• il y a 8 mois
Nicole Belloubet, ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse était l’invitée du Face-à-Face sur BFMTV et RMC ce mardi 2 avril 2024.

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Transcription
00:00 [Musique]
00:04 BFM TV face à face, Apolline de Malherbe.
00:08 [Musique]
00:09 Il est 8h32 et vous êtes bien sur AMC et BFM TV.
00:12 Bonjour Nicole Belloubet.
00:14 Merci d'être dans ce studio pour répondre à mes questions
00:16 après une semaine particulièrement troublée dans l'éducation nationale.
00:20 Le départ du proviseur du lycée Maurice Ravel menacé de mort
00:23 après avoir demandé à une élève de retirer son voile.
00:25 Les menaces d'attentats et les diffusions d'images de décapitation
00:29 sur des messageries internes de collèges, de lycées
00:32 et puis cette journée de grève aujourd'hui dans un certain nombre d'établissements
00:35 contre les groupes de niveau.
00:37 Vos réponses donc ce matin sont particulièrement attendues.
00:41 Je voudrais d'abord qu'on revienne sur cette suspension des ENT.
00:43 Les ENT ce sont ces espaces numériques de travail.
00:46 Au moment où on se parle, elles ont été suspendues,
00:48 ces messageries internes à l'usage des professeurs et des élèves
00:52 parce qu'effectivement un certain nombre de menaces avaient été proférées.
00:56 D'abord, est-ce que vous allez les rouvrir ?
00:58 Est-ce qu'on va retrouver ces ENT pour les élèves et les profs ?
01:01 Oui, bien sûr.
01:02 L'idée n'est que c'est que cette suspension soit temporaire.
01:05 En réalité, si vous voulez, je voudrais juste dire en chapeau
01:08 que la sécurité des enseignants, c'est la condition d'une école qui fonctionne.
01:13 Et dans notre République, l'école, c'est l'un des symboles les plus forts.
01:17 On doit la sécurité à nos enseignants et à l'ensemble des personnels
01:20 qui travaillent dans les écoles.
01:21 Cette sécurité, évidemment, elle prend diverses formes.
01:24 Et ce que vous évoquez là au travers des espaces numériques de travail,
01:27 c'est évidemment la sécurité numérique.
01:29 Vous savez qu'il y a eu évidemment des messages, disons,
01:34 qui étaient très menaçants, qui ont été diffusés la semaine dernière.
01:39 Combien d'élèves ? Pardon, mais on parle de quoi ?
01:41 Est-ce qu'on parle d'un poignet ?
01:42 Est-ce qu'on parle de combien ?
01:43 Est-ce que vous avez une idée de combien d'élèves ont été confrontés à ces messages
01:47 et même à ces vidéos de décapitation ?
01:49 Il faut quand même dire ce qui est...
01:50 Il y a eu à peu près 400 établissements qui ont été visés sur une vingtaine d'académies.
01:53 Et donc, évidemment, des élèves qui ont été visés,
01:56 je n'en ai pas le nombre exact, mais enfin...
01:58 Ça se compte en milliers ?
01:59 Oui, bien sûr.
01:59 Peut-être même en dizaines de milliers ?
02:01 Dizaines de milliers, je ne sais pas, mais en tout cas, trop.
02:03 Et c'est inacceptable.
02:05 Et donc, ces messages sont entrés par les comptes personnels de nos élèves.
02:10 C'est la raison pour laquelle j'ai demandé que soit suspendue la messagerie des ENT
02:15 pour que nous puissions réinitialiser ces comptes, sécuriser l'ensemble du dispositif,
02:22 refaire passer des consignes de prudence sur la gestion de ces comptes.
02:26 On ne donne pas son numéro, son code d'accès.
02:28 Et donc, il y a des éléments importants de ce point de vue-là.
02:31 Et évidemment, remettre en fonctionnement les ENT, puisque nous en avons besoin.
02:34 Avez-vous une perspective ?
02:35 Est-ce que vous pouvez dire aux parents, aux élèves qui nous écoutent ce matin
02:38 qu'au retour des vacances, par exemple, puisque selon les zones,
02:41 les vacances commencent ce vendredi pour certaines ?
02:43 C'est notre objectif, si vous voulez, de suspendre les ENT pendant ces vacances de printemps
02:48 pour pouvoir faire les premiers travaux dessus de sécurisation
02:53 et ensuite de réouvrir après les vacances.
02:56 C'est un travail que je conduis en lien avec les collectivités territoriales.
02:59 Je les ai réunies, j'ai eu au téléphone la présidente de l'ARF, madame Delga,
03:04 monsieur Sauvadet des départements de France, pour que nous travaillions, évidemment, ensemble.
03:08 Nicole Belloubet, vous avez annoncé des forces mobiles scolaires nationales
03:14 qui seraient composées d'une vingtaine de personnes
03:16 qui pourraient être envoyées dans des établissements scolaires en cas de difficulté.
03:18 J'aimerais qu'on essaye de rentrer dans le détail concret,
03:21 c'est-à-dire qu'on a presque l'impression que ce sont des pompiers de la laïcité
03:24 ou des pompiers des menaces.
03:25 Ça va marcher comment ? Ils vont venir d'où ?
03:28 C'est le deuxième type d'atteinte à la sécurité de nos personnels.
03:32 On vient de parler de la sécurité numérique.
03:34 Il y a également d'autres types d'atteintes qui peuvent être matériels,
03:38 qui peuvent être physiques.
03:39 Et dans un établissement en crise, pour une raison ou pour une autre,
03:43 il est important que nous puissions dépêcher des personnels
03:46 qui, aux côtés des chefs d'établissement, aux côtés des équipes enseignantes,
03:50 soient là pour rétablir le plus tôt possible le calme et la sécurité.
03:54 Alors il y a des équipes académiques qui font cela,
03:57 mais j'ai souhaité créer une force nationale, scolaire, mobile,
04:01 que nous pourrions dépêcher dans tel établissement très rapidement
04:04 pour l'aider à rétablir le calme.
04:05 Sachant qu'il y a déjà des réserves, effectivement,
04:07 ce qu'on appelle les réserves, les brigades de réserves,
04:09 qui sont très rarement appelées en vrai.
04:12 Elles sont appelées, encore une fois, pour venir pendant un temps limité
04:16 apporter du calme et de la sécurité.
04:18 Je crois que c'est important qu'on puisse dire aux chefs d'établissement,
04:21 aux équipes éducatives, vous nous appelez, on est là.
04:24 Franchement, je le dis, moi, mon souci, c'est de montrer qu'on est
04:27 en permanence aux côtés des équipes éducatives,
04:30 que ce soit lorsqu'il y a des atteintes à la laïcité,
04:32 dont on sait qu'elles sont inacceptables, c'est ce qui s'est passé à Ravel,
04:35 et/ou que ce soit dans des atteintes numériques ou physiques.
04:38 - On va revenir sur Ravel dans un instant aussi,
04:39 sur la question de la suite de la plainte,
04:41 puisque Gabriel Attal avait annoncé que l'État porterait plainte.
04:45 Mais puisque vous parlez de ces brigades,
04:46 j'aimerais qu'on essaye de comprendre concrètement à quoi elles serviraient.
04:50 Je voudrais vous donner deux exemples très concrets, très précis,
04:52 et savoir quoi faire.
04:54 Il y a une professeure de musique du Maurice Ravel
04:57 qui a témoigné dans le journal Le Parisien la semaine dernière,
04:59 et voilà ce qu'elle raconte.
05:01 "Le problème plus global", dit-elle,
05:02 "c'est la place qu'a prise la religion dans les établissements scolaires".
05:05 Aujourd'hui, raconte-t-elle, des élèves de sixième
05:07 refusent de chanter en période de ramadan parce que c'est "haram",
05:11 c'est-à-dire péché.
05:12 Qu'est-ce qu'elle doit faire, cette prof ?
05:13 - Bien écoutez, d'abord, elle en parle.
05:15 C'est ce qu'elle vient de faire, mais elle en parle à son chef d'établissement
05:17 et elle en parle à son équipe édu...
05:19 Enfin, au personnel qui travaille dans l'établissement.
05:21 Ensuite...
05:22 - Mais quand elle est devant les élèves, d'abord, je veux dire...
05:24 Je voudrais qu'on imagine la scène.
05:25 - Oui, oui, on l'imagine.
05:26 - Elle est dans une classe, elle est devant ses élèves de sixième,
05:28 elle a une poignée, un peu plus d'élèves qui lui disent
05:32 "mais madame, on refuse de chanter".
05:33 - Elle explique, elle explique que, à l'école,
05:36 à l'école, c'est le principe de la laïcité qui s'applique.
05:39 Donc, à l'école, la religion n'a pas sa place.
05:42 C'est très clair et c'est bien parce qu'à l'école,
05:45 nous travaillons dans un espace commun, neutre,
05:48 que les différences pourront ensuite s'exprimer et s'expliquer.
05:51 Moi, je le dis clairement, à l'école, ce n'est pas ce que l'on croit
05:55 qui s'impose, mais ce que l'on sait et ce que l'on doit savoir, c'est la science.
05:59 - Mais là, on en parle calmement.
06:00 - Oui, on en parle calmement, mais je pense qu'il faut...
06:02 - Imaginons des élèves.
06:04 - Moi, j'entends bien le principe, mais j'essaye de me mettre à la place
06:07 d'un prof qui est quand même face à une classe d'élèves
06:10 qui, pour certains, sont peut-être véhéments, turbulents,
06:14 qui disent "Mais madame, on ne veut pas chanter".
06:15 Est-ce que sur le moment, elle doit les forcer à chanter ?
06:17 Est-ce qu'elle doit leur dire "Écoutez, vous êtes en classe de musique,
06:20 le principe, c'est qu'on chante, vous allez chanter" ?
06:22 Ou est-ce qu'elle doit respecter ?
06:23 - Ah non, elle ne doit pas respecter.
06:25 - D'accord, donc elle doit les forcer à chanter.
06:27 - Non, mais les forcer, on ne force pas quelqu'un à chanter,
06:28 mais on explique, on dialogue, c'est, me semble-t-il, le premier temps,
06:32 et on explique pourquoi, à l'école, en cours de musique,
06:35 on applique le programme du cours de musique,
06:38 quel que soit le temps et le moment.
06:40 C'est très important.
06:41 - Ramadan par Ramadan, Haram par Haram.
06:43 - Mais bien sûr, bien sûr, c'est le principe de la laïcité.
06:46 Et je poursuis, si vous le voulez bien,
06:48 si l'enseignant se trouve en difficulté,
06:51 il peut faire appel aux corps d'inspection qui sont présents,
06:54 qui se sont dépêchés immédiatement,
06:56 aux équipes Valeurs de la République présentes dans chaque académie,
07:00 qui peuvent venir accompagner l'enseignant s'ils le souhaitent,
07:02 aux cellules d'appui pédagogique que nous allons créer,
07:05 et qui peuvent venir dans la classe ou à côté de la classe
07:07 pour réexpliquer.
07:09 À l'école, le seul terrain, c'est celui des programmes et de la science.
07:12 - Mais encore une fois, j'essaie d'imaginer la scène.
07:15 S'il doit y avoir une suspension du cours
07:17 parce que certains refusent obstinément de chanter...
07:20 - Je ne crois pas qu'il faille suspendre le cours.
07:22 Il faut expliquer pourquoi on doit suivre le programme.
07:25 - Ces brigades seront là, ou ces brigades ou l'académie seront là...
07:28 - Très vite.
07:29 - Peut-être pour le cours de la semaine suivante.
07:31 Parce qu'en fait, des cours de musique, on sait bien que c'est une 3e semaine.
07:33 - Oui, mais alors la semaine suivante, mais très bien.
07:35 Elle peut, dans le cours, expliquer pourquoi il faut appliquer le programme,
07:41 c'est-à-dire chanter en l'occurrence.
07:42 Et puis, si c'est nécessaire, la semaine suivante,
07:45 elle peut se faire accompagner par quelqu'un d'autre, si elle le veut.
07:48 Évidemment, la liberté pédagogique là est entière.
07:51 - Encore une fois, pour qu'on ne soit pas dans la théorie, mais dans la pratique.
07:53 Deuxième exemple, celui du professeur de français qui s'appelle
07:56 Grégory Lefloch, qui enseigne depuis 13 ans en collège et en lycée.
08:00 Il a témoigné dans le magazine L'Obs.
08:03 Il a écrit une lettre à ses élèves.
08:04 Il leur dit "parmi vous monte quelque chose qui m'inquiète et contre lequel je bute,
08:07 quelque chose de bruyant et qui hurle.
08:09 Tout sera bientôt impossible.
08:12 Vous êtes face à une morale rabougrie et aveugle qui n'est ni de votre âge,
08:16 ni de votre siècle."
08:17 Et là, il donne des exemples.
08:18 Il dit qu'il a été menacé par un élève, menacé d'être dénoncé à son père
08:23 parce qu'il lisait et étudiait en classe une scène de Roméo et Juliette
08:27 où les deux amants s'embrassent.
08:29 Que faire ?
08:30 - Eh bien, le professeur, là encore, je le dis clairement,
08:33 il doit expliquer pourquoi Roméo et Juliette est au programme.
08:36 C'est pour expliquer la diversité des écrits, la diversité des auteurs,
08:41 la diversité des compositions scéniques.
08:43 Il l'explique et il me semble que là encore, il n'a pas à...
08:47 Il ne me semble pas, je suis certaine.
08:49 Il n'a pas à céder devant des récriminations de ce type-là.
08:53 Il n'a pas à céder à la peur, car nous sommes à ses côtés.
08:56 Moi, je le dis clairement.
08:57 Si les enseignants...
08:58 - Il ne cède pas à la peur, d'ailleurs.
08:59 Il dit qu'il persiste et qu'il continue, mais qu'il a été frayé par la multiplication de ce genre.
09:03 - Je comprends qu'il soit effrayé.
09:05 Et c'est la raison pour laquelle nous ne devons pas transiger.
09:07 On ne transige pas avec la laïcité.
09:09 On ne transige pas avec la science à l'école.
09:11 - Dernier exemple sur les sorties scolaires.
09:14 C'est encore Grégory Leflocq qui le raconte.
09:16 Il dit "La première fois qu'on m'a confié des terminales littéraires,
09:19 j'ai voulu leur faire découvrir les grands musées parisiens.
09:21 Le projet reposait sur le volontariat.
09:23 Rien de formel, tout était libre.
09:25 Nous avons commencé, raconte-t-il, par l'Institut du Monde Arabe.
09:28 Mes élèves furent tous au rendez-vous.
09:29 Ce fut un succès réjouissant.
09:31 La conversation après la visite m'a montré des élèves curieux et intéressés.
09:34 La semaine suivante, autour du musée d'Orsay.
09:37 Mais à l'heure convenue, il n'y eut qu'une maigre poignée d'élèves.
09:40 Dans mon souvenir, deux.
09:42 Deux élèves qui se sont présentés.
09:44 Le lendemain en classe, j'eus l'explication.
09:46 Ils avaient vu sur Internet que le musée d'Orsay
09:48 exposait des statues de femmes nues.
09:50 C'était donc rédhibitoire.
09:52 - Que faire ?
09:52 - Là encore, vous me dites que c'était sur la base du volontariat.
09:56 Donc les choses sont peut-être un petit peu différentes.
09:58 Mais là encore, il me semble que si c'est quelque chose qui entre dans le programme,
10:02 il faut expliquer, il faut expliquer que la diversité de la création artistique
10:07 passe par différents stades.
10:09 Il ne doit pas y avoir de pudeur fondée sur la religion
10:12 qui s'exprimerait dans le cadre de l'école.
10:15 Dans le cadre de l'école.
10:16 En dehors de l'école, c'est autre chose.
10:18 Mais dans le cadre de l'école, ce qui nous unit, je le redis ici...
10:20 - Vous êtes inquiète quand vous voyez la multiplicité de ces témoignages ?
10:24 Pour vous, est-ce qu'on est dans un moment crucial ?
10:27 Est-ce que vous vous dites que c'est un moment important ?
10:30 - Je pense que nous sommes dans un moment de vigilance.
10:32 Comme d'ailleurs, toujours, cela l'a été avec plus ou moins d'acuité
10:37 en ce qui concerne la laïcité.
10:38 Nous sommes dans un moment de vigilance.
10:40 On l'a été au moment des affaires en 89, au moment des affaires dites du voile.
10:46 On est dans un moment où il faut être vigilant et où il faut être ferme.
10:50 Parce que je le redis, c'est la condition de notre vie en commun
10:53 qui s'expose là et qui s'exprime là.
10:55 On ne peut pas transiger, pardonnez-moi si je me répète.
10:58 - Parmi les éléments de fermeté, Gabriella Talle a annoncé
11:01 que l'État allait porter plainte contre la jeune femme
11:04 qui était à l'origine de l'affaire de l'établissement Maurice Ravel
11:07 pour une plainte pour dénonciation calomnieuse.
11:11 Est-ce que cette plainte a été déposée ?
11:13 Et au nom de qui va-t-elle être déposée ?
11:15 - Elle l'a été au nom de l'État.
11:18 C'est le rectorat de Paris qui l'a fait,
11:19 puisqu'il agit en l'occurrence au nom de l'État.
11:22 Et effectivement, cela a été fait.
11:24 - Le rectorat a déposé plainte sous ce chef d'accusation
11:27 de dénonciation calomnieuse.
11:30 Richard Mal... - Si vous voulez...
11:31 - Pardon. - Allez-y, allez-y.
11:32 - Non, ce que je veux dire ici, c'est que comme nous ne voulons pas
11:36 céder à rien qui viendrait heurter les principes de l'école républicaine,
11:41 nous avons décidé juridiquement d'être très fermes.
11:43 - Vous porterez plainte systématiquement ?
11:45 - Nous allons désormais nous porter systématiquement parti civil.
11:48 L'État, c'est-à-dire sans doute les rectorats,
11:50 vont systématiquement se porter civil
11:52 dès lors qu'il y a une atteinte commise à l'endroit de l'école.
11:56 Et c'est parce que l'État ira en justice
11:58 que l'école obtiendra réparation.
12:01 Quand il y aura eu des dégâts, que ce soit des dégâts matériels
12:03 ou des dégâts moraux à l'endroit de nos professeurs,
12:07 de nos équipes éducatives,
12:08 eh bien, il n'est pas anormal que l'État se porte parti civil.
12:11 Nous ne céderons en rien.
12:13 - Une question à propos de Samuel Paty.
12:16 Est-ce que vous estimez, vous, Nicole Béloubet,
12:18 que l'État a une part de responsabilité dans la mort de Samuel Paty
12:22 de ne pas l'avoir protégé ?
12:24 - Alors, si vous voulez, il y a sans doute des choses
12:26 qui auraient pu être mieux faites.
12:29 Pour autant, je ne suis pas certaine que l'on puisse dire
12:32 que l'État a une part de responsabilité
12:34 dans l'assassinat de Samuel Paty.
12:37 Mais cet assassinat terroriste, qui a beaucoup marqué,
12:41 a été un électrochoc pour l'État.
12:43 Cela nous a conduits à avoir la fermeté
12:46 dont je témoigne ici et dont mes prédécesseurs ont également témoigné,
12:51 à remettre en place des procédures de sécurité
12:53 auprès de nos équipes éducatives.
12:55 C'est ce que je voudrais dire ici.
12:56 - Je voudrais que vous puissiez écouter les mots de la sœur de Samuel Paty,
12:59 qui était à ce même micro la semaine dernière.
13:01 - En termes de collecte d'informations, je pense qu'il n'y a pas eu de faille.
13:04 Ce n'est pas au niveau de la collecte le problème,
13:06 c'est qu'est-ce qu'on en fait de ces éléments.
13:09 Le fait de rassembler les informations,
13:10 avoir conscience, effectivement, qu'il peut se passer quelque chose,
13:15 aurait dû emmener à minima une protection de mon frère.
13:18 Il était totalement évident qu'il aurait dû être mis en retrait
13:21 et qu'il aurait dû bénéficier d'une protection.
13:23 - De quoi est mort votre frère ?
13:25 Comment vous qualifieriez les choses ?
13:27 - D'un abandon.
13:29 D'un abandon.
13:30 - Qu'est-ce que vous répondez, Nicole Belloubet ?
13:32 - Je réponds qu'il est mort d'un assassinat terroriste
13:35 et que, certes, je le redis devant vous,
13:38 il y a des choses qui auraient pu être mieux faites.
13:40 Mais il me semble difficile de considérer que l'État a une part de responsabilité
13:44 dans cet assassinat terroriste.
13:46 - Nicole Belloubet, jour de grève aujourd'hui dans l'éducation nationale
13:50 contre la mise en place des groupes de niveau.
13:52 D'abord, je m'y perds un peu.
13:53 Je n'arrive plus à savoir s'il y aura des groupes de niveau ou pas.
13:56 - Il y aura une prise en charge particulière de nos élèves de 6e et de 5e en français et en maths, en groupe.
14:03 Moi, je préfère parler de groupe de besoin.
14:05 C'est-à-dire que l'idée n'est pas de classer un élève en début de 6e
14:10 et qu'il ressorte en fin de 5e en étant dans le groupe des plus faibles ou des plus forts.
14:15 Mais au contraire, en fonction des compétences qu'il devra acquérir en français et en maths,
14:21 qu'il puisse évoluer d'un groupe à l'autre en fonction de ses besoins.
14:25 Je le redis ici devant vous, par exemple, puisque vous aimez les exemples concrets.
14:29 En maths, vous apprenez et la numération et la géométrie.
14:34 Vous pouvez avoir un élève qui est à l'aise en numération et qui est plus en difficulté en géométrie.
14:40 Eh bien, dans cette même année, il pourra être dans des groupes différents
14:43 en fonction de ce qu'il apprendra.
14:45 Et comment vous sélectionnez ?
14:47 Comment se passe-t-il ?
14:49 C'est en fonction des notes, des évaluations ?
14:51 Non, en début d'année, les enseignants vont prendre les élèves en classe entière
14:56 et en fonction des thématiques abordées, ils pourront les répartir en groupe.
15:00 C'est assez simple et somme toute de bonne logique.
15:02 Et donc, moi, je le redis ici, ce n'est pas du tout un tri des élèves. Pas du tout.
15:07 L'idée est au contraire de leur donner en groupe, selon leur niveau,
15:12 des compétences mieux assises et mieux assurées.
15:14 En groupe, selon leur niveau ? J'avoue que moi, j'entends groupe de niveau.
15:17 Non, pas du tout. En groupe, selon leur niveau, en fonction de la compétence requise.
15:21 En géométrie, vous êtes un peu plus faible. Eh bien, on va peut-être vous prendre en plus petit groupe.
15:26 Mais si en numération, vous êtes bon, eh bien, vous serez en classe entière.
15:29 Donc, si vous voulez, c'est assez simple. C'est-à-dire qu'on va travailler selon les besoins des élèves.
15:33 C'est des groupes de soutien ?
15:34 Non, je n'appellerai pas ça soutien.
15:36 J'appellerai ça des groupes pour travailler les programmes,
15:39 mais en plus petit nombre, en fonction des situations.
15:42 Ça va se passer en plus des horaires de cours ?
15:45 Non, pas du tout. Dans les 4h30. Il y a 4h30 de français.
15:50 Et donc, dans la classe, on met ceux qui sont en algebre d'un côté,
15:53 ceux qui sont en professe d'un groupe à l'autre ?
15:56 Ça va se faire assez naturellement. C'est-à-dire qu'en sixième, vous avez un nombre d'élèves.
16:00 Soit ils sont répartis en différents groupes,
16:02 soit ce sont plusieurs classes de sixième qui vont être réparties dans les mêmes groupes.
16:05 Ça va se faire, me semble-t-il, assez naturellement.
16:07 Mais je le redis, ce ne sont pas des groupes qui doivent trier les élèves.
16:12 C'est au contraire un dispositif qui leur permet de mieux apprendre,
16:15 parce qu'on a un objectif, un seul, qui est d'améliorer les résultats de tous nos élèves.
16:20 Un certain nombre d'élèves, de professeurs, sont aujourd'hui en grève,
16:24 jour de grève dans l'éducation nationale.
16:25 D'abord, est-ce que vous avez une idée de à quel point ça va être suivi, pas suivi ?
16:28 Non, je n'ai pas d'idée au moment où je vous parle.
16:31 Je pense que nos enseignants auxquels je fais vraiment confiance,
16:35 parce qu'il faut le redire, les enseignants travaillent beaucoup
16:37 et ils ont besoin de reconnaissance.
16:39 Je pense qu'ils savent que la priorité, c'est évidemment d'être aux côtés des élèves et devant les élèves.
16:44 Certains établissements disent qu'ils prévoient de la désobéissance civile.
16:47 C'est ce que raconte le journal Libération ce matin,
16:50 qui a le témoignage d'un certain nombre de professeurs,
16:54 qui disent qu'ils n'appliqueront pas ces groupes.
16:56 Je ne l'imagine pas, parce que s'ils en comprennent la philosophie...
17:00 Je ne sais plus comment les dire, j'avoue.
17:02 Parlez de groupe, ok, groupe tout court.
17:04 Non, parlez de groupe de besoins, je trouve que c'est très juste.
17:06 Groupe de besoins.
17:07 Ces groupes, si nos enseignants en comprennent la philosophie,
17:11 et ils la comprendront évidemment,
17:13 puisque aux côtés de leurs principaux,
17:15 ils vont bien comprendre qu'il ne s'agit pas de trier des élèves,
17:19 mais de leur apporter, selon une pédagogie différenciée, des compétences,
17:22 eh bien je pense qu'il n'y a pas de raison d'entrer en résistance, comme cela est dit.
17:28 Toutefois, ils mettent en application ce qu'ils disent aux journalistes de Libération,
17:32 c'est-à-dire effectivement cette forme de désobéissance civile
17:34 où ils refuseraient d'appliquer ces groupes de besoins.
17:37 Est-ce que vous prévoyez des sanctions ?
17:39 Est-ce que vous dites "attention, si vous ne le faites pas, il y aura des sanctions" ?
17:41 Je ne suis pas dans l'ordre des sanctions, je suis dans l'ordre de la conviction.
17:44 Je redis ici que la main est donnée aux établissements,
17:48 au plus près des besoins du terrain, pour mettre en place ces groupes de besoins.
17:52 Et je suis persuadée qu'ainsi conçus,
17:54 ces groupes seront mis en place partout, avec intelligence,
17:57 en fonction de ce qui se passe sur le terrain.
17:59 Par ailleurs, juste un mot, ils seront accompagnés,
18:02 puisque j'ai donné deux demi-journées de concertation
18:05 pour que les équipes éducatives réfléchissent à la mise en place de ces groupes,
18:08 ils seront accompagnés par tous les corps d'inspection pédagogique.
18:11 Donc je pense qu'il y a les moyens pour mettre en place ces dispositifs.
18:14 Nicole Belloubet, il y a une mobilisation particulière en Seine-Saint-Denis
18:18 où les professeurs et les parents dénoncent,
18:21 notamment des établissements scolaires, d'élabrer
18:23 et une absence de professeurs moins remplacés qu'ailleurs en France.
18:26 D'abord, est-ce que vous êtes d'accord sur le constat ?
18:28 Et est-ce que vous aurez une réponse particulière ?
18:31 Si vous voulez, la question des établissements, lycées, collèges,
18:35 elle relève des collectivités territoriales.
18:37 C'est-à-dire que ce n'est pas l'État qui gère les lycées et les collèges.
18:40 Je parle des bâtiments, ce sont le département et la région Ile-de-France.
18:45 J'ai eu un contact et des entretiens avec Valérie Pécresse et avec Stéphane Troussel.
18:50 Nous avons évoqué ces questions-là.
18:52 Ils investissent, ils rénovent.
18:54 Nous devons, évidemment...
18:55 Et s'il faut un moment, un coup de main de l'État, est-ce que vous le ferez ?
18:58 Cela a été fait en 2019.
19:00 Puisqu'en 2019, le précédent Premier ministre a donné 20 millions d'euros sur 10 ans,
19:08 donc 2019, c'est encore en cours, pour la rénovation des écoles.
19:11 Donc il y a déjà un effort qui a été fait.
19:13 Je rappelle qu'en Seine-Saint-Denis, il y a un effort important qui a été fait
19:16 pour les fonctionnaires puisqu'ils bénéficient d'une prime de fidélisation
19:20 de 12 000 euros versées au bout de 5 ans de présence dans le département.
19:23 Elle va être versée pour la première fois dans quelques semaines ou dans quelques jours.
19:26 - Méloubet, vous êtes ministre de l'Éducation nationale,
19:28 mais parfois en vous écoutant, je me demande si vous n'êtes pas un peu ministre de l'Intérieur,
19:32 presque malgré vous.
19:33 - En fait, on est quand même beaucoup sur des questions d'organisation, de sécurité, de locaux.
19:38 - La question des groupes de besoin en 6e, 5e, on est là au cœur de la pédagogie
19:44 et c'est évidemment ce qui fait l'essentiel.
19:46 - Mais hormis tout cela, vous le voyez bien, les questions, elles sont beaucoup...
19:47 - Je travaille beaucoup avec mes collègues Gérard Darmanin et Éric Dupond-Moretti
19:51 sur tout ce qui est sécurité, bien entendu.
19:53 Je ne l'ai pas dit, mais ils sont très présents.
19:55 Et vous savez, quand il y a des enquêtes qui sont conduites pour arrêter les personnes
20:00 qui ont diffusé les messages sur Internet, tout cela a donné leur fouille.
20:02 - Mais vous imaginez à quel point cette question de la sécurité prendrait autant de place ?
20:06 - Je me sens pleinement ministre de l'Éducation
20:07 et je n'entends pas du tout marcher sur les plaintes de mes collègues.
20:10 - Merci Nicole Béloubet d'être venue apporter des réponses ce matin.
20:13 Vous qui êtes ministre de l'Éducation nationale.
20:15 Il est 8h52 sur AMCB FM TV.

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