explorer tout doucement leur environnement
00:03:49 à partir de 5 ou 6 ans, mais toujours avec la proximité d'un adulte.
00:03:53 Là, il y a une dangerosité de l'environnement qui exige de faire attention à eux.
00:03:59 C'était pour rappeler qu'il n'y a aucune nature dans la manière d'élever les enfants.
00:04:05 Il y a autant de manières qu'il existe de sociétés humaines depuis l'origine des humains.
00:04:11 Alors, il n'est évidemment de monde que de corps.
00:04:15 Le monde commence et finit à travers notre corps, à travers nos sens,
00:04:19 à travers ce flux incessant qui nous traverse
00:04:23 et qui traduit les données multiples de notre environnement,
00:04:26 qui les traduit en odeurs, en sons, en images, en goûts, en tactilité, en ambiance, etc.
00:04:33 Notre expérience du monde est donc toujours affective, sensorielle.
00:04:37 Il n'est rien dans l'esprit qui ne soit d'abord passé par les sens,
00:04:41 à travers une condition sociale, culturelle, un genre, une histoire personnelle,
00:04:47 une attention à l'environnement et surtout, évidemment, ce que chacun de nous fait de ses influences,
00:04:53 puisque nous ne sommes en aucun cas notre culture, nous sommes ce que nous faisons de notre culture,
00:04:58 nous sommes ce que nous faisons des influences qui ont pesé sur nous.
00:05:02 Et l'enfant entre donc dans l'intégration de la pluralité signifiante, sensorielle et affective du monde.
00:05:08 Ce qu'il apprend à cet âge est une matrice de sens et de perception
00:05:14 qui alimenteront son existence toute entière.
00:05:17 Ces apprentissages précoces conjuguent évidemment ceux de la famille, de l'école,
00:05:23 se prolongent parfois par des affinités avec des voisins, avec des animateurs par exemple,
00:05:28 qui transmettent avec passion leurs compétences dans un domaine ou leurs curiosités,
00:05:33 qui va faire que l'enfant va rester toute sa vie finalement fasciné par les étoiles,
00:05:38 ou par les arbres, ou par les champignons ou d'autres choses de cet ordre.
00:05:42 Une pédagogie participative sollicite l'expérience sensible de l'élève ou de l'enfant.
00:05:49 Son ouverture au monde implique déguiser son attention pour qu'il s'approprie son environnement par corps
00:05:55 dans la confrontation à son environnement et non à distance, assis sur les bancs de l'école,
00:06:01 en demeurant passif, et encore plus dans le monde d'aujourd'hui, passif derrière son smartphone.
00:06:07 Les manières de connaître sollicitent toutes les ressources physiques et morales de l'enfant.
00:06:14 D'ailleurs, pour moi, distinguer ressources physiques et morales, c'est un effet de langage, c'est très abstrait.
00:06:20 On n'a pas notre morale d'un côté et notre corps de l'autre.
00:06:23 Nous sommes tout entiers présents au monde, bien entendu.
00:06:30 L'enfant n'est jamais un réceptacle, jamais, mais le co-auteur, toujours,
00:06:36 le co-auteur de son éducation avec, évidemment, les adultes.
00:06:43 Je mets des guillemets à "adultes", pour moi ce sont des notions très floues, très vagues.
00:06:48 L'enfant est le co-auteur de son éducation avec les adultes, les enseignants,
00:06:55 qui sont aussi d'abord et avant tout ses compagnons, ses compagnes de route.
00:07:00 Ce n'est jamais le réel que les individus perçoivent, mais un monde de signification.
00:07:05 C'est pour ça qu'il y a de la sociologie, d'une certaine manière.
00:07:08 Ce n'est pas le réel que les individus perçoivent, mais toujours un monde de signification.
00:07:13 L'une des tâches de l'éducation est de donner à l'enfant des outils de déchiffrement,
00:07:19 lui rappeler ce foisonnement, le mouvement inlassable des significations,
00:07:24 la multitude des points de vue possibles, les repères également,
00:07:29 pour comprendre, pour explorer, pour élargir sa marge de confiance en lui-même et dans ses ressources.
00:07:35 L'enfant n'est pas moins corps que ses parents ou ses enseignants,
00:07:39 sa compréhension et son usage du monde découlent des attentions à son égard
00:07:44 et des apprentissages qui lui sont prodigués.
00:07:48 L'école induit souvent une longue immobilité qui n'est pas de son âge.
00:07:53 Une discipline qui, pour être nécessaire à la dynamique de groupe de sa classe,
00:07:58 lui est souvent très difficile à tenir.
00:08:01 D'où le fait que certains enfants sont remuants, dissipés, comme on dit,
00:08:06 entravant le bon déroulement des cours.
00:08:09 Toute mon enfance, on m'a dit que j'étais dissipé, remuant,
00:08:13 et j'ai passé un temps record devant les poêles, dans les coins,
00:08:18 ou à faire des tours de la cour de récréation avec une ardoise dans le dos,
00:08:22 disant que j'étais vraiment infréquentable.
00:08:25 Hors de la ritualité sérieuse de l'enseignement dans la classe,
00:08:29 la contrainte à l'immobilité doit être interrompue par des jeux,
00:08:33 des exercices physiques, des activités de découverte de l'environnement,
00:08:37 qui favorisent aussi la dépense, la décharge des tensions,
00:08:41 et une autre relation au monde et aux autres.
00:08:45 L'enfant est alors saisi comme personne, en tant qu'il est son corps,
00:08:50 et non seulement un réceptacle spirituel à remplir.
00:08:54 L'enfant retrouve la sensorialité du monde, le désir de toucher les arbres,
00:08:58 les pierres, de sentir les fleurs ou les végétaux, la terre,
00:09:03 d'entendre à nouveau le silence ou les oiseaux, de regarder,
00:09:07 de contempler le monde autour de lui, et ne plus simplement les voir
00:09:11 pour des raisons utilitaires de protection de soi,
00:09:14 du côté du trottoir ou du côté de la cour de récréation.
00:09:19 Donc ne plus être devant le monde, mais être immergé dans le monde.
00:09:24 Les promenades en forêt, par exemple, pour identifier les arbres,
00:09:28 les plantes ou les animaux, le jardinage ou les activités maritimes
00:09:32 pour les écoliers proches de la mer, sont autant d'échappées belles
00:09:37 vers d'autres dimensions de l'existence que l'on ne peut apprendre
00:09:41 dans les livres ou à travers la médiation d'un enseignant.
00:09:45 L'enfant alors s'approprie le monde par corps,
00:09:49 il apprend à nommer son environnement, à interpréter les situations,
00:09:54 à se protéger également, il découvre souvent l'entraide, la solidarité
00:10:00 et accroît également ses habiletés motrices et en même temps
00:10:04 sa connaissance du monde environnant.
00:10:07 Certains enseignants introduisent ainsi dans leur classe des exercices
00:10:11 de silence, de méditation, des mouvements de yoga éminemment propices
00:10:16 à l'apaisement de l'enfant, à sa disponibilité pour les autres enseignements,
00:10:20 à l'unification du groupe classe, mais ils apprennent aussi à l'enfant
00:10:24 à être à l'écoute de ses perceptions sensorielles, à les comprendre
00:10:28 et à élargir ainsi sa connaissance du monde.
00:10:31 Ce sont d'ailleurs aussi, pour les enseignants, des moments de respiration.
00:10:36 Réintroduire les dimensions corporelles dans l'expérience pédagogique
00:10:41 est une manière de prendre l'enfant comme une personne
00:10:44 et non plus seulement comme un pur esprit.
00:10:47 Au regard de l'inertie physique de nombre d'enfants ou d'adolescents
00:10:52 aujourd'hui qui sont hâpés, hypnotisés par leur portable,
00:10:58 il est évident que le fait de les mouvoir, de les faire bouger,
00:11:04 ce sont des activités de promotion de la santé.
00:11:07 Ce ne sont pas des trucs qui me passionnent, mais en tous les cas,
00:11:10 c'est vrai qu'en termes de santé publique, ce sont des choses
00:11:13 essentielles à rappeler au regard de tous les problèmes de santé
00:11:17 que rencontrent aujourd'hui nos enfants ou nos adolescents.
00:11:20 Les activités culturelles également, je pense davantage au théâtre,
00:11:24 au cinéma, aux comptes, etc.
00:11:28 Les activités culturelles sont aussi une manière de leur faire
00:11:32 lever les yeux de leur portable, leur rappeler que leur environnement
00:11:37 est infiniment plus vaste, infiniment plus complexe,
00:11:40 infiniment plus ambivalent que les informations qui glanent
00:11:44 sur leurs écrans.
00:11:47 L'enseignement varie selon le statut moral du corps dans les sociétés,
00:11:52 selon les conditions sociales, selon, la plus banalement,
00:11:57 que les classes sont mixtes ou non, selon les représentations
00:12:01 inhérentes au genre également, ce qui subsiste des stéréotypes
00:12:05 de genre, mais qui semble encore extrêmement ancré dans le monde
00:12:09 aujourd'hui.
00:12:11 Les moyens accordés aux établissements, l'inventivité des équipes,
00:12:14 la personnalité des enseignants et la qualité de leurs échanges
00:12:18 mutuels, l'ouverture d'esprit des autorités, la créativité particulière
00:12:23 de chaque professeur cristallise la réceptivité des élèves,
00:12:27 leur collaboration propice aux actions pédagogiques mises en œuvre.
00:12:32 Des registres corporels bien différents sont sollicités.
00:12:36 Mais ces activités sont souvent perçues comme dangereuses en puissance
00:12:40 et très réglementées, en ce qu'elles exigent de sortir des murs
00:12:44 de l'école, ne serait-ce que pour aller dans les musées,
00:12:49 ou aller visiter des jardins, ou aller marcher pendant une heure
00:12:53 ou deux à la découverte de la forêt, il faut sortir des murs
00:12:56 de l'école, et donc voilà, problème d'assurance, de règlement,
00:13:00 de responsabilité, etc.
00:13:03 Sans compter les parents qui s'y opposent, par peur qu'il arrive
00:13:07 un accident, et puis évidemment, il y a toutes les logiques
00:13:10 assurancielles extrêmement restrictives aujourd'hui,
00:13:13 qui lient les mains des organisateurs dans tous les domaines,
00:13:16 que ce soit l'école, mais les travailleurs sociaux que je fréquente
00:13:19 évidemment très souvent, sont souvent aussi coincés et ne peuvent
00:13:22 proposer à des enfants en souffrance des activités qui leur seraient
00:13:26 éminemment propices.
00:13:29 Nos sociétés contemporaines sont hantées par le risque,
00:13:32 car ce sont d'abord des sociétés d'individus.
00:13:35 Nous sommes des individus, c'est-à-dire des "moi" personnellement "je".
00:13:39 On n'est plus du tout ensemble dans le monde d'aujourd'hui,
00:13:42 on est les uns à côté des autres, avec des affinités relatives,
00:13:45 avec des intérêts qui nous réunissent parfois, mais la difficulté
00:13:50 de vivre de nos sociétés tient pour une grande part à cette
00:13:54 individualisation du lien social, au fait qu'on est seul au monde,
00:13:58 d'une certaine manière.
00:14:00 Donc nos sociétés sont hantées par le risque, car ce sont des sociétés
00:14:03 d'individus, d'individus qui se sentent démunis face aux menaces
00:14:07 qu'ils imaginent autour d'eux.
00:14:09 Ils se vivent dans l'autonomie, dans l'indifférence relative aux autres,
00:14:15 et si ce sentiment est propice au déploiement de soi,
00:14:18 et à la liberté d'ailleurs, parce que je ne suis pas du tout
00:14:20 en train de critiquer l'individualisme, mais l'individualisme,
00:14:23 c'est l'invention de la liberté, alors que les sociétés communautaires,
00:14:27 comme celles de la Nouvelle-Guinée ou des Goyakis dont je parlais
00:14:30 tout à l'heure, sont des sociétés du nous-autre, où on est ensemble
00:14:34 en permanence, où chaque personne, il n'y a pas d'individus,
00:14:38 mais chaque personne n'existe qu'à travers les interactions
00:14:42 avec les autres.
00:14:43 Nous, nous existons par nous-mêmes, tout seuls, sans avoir forcément
00:14:46 besoin des autres, mais en même temps, évidemment, ça se paye
00:14:49 très souvent de l'isolement, de la solitude, d'un sentiment
00:14:53 d'insignifiance de son existence, de fragilité, etc.
00:14:58 Donc, les individus contemporains n'ont ni en eux, ni dans leur
00:15:04 environnement, les ressources qui leur donneraient une confiance élargie.
00:15:08 Bien entendu, le sentiment du danger est rarement proportionnel
00:15:13 aux menaces réelles, aux menaces réelles pressenties.
00:15:17 La part du fantasme y est considérable, tant pour nier
00:15:22 toutes menaces que pour les exagérer.
00:15:25 La sécurité, bien entendu, n'est jamais assurée, en revanche,
00:15:28 car les peurs ne cessent de se déplacer, soulèvent de nouvelles
00:15:32 exigences de protection.
00:15:33 Il est de toute façon impossible de sécuriser l'existence d'un enfant
00:15:38 au point qu'elle ne comporterait plus d'incertitude ni de danger.
00:15:42 Vivre, c'est forcément un danger en permanence, une précarité
00:15:47 plutôt qu'un danger, disons, dans nos sociétés, en tous les cas,
00:15:50 où on est quand même relativement protégé.
00:15:52 On est en permanence dans la vulnérabilité.
00:15:55 Je dis souvent, j'avais surtout développé ça dans mon livre
00:15:58 "Conduite à risque", toute décision est une prise de risque.
00:16:01 De venir ici plutôt qu'aller ailleurs, ça peut être le risque
00:16:06 de l'ennui, mais ça peut être le risque d'un problème en cours de route
00:16:09 ou d'un accident, de louper autre chose qui aurait été importante.
00:16:14 Ça, c'est des trucs qui sont simples, mais décider de faire ses études
00:16:18 dans une ville plutôt qu'une autre, faire de la sociologie
00:16:21 plutôt que de la physique, ou décider de ne pas faire d'études,
00:16:24 vivre avec quelqu'un, mettre un enfant au monde.
00:16:27 C'était d'ailleurs l'un des grands auteurs catholiques du début du siècle
00:16:33 dont le nom tout de suite m'échappe, disait que le plus grand risque
00:16:37 qu'on prenait dans sa vie, c'était de mettre un enfant au monde.
00:16:40 C'est une responsabilité qu'on prend évidemment pour toute sa vie,
00:16:44 mais toutes nos actions impliquent des menaces,
00:16:49 impliquent de l'incertitude, de l'imprévisible.
00:16:51 C'est-à-dire, en d'autres termes, notre existence d'individu,
00:16:54 elle est faite de beaucoup plus d'imprévisibles que de probables.
00:16:58 Et ça, personne au monde n'y pourra jamais rien.
00:17:02 Il faut assumer notre liberté d'individu.
00:17:06 Dès les premières années de l'existence, évidemment,
00:17:10 le nourrisson est totalement assujetti à la protection de ses parents.
00:17:15 Un enfant de 3 mois, 6 mois, il meurt immédiatement
00:17:18 si on le laisse tout seul.
00:17:20 Les quelques enfants "sauvages" que l'on connaît
00:17:23 sont des enfants qui ont commencé à vivre seul vers 6, 7 ans,
00:17:29 comme Victor de la Veyron, par exemple,
00:17:31 et qui avaient suffisamment de ressources pour pouvoir savoir
00:17:34 qu'il faut manger, qu'il faut se protéger des animaux, etc.
00:17:37 Mais pendant longtemps, l'enfant est extrêmement vulnérable.
00:17:42 Et puis quand il commence à marcher vers 2 ans,
00:17:46 vers 1 an et demi, 2 ans,
00:17:48 il est confronté à d'autres apprentissages
00:17:51 parce qu'il est confronté à des dangers,
00:17:54 des dangers de brûlure, de chute, d'intoxication, d'électrocution,
00:17:58 de noyade s'il y a une rivière dans les parages,
00:18:01 une piscine ou autre.
00:18:04 Également les risques d'accident sur la route,
00:18:08 le gamin qui court derrière son ballon et qui ne fait pas attention.
00:18:12 C'est le moment où les parents sont extrêmement attentifs
00:18:15 à enseigner à leurs enfants, à se protéger,
00:18:18 parfois en étant très répétitifs,
00:18:20 mais évidemment il y a un enjeu, une responsabilité absolument majeure
00:18:23 à cet égard, que l'enfant se sente vulnérable
00:18:26 et qu'il soit toujours attentif à son environnement.
00:18:31 S'ouvrir aux autres et au monde
00:18:34 est une entreprise risquée pendant de longues années,
00:18:37 mais ces prises de risques inhérentes à l'existence
00:18:40 participent à la construction de soi.
00:18:42 Selon les situations, l'éducation mobilise une bonne distance
00:18:46 entre surveillance et confiance.
00:18:49 On ne peut pas surveiller en permanence le gamin
00:18:52 et on ne peut pas non plus lui faire totalement confiance,
00:18:55 donc il y a ce jeu, cette débrouillardie,
00:18:58 cette intuition que les parents peuvent avoir,
00:19:01 que leur enfant ne court pas trop de risques,
00:19:04 parce qu'il a bien compris cette situation,
00:19:06 mais dans chaque famille ce serait une équation différente.
00:19:11 Plusieurs obstacles participent aujourd'hui
00:19:14 à une éducation plénière de l'enfance.
00:19:16 L'individualisation précoce de l'enfant,
00:19:19 devenu souvent partenaire à part entière
00:19:22 des décisions familiales ou de ses activités.
00:19:25 On ne reconnaît absolument plus l'enfant d'autrefois,
00:19:28 quand je dis autrefois c'était simplement
00:19:30 il y a une trentaine d'années,
00:19:32 l'enfant d'autrefois soumis à l'autorité des parents ou des enseignants.
00:19:36 Aujourd'hui, soutenu souvent par ses parents,
00:19:39 il récuse souvent toute forme d'autorité
00:19:42 n'allant pas dans le sens de sa volonté propre, de ses désirs.
00:19:46 C'est après moi le déluge, j'ai envie de faire ça,
00:19:49 je ne veux pas que quelqu'un m'empêche de le faire, etc.
00:19:53 L'enfant est déjà quelqu'un, il est déjà une personne.
00:19:57 Vous vous rappelez des très beaux films de Bernard Martineau,
00:20:00 "Le bébé est une personne".
00:20:02 Aujourd'hui, on a cette tendance, cette inclination
00:20:06 à voir l'enfant comme une personne à part entière
00:20:09 et donc de toujours le considérer comme responsable de lui,
00:20:13 de ses actes, etc.
00:20:16 La famille contemporaine n'est plus toujours
00:20:19 l'instance médiatrice de l'entrée dans un lien social
00:20:22 de partage et de limite.
00:20:24 Elle s'est souvent privatisée elle-même, à la famille,
00:20:27 de même d'ailleurs les enfants.
00:20:29 Elle est devenue une agrégation d'individus
00:20:32 et même les enfants défendant farouchement leur autonomie.
00:20:35 J'ai bien le droit, je veux faire ça, tu ne m'empêcheras pas, etc.
00:20:39 S'agissant de l'enfant, très souvent la famille
00:20:42 est aussi pourvoyeuse de narcissisme,
00:20:44 d'un refus de composer avec les autres,
00:20:46 et même au sein de l'école ou dans d'autres domaines
00:20:49 où le groupe est nécessaire.
00:20:51 On voit souvent des parents extrêmement agressifs
00:20:53 insulter les enseignants,
00:20:55 refuser que l'enseignant émette tel ou tel jugement
00:20:59 sur le devoir d'un enfant
00:21:01 ou lui reproche tel ou tel de ses comportements,
00:21:04 pourtant fort préjudiciables au groupe classe.
00:21:08 Mais laisser croire à l'enfant qu'il possède seul
00:21:12 la maîtrise de ses activités
00:21:14 revient à l'encourager à voir le monde structuré
00:21:16 de son seul point de vue
00:21:18 et le rendre également incapable d'accepter l'altérité à son entour.
00:21:23 Et pourtant il va vivre en permanence à l'intérieur de cette altérité,
00:21:27 plus il grandira bien entendu.
00:21:30 On sait d'ailleurs que beaucoup de travaux aujourd'hui
00:21:33 montrent la diminution graduelle de l'empathie
00:21:37 qui est fortement liée à l'utilisation massive du smartphone,
00:21:41 le fait que l'autre soit toujours à distance,
00:21:43 qu'on n'ait plus son visage, qu'on n'ait plus sa voix,
00:21:46 qu'on ait plus sa présence, qu'on soit plus attentif à lui.
00:21:49 Il y a plein d'indicateurs sociaux,
00:21:51 il y a plein d'expériences qui sont menées
00:21:53 qui montrent que les enfants d'aujourd'hui
00:21:55 sont nettement moins empathiques qu'ils ne l'étaient autrefois.
00:21:58 J'appelle empathie la capacité de se mettre à la place de l'autre, simplement.
00:22:03 D'où d'ailleurs la violence aujourd'hui dans les écoles,
00:22:07 le harcèlement et autres,
00:22:09 où des gamins n'ont absolument pas conscience
00:22:11 qu'ils sont en train de détruire quelqu'un
00:22:13 avec la cruauté de leurs propos
00:22:15 ou les photos qu'ils diffusent, ou les vidéos et autres.
00:22:18 On est de moins en moins capable dans le monde d'aujourd'hui
00:22:20 de se mettre à la place de l'autre.
00:22:22 Et ça c'est une rupture anthropologique aussi
00:22:24 qui est absolument saisissante
00:22:26 parce que c'est difficile de faire une société
00:22:28 sans à tout moment se dire
00:22:30 si je fais ça ou si je dis ça,
00:22:32 comment ça va être perçu par les autres.
00:22:34 En tant qu'adulte, on a généralement acquis cette sensibilité-là,
00:22:38 mais on s'aperçoit que les enfants, ça devient de plus en plus compliqué
00:22:40 de leur faire acquérir du fait de la médiation du smartphone,
00:22:44 particulièrement, qui les absorbe totalement.
00:22:47 Donc les enfants d'aujourd'hui sont sédentaires,
00:22:51 fascinés par les écrans, hypnotisés par les écrans,
00:22:54 le plus souvent immobiles,
00:22:56 immobiles physiquement,
00:22:58 mais avec l'esprit qui tourne dans tous les sens
00:23:00 dans leur téléchargement et leur SMS,
00:23:03 la centaine de SMS qu'ils envoient tous les jours, etc.
00:23:06 Mais c'est ce paradoxe,
00:23:08 d'où la nervosité, le manque d'attention,
00:23:11 tout ce qui est pointé aujourd'hui par les psychologues.
00:23:14 Donc les enfants d'aujourd'hui sont sédentaires,
00:23:17 fascinés par les écrans, le plus souvent immobiles,
00:23:20 témoignant à leur échelle de l'actuelle humanité assise,
00:23:24 comme je la nomme souvent, qui caractérise nos sociétés.
00:23:27 En 2007, il n'y a pas longtemps,
00:23:29 un médecin britannique, William Byrd,
00:23:32 a noté la restriction progressive des parcours pédestres des enfants.
00:23:36 En 1919,
00:23:39 un enfant allait à pied et seul,
00:23:41 pour se baigner dans un lac,
00:23:43 situé à une dizaine de kilomètres.
00:23:46 Une dizaine de kilomètres, tout seul, à pied.
00:23:48 Une génération plus tard, en 1950,
00:23:51 la distance s'est réduite à 1,5 kilomètre.
00:23:55 En 1979, l'enfant va seul à la piscine,
00:23:59 qui est à 800 mètres de là.
00:24:01 Aujourd'hui, il n'a le droit de marcher
00:24:03 que jusqu'au bout de la rue, à 300 mètres.
00:24:06 Vous voyez cette prodigieuse restriction du monde
00:24:09 qu'on inflige aujourd'hui à l'enfance.
00:24:12 Aujourd'hui, l'enfant n'a plus le droit
00:24:15 qu'à marcher simplement au bout de la rue.
00:24:18 Seuls 11% des élèves de primaire
00:24:22 vont à pied, tout seul, à l'école.
00:24:24 11% seulement.
00:24:26 Ce qui explique aussi les embouteillages et les accidents
00:24:28 autour des écoles, avec tous les parents
00:24:30 qui viennent chercher leur gamin en voiture.
00:24:33 En santé publique, on sait aujourd'hui
00:24:36 qu'à la course de 800 mètres, deux tours de piste,
00:24:40 il y a une vingtaine d'années,
00:24:45 les enfants couraient à 800 mètres en 3 minutes.
00:24:50 Aujourd'hui, c'est 4 minutes.
00:24:52 On a perdu 1 minute, ce qui est considérable,
00:24:54 en l'espace d'une génération.
00:24:56 Vous voyez l'humanité assise,
00:24:58 les problèmes de santé publique qu'on rencontre
00:25:00 de plus en plus.
00:25:02 La protection de l'enfant se fait jour.
00:25:05 Une infériorisation physique qui va de pair
00:25:08 avec son éminence morale.
00:25:10 L'enfant roi, l'enfant tyran,
00:25:13 et en même temps, il est petit, il est fragile,
00:25:15 il faut absolument qu'on veille sur lui.
00:25:17 Une ambivalence, une contradiction même.
00:25:19 On considère que livré à lui-même,
00:25:21 il court beaucoup trop de risques.
00:25:23 D'innombrables mesures de protection s'imposent,
00:25:26 notamment au niveau juridique,
00:25:28 par la profusion des règlements
00:25:30 dans toutes les activités possibles.
00:25:32 Une judiciarisation vétilleuse,
00:25:34 l'éléma des éducateurs, des enseignants,
00:25:37 inquiets d'un incident quelconque
00:25:40 et de devoir payer le prix de l'imprévisible.
00:25:43 Le monde de mon enfance, par exemple,
00:25:45 si je prends un seul exemple,
00:25:47 n'a strictement rien à voir avec celui d'aujourd'hui.
00:25:50 En primaire, par exemple, j'allais à l'école à pied,
00:25:53 et mon école était à plusieurs kilomètres de là.
00:25:56 J'ai passé mon enfance, plus tard,
00:25:58 à parcourir toutes les rues de la Sarthe.
00:26:00 J'ai grandi au Mans.
00:26:02 Toutes les routes de la Sarthe, en vélo, à pied, en courant.
00:26:05 On se baignait avec mes copains
00:26:07 dans toutes les rivières, dans toutes les mares,
00:26:09 dans tous les lacs qu'on avait autour de nous.
00:26:12 Il n'y avait aucun interdit.
00:26:13 Nos parents avaient confiance en nous à cet égard.
00:26:15 Je me rappelle d'ailleurs de ma mère
00:26:17 qui avait tellement insisté à ce qu'on apprenne à nager
00:26:20 très, très vite.
00:26:22 Près de la Loire, elle avait connu des moments
00:26:25 où des enfants s'étaient noyés.
00:26:27 Ça l'avait pas mal marqué.
00:26:29 Mais tous nos voisins étaient dans la même logique.
00:26:32 Tout le monde apprenait à nager.
00:26:34 À 5, 6 ans, on nageait comme des poissons tous.
00:26:37 Et puis, un de nos parents avait confiance en nous,
00:26:40 en nos ressources.
00:26:42 On parcourait le monde environnant.
00:26:44 On allait explorer les maisons abandonnées, etc.
00:26:47 Et puis même, par rapport à la culture, par exemple,
00:26:50 au sens plus traditionnel du terme,
00:26:52 j'allais chercher les livres et les disques,
00:26:56 aussi à l'époque, à la bibliothèque du comité d'entreprise
00:26:59 d'Ézine Renaud, où travaillait mon père.
00:27:01 J'y allais à pied, c'était à 5, 6 kilomètres.
00:27:03 Je prenais des bouquins pour ma mère, pour moi.
00:27:06 Je ramenais 2, 3 disques.
00:27:08 Je faisais le va-et-vient à pied pendant longtemps.
00:27:10 J'avais à l'époque 8, 9 ans, 10 ans.
00:27:12 Jamais nos parents se seraient inquiétés
00:27:15 de ce qui allait nous arriver en cours de route.
00:27:17 C'est l'observation que fait également
00:27:19 l'un des très grands alpinistes contemporains,
00:27:21 c'est Reinhard Messner,
00:27:23 qui a cumulé tous les 8 000 possibles
00:27:28 et qui a fait des expéditions absolument prodigieuses.
00:27:32 C'est un Autrichien du Tyrol
00:27:36 et qui se souvient également de l'univers des montagnes,
00:27:39 de son enfance.
00:27:41 Là, je cite Messner qui écrit
00:27:43 "À l'époque, nous ne connaissions pas les panneaux d'interdiction,
00:27:47 nous n'avions pas de piscine.
00:27:49 En revanche, nous pouvions profiter du torrent de Vilnus
00:27:52 où nous construisions des barrages.
00:27:55 La culture urbaine a ôté toute responsabilité aux gens.
00:27:59 On a des assurances pour tout ce qu'on possède,
00:28:02 tout ce qu'on fait, si bien qu'en cas de coup dur,
00:28:05 les autres seront responsables."
00:28:07 Fin de la citation.
00:28:09 Paradoxe d'un monde contemporain
00:28:11 qui individualise l'enfant dès le plus jeune âge
00:28:13 dans nos sociétés, tout en le maintenant
00:28:15 dans une situation de mineur,
00:28:17 par rapport à ce que décrit Messner
00:28:20 ou ce que je décrivais de ma propre enfance.
00:28:23 Je cite à nouveau Messner qui écrit
00:28:26 "Ces espaces de liberté et le pluralisme de valeurs
00:28:30 qui étaient naturels au temps de mon enfance ont disparu.
00:28:35 Aujourd'hui, on doit mettre un grillage autour des étangs,
00:28:38 il est interdit de franchir les cultures,
00:28:41 la forêt est taboue et même en escalade,
00:28:43 on craint que d'aucuns ne portent plainte en cas d'accident."
00:28:48 Si vous lisez le livre de Messner,
00:28:50 vous verrez que déjà à 8, 9, 10 ans,
00:28:52 il escaladait avec son frère tous les rochers,
00:28:54 tout l'environnement alpin qui était autour de sa maison.
00:28:59 Les parents n'avaient absolument aucune inquiétude,
00:29:01 ils avaient confiance dans les capacités de leurs enfants.
00:29:06 "Nombre d'activités autrefois communes à l'enfance
00:29:09 sont désormais associées à un risque
00:29:11 du fait de ce processus d'assurancialisation
00:29:14 de nos sociétés qui identifie les menaces possibles
00:29:17 d'une multitude d'activités
00:29:20 qui ne posaient autrefois absolument aucun problème."
00:29:23 On va donc créer d'innombrables règlements.
00:29:27 "Les accidents ne sont plus perçus comme relevant
00:29:30 du hasard ou de l'épreuve en elle-même,
00:29:32 mais d'une imprudence, d'une défaillance personnelle ou technique."
00:29:35 De toute façon, il y a un responsable.
00:29:37 Si je tombe tout à l'heure en sortant de la cité des sciences,
00:29:42 peut-être, pas moi, mais quelqu'un serait susceptible
00:29:46 d'accuser la mairie de Paris de ne pas avoir prévu
00:29:48 que quelqu'un allait se casser la gueule là, etc.
00:29:51 Il faut chercher absolument des responsables en permanence,
00:29:55 en permanence, une société assez terrible à cet égard
00:29:58 et qui multiplie d'ailleurs la notion de risque.
00:30:01 On se dit vraiment qu'il y a des risques absolument partout,
00:30:03 quoi qu'on fasse, il y a des risques
00:30:06 parce qu'on peut être tenu pour responsable
00:30:08 de quelque chose qui nous dépassait complètement.
00:30:12 Un souci trop vétilleux, trop obsessionnel de la sécurité
00:30:17 anéantit évidemment les possibilités d'élargissement
00:30:20 des ressources physiques et morales.
00:30:22 Il limite forcément la créativité.
00:30:24 Le souci sécuritaire en matière d'activité physique ou culturelle
00:30:28 est une entrave au développement de l'enfant.
00:30:32 Elle le rend d'ailleurs beaucoup plus vulnérable aux accidents
00:30:35 puisqu'il n'est pas du tout préparé à y faire face.
00:30:37 Et puis en plus, physiquement, comme il passe presque tout son temps
00:30:41 derrière son téléphone portable, il n'a plus du tout
00:30:43 les ressources physiques d'un gamin d'il y a 30 ou 40 ans.
00:30:47 Rappelez-vous ce que je vous disais de la course de 800 mètres.
00:30:50 On a perdu une minute en l'espace d'une seule génération.
00:30:54 Donc la confrontation au risque, qui implique évidemment une vigilance,
00:30:59 encourage les prises d'initiatives, les remises en question de soi,
00:31:03 le renouvellement du rapport au monde, le désir d'expérimentation,
00:31:07 la curiosité. Plus on surprotège l'enfant, plus il sera apeuré, vulnérable
00:31:14 et à la recherche en permanence de la protection des autres.
00:31:17 Je fais un petit détour par Émile Zola.
00:31:20 On remonte un siècle, 120 ans en arrière, dans un livre assez fascinant
00:31:25 qui s'appelle Paris, comme la ville de Paris.
00:31:29 Et c'est sur la bicyclette. C'est les premiers temps de la bicyclette.
00:31:32 Et à ce moment-là, la citation que je prends vient d'une jeune femme
00:31:39 qui s'émancipe à travers le vélo. C'est très intéressant quand on fait
00:31:42 l'histoire de la bicyclette. Le vélo a été un outil absolument prodigieux
00:31:47 de l'émancipation des femmes à la fin du 19e.
00:31:51 Et Zola, qui était un grand adepte du vélo, qui adorait faire du vélo,
00:31:54 avait été parfaitement conscient de ça et promouvait le vélo aussi d'ailleurs
00:31:59 comme une forme d'ouverture au monde pour les petites filles et pour les femmes.
00:32:04 Et là, dans ce roman, il met en scène un dialogue entre une jeune femme
00:32:08 sur sa bicyclette et un ami à elle, qui chemine sur les petites routes
00:32:14 où à l'époque il n'y a pas des masses, il n'y a aucune voiture, évidemment.
00:32:17 Et la femme explique que si un jour elle a une petite fille,
00:32:22 la première chose qu'elle lui apprendra, c'est à faire du vélo.
00:32:25 Et pourquoi ? Je cite maintenant Zola qui parle à travers la bouche
00:32:29 de cette jeune femme. "Mettez-en une, une petite fille,
00:32:34 "mettez-en une toute seule sur une bicyclette et lâchez-la moi sur les routes.
00:32:39 "Il faudra bien qu'elle ouvre les yeux pour éviter les cailloux,
00:32:42 "pour tourner à propos et dans le bon sens quand un coup de se présentera.
00:32:48 "Celles qui éviteront les cailloux, qui tourneront à propos sur les routes,
00:32:53 "sauront aussi dans la vie sociale et sentimentale franchir les difficultés,
00:33:01 "prendre le meilleur parti d'une intelligence ouverte, honnête et solide."
00:33:07 Et cette jeune femme, toujours dans la bouche d'Emile Zola,
00:33:10 décline les "progrès" induits par les bicyclettes. Je la cite.
00:33:16 La culotte qui délivre les jambes, à l'époque vous vous rappelez,
00:33:20 les femmes avaient des corsets pleins de jupons, etc.
00:33:23 Il a bien fallu pour faire du vélo, avoir des culottes en zouave au début,
00:33:28 des trucs qui permettaient de pédaler,
00:33:31 on ne pouvait pas monter en écuyerre comme sur un cheval.
00:33:36 Il fallait bien des outils appropriés.
00:33:39 Elle cite la culotte qui délivre les jambes, les sorties en commun
00:33:43 qui mêlent et égalisent les sexes, on est fin du 19e,
00:33:47 qui mêlent et égalisent les sexes,
00:33:50 la femme et les enfants qui peuvent suivre leur mari éventuellement,
00:33:54 les camarades comme nous deux,
00:33:56 avec son copain qui s'entraîne faire du vélo dans la campagne,
00:34:00 les camarades comme nous deux qui peuvent aller à travers champs,
00:34:03 à travers bois sans qu'on s'étonne.
00:34:05 Et là est surtout l'heureuse conquête, les bains d'air et de clarté
00:34:10 qu'on va prendre en pleine nature, ce retour à notre mère commune,
00:34:14 la terre, et cette force et cette gaieté neuve qu'on se remet à puiser en elle.
00:34:20 Fin de la citation d'Émile Zola, mais qui vous montre aux yeux
00:34:24 d'un observateur extrêmement lucide comme lui,
00:34:27 l'importance de ces activités physiques d'ouverture au monde
00:34:30 et en même temps qui apprennent à se protéger,
00:34:33 qui apprennent à repérer les dangers éventuels de l'environnement.
00:34:37 Je vais essayer d'aller un peu plus vite,
00:34:41 de toute façon j'ai dit déjà pas mal de trucs,
00:34:44 mais j'avais décidé de terminer autrement mon propos,
00:34:48 donc j'essaie de passer quelque chose pour avoir le temps de le faire.
00:34:53 Je vais vous raconter une ou deux anecdotes,
00:35:02 ça du coup je l'ai sans doute passé, mais je vous la rappelle.
00:35:05 Le fait qu'aujourd'hui nos enfants par exemple
00:35:09 connaissent plus d'une centaine de logos,
00:35:12 voire plus des milliers de logos,
00:35:15 mais ils sont incapables de reconnaître un chêne d'amarognés
00:35:19 ou d'identifier les oiseaux qu'ils entendent chanter tous les matins de leur chambre.
00:35:24 Voilà le paradoxe, l'hyper-marchandisation de nos sociétés,
00:35:28 le formatage inouï des esprits,
00:35:30 la méconnaissance de l'univers familier qui nous entoure,
00:35:34 le fait qu'on n'a pas les mots,
00:35:36 on ne les connaît pas, en tout cas les enfants n'ont pas les mots,
00:35:40 on ne leur apprend plus rien du tout de tout ça,
00:35:42 par contre on leur apprend évidemment à utiliser leur smartphone avec efficacité.
00:35:47 Mais finalement on les déréalise du rapport, d'un rapport sensoriel,
00:35:52 d'un rapport cognitif avec le monde qui les entoure.
00:35:56 Alors il y a des tas de travaux, je peux résumer ça en vitesse,
00:36:00 il y a des tas de travaux qui montrent justement
00:36:02 combien ces activités de plein air ouvrent l'enfant à une sensorialité heureuse du monde,
00:36:09 développent ses habiletés physiques, apprennent également à l'enfant l'entraide, la solidarité,
00:36:16 l'apprennent, comme je disais tout à l'heure, à voir qu'il y a d'autres points de vue que le sien,
00:36:21 il n'est pas un petit roi, il y a dix gamins sur le terrain de jeu,
00:36:26 il y en a plusieurs qui ont des points de vue différents,
00:36:29 donc il faut composer avec les uns, avec les autres,
00:36:32 donc ce sont des moments extrêmement puissants de socialisation, d'ouverture à l'autre, également à l'altérité.
00:36:38 Le fait de jouer avec le risque évidemment, ou avec le fantasme du risque,
00:36:43 c'est une formidable école de la vie également,
00:36:46 il y a l'intensité, le frémissement de l'enfant qui croit qu'il prend des dangers, qu'il prend des risques,
00:36:52 alors souvent il n'en prend pas des masses, mais surtout si les adultes sont là dans le coin,
00:36:56 mais en tous les cas il y a ce sentiment de faire des choses extraordinaires,
00:36:59 je vous en donne d'ailleurs un exemple très simple d'une petite qui doit avoir 15-16 ans,
00:37:06 qui a des problèmes avec la justice, une petite délinquante,
00:37:10 et le juge pour enfant lui a proposé soit une institution fermée où on accueille des adolescents à problème,
00:37:17 soit la prison, je crois, ou la longue marche.
00:37:22 Je suis en train de faire référence à l'association SAI qui a été fondée ici à Paris par Bernard Olivier,
00:37:29 et cette petite choisit donc d'aller marcher sur 2000 kilomètres, c'est Paris,
00:37:34 sans téléphone portable, sans musique, etc.
00:37:37 Et donc ils partent avec un compagnon, une compagne de route, ils partent du puits en volet,
00:37:42 puis les voilà à mi-chemin, tout d'un coup dans un gîte,
00:37:45 ils sont avec une compagnie de marcheurs français,
00:37:50 et puis tout le monde discute, et puis il y a quelqu'un qui se tourne vers cette petite et qui lui dit
00:37:55 "mais toi quand même tu as l'air vraiment très très jeune, tu viens d'où ?"
00:38:00 Et la petite dit "ben on est partis du puits en volet",
00:38:03 grande exclamation de tous les adultes "quoi ? t'as marché tout ça ?"
00:38:08 Et la petite dit son sentiment d'émerveillement,
00:38:12 ce sentiment pour la première fois dans sa vie d'être quelqu'un qui a fait quelque chose de formidable, etc.
00:38:18 Et donc c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:21 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:24 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:27 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:30 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:33 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:36 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:39 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:42 parce que c'est un peu comme si on avait un petit peu de chance,
00:38:45 quand il est choisi ou consenti en toute lucidité,
00:38:48 le risque constitue une ressource identitaire,
00:38:51 le jeu éventuel avec le danger dans les activités physiques
00:38:54 traduit une expérimentation de soi,
00:38:57 parfois dans la méconnaissance des dangers,
00:39:00 la surévaluation de ses ressources,
00:39:02 mais ça fait partie du jeu, c'est là où on apprend justement
00:39:05 à ne pas dévaler les pentes avec son vélo à toute allure,
00:39:09 à faire gaffe d'avoir des freins,
00:39:12 des tas de choses comme ça qui nous paraissent en tant qu'adultes
00:39:15 entre guillemets très banales,
00:39:17 mais qui ne le sont pas forcément pour un enfant,
00:39:19 mais c'est en expérimentant qu'il va apprendre justement
00:39:22 sa vulnérabilité et qu'il va ajuster son comportement à cet égard.
00:39:26 J'ai beaucoup parlé des activités physiques,
00:39:34 des activités de plein air,
00:39:36 pour vous montrer comment elles sont des formes majeures
00:39:39 et qui sont en question de réparation dans beaucoup de cas.
00:39:43 Je n'ai pas le temps de développer la manière dont les travailleurs sociaux
00:39:46 aujourd'hui utilisent énormément les activités d'aventure,
00:39:49 les longues marches également,
00:39:52 les traversées de déserts ou l'escalade, l'alpinisme,
00:39:58 il y a plein de choses comme ça,
00:40:01 j'ai évoqué ou du côté de la Bretagne,
00:40:04 on fait souvent faire des croisières à des jeunes toxicomanes
00:40:08 ou délinquants ou en souffrance personnelle,
00:40:11 ils partent quelques jours ou quelques semaines
00:40:14 seconder des marins sur des bateaux.
00:40:18 Ce sont des ressources majeures,
00:40:20 surtout dans le monde d'aujourd'hui où on est de plus en plus immobile
00:40:24 et dépossédé de sa propre pensée à travers les GAFAM,
00:40:28 les géants de l'Internet qui pensent en permanence pour nous
00:40:32 et qui finissent par régir complètement le monde qui nous entoure.
00:40:35 Mais je voudrais terminer en fonction aussi de mon expérience
00:40:39 des conduites à risque des jeunes
00:40:41 et des manières de les accompagner, de les prendre en charge,
00:40:44 au-delà des activités physiques d'aventure,
00:40:49 il y a aussi le recours aux activités culturelles,
00:40:52 au sens plus classique du terme,
00:40:54 je vais très vite en prendre deux ou trois exemples,
00:40:57 l'un d'entre eux, vous pouvez le prolonger
00:41:01 en regardant ce très beau film de Keshiche qui s'appelle "L'esquive".
00:41:06 Dans "L'esquive", vous avez une prof de français dans le nord de la France
00:41:11 qui tente de monter une pièce de Marivaux avec des élèves,
00:41:15 des élèves de milieux populaires,
00:41:18 parce que quand on les voit, quand ils parlent ensemble,
00:41:21 ce sont des enfants qui parlent à toute vitesse,
00:41:23 c'est extrêmement difficile de les suivre
00:41:25 parce que c'est vraiment une vocalisation quasiment
00:41:28 comme avec une mitraillette, véritablement.
00:41:31 Il y a un fils de pute dans chaque phrase, c'est impossible,
00:41:34 c'est comme un point ou une respiration,
00:41:36 que ce soit les filles d'ailleurs ou les garçons.
00:41:39 Mais quand ils entrent dans le texte de Marivaux,
00:41:44 soudain, il se passe quelque chose d'absolument magique,
00:41:47 ils sont tous en train d'écouter celui ou celle qui lit un texte,
00:41:52 il y a une sorte de redécouverte de la langue,
00:41:56 mais au-delà de la langue, évidemment,
00:41:58 c'est aussi une redécouverte du monde,
00:42:00 le sentiment qu'il n'y a pas que la manière de parler
00:42:02 de son quartier qui existe,
00:42:04 finalement il y a beaucoup d'autres manières de parler.
00:42:06 Et puis le théâtre est un dispositif anthropologique absolument essentiel,
00:42:11 le théâtre nous apprend à changer de rôle, tout simplement.
00:42:14 C'est-à-dire, nous apprend qu'on n'est jamais prisonnier
00:42:17 de sa réputation, de son rôle social.
00:42:20 La preuve peut dire à un élève,
00:42:22 finalement, toi je te verrais mieux dans tel ou tel personnage,
00:42:25 et le gamin va changer de personnage,
00:42:29 il s'aperçoit finalement qu'on n'est jamais prisonnier de soi,
00:42:32 le monde est toujours devant nous,
00:42:35 il n'est jamais derrière,
00:42:37 donc je vois le théâtre comme un outil absolument essentiel
00:42:40 d'apprentissage de la liberté de manœuvre
00:42:45 dont chacun peut disposer dans sa vie.
00:42:47 Je vais vraiment très vite, je termine dans quelques minutes.
00:42:51 Il y a aussi l'expérience prodigieuse de Pina Bausch,
00:42:55 sans doute la plus grande chorégraphe du XXe siècle,
00:42:58 à Wuppertal en Allemagne, dans un collège, dans un lycée.
00:43:02 Elle est mobilisée par la municipalité
00:43:07 pour faire un atelier danse avec des élèves volontaires de sa classe.
00:43:12 Et pendant plusieurs mois, les élèves vont monter,
00:43:16 vont remonter, d'ailleurs, à une chorégraphie légendaire de Pina Bausch,
00:43:22 mais à leur âge et avec leurs moyens, etc.
00:43:26 On est en Allemagne, donc il y a quasiment la moitié des élèves qui est turc,
00:43:31 et donc ce n'est pas facile de mobiliser notamment les garçons,
00:43:35 parce que pour les garçons, le théâtre, la danse, c'est un truc d'homosexuel,
00:43:40 je le dis avec la civilité,
00:43:44 ils sont plus brutaux que ça.
00:43:47 Rappelez-vous d'ailleurs aussi le très beau film "Billy et Elliot"
00:43:50 et la violence que subit ce jeune Anglais dans sa passion pour la danse,
00:43:54 aussi bien violence de la part de ses parents, ouvriers durs, virils, etc.,
00:44:00 que de la part de ses copains de classe,
00:44:03 pour qui vraiment c'est un type perdu, un homosexuel refoulé, ouvré, etc.
00:44:08 Voilà tout un tas de gamins, il y a une moitié de filles, une moitié de garçons,
00:44:12 et ils vont en effet faire un spectacle absolument prodigieux
00:44:15 qui a été filmé par une documentariste qui suit l'entreprise d'un bout à l'autre,
00:44:21 ça s'appelle "Les rêves dansants", vous trouvez ça en DVD,
00:44:26 moi je l'ai acheté une dizaine d'euros,
00:44:29 c'est vraiment un document merveilleux qui bouleverse complètement,
00:44:32 et il bouleverse notamment parce qu'on s'aperçoit au fur et à mesure
00:44:38 des entretiens que la documentariste a avec un certain nombre d'élèves,
00:44:43 que beaucoup d'élèves ont réparé des déchirures qui existaient dans leur vie.
00:44:49 Pour moi la plus belle, la plus bouleversante de toutes,
00:44:52 c'est une petite qui doit avoir 14 ans, pas 13, 14 ans,
00:44:57 et à qui Pina Bausch a proposé à un moment de faire un solo,
00:45:01 un moment absolument grandiose pour elle, toute petite,
00:45:05 avec les spectateurs, souvent les parents qui vont voir le résultat de ces mois de travail,
00:45:12 et à ce moment-là, quand elle est interjugée, on découvre avec stupeur
00:45:16 que son père s'était tué quelques semaines avant que ne commence l'atelier danse,
00:45:24 que la famille a été totalement désintégrée,
00:45:27 la mère n'a jamais compris pourquoi son mari s'était tué,
00:45:31 elle est entrée dans une dépression extrêmement sévère,
00:45:34 les enfants ont été livrés un peu à volo,
00:45:37 et puis elle, elle a investi là-dedans,
00:45:40 et il y a ce moment, je trouve déchirant quand on regarde le film,
00:45:44 où elle dit "quand j'ai fait mon solo, j'étais convaincue que mon père me regardait".
00:45:48 Vous voyez comment des formes de réparation peuvent exister,
00:45:52 de façon tellement simple, tellement peu coûteuse par ailleurs,
00:45:56 mais avec d'autres prises de risques d'ailleurs,
00:45:59 j'ai évoqué surtout le risque "physique", mais aussi le risque plus symbolique,
00:46:05 de prendre la parole en public,
00:46:08 pour moi ça a été longtemps quelque chose d'absolument impossible,
00:46:12 mais pour des enfants, de danser devant d'autres, de jouer au théâtre,
00:46:18 dans la hantise d'oublier une réplique,
00:46:20 ou d'avoir un fou rire au moment le plus tragique de la pièce,
00:46:24 il y a une prise de risque considérable quand on entre sur la scène.
00:46:29 D'où le fait que ce sont des apprentissages absolument essentiels.
00:46:33 Et puis pour terminer, je peux revenir sur la marche,
00:46:37 parce que j'ai évoqué l'expérience de l'association Soil à Paris,
00:46:41 mais qui est diffusée aujourd'hui partout, même dans beaucoup de pays européens,
00:46:45 il s'agit de faire marcher les enfants sur 2000 kilomètres,
00:46:49 sans téléphone portable, sans musique et autres,
00:46:52 mais on peut aussi faire marcher les enfants sur de moindres distances,
00:46:56 en les faisant sortir de la ville, ou simplement en les sortant d'un quartier,
00:47:01 en les faisant visiter la forêt avoisinante avec des animateurs ornithologues,
00:47:05 ou qui connaissent les arbres, ou je ne sais quoi,
00:47:09 et puis on va apprendre aux enfants à repérer les feuilles, à repérer les fruits, etc.
00:47:14 C'est des trucs d'une simplicité absolument déconcertante,
00:47:17 et en même temps qui va mobiliser souvent de la part des enseignants,
00:47:21 ou éventuellement des travailleurs sociaux,
00:47:23 beaucoup de ressources intérieures et de ténacité,
00:47:27 parce qu'on va leur dire "mais c'est vachement dangereux,
00:47:30 s'il y en a un qui tombe, s'il y en a un qui disparaît, on ne s'en remettra jamais".
00:47:36 Donc il faut se battre contre vents et marées,
00:47:39 contre une société hyper...
00:47:42 où il y a une obsession de sécurité d'un côté,
00:47:45 ce qui n'empêche pas, quand on ouvre la télé,
00:47:50 parfois de voir des rallies qui traversent des villages ou des villes,
00:47:54 Paris-Dakar, de sinistres mémoires,
00:47:58 ou d'autres...
00:47:59 Donc d'un côté vous avez une valorisation effrénée du risque,
00:48:02 pour des privilégiés, l'aventure, etc.
00:48:05 Et puis de l'autre côté, vous avez cette espèce d'obsession sécuritaire
00:48:11 qui fait que notre marge de liberté souvent est extrêmement restreinte.
00:48:15 Pour terminer, simplement dire que le risque est vraiment inhérent à nos existences.
00:48:20 On ne peut pas vivre sans prendre des risques,
00:48:22 et puis on apprend en permanence de tous les risques qu'on comprend.
00:48:27 Ça nous permet de grandir jusqu'à la fin de nos jours, même quand on est très vieux.
00:48:31 Merci infiniment de votre écoutage.
00:48:34 (Applaudissements)
00:48:53 Merci David Le Breton.
00:48:55 On va prendre quelques questions dans le public,
00:48:58 mais avant ça, on a prévu une petite chose,
00:49:01 c'est qu'on va parler d'enfants pendant deux jours.
00:49:04 Les enfants sont au centre de nos discours, de nos préoccupations.
00:49:07 Mais il n'y a pas d'enfants, vous avez remarqué,
00:49:09 il n'y a pas d'enfants ni sur la scène ni dans le public.
00:49:11 Alors on a interviewé trois enfants, qui seront nos petites invitées,
00:49:15 en décalé, qui interviendront de temps en temps dans ce colloque.
00:49:20 Et on va écouter une première question pour vous David, de la jeune Louise.
00:49:27 Moi je m'appelle Louise et j'ai 10 ans et j'aime bien lire et aussi ne rien faire.
00:49:34 Alors moi ma question, c'est pourquoi on a forcément besoin de parents
00:49:38 et pourquoi on a forcément besoin de tout le temps les écouter
00:49:42 et pas de nous écouter nous-mêmes ?
00:49:46 Je réponds maintenant ?
00:49:48 Vous pouvez répondre à Louise, elle sera informée de la réponse.
00:49:51 Oui d'accord.
00:49:52 Je dirais à Louise que la manière dont les parents veillent sur un enfant,
00:49:56 ça s'appelle la transmission d'ailleurs.
00:49:58 Quand on a 10 ans, évidemment, on a encore une énorme méconnaissance du monde,
00:50:03 même si on est une grande lectrice comme elle semble l'être,
00:50:07 même si on aime ne rien faire.
00:50:09 Aujourd'hui il faut absolument valoriser ça, elle est prodigieuse.
00:50:12 Parce que l'ennui disparaît complètement.
00:50:15 15 secondes et beaucoup dans la salle, vous allez tirer votre téléphone portable.
00:50:21 Et on est nombreux dans le domaine de l'enfance ou de l'adolescence,
00:50:26 que ce soit du côté des psychologues, des pédopsyches, ou de la sociologie ou de l'entrepôt,
00:50:32 on est nombreux à valoriser l'ennui.
00:50:34 Parce que c'est dans l'ennui justement qu'on apprend,
00:50:37 que d'abord on réfléchit, on est dans un processus imaginaire,
00:50:41 on pense à des tas de trucs.
00:50:43 Donc l'ennui est essentiel pour qu'un enfant grandisse.
00:50:47 Et puis d'autre part il faut distinguer autorité et autoritarisme.
00:50:51 Quand les parents sont autoritaires dans le sens de l'autoritarisme,
00:50:55 ça peut être une tragédie pour l'enfant,
00:50:57 qui ne peut plus faire un pas d'un pied devant l'autre,
00:51:00 et puis qui est contraint en permanence.
00:51:03 L'autorité c'est plutôt assumer une espèce de charisme,
00:51:08 une aura qui fait que l'enfant comprend que ses parents n'ont pas tort
00:51:15 de lui interdire telle ou telle activité, etc.
00:51:19 Du coup on pourrait faire la différence entre autoritarisme et autorité
00:51:24 en jouant sur le mot interdit.
00:51:26 L'autoritarisme c'est interdire, l'unicité du mot interdire.
00:51:31 L'autorité c'est inter-dire.
00:51:35 Interdire étymologiquement ça veut dire dire entre soi.
00:51:40 Si je t'interdis ça c'est parce que c'est dangereux, etc.
00:51:44 L'autoritarisme c'est je t'interdis absolument, tu ne discuteras pas avec moi, etc.
00:51:49 C'est important qu'un enfant dispose d'un certain nombre de cadres, de repères,
00:51:54 mais en même temps qu'il n'ait pas le sentiment d'un étouffement.
00:51:57 Ah oui, j'avais oublié, je voulais commencer mon exposé quand même
00:52:01 par deux images majeures de l'islam.
00:52:04 Je vous les dis tout de suite parce que ce n'est pas pour longtemps.
00:52:07 Rappelez-vous dans l'arrache-coeur de Boris Vian,
00:52:10 parce que celle-là c'est vraiment l'image fabuleuse.
00:52:12 Cette mère qui a tellement peur qu'il arrive quelque chose à ses enfants
00:52:16 qu'elle les met dans une cage
00:52:19 où évidemment ils vont s'étioler et où ils vont mourir.
00:52:23 Comment ?
00:52:25 C'est...
00:52:27 Et puis l'autre image, c'est dans le très beau film d'Edtoré Scola
00:52:33 qui s'appelle "Affreux, sales et méchants".
00:52:36 Vous vous rappelez que dans ce quartier hyper populaire,
00:52:38 je ne sais plus très bien quelle ville italienne,
00:52:41 mais il y a une petite ville qui s'appelle Aetorae Scola,
00:52:44 et c'est là que je me suis rendue compte que c'était un village
00:52:47 où il y avait des gens qui étaient très très riches.
00:52:50 Et donc, il y avait des gens qui vivaient là-bas,
00:52:53 et ils se sont retrouvés dans un village très très riche.
00:52:56 Et donc, il y a une petite ville qui s'appelle Aetorae Scola,
00:52:59 et c'est là que je me suis rendue compte que c'était un village
00:53:02 où il y avait des gens très très riches.
00:53:04 Et donc, il y a une petite ville qui s'appelle Aetorae Scola,
00:53:07 et c'est là que je me suis rendue compte que c'était un village
00:53:10 où il y avait des gens très très riches.
00:53:13 Et donc, il y a une petite ville qui s'appelle Aetorae Scola,
00:53:16 et c'est là que je me suis rendue compte que c'était un village
00:53:19 où il y avait des gens très très riches.
00:53:22 Et donc, il y a une petite ville qui s'appelle Aetorae Scola,
00:53:25 et c'est là que je me suis rendue compte que c'était un village
00:53:28 où il y avait des gens très très riches.
00:53:31 Et donc, il y a une petite ville qui s'appelle Aetorae Scola,
00:53:34 et c'est là que je me rends compte que c'était un village
00:53:37 extrêmement terrifiant de ce qu'on doit refuser en permanence,
00:53:40 et l'enfermement de l'enfant dans une sécurité
00:53:43 qui le détruit, qui l'étouffe.
00:53:46 Il faut faire confiance, on ne peut pas vivre sans confiance de toute façon.
00:53:49 Merci. Alors, on va avoir le temps,
00:53:52 vraiment 5 minutes pour prendre 2 ou 3 questions dans le public,
00:53:55 si il y en a, des questions, des remarques.
00:53:58 Vous avez deux personnes qui circulent avec des micros.
00:54:02 Ah, ça ne marche pas.
00:54:05 Il faudrait activer le micro.
00:54:10 Je ne sais pas si vous avez des questions.
00:54:22 Je ne sais pas si vous avez des questions.
00:54:25 Je ne sais pas si vous avez des questions.
00:54:28 Non.
00:54:31 Je ne vais pas les faire.
00:54:34 Oui, allez-y.
00:54:37 Oui, oui.
00:54:40 Je n'aime pas quand mes filles font des choses risquées,
00:54:43 comme du parapente ou ce genre de choses.
00:54:46 Mais j'ai tellement appris avec ces activités
00:54:49 que je serais bien mal inspiré de les en priver par confort personnel.
00:54:52 Absolument.
00:54:56 Je vois qu'il y a une question là-bas.
00:54:59 En fait, il y en a une en haut.
00:55:16 On va écouter celle d'en haut et ensuite celle d'en bas.
00:55:19 On vous a repérées en même temps.
00:55:22 Je ne sais pas si ça marche.
00:55:25 Bonjour, merci beaucoup pour ce temps.
00:55:28 Je ne sais pas si ça relève de la question ou de l'interrogation,
00:55:31 mais c'est vrai que je pense être plus jeune que vous.
00:55:34 Sans vouloir vous enfoncer.
00:55:37 Et c'est vrai que dans ce que vous peignez de votre enfance,
00:55:40 j'ai la sensation qu'il y a beaucoup de mes pratiques
00:55:43 qui n'étaient pas si loin de ce que vous avez fait.
00:55:46 Et je pense que c'est vrai.
00:55:49 Il y a beaucoup de mes pratiques qui n'étaient pas si loin
00:55:52 de ce que vous décrivez dans l'autonomie.
00:55:55 Je trouve ça un peu dur, la manière dont vous avez condamné
00:55:58 de manière aussi globale et générale,
00:56:01 sans considérer par exemple les facteurs urbains, rurals,
00:56:04 les facteurs sociaux qui font que cette autonomisation de l'enfant
00:56:07 et cette prise de risque, parfois,
00:56:10 elle se fait presque malgré soi
00:56:13 parce qu'on n'a pas le choix que de payer quelqu'un
00:56:16 pour accompagner l'enfant à l'école, que d'accompagner les enfants
00:56:19 parce qu'on ne peut pas se permettre le matin d'y aller en voiture.
00:56:22 Et je trouve que c'était très dur parfois
00:56:28 de cette condamnation aussi sévère
00:56:31 de la pratique des enfants avec les écrans.
00:56:34 Je trouvais parfois que moi, dans mon ressenti,
00:56:38 je pense avoir été des enfants qui commencent à grandir avec les écrans.
00:56:43 Et j'ai aussi été à pied à l'école, j'ai aussi fait de la rando,
00:56:48 j'ai aussi été dans des lacs, me baigner,
00:56:52 parce que j'ai peut-être grandi en milieu rural,
00:56:55 je ne sais pas si ça influence, mais je trouvais que c'était un peu sévère.
00:56:59 - Peut-être une réponse d'une petite minute
00:57:03 pour qu'on reste dans les temps si possible.
00:57:06 - Oui, non, je n'ai absolument pas du tout moralisé,
00:57:09 j'ai essayé de décrire des situations
00:57:12 de notoriété courante et qu'analysent aujourd'hui
00:57:15 les psychologues, les psychanalystes, les philosophes,
00:57:18 les sociologues, les anthropologues comme moi,
00:57:21 qui ne sont pas fascinés par les technologies,
00:57:23 qui plutôt essaient d'analyser leurs conséquences
00:57:26 en matière de connaissances, en matière de sociabilité ou autre.
00:57:30 Donc moi j'observe plutôt d'abord une sorte de disparition de l'enfant,
00:57:34 plutôt des adolescents, on a l'impression qu'une génération
00:57:37 a disparu sous nos yeux, mais vous allez me dire,
00:57:39 ce n'est pas seulement les adolescents, il suffit de marcher
00:57:42 dans les rues de Paris ou de Strasbourg ou n'importe où dans le monde
00:57:45 et on ne voit plus personne, parce que tout le monde avance,
00:57:47 tiré en avant par son portable, hypnotisé par son portable,
00:57:50 ce qui fait que quand on est perdu et qu'on cherche son chemin,
00:57:53 par exemple, on ne sait plus du tout à qui ça ne ressent.
00:57:55 Et je pense que ça c'est justement une métaphore
00:57:57 de l'extraordinaire désorientation du monde dans lequel on est plongé,
00:58:01 on n'a plus personne aujourd'hui pour nous guider,
00:58:03 pour nous aider, pour nous indiquer dans quelle direction aller.
00:58:07 Une dernière image rurale, justement, je suis très souvent en Lorraine,
00:58:11 dans un petit village, et quand je vais marcher,
00:58:15 je passe par exemple à 2 heures, je vois 4-5 gamins
00:58:20 sur la place du village qui sont en train de pianoter
00:58:23 derrière leur portable dans l'abribus, quand je reviens 3 ou 4 heures après,
00:58:27 ils n'ont pas bougé, ils sont toujours là, alors que leurs parents
00:58:31 étaient des hommes ou des femmes qui parcouraient la campagne,
00:58:33 qui allaient se baigner dans un lac qui n'est pas très loin,
00:58:36 ils cherchaient des champignons, voilà.
00:58:39 Donc il y a une espèce de décorporation du monde,
00:58:42 de désensorialisation du monde, et qui est relativement nocif sans doute.
00:58:47 Mais en même temps, c'est difficile de répondre simplement,
00:58:52 parce qu'en même temps, vous avez raison de dire que les enfants
00:58:56 qui grandissent avec ces outils sont comme des poissons dans l'eau.
00:59:00 Et effectivement, bien entendu, mais ils ne savent pas ce qu'ils perdent,
00:59:03 d'une certaine manière, ils ne savent pas l'épaisseur du monde,
00:59:06 la saveur du monde qui aurait pu exister s'il n'y avait pas en permanence
00:59:10 la médiation du portable dans leurs relations avec les autres,
00:59:13 sans compter d'ailleurs tous les dégâts en termes de harcèlement et autres.
00:59:17 Quand même, il y a cet aspect-là aussi, en termes d'école ou d'université,
00:59:21 c'est qu'on s'aperçoit que nos gamins n'ont absolument plus
00:59:24 aucune culture générale, aucune culture générale,
00:59:27 ils sont prêts à croire n'importe quoi, donc ils sont un terreau merveilleux
00:59:31 pour le populisme, pour la post-vérité et tous ces trucs-là.
00:59:35 Ça par contre, ça aura des conséquences sociales qui peuvent être
00:59:38 absolument catastrophiques. Si vous leur dites que les Martiens
00:59:41 ont atterri à Paris, ils vont se précipiter pour aller voir
00:59:45 quelle tête ils ont. Ils n'auront absolument pas le recul pour se dire
00:59:49 qu'ils sont en train de me raconter des blagues.
00:59:52 - C'est des sujets qu'on va aussi explorer dans d'autres tables rondes
00:59:55 à travers la parole d'autres personnes, donc on continuera à se poser
00:59:59 ces questions qui sont pertinentes et intéressantes.
01:00:02 Je crois qu'on a peut-être... Enfin, voilà, il y avait une dernière question,
01:00:05 je vous laisse la poser rapidement, mais après, on va vite passer
01:00:09 à la suite, si vous le voulez bien.
01:00:12 - Bonjour et merci pour votre parole, j'ai beaucoup appris.
01:00:17 J'ai une question par rapport à ce que vous avez dit,
01:00:22 c'est plutôt une description de monde, en fait,
01:00:26 et de le dire, comment on est, dans quel monde on vit.
01:00:34 Et moi, ce que j'avais envie d'entendre aussi, c'est que faire, en fait.
01:00:39 C'est qu'un monde, qu'on le dit, on est en recul, l'enfant,
01:00:46 il a perdu le contact avec la réalité par un système mondial
01:00:53 qui domine le monde, un système capitaliste qui favorise
01:00:59 cette mentalité, et qu'est-ce qu'on peut faire ?
01:01:04 Ça veut dire, est-ce que l'individu peut faire quelque chose tout seul ?
01:01:09 Moi, j'ai un enfant, j'ai envie de l'emmener dans la nature,
01:01:12 je travaille dans un centre d'hébergement avec les immigrants,
01:01:18 est-ce que tout seul, je peux faire quelque chose dans ce système ?
01:01:22 Comme d'ailleurs dans le travail, comme d'ailleurs dans toute l'échelle
01:01:27 de la société. Je ne veux pas vous déranger plus, merci beaucoup.
01:01:31 Oui, finalement, c'est tout l'objet du colloque, de conjuguer
01:01:38 toutes les expériences des uns et des autres.
01:01:41 Je crois qu'effectivement, il faut lutter contre le formatage des esprits,
01:01:44 ça par contre, c'est difficile de... si je dis ça, c'est difficile de dire
01:01:48 que je suis un moralisateur, parce qu'on voit bien comment, finalement,
01:01:52 l'esprit de nos enfants est incroyablement formaté aujourd'hui,
01:01:55 sans compter l'esprit de nombreux adultes également.
01:01:59 Mais en même temps, c'est nous qui sommes les maîtres d'œuvre
01:02:05 de nos existences. La petite Louise, par exemple, elle disait
01:02:08 qu'elle lisait énormément, qu'elle aimait bien ne rien faire, etc.
01:02:12 Donc, le monde est toujours devant nous.
01:02:14 Ça, c'est pour moi une phrase fondamentale que je dis souvent
01:02:18 quand j'interviens sur les conduites à risque.
01:02:20 Le monde n'est pas derrière nous, il est devant nous, c'est à nous
01:02:23 de le construire. La manière dont les parents vont être créatifs,
01:02:28 ouvrir leur enfant au monde, les emmener dans les forêts, etc.,
01:02:32 les emmener au théâtre, à la danse, les faire les voyages, etc.
01:02:37 Il y a mille manières d'ouvrir l'enfant au monde et qu'il ait un usage
01:02:41 réflexif, par exemple, du téléphone portable, du smartphone,
01:02:47 mais pas qu'il soit happé complètement par lui.
01:02:50 Ça, c'est toujours entre nos mains, évidemment.
01:02:53 Donc, ne nous faisons pas toujours les complices de ces grands
01:02:59 dégâts femmes qui contrôlent aujourd'hui le monde,
01:03:02 qui ont plus de puissance que les États et qui refusent
01:03:05 de payer leurs impôts, il faut aussi le rappeler.
01:03:07 Ce n'est pas du tout un univers que nous devrions valoriser
01:03:10 si on peut se battre pour le service public, pour les solidarités,
01:03:13 pour les mitiés, etc., parce que ce sont des dispositifs
01:03:16 qui vont absolument à l'encontre de toutes ces valeurs qui sont
01:03:19 les nôtres incarnées par des hommes qui sont également dans les valeurs
01:03:23 de l'ultracapitalisme, l'ultralibéralisme, avec lesquels
01:03:27 on ne peut pas vivre si on n'a pas beaucoup d'argent.
01:03:30 C'est-à-dire que l'immense majorité du monde ne peut pas vivre comme ça.
01:03:36 Merci. David Le Bresson.
01:03:39 Je vous remercie. Bon travail.
01:03:43 On va passer à la suite. Je vous rappelle, pour ceux qui en auraient besoin,
01:03:49 qu'il y a des casques de traduction qui sont disponibles à la sortie de la salle.
01:03:54 Pour nous aussi, il va y en avoir, parce que sur la table ronde qui arrive,
01:03:59 il y aura une personne anglophone. Donc, je vais appeler Benoît Sika,
01:04:03 Julien Vittoresse à me rejoindre sur scène et Lorraine Hyams
01:04:09 à nous rejoindre en visio depuis Londres.
01:04:12 Merci d'avoir regardé cette vidéo !

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