• il y a 10 mois
Raphaël Glucksmann, député européen, était l’invité du Face à Face sur BFMTV - RMC.

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Transcription
00:00 Parlons de la guerre, l'Union européenne a déclaré qu'elle ne pourrait livrer que la moitié des munitions qui étaient promises à l'Ukraine,
00:07 en tout cas dans les temps, avant la date limite de mars.
00:10 Dans ce moment-là, le Danemark, par exemple, dit "écoutez, dans ces cas-là, on va faire les fonds de tiroir,
00:14 on va prendre toutes nos munitions et on va toutes les envoyer à l'Ukraine".
00:17 Est-ce qu'il faut que les autres pays de l'Union européenne aillent jusqu'à cette solidarité-là ?
00:21 Il le faut. Et ce qui est absolument fou, c'est que ça fait deux ans que cette guerre a commencé,
00:27 que l'invasion totale de l'Ukraine a eu lieu, et qu'on n'a toujours pas augmenté nos capacités de production,
00:33 qu'on n'a toujours pas passé en mode économie de guerre.
00:37 Ce qui est fou, je vais vous dire, c'est qu'aujourd'hui sur le front ukrainien,
00:40 les Ukrainiens peuvent tirer 1000 obus quand les Russes en tirent 10 000 par jour,
00:44 et qu'on a un ministre de la Défense en France qui s'enorgueille du fait que la France puisse livrer 3000 obus par mois.
00:50 On devrait passer en économie de guerre pour vous ?
00:52 On devrait totalement passer en économie de guerre.
00:53 Personne ne nous demande d'envoyer des soldats mourir sur le front.
00:56 Par contre, ce que j'aimerais que les auditeurs comprennent,
00:58 c'est que ce n'est pas simplement une guerre qui vise des territoires,
01:02 qui vise le Donbass, qui vise la Crimée,
01:04 ce n'est pas simplement une guerre entre la Russie et l'Ukraine.
01:06 Moi, j'ai présidé au Parlement européen la commission d'enquête sur les ingérences étrangères pendant tout mon mandat.
01:12 J'ai décortiqué la guerre hybride, cette forme nouvelle d'attaque contre nos démocraties
01:17 que mène le régime de Vladimir Poutine, contre la France, contre l'Allemagne.
01:21 Et je peux vous le dire, j'ai lu l'ensemble des textes produits par les Russes,
01:25 l'ensemble de leurs doctrines.
01:26 Je vois ce qu'ils disent dans leurs médias.
01:29 La guerre qu'ils mènent, ce n'est pas une guerre contre l'Ukraine,
01:32 c'est une guerre contre ce qu'ils appellent l'Occident collectif,
01:34 c'est-à-dire contre nous.
01:35 Et donc, nous devons, nous...
01:37 - Je vous repose donc ma question,
01:38 parce que je vais reprendre les mots exacts du Premier ministre danois.
01:42 Il dit "l'Ukraine nous demande des munitions et de l'artillerie maintenant".
01:46 Nous, le Danemark, avons décidé de transférer "all" artillerie,
01:50 toute notre artillerie et toutes nos munitions à l'Ukraine.
01:53 Vous estimez que la France devrait faire de même ?
01:55 - Ce que j'estime, c'est que la France devrait augmenter ses capacités de production.
01:58 - Mais est-ce qu'on va donner les munitions qu'on a aujourd'hui ?
02:00 - On ne va pas livrer toutes nos munitions.
02:01 Par contre, ce qu'on va faire, ce qu'on devrait faire,
02:03 si on avait un leadership courageux qui comprend les enjeux,
02:08 eh bien, on devrait aujourd'hui passer en mode économie de guerre sur la production.
02:12 On devrait passer des contrats à long terme avec nos industriels,
02:15 ce qui n'est toujours pas fait.
02:17 On devrait aller écouter le président tchèque
02:20 qui dit qu'il y a 800 000 obus disponibles sur le marché international
02:23 et que donc on pourrait les acheter en commun à l'échelle européenne
02:26 et les envoyer en Ukraine.
02:28 Et on ne le ferait pas simplement par solidarité ou, comme vous l'avez dit, par morale.
02:31 On le ferait par intelligence et par égoïsme même,
02:35 parce qu'on sait que c'est notre intérêt vital.
02:36 Et j'aimerais juste vous dire une chose, la pouline de ma lerbe.
02:39 Si nous ne le faisons pas maintenant et que le front ukrainien s'effondre,
02:43 les questions que nous devrons nous poser dans un an ou dans deux ans
02:46 seront infiniment plus douloureuses que celles que vous nous posez.
02:49 Les questions qu'on devra se poser, c'est
02:51 quel type d'homme on envoie crever en Lettonie ?
02:54 Ce sera ça les questions qu'on devra se poser.
02:56 Donc si vous voulez, vous évitez ces questions.
02:57 Si vous voulez, vous évitez que des soldats français aient à crever.
03:00 Eh bien, il faut aujourd'hui aider ceux qui crèvent pour nous autant que pour eux,
03:05 c'est-à-dire les Ukrainiens sur le front,
03:07 s'ils ont perdu la dernière ville d'Avril.
03:08 - Vous avez entendu Bruno Le Maire hier qui dit qu'on n'a plus d'argent,
03:11 qu'il y a 10 milliards à trouver dans les jours qui viennent.
03:14 Est-ce que vous estimez que malgré tout, il faut continuer à lancer
03:18 une économie de guerre en France, à relancer la production de munitions ?
03:21 Ça doit être une question de choix pour vous.
03:23 - Ce que nous ne refusons de payer maintenant,
03:26 nous le payerons au centuple dans un an, dans deux ans ou dans trois ans.
03:31 Donc nous ferons des économies en investissant sur la résistance ukrainienne.
03:34 Nous ferons des économies en relançant notre industrie d'armement.
03:38 Aujourd'hui, si vous voulez, en 2024, on est dans une situation
03:42 où l'Europe, à la fin de l'année, le 5 novembre, peut se retrouver seule,
03:46 seule face à la guerre, seule face à Vladimir Poutine
03:49 qui a promis la déstabilisation de nos démocraties.
03:52 Nous allons nous retrouver seules et nous sommes démunis.
03:56 Nous sommes à poil, je suis désolé.
03:59 Nous n'avons pas les capacités industrielles aujourd'hui
04:03 pour faire face seules à une telle situation.
04:05 Et donc il faut relancer notre industrie.
04:08 Et ça, c'est un enjeu fondamental.
04:09 On doit devenir les producteurs de notre propre sécurité.
04:11 On doit devenir les producteurs de nos biens stratégiques.
04:14 Et ça suppose des investissements massifs.
04:16 Donc les comptes d'apothicaires, dans une situation aussi douloureuse,
04:20 aussi désastreuse, aussi dangereuse, ne sont pas au niveau de l'histoire.
04:24 Et si il faut trouver de l'argent, puisqu'il faut trouver de l'argent,
04:27 il y a deux manières, trois manières de trouver l'argent.
04:31 Trois manières de trouver l'argent très rapidement.
04:32 Aujourd'hui, le CAC 40 fait des profits records.
04:35 97 milliards d'euros versés en dividendes aux actionnaires.
04:40 Il y a des sous.
04:40 La deuxième chose, la deuxième chose,
04:43 on a 200 milliards russes d'avoir public russe dans nos banques.
04:47 Au lieu de les geler, il faut les saisir.
04:49 Et comme ça, ça ne coûtera pas un centime aux contribuables européens.
04:54 Ça ne coûtera pas un centime aux contribuables européens.
04:56 Et les Russes payeront pour la guerre qu'ils mènent en Ukraine.
05:00 Et la troisième chose, c'est qu'on a une capacité d'endettement commune
05:04 à l'échelle européenne.
05:04 On l'a montré pendant la pandémie.
05:05 Ce que nous avons fait pendant la pandémie, nous pouvons le faire pour assurer
05:08 pour assurer leur propre défense.

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