Sexagénaire victime d'une agression antisémite à Paris: son avocate revient sur les faits

  • il y a 6 mois
Marco, 62 ans, a été agressé vendredi 1er mars 2024 dans le 20e arrondissement de Paris, alors qu'il sortait d'une synagogue. Après plusieurs jours de recherches, un suspect a été arrêté. L'avocate de Marco, Me Serfati, revient sur les faits.

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Transcript
00:00 Bonjour Maître Serfati, merci d'être en direct ce matin avec nous sur BFM TV.
00:04 Vous êtes l'avocate maître de Marco, votre première réaction à cette arrestation ?
00:09 Je suis soulagée, extrêmement réjouie de la rapidité de cette arrestation
00:15 et je veux avant tout saluer encore une fois la réaction tellement digne de mon client.
00:22 Vous venez de faire passer la réaction à chaud quelques heures après cette interpellation.
00:27 Voilà, pas de sentiment de vengeance alors qu'il est dans un état physique et psychologique extrêmement grave.
00:33 C'est encore une réaction de dignité qui est la sienne.
00:36 Et il l'exprime à demi-mot mais je me suis entretenue avec lui avant de vous parler.
00:41 Il est soulagé parce que depuis vendredi, et vous l'avez repris, il est dans un sentiment d'angoisse absolue
00:47 avec des violences qui laissent des stigmates extrêmement encore importants sur son corps
00:51 et un sentiment de sidération et d'inquiétude.
00:54 C'est un soulagement et c'est une grande satisfaction que la justice,
00:58 que l'interpellation ait pu se faire dans des délais aussi brefs.
01:01 Votre client, maître, vivait depuis vendredi dans la crainte que ça puisse se reproduire ?
01:05 Bien évidemment, dans la crainte que ça puisse se reproduire.
01:09 Il était angoissé de sortir et puis dans un véritable état de sidération
01:13 et chaque jour apporte son lot de troubles psychologiques encore plus graves.
01:17 C'est-à-dire qu'au début, il a eu une réaction de sidération, véritablement,
01:23 de choc par rapport aux violences physiques et aux violences psychologiques.
01:26 Et maintenant, c'est de l'incompréhension qui se mêle à un sentiment d'injustice
01:30 et un sentiment d'extrême fatigue parce que maintenant, il a le contre-coup
01:35 de la violence, à la fois de la violence physique.
01:41 Mais je crois que dans son cas, les violences physiques dont il a été victime
01:45 ne sont pas moins graves que les maux qui ont tapé encore,
01:49 au moins aussi fort que les violences physiques dont il a été victime.
01:52 – Les maux, c'est-à-dire quand il a été traité de sale juif,
01:55 les maux, c'est-à-dire quand on lui dit "c'est toi qui tue à Gaza" ?
01:58 – Absolument, ces maux sont d'une violence extrême.
02:01 Ils l'ont choqué, je crois encore une fois, que je suis sûre que ça l'a
02:05 beaucoup plus frappé que les violences physiques dont il a été victime.
02:10 Et je dois dire que ces maux sont d'une extrême gravité
02:13 et marquent un cran supplémentaire dans les drames antisémites
02:16 qui peuvent être commis sur notre sol, en pleine journée, en plein Paris,
02:20 dans un quartier qu'on dit être un quartier calme.
02:23 On a, avec Marco, franchi un seuil supplémentaire
02:26 dans la gravité de l'antisémitisme en France.
02:28 – Est-ce que vous avez des informations sur le profil du suspect qui a été arrêté ?
02:33 – Oui, justement, c'est un profil qui me laisse à côté de ce sentiment
02:38 d'être réjoui de la rapidité et du soulagement,
02:41 un sentiment de grande inquiétude, puisque d'après les premiers éléments
02:44 que l'on a, cette personne est connue pour des actes violents,
02:48 mais surtout est connue pour un passé antisémite, déjà.
02:53 C'est donc dire que c'est un sentiment extrême, alors qu'il est connu,
02:56 il a pu commettre l'irréparable qui a été commis vendredi.
03:00 Et à la fois je suis inquiète, mais je vous avoue n'être pas surprise,
03:05 parce que les mots qui ont été dits à Marco vendredi soir
03:09 marquaient pour moi sans contestation possible et sans surprise
03:13 le profil de quelqu'un qui était déjà antisémite, bien évidemment,
03:17 avec un profil qui était déjà extrêmement inquiétant avant même son interpellation.
03:22 – Mais quand vous dites connu, c'est quelqu'un qui avait déjà été condamné
03:25 pour des faits antisémites ?
03:27 – Alors oui, oui, il a… vous savez on est au stade de l'enquête,
03:31 donc bien évidemment je n'ai pas encore de précision tout à fait
03:38 sur son profil exact, mais ce que l'on sait effectivement,
03:44 c'est qu'il a un passé et qu'il est connu des services de justice
03:48 par rapport à des faits d'antisémitisme.
03:50 – Bon, vous disiez le choc que ça représentait pour lui,
03:56 moi il y a ce mot qu'il avait prononcé dans le témoignage recueilli par Boris,
04:00 il lisait son sentiment d'humiliation Marco,
04:03 le fait de ne pas avoir été en capacité de se défendre.
04:07 – Absolument, je pense que c'est à la fois une humiliation psychologique aussi,
04:11 c'est-à-dire de se dire comment moi, français,
04:14 qui me sens français jusqu'au bout des ongles,
04:16 qui marche en France sans avoir peur de garder ma kippa,
04:19 parce que c'est comme ça que ça devrait se passer,
04:21 il s'est senti humilié qu'on puisse lui dire "toi tu tues des gens
04:26 parce que tu es juif", ça c'est la première humiliation,
04:29 et puis l'état de sidération dans lequel il a été placé
04:32 par rapport à l'extrême violence des coups qu'il a reçus
04:34 et des mots dont il a été victime,
04:36 a fait qu'effectivement il n'a pas pu réagir,
04:39 et c'est certainement tant mieux,
04:41 mais effectivement c'est un double sentiment d'humiliation,
04:44 d'avoir pas eu de réaction physique, mais je crois encore plus,
04:48 de n'avoir pas su comment réagir face à la surprise
04:52 de la violence des mots qui ont été prononcés.
04:54 – Vous avez l'habitude de traiter ces dossiers-là,
04:56 d'accompagner des victimes d'actes antisémites,
04:58 pourquoi est-ce que cette agression-là va au-delà
05:01 de ce que vous voyez d'habitude,
05:03 au-delà de la violence que l'on voit sur le visage de Marco ?
05:06 – Alors vous avez raison, je suis l'avocat du Bureau national de vigilance,
05:09 un des avocats avec Franck Serfati du Bureau national de vigilance
05:12 contre l'antisémitisme, et donc je plaide toute la semaine,
05:15 toutes les semaines, contre, comme il a été dit dans votre reportage,
05:18 des auteurs qui manifestent leur violence antisémite dans les réseaux,
05:23 mais également dans les actes de la vie de tous les jours.
05:26 Là il faut prendre conscience, pourquoi je parle d'un cran supérieur,
05:29 c'est que, en fait, quand on est juif, qu'on a juste l'outrecuidance
05:33 de mettre sa kippa pour aller prier à la synagogue le vendredi soir,
05:36 on n'est pas sûr de rentrer à la maison, et en sortant de cette synagogue,
05:40 on prend le risque de prendre la direction de l'hôpital
05:43 avec des violences qui auraient pu être encore plus graves,
05:46 mais elles le sont déjà extrêmement graves, c'est-à-dire,
05:49 comment est-ce admissible qu'un vendredi soir,
05:52 dans un quartier qui est fréquenté, qui est considéré
05:56 comme un quartier tranquille de Paris, un homme va prier
06:01 et ressort directement en étant conduit à l'hôpital
06:04 parce qu'il est victime d'un acte antisémite,
06:06 d'une extrême gravité sur les propos et avec les actes.
06:10 Ça n'est pas tolérable, ça n'est plus possible.
06:13 C'est-à-dire qu'il y a, sous couvert, sous prétexte de l'importation
06:17 du conflit israélo-palestinien, il y a un antisémitisme
06:23 qui se libère tant dans les paroles que dans les actes.
06:26 Et là, oui, c'est un cas qui est franchi, parce que ça veut dire
06:29 que maintenant, quand on est juif et que l'on marche dans la rue,
06:33 on n'est pas sûr de ne pas se faire tabasser,
06:36 de ne pas se faire insulter de tous les mots et sous tous les prétextes.
06:40 Ça n'est plus possible.
06:41 Merci beaucoup, maître.
06:42 Merci d'avoir été avec nous après la restation de ce suspect
06:45 cinq jours après l'agression dont a été victime Marco à Paris.
06:49 Merci beaucoup, Boris Karlamoff.

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