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Lancer son association, monter sa start-up ou son commerce artisanal : les jeunes sont de plus en plus nombreux à vouloir être maître de leur vie professionnelle.
Dans ce nouveau numéro de « Avoir 20 ans », nous nous demanderons pourquoi ce choix de carrière. Les jeunes sont-ils dégoûtés du salariat, veulent-ils prendre leur risque, maîtriser toute la chaîne de décision¿? Nous parlerons de trajectoires inspirantes mais nous chercherons également à comprendre les difficultés, les obstacles à surmonter pour lancer son propre projet.

Année de Production : 2024

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00:00 [Musique]
00:19 - Lancé son association, monté sa start-up ou son commerce artisanal,
00:24 les jeunes sont de plus en plus nombreux à vouloir être maîtres de leur vie professionnelle.
00:28 Dans cette émission, on va se demander pourquoi ce choix de carrière ?
00:32 Est-ce qu'ils ont été dégoûtés du salariat ?
00:34 Est-ce qu'ils veulent prendre leurs risques, maîtriser toute la chaîne de décision ?
00:38 On va avoir des trajectoires, j'espère qu'elles vont vous inspirer.
00:41 Et puis aussi concrètement, on va comprendre les difficultés,
00:44 les obstacles à surmonter pour lancer son propre projet.
00:47 Sur ce plateau, j'ai le plaisir d'accueillir deux jeunes entrepreneurs.
00:50 Chéryline Tabissouk, bonjour. - Bonjour.
00:52 - Vous avez 29 ans, vous êtes cofondatrice et directrice générale de la start-up Le Pas Pondu.
00:58 Alors, en un mot, qu'est-ce que c'est Le Pas Pondu ?
01:00 - Le Pas Pondu, c'est une start-up qui est dans l'innovation alimentaire
01:03 avec des alternatives végétales à l'œuf qui permettent de remplacer les œufs dans toutes les recettes.
01:08 Donc aujourd'hui, ça fait un peu plus d'un an qu'on est lancé sur le marché français
01:11 avec notre gamme de Pas Pondu battus, donc d'alternatives à l'œuf battu,
01:14 à destination des consommateurs et des professionnels de la restauration.
01:17 - Voilà, c'est bien utile pour les véganes ou pour les intolérants à l'œuf, par exemple.
01:22 Également sur ce plateau, Léa Dequince, bonjour. - Bonjour.
01:25 - Vous avez 27 ans, vous êtes céramiste, votre atelier est installé à Neuilly-Plaisance, en Seine-Saint-Denis.
01:31 Il s'appelle La Chouette et vous vendez votre production essentiellement en ligne.
01:35 On va notamment s'intéresser à la place des réseaux sociaux dans votre modèle.
01:39 Avec nous également deux experts, Stéphane Follière, bonjour. - Bonjour.
01:42 - Vous êtes maître de conférence en entrepreneuriat étudiant à l'université Jean Monnet à Rouen,
01:48 où vous avez d'ailleurs lancé un incubateur. On va s'y intéresser de près dans cette émission.
01:53 Et enfin avec nous Valérie Lyon, bonjour. - Bonjour.
01:55 - Vous êtes rédactrice en chef de Vive Média.
01:58 Vive Média, c'est un média au service de l'indépendance économique et financière des femmes.
02:03 On va parler avec vous des biais de genre dans l'entreprenariat,
02:07 parce que c'est comme dans bien des domaines, on l'a vu d'ailleurs plusieurs fois dans cette émission,
02:10 les femmes sont moins nombreuses que les hommes à lancer leur propre projet.
02:15 Mais ce n'est pas le cas. Dans cette émission, sur ce plateau, on a le plaisir d'être en présence de deux jeunes entrepreneurs.
02:20 On va parler ensemble de la jeunesse de vos projets. Chéryline, vous avez à la fois donc lancé votre start-up
02:27 et lancé votre propre produit, cette alternative à l'œuf. Est-ce que vous pouvez tout simplement nous raconter
02:32 comment vous est venue l'idée, comment vous avez lancé votre projet ?
02:35 - J'ai cofondé le Papon de Jus avec une associée qui est philippine sous l'air.
02:39 Toutes les deux, nous sommes ingénieurs en bio-industrie et on a eu l'idée quand on était étudiante.
02:43 En fait, le point de départ, c'est un ami vegan qui nous a dit
02:46 "mais depuis que j'ai changé de régime alimentaire, je ne trouve pas de solution pour remplacer l'œuf".
02:50 Alors qu'il y en a dans toutes les recettes, à la fois sucrées, salées, dans les gâteaux, dans les crêpes, en tarte, etc.
02:56 Et je ne trouve pas de solution. Et à ce moment-là, on s'était dit "finalement, nous, on a le profil pour proposer une alternative,
03:04 enfin une solution à ces personnes". - Qui vous se sont posé, vous êtes ingénieure ?
03:08 - Oui, tout à fait, ingénieure en bio-industrie avec un double diplôme en master de chimie.
03:13 Et donc en fait, en partant de ce constat, on s'était dit qu'on avait le profil pour proposer une solution
03:18 qui va répondre aux besoins du remplacement de l'œuf dans les recettes,
03:21 et également d'un point de vue nutritionnel, donc avoir un bon aliment qui a un bon impact sur la santé et l'environnement.
03:27 Et c'est aussi une problématique que connaît de plus en plus de personnes,
03:31 puisque de plus en plus de personnes recherchent des substituts, notamment pour des raisons de santé,
03:35 comme par exemple les allergies, les intolérances ou alors le trop de cholestérol,
03:39 pour des raisons d'éthique, notamment liées au bien-être animal, et également pour des raisons d'environnement,
03:44 parce que maintenant on sait que la production d'œufs est très énergivore,
03:48 et donc aujourd'hui pour des objectifs de consommation durable, de plus en plus de personnes souhaitent des nouvelles alternatives.
03:53 - Et ça a été compliqué de constituer ce produit, vous avez fait beaucoup de tests, comment ça s'est passé ?
03:59 - Oui, alors c'est beaucoup de tests, alors à la jeunesse du projet, on a été étudiante,
04:03 donc finalement les tests ont été faits surtout à la fin de nos cours, on se faisait des rendez-vous le week-end,
04:08 et une fois qu'on a été diplômés, donc ça c'était fin 2019, avec Philippine,
04:11 on a décidé de se lancer à temps plein sur le projet, et donc ça a été deux années de recherche et développement,
04:16 pour avoir un produit aujourd'hui qui coche toutes les cases de notre cahier des charges,
04:21 notamment avoir un produit qui va remplacer facilement l'œuf, qui va être bon,
04:25 qui va être constitué d'ingrédients d'origine naturelle, une liste courte d'ingrédients.
04:30 - C'est énorme deux années de recherche et développement, quand on sort d'école,
04:34 quand j'imagine on a un moment où on a envie de commencer à gagner sa vie, rentrer dans la vie active,
04:39 c'était difficile, c'était des sacrifices, comment vous voyez ça par rapport peut-être même à vos collègues de promo,
04:45 qui peut-être avaient déjà des carrières qui se constituaient dans d'autres entreprises ?
04:49 - Tout à fait, c'est vrai que quand on se lance dans l'entreprenariat, on prend des risques,
04:54 on prend aussi des risques, on voit que quand on se compare avec nos anciens camarades de promo,
05:00 il y a des évolutions de carrière, comme vous le dites, et que nous de notre côté on s'est lancé dans l'entreprenariat,
05:06 après on sait pourquoi on s'est lancé dans l'entreprenariat, on avait à cœur de proposer cette solution,
05:11 en ayant déjà à la sortie de nos études un prototype et en ayant aussi mis le doigt sur un besoin,
05:18 donc finalement la difficulté elle est là quand on se compare au profil des personnes,
05:24 mais elle est effacée quand on a cette raison de se lancer, et en plus quand on s'est lancé,
05:31 on s'est lancé directement en sortie d'études, donc on avait très peu de moyens financiers,
05:36 on n'avait pas de laboratoire pour commencer à formuler notre prototype, notre produit,
05:41 donc ce qui a été difficile ça a été de se lancer en partant de zéro,
05:45 mais finalement aussi c'est là où il y a la beauté du projet.
05:50 - C'est très gratifiant d'arriver à quelque chose quand on part de zéro, aussi jeune,
05:55 femme, on va en parler, tout ça, ça fait partie des sujets de cette émission.
05:58 Léa, Léa Dequinze, vous avez choisi vous de vous lancer dans l'artisanat,
06:02 vous vendez votre propre production de céramique,
06:05 et vous vous avez décidé de vous lancer à l'issue d'une période d'inactivité après le Covid,
06:11 comment ça s'est passé ?
06:12 - Alors en sortie de mes études, j'ai plus ou moins toujours travaillé la terre,
06:16 la céramique c'est quelque chose que j'aimais vraiment beaucoup,
06:19 et une fois que j'ai été diplômée de mon master en design d'objets,
06:22 parce que je suis issue du design, j'ai travaillé pendant un an chez un designer textile,
06:26 et forcément il y a eu le Covid à ce moment-là,
06:28 donc beaucoup moins d'argent qui rentrait pour l'entreprise,
06:30 et comme j'étais la dernière à arriver, j'ai perdu mon emploi.
06:33 - Première à partir. - Première à partir, c'est ça.
06:36 Et pendant un an, je ne savais absolument pas quoi faire, j'avais le chômage,
06:39 donc forcément j'avais cette santé financière à peu près pour me sécuriser.
06:43 Et il y a quelque chose qui revenait souvent sur Instagram,
06:47 parce que je suis très addicte aux réseaux sociaux,
06:49 c'était le tournage de la poterie, le céramique, qui m'attirait toujours comme avant,
06:54 et je me suis dit pourquoi pas te lancer dans une formation professionnelle
06:57 pour se lancer dans le tournage de la céramique,
07:01 et j'ai trouvé une formation assez rapidement, juste après mon licenciement.
07:06 - Et vous ne vous êtes pas dit "je recandidate dans une autre entreprise",
07:08 vous avez eu envie de créer votre entreprise ?
07:11 Vous aviez été un peu dégoûtée du monde du salariat, ou qu'est-ce qui s'était passé ?
07:15 - Pendant un an, oui, j'ai vécu des choses qui n'étaient pas forcément très simples
07:18 au sein de mon entreprise, même si j'aimais vraiment beaucoup mes collègues,
07:21 tout se passait très bien.
07:22 Je me suis dit "non, je ne me vois pas repartir encore une fois dans les entretiens d'embauche",
07:27 je voulais vraiment garder cette liberté de création,
07:29 parce que je suis avant tout créatrice,
07:31 et donc je me suis lancée, non, je ne me voyais pas revenir en tant que salariée.
07:35 - Et vous ne vous voyez toujours pas aujourd'hui,
07:37 maintenant que vous êtes lancée dans votre entreprise ?
07:39 Qu'est-ce que vous trouvez dans le monde de l'entrepreneuriat
07:42 que vous ne trouviez pas dans le monde de l'entreprise ?
07:44 - J'ai vraiment cette liberté, cette liberté de choisir sur quoi on va travailler,
07:48 sur nos propres créations, et surtout quand est-ce qu'on a envie de travailler,
07:53 parce qu'il arrive des fois en semaine où on n'est pas 100% là,
07:56 100% mentalement là pour le travail.
07:59 - Est-ce que là vous diriez que vous travaillez, je ne sais pas combien de temps par semaine,
08:02 pour la construction de votre entreprise,
08:04 entre ce que vous faites, la céramique pure et dure,
08:09 et puis j'imagine tout l'accompagnement,
08:10 parce que ça a l'air d'être quand même très important, notamment sur les réseaux.
08:12 - Oui, sur les réseaux, il y a vraiment une grosse partie,
08:15 je travaille même le week-end, c'est-à-dire le samedi et le dimanche,
08:17 des fois pour faire la création vidéo, la création de contenu pour les personnes,
08:20 toujours alimenter ce compte-là, je travaille entre,
08:23 ça peut être des fois une petite semaine à 30 heures,
08:25 des fois ça peut être entre 40 et 50 heures,
08:28 je ne compte vraiment pas mes heures là-dessus, donc il y a cette liberté.
08:31 - Mais ça ne vous pèse pas de travailler là-dessus le week-end, c'est votre projet ?
08:33 - Oui, c'est quelque chose qui me plaît vraiment beaucoup,
08:35 surtout quand c'est de la création de contenu,
08:36 donc je ne considère pas ça comme du travail.
08:38 - D'accord.
08:39 - Oui.
08:40 - Alors seulement les premières motivations pour se lancer dans son propre projet,
08:43 c'est la réalisation d'un rêve personnel,
08:46 la Quête de Sens aussi c'est un sujet assez central,
08:49 c'est le cas de Laure Binaud que nous avons suivie alors qu'elle est encore en études,
08:54 elle a lancé le projet Rizome.
08:56 Alors Rizome, c'est une association qui monte des ateliers intergénérationnels
09:00 où se rencontrent jeunes et personnes âgées.
09:03 Flora Sauvage l'a suivie, regardez.
09:05 À tout juste 19 ans, Laure a fondé avec cinq amis son association, les Rizome.
09:10 L'objectif, créer du lien entre des jeunes et des seniors.
09:13 - On a rencontré la responsable du pôle jeunesse.
09:16 Du coup, on fait des ateliers pour l'instant une fois toutes les deux semaines
09:19 et ça réunit des jeunes d'entre 6 et 18 ans et aux personnes de plus de 60 ans.
09:23 Et l'idée, c'est que c'est les participants de participants qui animent les ateliers eux-mêmes.
09:27 Donc on a eu des ateliers cuisine, il va y avoir un atelier attrape rêve bientôt, belote.
09:33 Pour développer l'association et défendre les valeurs qui lui sont chères,
09:37 Laure participe à Talent 2024.
09:39 Organisé par la ville de Paris, ce concours récompense des porteurs de projets âgés de 16 à 25 ans.
09:45 - Chez les Rizome, il y a un proverbe que l'on aime beaucoup
09:48 et qui dit que quand un vieillard meurt, c'est toute une bibliothèque qui brûle.
09:51 Pourtant, aujourd'hui, l'intergénérationnel se résume encore beaucoup
09:55 à une relation d'assistanat envers les personnes âgées.
09:57 À 69 ans, emballée par le projet de Laure, Josie a choisi de rejoindre l'association.
10:03 - Je suis entièse et j'aime la cuisine.
10:06 Donc je leur ai proposé d'aller en faire un atelier cuisine.
10:09 C'est un moment extraordinaire.
10:11 Un moment extraordinaire de jeter un seins.
10:15 Clara est lycéenne.
10:16 À 17 ans, elle a aussi rejoint l'association pour animer des ateliers.
10:20 - Étant donné qu'on est dans une génération où on ne prend pas forcément le temps
10:23 de vraiment profiter des moments présents,
10:25 ce que je retiendrais vraiment, c'est que j'ai vraiment passé des temps
10:28 où j'étais déconnectée de mon téléphone, déconnectée des réseaux sociaux.
10:32 Donc j'ai profité vraiment du temps avec des personnes âgées.
10:36 Un pari réussi pour Laure, qui est décidée à choisir un métier qui a du sens.
10:40 - Je sais qu'a priori, je n'ai pas envie de travailler en entreprise
10:43 parce qu'effectivement, le milieu associatif ou alors vraiment la fonction publique,
10:50 tout ça me parle beaucoup plus.
10:53 Et puis ça a le côté effectivement très stimulant de mener le projet soi-même.
10:59 Je ne sais pas pour autant si ça sera mon projet professionnel principal,
11:02 mais en tout cas, pour l'instant, c'est stimulant.
11:05 - Récompensé par la ville de Paris avec un chèque de 10 000 euros à la clé,
11:09 l'association, cofondée par Laure, va pouvoir se développer
11:13 et peut-être même embaucher un salarié.
11:16 - L'association Rizome qui a également reçu le prix Érignac au Sénat la semaine dernière.
11:22 Alors on le voit dans ce projet, Stéphane Folliard, il y a la quête de sens qui est centrale.
11:28 Des projets qui s'inscrivent dans la cuisine durable, c'est votre cas,
11:33 vous ressoudez les générations à cette quête de sens.
11:35 Est-ce que c'est quelque chose aujourd'hui qui est moteur
11:37 quand vous analysez l'entrepreneuriat, la recherche d'entreprises chez les jeunes ?
11:42 - Clairement, c'est quelque chose qui ressort de plus en plus aujourd'hui
11:46 dans le classement finalement de pourquoi on veut créer.
11:49 Ça devient l'une des raisons principales.
11:51 Alors il y a toujours la raison d'avoir son propre emploi,
11:54 de subvenir à ses besoins, mais on n'est plus du tout dans le mythe
11:58 d'entrepreneur version Silicon Valley où on veut créer et devenir milliardaire.
12:03 Ça c'est ce que voulaient mes étudiants, je dirais, il y a encore 4 ou 5 ans.
12:07 Quand je demandais qui veut être milliardaire, j'avais la moitié de la classe qui levait la main.
12:11 Sur la dernière année, j'ai un seul étudiant qui a levé la main.
12:14 - Qu'est-ce qui a changé pour vous ?
12:16 Vous analysez, vous arrivez à comprendre quand est-ce que cette ambition s'est modifiée ?
12:22 - Il n'y a pas un déclic particulier, mais je pense que c'est vraiment un déclic générationnel
12:27 où un rapport au travail est effectivement différent
12:30 et surtout la volonté d'être plus proche des résultats, plus proche de ce qu'on fait.
12:34 Alors oui, effectivement, dans l'artisanat, il y a cette production de céramique,
12:37 mais on le retrouve également dans les autres, dans l'association.
12:40 Je pense que les sourires de cette personne qui a monté cette association,
12:44 elle les a puisqu'elle a un miroir aussi des personnes qui interagissent avec elle.
12:49 Et ça, c'est quelque chose qui est de plus en plus important.
12:52 Il y a cette question du sens, de pourquoi on fait les choses.
12:55 Il y a cette volonté aussi de prendre en compte les grandes transitions dans lesquelles nous sommes engagés.
13:00 Là, il y a visiblement une dimension sociétale qui est très importante dans le reportage qu'on vient de voir.
13:04 Il y a aussi toute la dimension écologique et toute la dimension sociale
13:07 qui devient de plus en plus forte dans les projets portés par nos étudiants et nos étudiantes
13:12 avec vraiment cette volonté d'avoir un pouvoir pour transformer les choses,
13:17 mais surtout voir les résultats.
13:19 - Oui, on va regarder un petit peu les motivations pour créer son entreprise.
13:22 C'est issu de l'indice entrepreneurial 2023 de BPI France.
13:27 En premier, c'est être son propre patron, ne plus être salarié, 21%.
13:32 C'est votre cas, Léa.
13:34 Réaliser un rêve, 20%.
13:36 Exercer une activité conforme à vos valeurs, 20% également.
13:40 Et ce que vous disiez sur le fait de vouloir devenir milliardaire,
13:43 augmenter votre revenu ou votre capital, c'est 15%.
13:47 Mais ce qui est intéressant, c'est effectivement la tendance.
13:49 C'est -8% par rapport à 2021.
13:53 Faire fortune, ce n'est pas honteux.
13:56 Ça vous parle, c'est accessoire, c'est quand même important.
14:00 Qu'est-ce que vous en dites ?
14:01 - C'est vrai qu'avec Le Papon de Jus, quand on a cofondé Le Papon de Jus,
14:05 l'idée principale et l'objectif, c'était de pouvoir apporter une solution,
14:09 de pouvoir changer le futur et d'améliorer l'alimentation
14:14 et d'apporter vraiment une solution qui correspond à un besoin.
14:17 Donc effectivement, ce n'est pas la motivation première.
14:20 Après, faire fortune, ça signifie aussi également avoir un produit,
14:23 une solution qui répond à un marché, qui est un produit qui plaît,
14:27 donc qui répond aussi à un besoin.
14:29 - C'est une réussite.
14:30 Ça veut dire qu'on est arrivé au bout de son projet quand même.
14:32 - Oui, c'est ça.
14:33 Et puis c'est aussi créer de l'emploi,
14:34 aussi pouvoir investir dans de nouveaux projets,
14:36 de pouvoir toujours avoir plus d'impact.
14:39 Donc finalement, ce n'est pas non plus honteux de vouloir faire fortune.
14:42 - Léa, qu'est-ce que ça vous inspire, vous ?
14:44 La réussite économique de votre projet.
14:46 J'imagine que c'est essentiel de toute façon pour qu'il persiste,
14:50 pour qu'il perdure.
14:51 - C'est essentiel surtout pour les artisans,
14:53 où là c'est très compliqué de dégager un revenu.
14:56 Quand on est tout seul à travailler pour soi,
14:58 c'est compliqué de base de dégager un revenu.
15:00 - C'est compliqué pour vous, sans vouloir être indiscret ?
15:03 - Là récemment, non, c'est moins compliqué,
15:05 parce qu'avec justement les réseaux sociaux,
15:07 j'ai pu dégager plus de revenus grâce à ça.
15:09 Je me suis exposée aussi à plus de potentiels clients
15:12 qui étaient intéressés pour acheter mes produits.
15:14 Donc forcément, ça m'a permis de réinvestir derrière
15:16 pour l'achat d'un four, d'un tour aussi,
15:18 si je voulais quelque chose de plus performant
15:20 pour la production.
15:21 Et puis pourquoi pas m'agrandir aussi mon entreprise.
15:23 - Alors l'entrepreneuriat, en tout cas,
15:25 à la cote chez les jeunes, quelques chiffres récents,
15:28 68% des moins de 30 ans disent vouloir entreprendre.
15:32 Entre la volonté et la réalisation, il y a forcément un pas.
15:35 La part des moins de 30 ans parmi les nouveaux entrepreneurs
15:39 individuels est passée de 31% en 2012 à 39% en 2022.
15:45 Qu'est-ce qui vous inspire cette tendance, Alérie Lyon ?
15:48 - C'est clair qu'on voit que depuis 20 ans,
15:51 ça a beaucoup changé dans notre pays.
15:53 Et je dirais que le projet de la Start-up Nation
15:57 a beaucoup joué aussi dans cet appétit
15:59 pour l'entrepreneuriat en France.
16:01 Et on ne peut que s'en réjouir, parce que l'entrepreneuriat,
16:03 ça permet de créer de la richesse, de créer de l'emploi,
16:05 comme vous le disiez.
16:06 Donc ça, c'est une très bonne nouvelle.
16:08 Après, je pense qu'il faut être très vigilant.
16:10 Tout le monde ne peut pas être entrepreneur.
16:12 Et c'est vrai que cette idée de la Start-up Nation
16:15 a donné le sentiment que finalement,
16:17 tout le monde pouvait créer son emploi,
16:19 développer son entreprise,
16:20 devenir millionnaire ou milliardaire, peut-être.
16:23 Être entrepreneur, ça demande quand même
16:25 des qualités très particulières.
16:27 Il faut accepter de prendre des risques,
16:30 il faut être endurant.
16:32 C'est les montagnes russes, l'entrepreneuriat.
16:34 Un jour, vous décrochez un client,
16:35 le lendemain, vous en perdez un.
16:37 Un jour, votre prototype fonctionne,
16:39 le lendemain, il ne fonctionne plus.
16:40 Donc il faut pouvoir résister à tout ça.
16:43 Et puis surtout, il faut avoir une capacité
16:44 dont on parle quand même assez rarement
16:46 quand on parle de l'entrepreneuriat.
16:47 C'est une capacité commerciale,
16:49 une capacité de conviction.
16:50 Quand on est entrepreneur, il faut savoir vendre.
16:52 Il faut d'abord savoir se vendre
16:54 auprès d'un banquier, auprès d'un investisseur.
16:56 Il faut savoir se vendre, vendre son produit
16:59 pour trouver des clients.
17:00 Quand on veut recruter des salariés
17:01 et que vous démarrez une entreprise
17:03 pour les convaincre de venir,
17:04 cette capacité commerciale, elle est vraiment importante.
17:07 - Et l'on ne l'a pas.
17:09 - Voilà, certains l'ont, d'autres pas.
17:11 Et puis je dirais l'autre point,
17:12 et ça a été évoqué,
17:13 c'est cette question de...
17:15 Aujourd'hui, les gens vont vers l'entrepreneuriat
17:17 et les jeunes beaucoup pour cette quête de sens.
17:19 On voit qu'ils se détournent des grandes entreprises.
17:21 Plusieurs études le montrent.
17:23 Ils ne veulent plus aller autant qu'avant
17:25 dans les grandes entreprises.
17:26 Ils veulent créer leur propre projet,
17:28 leur propre activité.
17:29 Mais après, il y a quand même un enjeu,
17:30 il faut pouvoir en vivre.
17:31 Donc il faut pouvoir à la fois financer le projet,
17:33 et il faut pouvoir être rémunéré.
17:35 Parce que si vous n'en vivez pas,
17:37 le projet n'aura pas d'existence pérenne.
17:40 - Oui.
17:41 Tout le monde ne veut pas devenir millionnaire ou milliardaire,
17:43 mais encore faut-il déjà commencer par en vivre.
17:45 - Encore faut-il déjà commencer par en vivre.
17:47 - Stéphane Follières, qu'est-ce que vous dites
17:48 à vos étudiants qui veulent devenir entrepreneurs ?
17:51 Est-ce que, voilà, il y a des choses où vous vous dites
17:54 "Bon, ça c'est pour lui".
17:55 Quelle qualité vous voyez, par exemple,
17:57 chez les étudiants qui se lancent là-dedans ?
17:59 - Alors, moi, je les prends...
18:01 J'ai des étudiants assez jeunes, finalement,
18:04 qui ont moins de 20 ans.
18:05 Et ces étudiants, ce qu'on va leur donner,
18:08 c'est des connaissances.
18:09 J'aime beaucoup cette idée de compétence commerciale.
18:11 Mais ça, on va le travailler,
18:13 et on va surtout le travailler par l'expérience.
18:15 L'entrepreneuriat en amphithéâtre, à mon avis, ça ne passe pas.
18:19 D'ailleurs, nous, on est beaucoup sur des apprentissages expérientiels.
18:22 Et on a aussi créé des programmes pédagogiques
18:24 où nos étudiants apprennent par la création d'entreprises.
18:27 Donc ils créent vraiment.
18:28 Et on va leur donner un minimum...
18:31 - Vous faites des ateliers, vous n'êtes pas en amphithéâtre,
18:33 vous me dites, vous faites comment ?
18:35 - Alors, en fait, on a trois temps.
18:37 Un premier temps où on va leur donner des connaissances
18:39 pour comprendre le monde dans lequel ils vont avoir à travailler,
18:43 comprendre la relation commerciale,
18:45 comprendre, puisqu'on en parlait, la place du banquier
18:47 et qu'est-ce qu'il attend dans la négociation.
18:49 Et puis ensuite, très, très vite, on les envoie dehors.
18:51 C'est-à-dire qu'on les envoie tester leurs idées
18:53 avec des prototypes les plus simples possibles.
18:56 Et ensuite, le troisième temps, on revient et on discute
18:59 et on essaye de comprendre ce qui a marché, ce qui n'a pas marché.
19:01 Et là, on va développer des compétences.
19:03 Et puis, surtout, le fait d'aller les envoyer dehors,
19:05 c'est qu'ils développent quelque chose qu'on ne peut pas faire
19:07 dans les écoles ou universités.
19:08 C'est tout ce qu'on appelle les connaissances tacites.
19:10 La relation, la posture entrepreneuriale,
19:12 ça, ça prend face à des entrepreneurs.
19:14 - D'accord.
19:15 Donc, il n'y a que l'expérience qui peut vous apprendre ça.
19:18 Donc, il faut au moins...
19:19 Ce n'est même pas de la simulation d'expérience,
19:21 parce que c'est vraiment ce qu'ils font dès...
19:23 Dès lors qu'ils sont étudiants.
19:24 - Voilà, on le fait à tous les niveaux.
19:25 On le fait sous forme de simulation.
19:26 On les envoie quand même tester leurs idées.
19:28 L'objectif, c'est effectivement qu'ils soient capables
19:31 de s'exposer, de prendre un risque le plus limité possible.
19:35 On les envoie juste tester une idée au départ.
19:37 On ne les envoie pas...
19:38 Et puis, même les montants, ensuite, sont relativement modestes.
19:41 Mais voilà, cette expérience, elle est très importante.
19:43 Et oui, effectivement, il y en a qui ne veulent pas aller plus loin.
19:46 Et c'est très bien, parce que l'expérience entrepreneuriale...
19:48 - Ce n'est pas pour moi.
19:49 - Et c'est un choix.
19:51 Et en fait, voilà, cette dimension...
19:53 Après, il faut identifier pourquoi.
19:54 Si la dimension commerciale est quelque chose de vraiment rédhibitoire,
19:58 alors peut-être qu'on pourra quand même partir
20:00 dans une aventure entrepreneuriale,
20:01 mais on va embaucher des commerciaux.
20:03 - Alors, vous en parlez très bien,
20:05 mais on va quand même demander à l'un de vos étudiants,
20:07 qui étudie à l'IUT de Rouen.
20:11 Il s'appelle Tom Bonnier.
20:12 Bonjour, Tom.
20:14 Vous êtes en troisième année de DUT,
20:16 gestion des entreprises et administration.
20:18 Alors, vous êtes étudiant entrepreneur.
20:21 Vous aviez le choix entre alternance en entreprise
20:23 et monter votre projet.
20:24 Pourquoi est-ce que vous avez préféré monter votre projet ?
20:27 - Exact.
20:28 J'ai préféré monter mon projet,
20:30 je trouvais ça plus polyvalent.
20:32 En fait, mon objectif, c'était vraiment d'avoir des compétences
20:34 dans plein de domaines,
20:35 et d'être polyvalent,
20:38 et d'aller à la rencontre,
20:39 et de voir le résultat de mon projet,
20:41 de voir les impacts que j'amenais.
20:43 Et c'était vraiment un point assez important
20:45 d'être vraiment au contact des fournisseurs,
20:49 de voir tout, de la partie budgétisation.
20:52 - Et finalement, ce n'est pas un projet,
20:54 mais ce sont trois projets
20:55 que vous avez eu envie de monter.
20:56 Est-ce que vous pouvez nous dire un mot
20:58 de ces trois projets que vous montez dans ce cadre ?
21:01 - Exact.
21:02 Donc, l'année dernière,
21:03 j'ai eu le statut étudiant entrepreneur.
21:05 Donc, j'ai monté le projet,
21:07 la création d'idées,
21:09 ça s'appelait Mimi.
21:10 Et donc, c'est dans l'accompagnement,
21:12 et dans l'accompagnement aux deuils
21:14 et la mise en valeur des souvenirs.
21:17 Un second, c'est le Campus Solidaire.
21:19 Ça, c'est une association à l'IUT de Rouen.
21:22 Donc, je suis le président.
21:23 C'est en fait une épicerie solidaire
21:25 pour les étudiants.
21:26 Et donc là, ce qui m'importe beaucoup,
21:28 c'est la dimension à impact
21:30 et le sens que j'y trouve dans l'association.
21:34 Et le dernier,
21:35 que je fais pendant mon BUT dans ma troisième année,
21:38 donc là, c'est un accompagnement
21:40 des projets naissants et associations
21:42 sur leur partie,
21:43 communication
21:45 et la recherche de partenaires financiers aussi.
21:47 - Restez avec nous, Tom.
21:49 Stéphane Foliar, là, on entendait
21:51 qu'il y avait association, entreprise, etc.
21:54 Ce qui est important, c'est monter un projet,
21:56 quelle que soit la forme, j'allais dire,
21:59 dans le cadre de votre incubateur.
22:03 - Exactement.
22:04 La finalité,
22:05 il n'y a pas forcément une finalité commerciale.
22:07 On peut très bien voir comme l'association,
22:10 l'épicerie solidaire,
22:11 il n'y a zéro transaction monétaire.
22:13 Et pourtant, elle est super importante.
22:15 Et pourtant, il y a un vrai impact sur le territoire.
22:18 Il y a un vrai impact auprès de nos étudiants
22:20 qui sont dans le besoin.
22:21 Et oui, ça, c'est un cadre associatif.
22:23 Et finalement, l'entrepreneuriat,
22:24 ce n'est pas que la création d'entreprises,
22:26 c'est bien plus que ça.
22:27 C'est transformer des idées en actions.
22:29 Et puis, il va y avoir de la création de valeur.
22:31 Cette création de valeur,
22:32 elle peut être effectivement monétaire,
22:33 mais elle peut être surtout au bénéfice
22:35 plus exactement des usagers
22:38 de l'épicerie solidaire
22:39 ou alors des personnes qui vont,
22:41 on en parlait quand l'entreprise marche,
22:43 oui, c'est qu'on répond à un besoin,
22:45 c'est que les gens sont satisfaits par la démarche
22:47 et du coup, reviennent et achètent.
22:49 Il y a bien des points communs.
22:50 Tom, vous êtes toujours avec nous, je crois.
22:53 Est-ce que vous pouvez nous dire en quelques mots
22:55 qu'est-ce que vous permet l'incubateur ?
22:58 Qu'est-ce que vous y trouvez comme aide,
22:59 comme accompagnement à vos projets ?
23:02 L'incubateur, dans un premier temps,
23:04 c'est déjà un espace.
23:05 Donc, un espace de coworking
23:07 avec plusieurs types de projets d'étudiants.
23:09 Donc, ça nous permet de discuter,
23:11 de parler de nos problématiques,
23:13 de nos produits aussi,
23:15 pour avoir des retours directement
23:17 avant d'aller présenter dans la rue
23:19 à des entrepreneurs ou à d'autres personnes.
23:22 Donc, dans un premier temps, c'est ça.
23:23 Et puis, dans un second temps,
23:24 c'est aussi la possibilité d'avoir des cours,
23:27 des enseignements avec des professionnels,
23:29 des entrepreneurs.
23:31 Par exemple, dernièrement, avec un banquier,
23:34 une community manager,
23:35 qui nous donne d'autres compétences
23:37 à mener différemment.
23:38 D'accord.
23:39 Merci beaucoup, Tom, pour votre témoignage.
23:42 Stéphane Feuillard, c'est quoi le plus difficile
23:44 pour lancer son entreprise
23:46 quand on est étudiant, selon vous ?
23:47 Trouver l'idée, bon,
23:49 ce n'est pas forcément le plus difficile.
23:51 Non, ce n'est pas le plus difficile.
23:52 Alors, c'est vrai que je suis beaucoup
23:53 sur ce qui est facile à faire
23:55 et on les amène là-dessus.
23:56 Après, l'une des difficultés,
23:58 quand on a moins de 20 ans
23:59 et qu'on monte une entreprise,
24:00 c'est vraiment la question de la légitimité,
24:02 la question de la crédibilité envers les acteurs.
24:04 Puisqu'on parle d'un banquier aussi,
24:06 c'est la crédibilité de l'idée
24:07 par rapport à un banquier
24:08 et de la capacité, finalement,
24:10 à durer, à pérenniser l'entreprise
24:13 et finalement répondre à la seule question
24:15 qu'attend le banquier,
24:16 c'est comment on va le rembourser.
24:17 Vous vous êtes retrouvés face à ce problème,
24:19 chère Hélène.
24:20 Est-ce que, voilà,
24:21 prouver à un banquier
24:23 qu'on a raison, que son projet,
24:25 il est bon, c'est difficile
24:27 quand on est jeune,
24:28 quand on a 20 ans.
24:29 Quand on est une femme,
24:30 on va en parler tout à l'heure,
24:32 mais je crois que, bon,
24:33 on accumule des difficultés dans ce moment-là.
24:34 Est-ce que vous vous êtes retrouvée
24:35 dans cette situation ?
24:36 Effectivement,
24:37 quand on parle de légitimité,
24:38 je me suis retrouvée dans cette situation.
24:40 Alors, pas forcément en banquier,
24:42 mais aussi assez régulièrement,
24:43 même quand on va voir des fournisseurs.
24:45 En fait, à chaque fois qu'on doit convaincre
24:47 et qu'on doit se vendre,
24:49 je pense que la question de l'âge,
24:51 qui est souvent liée aussi à l'expérience,
24:53 quand on voit une personne jeune,
24:55 on peut se dire, par exemple,
24:56 qu'elle a très peu d'expérience.
24:58 C'est pour ça que c'est important,
24:59 quand on est jeune,
25:00 aussi de bien s'entourer
25:01 et d'avoir des profils complémentaires
25:02 pour apporter des expériences qu'on n'a pas
25:04 et pour pouvoir nous aider
25:06 à avoir cette expérience
25:08 et bénéficier de l'expérience d'autres personnes
25:10 qui sont passées par le même chemin que nous,
25:12 enfin, que l'on souhaite,
25:13 ou bien qui peuvent nous apporter
25:15 pour notre projet.
25:17 Donc, c'est tout l'importance
25:18 d'être bien entourée, accompagnée,
25:20 même par des incubateurs.
25:22 Comment ça s'est passé ?
25:23 Vous, vous avez été accompagnée
25:24 pour le début de votre projet ?
25:26 Oui, tout à fait.
25:27 Alors, nous, quand on a eu l'idée,
25:28 on était étudiantes.
25:29 Et à ce moment-là,
25:30 on s'est rapprochées du réseau Pépite,
25:32 donc c'est le pôle étudiant pour l'innovation,
25:34 le transfert et l'entreprenariat,
25:36 ce qui nous a permis, d'une part,
25:37 de faire partie d'un réseau
25:39 avec d'autres étudiants entrepreneurs,
25:41 donc de savoir qu'on n'était pas seules,
25:43 qu'il y avait d'autres personnes
25:44 qui voulaient aussi entreprendre,
25:45 même avec le même profil, le même âge.
25:48 Et aussi, c'est ce qui nous a permis
25:49 d'avoir toutes les bases de l'entreprenariat.
25:51 Vous n'avez rien de tout ça,
25:53 vous qui étiez ingénieure, j'imagine ?
25:55 Étant de profil scientifique,
25:57 on était très bonnes sur la partie technique,
25:59 la formulation, le développement de produits,
26:02 mais pas assez bonnes sur la partie
26:05 entrepreneuriat, commercial, business,
26:07 marketing, communication, finance aussi.
26:11 Et grâce au réseau Pépite,
26:12 on a pu avoir cette base solide
26:14 qui nous a permis ensuite
26:16 de pouvoir construire petit à petit le projet.
26:19 Valérie Lyon, il y a trop d'entrepreneurs
26:21 encore aujourd'hui qui se font accompagner
26:23 au début de leur projet,
26:24 alors qu'on voit que c'est très important,
26:26 notamment quand on est jeune
26:27 et quand forcément il nous manque
26:28 des compétences.
26:29 L'accompagnement, c'est clé.
26:31 On voit sur le succès ou l'échec d'une entreprise,
26:33 c'est vraiment un facteur décisif.
26:35 C'est-à-dire qu'un entrepreneur
26:37 qui va se faire accompagner,
26:38 il a deux fois plus de chances de réussir
26:39 qu'un entrepreneur qui ne se fait pas accompagner.
26:42 Et c'est vrai qu'on parle souvent
26:43 de la solitude de l'entrepreneur,
26:45 mais c'est une réalité.
26:46 Et c'est vrai qu'il y a à la fois un enjeu,
26:48 évidemment, d'avoir les compétences
26:51 nécessaires autour de soi.
26:52 J'ai beaucoup aimé ce que disait Tom
26:53 par rapport à l'entrepreneuriat.
26:55 Il disait "c'est la polyvalence".
26:56 Et c'est vrai que c'est ça aussi, l'entrepreneuriat,
26:58 surtout au début, parce qu'on ne peut pas
26:59 embaucher dix personnes autour de soi dès le début.
27:01 Savoir tout faire.
27:02 Donc la polyvalence, c'est essentiel.
27:03 Mais comme on ne peut pas embaucher dix personnes,
27:05 il faut se faire accompagner,
27:06 aller chercher ses compétences.
27:07 Et il y a beaucoup de réseaux d'accompagnement en France.
27:10 De ce point de vue-là, la France,
27:11 les choses se sont énormément structurées.
27:13 Beaucoup de réseaux d'accompagnement,
27:15 avec beaucoup d'accompagnements gratuits
27:17 qui sont disponibles.
27:18 Il faut savoir aller les chercher.
27:20 Ce n'est pas la perte de temps
27:22 d'aller chercher ces réseaux
27:25 pour vous accompagner,
27:26 parce que c'est vraiment mettre toutes les chances
27:28 de son côté.
27:29 Et surtout, passer ce cap décisif des trois ans.
27:32 Parce que quand on crée une entreprise,
27:33 on sait bien qu'il y a une première échéance,
27:35 qui est les trois ans.
27:36 Et si vous passez ce cap-là, déjà,
27:38 ça veut dire que vous pouvez espérer
27:39 une pérennité pour votre entreprise.
27:41 Elle a quel âge, votre entreprise ?
27:42 On a créé la société en décembre 2020,
27:44 donc elle a dépassé le cap des trois ans.
27:46 Elle a dépassé le cap.
27:47 Et vous, Léa ?
27:48 Elle va avoir trois ans, j'espère.
27:49 Elle va avoir trois ans.
27:50 Attention, c'est un anniversaire essentiel, important.
27:52 Stéphane Folliat,
27:53 dans quel domaine vos étudiants ont le plus envie d'entreprendre ?
27:57 C'est très variable.
27:58 Alors, moins dans l'artisanat,
28:00 puisque dans l'université dans laquelle je travaille,
28:03 on a effectivement la filière art,
28:04 mais qui n'est pas la plus dynamique
28:06 d'un point de vue d'entreprenariat.
28:07 On est vraiment dans tous les domaines.
28:08 Dans l'ingénierie, c'est très marqué.
28:10 L'entreprenariat a explosé dans ces domaines-là,
28:13 parce qu'effectivement, il y a un savoir-faire technique.
28:15 Il y a aussi la possibilité, via les projets étudiants,
28:19 d'avoir ce premier déclic,
28:22 en disant "j'ai envie d'aller pousser un petit peu plus loin,
28:25 ma solution a l'air bonne, est-ce que je peux transformer ça ?"
28:27 Et oui, le réseau Pépite et même les incubateurs,
28:30 comme celui de l'université, comme Usine,
28:33 on est là aussi pour vous accompagner,
28:35 pour insister sur cette dimension faisabilité,
28:38 et en disant "regarde, c'est possible,
28:40 on peut aller un petit peu plus loin",
28:41 mais aujourd'hui, c'est dans tous les domaines.
28:43 Dans tous les domaines.
28:44 Donc, il n'y a pas que la caricature qu'on a
28:47 du "start-upper" dans la tech,
28:49 qui est présente aujourd'hui.
28:51 Non, et c'est ce qui est génial, d'ailleurs,
28:53 c'est qu'on a aussi bien des projets
28:55 qui vont venir des facultés de sciences humaines
28:58 que à l'IUT d'Orwan,
29:00 où là, on est dans un département de gestion,
29:02 et on arrive quand même à créer des entreprises,
29:04 aussi bien que dans des écoles d'ingénieurs,
29:07 où il y a vraiment toute cette diversité,
29:09 et quand on arrive à mélanger les publics,
29:11 on arrive à des choses assez géniales.
29:13 Alors, Léa, vous, vous vous êtes posée
29:15 beaucoup de questions en lançant votre entreprise,
29:17 est-ce que vous pouvez un peu nous raconter ?
29:19 Parce que c'est vrai, il y a une forêt de questions
29:21 qu'on se pose quand on commence
29:23 et dont on n'a pas forcément les réponses
29:25 quand on se lance comme vous.
29:27 C'est vrai qu'on a une forêt de questions,
29:29 et surtout, on n'est pas forcément formés pour ça.
29:31 Moi, pendant mes études, j'ai peut-être eu
29:33 une ou deux heures de cours sur comment entreprendre,
29:36 comment créer notre entreprise, en fait,
29:38 notre auto-entreprise ou micro-entreprise,
29:40 et puis les différents statuts qui existent,
29:42 comment ça se passe, moi, j'étais totalement perdue,
29:44 donc j'étais lâchée un peu là-dedans,
29:46 et ça a été très précipité, parce qu'à la fin
29:48 de ma formation en août, j'ai trouvé tout de suite
29:50 un atelier pour pouvoir acheter un four,
29:53 commencer mon activité,
29:55 donc je devais absolument créer mon entreprise
29:58 dans le mois, en fait.
30:00 Donc j'ai posé beaucoup de questions sur Internet,
30:02 j'ai posé beaucoup de questions aussi
30:04 à d'autres artisans qui étaient dans mon cas,
30:06 qui sont passés par là.
30:08 Vous vous êtes sentie seule ?
30:10 On a parlé du besoin d'accompagnement à ce moment-là,
30:12 ou via Internet, tout ce genre de choses,
30:14 ça vous a suffi ?
30:16 Non, je me suis sentie seule face à Internet
30:18 parce que je ne comprenais pas certains thèmes,
30:20 certains termes, on va dire,
30:22 donc j'ai appelé la CMA, la Chambre des métiers
30:24 de l'artisanat, qui, elle, m'a du coup
30:26 beaucoup accompagnée là-dessus, et qui en plus
30:28 fait des formations pour nous aider là-dessus,
30:30 pour entreprendre, comprendre vraiment la fiscalité
30:32 de la micro-entreprise, comment ça se passe,
30:34 donc ça, c'était super intéressant,
30:36 et puis ça a été essentiel pour mon entreprise.
30:38 Alors vous disiez, la pérennité de votre entreprise,
30:40 elle vient notamment des réseaux sociaux,
30:43 comment est-ce que vous les utilisez,
30:45 et racontez-nous comment ils vous ont aidé
30:48 dans votre commerce ?
30:50 Alors ce qui m'a beaucoup aidée, je n'ai pas cherché
30:52 à vendre tout de suite, parce que les gens,
30:54 quand ils entendent artisanat, ils veulent rencontrer
30:56 la personne derrière les objets, cette authenticité,
30:58 alors que quand on est vraiment dans cette démarche
31:00 de vendre, vendre, vendre, les gens,
31:02 ils vont moins vers nous, ils reculent un petit peu.
31:04 Ok, mais qu'est-ce que vous avez fait du coup au début ?
31:06 En fait, j'ai montré comment je travaille,
31:08 j'ai montré mon atelier, comment je travaille,
31:10 comment je fais des petits tutoriels, ce genre de choses-là,
31:12 mais ce qui plaisait vraiment, c'est de voir l'histoire
31:14 de l'objet, de voir la personne à la base de la création,
31:16 et ça, ça a énormément plu, justement,
31:18 et ça m'a permis de vendre toutes mes créations
31:20 grâce à ça, donc c'est cette recherche
31:22 de l'authentique.
31:24 Et donc concrètement, vous avez fait des vidéos
31:26 où vous montrez comment vous travaillez pendant
31:28 je ne sais pas combien de temps, avant de faire
31:30 des ventes, et comment ça se passe, vos ventes aujourd'hui ?
31:32 Ça a été très rapide.
31:34 J'ai eu cette cassure en disant
31:36 que j'arrête de faire des photos, je poste que des vidéos
31:38 de mon travail, de comment je produis
31:40 mes objets, et en un mois,
31:42 je suis passée de 500 abonnés à 20 000 abonnés
31:44 sur Instagram. - Incroyable. - Mais improbable,
31:46 et je n'étais pas prête à ça, parce que je gagnais
31:48 1 000 abonnés par jour, je ne comprenais pas d'où ça venait,
31:50 et tous mes objets sont partis... - Ah, elles sont suivies
31:52 par vos vidéos. - Merci !
31:54 Et toute ma production est partie d'un coup,
31:56 et à chaque fois que je faisais des drops,
31:58 je mettais en ligne mes produits, tout partait très très vite,
32:00 et à chaque fois, on m'en redemandait de plus en plus,
32:02 de plus en plus, et là, j'arrive au bout de mes capacités,
32:04 je n'arrive pas à produire
32:06 assez pour la demande qu'il y a, en fait.
32:08 C'est compliqué.
32:10 - Donc vous stoppez vos ventes, quoi, vous faites
32:12 des ventes sur des temps très courts ? - C'est ça.
32:14 En fait, je produis vraiment énormément de pièces,
32:16 là, par exemple, pour la prochaine vente, j'ai 900 pièces,
32:18 à peu près, et je sais qu'elles vont partir en 2-3 jours,
32:20 ça sera fini, quoi.
32:22 Donc j'attends 2-3 mois, je produis pendant 2-3 mois
32:24 d'affilée, je fais une vente
32:26 sur une soirée, il y a tout qui part,
32:28 je passe ensuite 2 semaines en expédition,
32:30 et voilà.
32:32 - Stéphane Follière, vous travaillez sur les réseaux sociaux,
32:34 et sur la façon de...
32:36 plus que de communiquer, mais même de les utiliser
32:38 dans le cadre d'un...
32:40 par exemple, voilà, d'un commerce ou d'une activité ?
32:42 - Alors, j'ai décalé un peu le problème,
32:44 je ne suis pas un spécialiste des réseaux sociaux,
32:46 et je ne suis pas non plus community manager,
32:48 mais Tom, dans la présentation
32:50 qu'il a faite tout à l'heure, lui, a
32:52 monté une entreprise où il aide les autres
32:54 projets à, justement, à faire
32:56 les bons postes, à trouver le bon discours,
32:58 à faire les bonnes vidéos. Il travaille aussi pour
33:00 les réseaux, alors on parlait
33:02 de CMA, mais là, il travaille pour un
33:04 réseau des entreprises en Rouennais, où
33:06 finalement, c'est un autre regroupement consulaire,
33:08 et c'est Tom qui leur fait leurs
33:10 communications réseaux sociaux. - Et le pas
33:12 pendu aussi, c'est les réseaux sociaux, ça a eu son
33:14 importance, j'imagine, peut-être sur ce type
33:16 de projet très innovant, ça doit être
33:18 important de faire parler de soi
33:20 via les réseaux, via les médias ?
33:22 - Oui, tout à fait. Nous,
33:24 même si on a un produit qui s'adresse au
33:26 B2B, donc à travers les professionnels de la restauration,
33:28 on a aussi un produit qui s'adresse au B2C,
33:30 donc pour les consommateurs, et qui a été
33:32 aussi pensé pour les consommateurs, et
33:34 c'est aussi pendant qu'on était déjà en cours
33:36 de développement, en recherche de développement, on avait
33:38 commencé à créer nos réseaux sociaux, notamment,
33:40 on était beaucoup sur Instagram, et c'est ce qui
33:42 nous a permis de créer notre première communauté, et de,
33:44 à chaque fois qu'on était en cours
33:46 de développement, de pouvoir aussi avoir le
33:48 retour de notre
33:50 communauté, pour savoir si le produit
33:52 allait être adapté aux besoins.
33:54 Donc c'est aussi très important. - Et puis vous avez fait du
33:56 crowdfunding aussi, donc
33:58 votre communauté, elle a été essentielle
34:00 quand même pour lever des fonds au départ. - Oui, c'est ça,
34:02 la communauté c'est à la fois
34:04 une source d'inspiration
34:06 pour notre produit,
34:08 pour avoir le produit le plus adapté aux besoins,
34:10 mais c'est aussi beaucoup de soutien qu'on a
34:12 reçu, notamment lors de cette campagne
34:14 de financement participatif, où on a
34:16 eu plus de 600 contributeurs sur
34:18 un mois de campagne, et
34:20 ce qui nous a aussi beaucoup boosté sur le projet,
34:22 qui a aussi validé
34:24 le besoin qu'il y a sur
34:26 le produit, et
34:28 tout l'enthousiasme
34:30 qu'il y a derrière le PAPONTU.
34:32 - Je vais un peu doucher votre enthousiasme, mais est-ce que
34:34 vous avez, dans un coin de votre tête,
34:36 pendant que vous développez votre projet, l'idée de
34:38 l'échec, l'idée que ça puisse se casser la figure
34:40 à un moment ? - Bien sûr,
34:42 que ce soit sur
34:44 le produit, sur la solution,
34:46 ou bien sur toutes les étapes
34:48 du développement de l'entreprise,
34:50 on peut être confronté à l'échec,
34:52 parce qu'en étant entrepreneur,
34:54 on va se lancer vers l'inconnu,
34:56 on va oser, on va sortir de notre zone
34:58 de confort, donc à travers
35:00 l'inconnu et sortir de la
35:02 zone de confort, on peut être
35:04 amené à échouer.
35:06 - Vous l'envisagez ? Vraiment, vous vous dites
35:08 "bon, je recommence" ?
35:10 Vous vous dites quoi ? Si ça rate,
35:12 est-ce que je me relancerais ? Est-ce que vous irez travailler
35:14 dans une entreprise plus classique ? Vous avez déjà pensé
35:16 à tout ça ? - Alors si c'est sur le
35:18 PAPONTU, l'échec sur le PAPONTU,
35:20 c'est vrai que c'est une question qu'on se pose
35:22 naturellement, parce que,
35:24 c'est naturel. Je pense
35:26 que, comme j'ai déjà
35:28 mis un pied dans l'entrepreneuriat,
35:30 et également déjà trouvé
35:32 des... Je me suis beaucoup intéressée aussi
35:34 aux problématiques dans l'alimentation,
35:36 comment mieux manger, etc.,
35:38 je pense que je me tournerais vers un projet
35:40 qui va être plus sur... qui va aussi
35:42 toucher au domaine du PAPONTU.
35:44 Mais si c'est sur un produit du
35:46 PAPONTU, par exemple, on pourrait très bien
35:48 aussi le réadapter en fonction des besoins,
35:50 notamment en rebondissant sur
35:52 l'échec, parce qu'échouer,
35:54 c'est aussi l'opportunité de prendre le temps
35:56 de se poser les bonnes questions,
35:58 de réfléchir à pourquoi ça n'a pas fonctionné,
36:00 et ensuite de mieux repondre.
36:02 - Vous dites que ça peut être très fécond. - Oui, tout à fait.
36:04 - Et Léa, vous vous dites, vous avez
36:06 des gens autour de vous
36:08 qui ont eu des difficultés dans le même domaine
36:10 que vous, dans la céramique.
36:12 On est passé par une crise très compliquée, celle du
36:14 Covid. - Par exemple, l'ancienne
36:16 personne qui était là où j'avais mon atelier
36:18 actuellement, je crois qu'elle a totalement arrêté son
36:20 activité, après trois ans, donc elle a eu
36:22 le Covid en plein dedans.
36:24 - Les fameux trois ans. - C'est ça.
36:26 Donc ça lui a fait casser
36:28 tout son business, en fait, donc elle a totalement
36:30 arrêté. J'ai d'autres amis artisans qui
36:32 ont arrêté ou alors qui ont pris un temps partiel,
36:34 qui travaillent 20 heures par semaine dans une autre
36:36 entreprise pour pouvoir venir
36:38 financer aussi sa propre entreprise.
36:40 Donc c'est pas très simple
36:42 d'entreprendre maintenant. - Oui.
36:44 Stéphane Folliard, entreprendre, c'est donc aussi
36:46 risquer l'échec.
36:48 Ça vous l'expliquez comment à vos étudiants ?
36:50 - Je leur explique pas, je leur fais vivre.
36:52 C'est-à-dire que très très vite, on les envoie...
36:54 - Vous les envoyez aux casse-pipes.
36:56 - C'est pas le terme que je vais utiliser.
36:58 Mais oui, on les envoie
37:00 effectivement sortir de leur certitude,
37:02 aller tester,
37:04 comme je disais tout à l'heure, leur idée, leur produit,
37:06 ou alors commencer à vendre,
37:08 et puis se rendre compte que finalement, ils ont pas forcément
37:10 le bon projet, et là on va
37:12 travailler à faire pivoter l'idée,
37:14 ou pas forcément les bonnes compétences,
37:16 et on va aller les travailler pour augmenter
37:18 leur capacité à convaincre. Mais de toute façon,
37:20 l'échec fait partie
37:22 de la démarche entrepreneuriale.
37:24 Alors il y a l'échec avec
37:26 arrêt total de l'activité,
37:28 mais en attendant, ce qui a été développé
37:30 pendant peut-être les trois ans,
37:32 c'est des connaissances, des compétences,
37:34 et surtout une posture, où il n'y a finalement
37:36 qu'en entreprenant. On peut apprendre
37:38 ces compétences-là, et ces compétences sont aujourd'hui
37:40 très utiles et valorisées dans le monde de l'entreprise.
37:42 On parle d'intrapreneuriat,
37:44 et il y a toute cette culture de résolution de problèmes
37:46 qui est de plus en plus demandée.
37:48 - Oui, parce qu'on a tendance à dire que
37:50 apprendre de ses échecs, par exemple,
37:52 c'est toujours très présent dans l'enseignement
37:54 anglo-saxon, notamment à l'américaine,
37:56 qu'en France, on a une tendance
37:58 à vivre beaucoup plus mal l'échec,
38:00 c'est quelque chose qui est en train de changer,
38:02 vous diriez ? - Oui, je pense que c'est en train de changer.
38:04 Mais c'est vrai qu'en France, on n'a pas la culture
38:06 de l'échec, et on n'a pas la culture de l'échec
38:08 comme une méthode d'apprentissage, comme vous l'avez
38:10 très bien dit, parce que finalement, et comme vous le dites
38:12 également, ça fait partie
38:14 de la démarche. Ce qui est extraordinaire
38:16 avec l'entrepreneuriat, c'est une espèce
38:18 de formation en accéléré, c'est-à-dire un jeune
38:20 qui va tenter de monter une entreprise,
38:22 qui va réussir, aboutir son projet,
38:24 et peut-être le projet, au bout de
38:26 deux, trois ans, voire quatre, va se casser
38:28 la figure à cause d'un événement extérieur,
38:30 une crise sanitaire, à cause
38:32 d'un problème de financement, etc.,
38:34 ou d'un gros client qui le lâche,
38:36 mais la personne
38:38 qui aura monté cette entreprise aura
38:40 en trois, quatre ans, eu une formation
38:42 incroyable, et si elle revient sur le marché du travail
38:44 auprès d'une plus grande entreprise,
38:46 elle est effectivement un talent
38:48 qui est vraiment intéressant
38:50 pour ce type d'entreprise.
38:52 Et je pense que l'échec, on est en train, alors là,
38:54 pour le coup, c'est vraiment un des
38:56 bénéfices, je pense, de la Startup Nation,
38:58 c'est d'avoir fait comprendre que l'échec
39:00 fait partie de la démarche,
39:02 et c'est vrai qu'aux États-Unis, à la limite,
39:04 vous allez voir des investisseurs, si vous êtes
39:06 plantés deux fois, c'est encore mieux
39:08 que si vous n'êtes plantés qu'une seule fois, parce que ça veut dire
39:10 que vous avez essayé deux fois,
39:12 vous avez eu deux idées plutôt qu'une, etc.,
39:14 vous avez été capable de rebondir.
39:16 En fait, un entrepreneur, c'est d'abord, vous le disiez,
39:18 une question de posture, c'est une question
39:20 de tempérament, c'est une capacité aussi
39:22 à se relever sans cesse
39:24 face aux difficultés.
39:26 Un entrepreneur ou une entrepreneuse,
39:28 on disait
39:30 qu'on allait aussi évoquer ce sujet,
39:32 c'est parce que les femmes
39:34 entreprennent beaucoup moins que
39:36 les hommes, encore aujourd'hui,
39:38 pour quelles raisons ?
39:40 C'est très étonnant, parce que quand on interroge
39:42 les femmes sur leurs envies d'entreprendre,
39:44 c'est quasiment à égalité
39:46 avec l'envie d'entreprendre des hommes, en fait.
39:48 Or, seulement un tiers des chefs d'entreprise
39:50 en France sont des femmes,
39:52 et c'est un chiffre qui n'évolue pas beaucoup
39:54 d'année en année,
39:56 alors que les femmes représentent près de la moitié
39:58 de la population active en France, donc
40:00 il y a un vrai sujet là-dessus,
40:02 et je pense que plusieurs études
40:04 ont été menées, vous avez cité tout à l'heure
40:06 Ladi, par exemple, Ladi a mené
40:08 des études, Ouilla, qui est un incubateur
40:10 pour les femmes
40:12 entrepreneuses à Paris, vient de sortir
40:14 une étude avec Roland Berger,
40:16 Sista a mené des études,
40:18 en fait, il y a énormément de freins à l'entrepreneuriat
40:20 des femmes, qui sont des freins
40:22 liés notamment
40:24 aux stéréotypes, liés aux
40:26 conditions socio-économiques, on va dire,
40:28 de l'entrepreneuriat, le premier frein, c'est l'accès
40:30 au financement, ça c'est vraiment
40:32 le premier frein qui ressort, c'est-à-dire
40:34 qu'il faut quand même avoir deux chiffres en tête,
40:36 une femme a deux fois plus
40:38 de chances de se voir refuser
40:40 un prêt auprès d'une banque
40:42 qu'un homme quand elle entreprend.
40:44 À situation égale
40:46 de départ. Voilà, à situation comparable.
40:48 Et si elle va lever des fonds,
40:50 en moyenne, elle va lever
40:52 2,5 fois moins qu'un homme.
40:54 Donc déjà, ça, ça pose, je dirais, le décor.
40:56 Or, on a parlé d'argent
40:58 au début de cette émission,
41:00 une entreprise, elle a besoin d'argent
41:02 pour se financer, pour se développer.
41:04 Et un entrepreneur, il a besoin de se rémunérer,
41:06 d'argent pour vivre. Donc les femmes, elles partent déjà
41:08 avec un handicap qui va
41:10 handicaper tout le projet derrière.
41:12 Et elles ont tendance, alors,
41:14 fruit de toutes ces difficultés
41:16 qu'elles rencontrent sur l'accès au financement,
41:18 elles ont tendance à demander moins
41:20 d'argent. - Elles anticipent.
41:22 - Voilà, quelque part, elles anticipent. - Qu'elles en ont moins.
41:24 - Voilà. - Moins vous demandez, moins vous avez. - Voilà.
41:26 Donc elles en ont moins,
41:28 donc elles partent avec moins de capital,
41:30 et ça, évidemment,
41:32 ça ne facilite pas la réalisation
41:34 et le succès des projets,
41:36 parce qu'il faut bien dimensionner un projet
41:38 pour qu'il réussisse. - C'est comme les augmentations
41:40 en entreprise, je pense que les femmes...
41:42 - C'est un peu ça.
41:44 Elles ont tendance aussi à davantage
41:46 autofinancer leurs projets. Elles vont chercher
41:48 la love money, l'argent des proches,
41:50 de la famille, etc.,
41:52 au lieu d'aller tout de suite
41:54 et demander beaucoup.
41:56 - La love money, vous avez commencé avec ça,
41:58 Léa ? - Oui, en autofinancement, totalement.
42:00 C'était quasiment... - Votre argent,
42:02 l'argent des proches ? - Mon argent,
42:04 l'argent de mes parents aussi, qui croyaient
42:06 à mon projet et qui m'ont toujours suivie, mon conjoint
42:08 qui m'a beaucoup aidée aussi, parce que je suis
42:10 paxée, donc... - Il y a quand même un homme dans l'histoire.
42:12 - Oui, c'est ça, mais qui ont pu m'aider
42:14 au moins à payer les premiers loyers, qui n'étaient pas forcément
42:16 très simples, surtout quand on ne dégage aucun revenu.
42:18 Donc je ne me voyais vraiment
42:20 pas, clairement, aller à une banque, démarcher
42:22 les banques pour mon projet d'artisanat, pour ouvrir
42:24 un petit atelier de poterie dans mon coin, ce n'était pas possible.
42:26 - Et Chéryline, vous l'avez sentie, ça aussi ?
42:28 Ce frein de financement
42:30 dont vous parlez, où vous étiez
42:32 quand même, vous, déjà pas mal accompagnée
42:34 de votre incubateur, etc.
42:36 - Oui, alors nous, pour les
42:38 premiers financements, on allait sur du financement non dilutif,
42:40 donc à travers des subventions, des concours
42:42 dédiés aux étudiants
42:44 entrepreneurs, ou alors des concours d'innovation.
42:46 Également, on allait voir les banques pour des
42:48 emprunts bancaires, on a aussi eu recours à...
42:50 - Et ça se passait comment avec les banques ?
42:52 - J'ai pas le sentiment
42:54 que c'était lié au fait que j'étais
42:56 une femme, mais plus lié à mon âge.
42:58 Tout à l'heure, on en parlait un peu.
43:00 - Peut-être un double problème de légitimité, là,
43:02 quelque part, jeune et femme, en fait.
43:04 - Mais c'était difficile ?
43:06 - Alors, à la fois, j'ai senti une difficulté
43:08 parce que je n'avais jamais fait ça, donc c'est aussi
43:10 par le manque d'expérience, mais à la fois,
43:12 j'ai ressenti du soutien.
43:14 Même si j'avais eu des refus,
43:16 j'avais ressenti du soutien lié au fait que
43:18 le projet était un pacte, était innovant.
43:20 Donc j'ai quand même ressenti
43:22 plus de soutien que de difficulté.
43:24 - D'accord. Mais peut-être pas beaucoup
43:26 d'argent du soutien. - Oui, peut-être pas
43:28 beaucoup aussi. - On nous soit également
43:30 par Skype avec
43:32 Laure Darko, qui est
43:34 sénatrice, l'île d'indépendance de l'Essonne, et vice-présidente
43:36 de la délégation aux droits des femmes
43:38 et à l'égalité des chances. Bonjour,
43:40 Laure Darko, merci beaucoup d'être avec nous.
43:42 Qu'est-ce qui vous inspire, cette situation
43:44 que l'on décrit,
43:46 où l'un des premiers freins
43:48 à l'entrepreneuriat des femmes, c'est déjà
43:50 le frein du financement.
43:52 - Oui, c'était très drôle
43:54 parce que, ce que dit
43:56 votre invité
43:58 journaliste, en fait,
44:00 c'est exactement ce que j'allais vous dire.
44:02 On a plusieurs freins
44:04 très stéréotypés.
44:06 Une femme va demander moins.
44:08 Je l'ai vu même sur un
44:10 prisme, notamment
44:12 dans le cinéma, quand des femmes réalisatrices
44:14 demandent de l'argent, elles demandent moins
44:16 que les hommes.
44:18 Et je sais que c'est vrai aussi dans le monde de l'entrepreneuriat.
44:20 Je pense
44:22 qu'on s'auto-censure,
44:24 on a besoin avant tout
44:26 de cocher toutes les cases, pour
44:28 savoir si on est vraiment capable de faire
44:30 le projet. Alors je pense qu'un homme,
44:32 alors ça peut être un peu
44:34 caricatural de dire ça, mais un homme au culot
44:36 ne va pas forcément va foncer
44:38 et va demander les choses, même s'il n'est pas totalement au point
44:40 à 100%. Une femme
44:42 va peut-être de manière plus réfléchie
44:44 voir
44:46 vraiment si elles ont coché toutes les cases
44:48 avant de le demander.
44:50 En effet, j'ai eu une expérience
44:52 je vais la citer,
44:54 la BPI, très symptomatique
44:56 d'une scientifique
44:58 du plateau de Saclay, du CEA,
45:00 qui avait proposé
45:02 une
45:04 appli vraiment formidable
45:06 pour lutter contre les 10.
45:08 Elle a été retoquée. L'année suivante,
45:10 son
45:12 collaborateur le plus proche,
45:14 c'est lui qui l'a présenté,
45:16 mais exactement à la virgule près
45:18 le même projet, et le projet
45:20 a été reçu.
45:22 Je vous parle de ça il y a à peu près 4-5 ans,
45:24 donc j'espère que depuis, la BPI a fait
45:26 des progrès. Je sais qu'on a été plusieurs
45:28 à lui remonter ses problèmes
45:30 de discrimination,
45:32 mais vous voyez bien, c'est aussi peut-être,
45:34 dans la façon dont on présente les projets,
45:36 qu'on a des difficultés peut-être
45:38 à rassurer à ce moment-là les financeurs.
45:40 - Et vous dites que les femmes,
45:42 finalement, c'est la preuve qu'elles
45:44 inspirent moins confiance que son
45:46 collaborateur. Il y a des représentations
45:48 certainement derrière aussi ?
45:50 - C'est une représentation parce que je vous dis,
45:52 le pitch est exactement le même.
45:54 Donc en fait, c'était peut-être dans le ton,
45:56 une attitude peut-être un peu plus
45:58 stressante,
46:00 enfin plus stressée, pardon,
46:02 peut-être plus fébrile,
46:04 j'en sais rien. En tout cas, en effet,
46:06 avec exactement la même présentation,
46:08 elle, en tant que femme,
46:10 a été retoquée
46:12 un an avant. Donc je pense
46:14 qu'en effet, on a
46:16 sûrement des progrès à faire
46:18 de ce côté-là, mais également en fait
46:20 à voir aussi
46:22 des progrès de l'autre côté de la barrière.
46:24 Mais je voyais cette jeune fille
46:26 qui a monté Papandou,
46:28 moi je vois sur le plateau
46:30 de Saclay ou à Polytechnique, notamment,
46:32 on a des pépinières d'entreprise
46:34 et des incubateurs qui font très attention
46:36 à encourager
46:38 encore plus les femmes, notamment
46:40 dans les milieux scientifiques et numériques
46:42 où on en manque, et vous savez que c'est mon dada, Tam.
46:44 Et c'est vrai que c'est compliqué
46:46 du coup de
46:48 peut-être se lancer
46:50 quand on n'est pas entourée, et
46:52 j'ai l'impression vraiment que la société a changé
46:54 et que le monde de l'entreprise fait
46:56 attention, alors pas à nous privilégier
46:58 quand on n'a pas le niveau,
47:00 mais à égalité
47:02 de niveau
47:04 de présentation de projet et de personnalité.
47:06 Je pense
47:08 qu'aujourd'hui
47:10 les entreprises et les financeurs
47:12 font plus attention à ce que les femmes
47:14 soient représentées et encouragées.
47:16 - Vous pensez qu'il y a une révolution des mentalités qui est en cours ?
47:18 - Je trouve.
47:20 - Vous l'espérez en tout cas.
47:22 - Je l'espère.
47:24 Et même pour les CMA, j'entendais cette jeune femme.
47:26 Je recevais
47:28 une fédération justement
47:30 de métiers
47:32 de métiers de service.
47:34 On sent
47:36 que dans ces fédérations
47:38 il y a une entraide pour essayer
47:40 de changer aussi
47:42 le stéréotype de laisser
47:44 les femmes toujours dans les mêmes
47:46 secteurs d'activité
47:48 et de pousser un peu plus.
47:50 Je ne dirais pas que du jour au lendemain on va retrouver
47:52 50% de femmes dans le milieu du bâtiment,
47:54 mais d'essayer de pousser
47:56 les dossiers des jeunes
47:58 femmes dans
48:00 des secteurs où
48:02 elles étaient jusqu'à présent,
48:04 où elles s'interdisaient peut-être elles-mêmes, mais où elles étaient
48:06 très souvent exclues.
48:08 - Un mot sur la délégation au droit des femmes
48:10 à travailler sur
48:12 femmes et travail, femmes et santé au travail.
48:14 Il y a beaucoup de sujets
48:16 sur lesquels on a pu voir
48:18 quand même le fait
48:20 qu'il y avait quand même des années de retard
48:22 à rattraper.
48:24 - Ah oui, bien sûr.
48:26 Et sur la santé des femmes,
48:28 ça reste très compliqué.
48:30 Je ne sais pas si vous avez vu, il y a un texte qui va bientôt
48:32 arriver sur
48:34 justement les problèmes de menstruation.
48:36 On a depuis
48:38 quelques années beaucoup plus parlé de l'endométriose,
48:40 qui est donc cette maladie
48:42 qui touche beaucoup
48:44 de jeunes femmes avec des règles douloureuses.
48:46 Mais on a
48:48 cette tentation
48:50 de vouloir ouvrir
48:52 également
48:54 des congés maladie
48:56 pour des femmes qui n'auraient pas forcément
48:58 l'endométriose, mais des règles
49:00 difficiles tous les mois.
49:02 Je dois dire que moi-même, je suis très réservée
49:04 sur ces sujets-là parce que
49:06 je pense qu'on est dans une société qui
49:08 a du mal
49:10 à être bousculée.
49:12 Et je pense qu'il faut
49:14 faire attention qu'on n'ait pas un retour
49:16 de bâton et que les hommes
49:18 ne se disent pas...
49:20 Si je prends une femme
49:22 ou si j'ai une femme à entreprendre,
49:24 est-ce qu'elle va
49:26 du jour au lendemain ne pas se retrouver
49:28 avec des complications et des problèmes de santé
49:30 propres à la santé féminine
49:32 qui vont me freiner ?
49:34 Je caricature aussi, surtout quand on est
49:36 chef d'entreprise, je ne pense pas
49:38 que la jeune fille de Vapandou
49:40 se pose la question si elle a mal au ventre
49:42 tous les mois.
49:44 Je pense qu'il faut qu'on fasse attention
49:46 et que c'est
49:48 une meilleure appréhension
49:50 de l'autre qui doit
49:52 rentrer en compte. Comme pour les congés
49:54 paternités. Aujourd'hui,
49:56 la nouvelle génération
49:58 ne se pose même pas la question de savoir
50:00 s'il faut partager les tâches
50:02 et s'il faut partager
50:04 des congés pour que
50:06 la femme puisse épanouir si elle a besoin
50:08 d'avoir des journées fixes
50:10 de boulot.
50:12 J'ai un jeune sénateur
50:14 de mon groupe qui est jeune papa
50:16 et qui, certains jours,
50:18 ne vient pas au Sénat à cause de ça.
50:20 Je pense que c'est très bien
50:22 de montrer l'exemple.
50:24 Merci, merci beaucoup, Laure Darkos,
50:26 d'avoir répondu à nos questions.
50:28 Et bon courage
50:30 à ces jeunes entrepreneurs.
50:32 Merci, merci beaucoup. Valérie Lion,
50:34 est-ce que l'un des problèmes,
50:36 le problème du "qui va s'occuper des enfants",
50:38 ça reste encore présent, vous pensez ?
50:40 Dans l'esprit des banquiers,
50:42 dans l'esprit de tout ce qui est...
50:44 Il y a beaucoup de stéréotypes qui restent présents,
50:46 mais je voudrais rebondir sur le cas
50:48 que vous avez présenté, Laure Darkos,
50:50 de cette jeune femme qui a présenté son projet
50:52 qui n'a pas été retenu. Un an après,
50:54 il est présenté par son associé homme,
50:56 le projet est retenu. Il y a une étude aux Etats-Unis
50:58 qui a montré que quand un entrepreneur
51:00 vient pitcher son projet d'entreprise
51:02 et que les investisseurs
51:04 le questionnent,
51:06 si l'entrepreneur est un homme,
51:08 les investisseurs vont avoir tendance à le questionner
51:10 sur ses stratégies de succès.
51:12 Ils vont lui dire si ça marche, vous faites quoi,
51:14 comment vous réagissez, etc.
51:16 Ils vont avoir tendance à questionner
51:18 la femme entrepreneur sur ses risques d'échec.
51:20 Et si vous vous plantez, qu'est-ce qui se passe, etc.
51:22 Donc ça dit tout.
51:24 Et ça explique ce qu'a vécu, malheureusement,
51:26 cette femme
51:28 du plateau de Saclay avec son projet.
51:30 Donc il y a un double enjeu.
51:32 D'abord, évidemment, le milieu
51:34 des investisseurs, c'est un milieu quasiment
51:36 90% masculin.
51:38 Donc forcément,
51:40 ceux qui étudient les projets,
51:42 ce n'est pas d'une grande diversité.
51:44 Donc déjà, il faudrait plus de femmes
51:46 parmi les investisseurs, les banquiers,
51:48 les comités d'investissement, etc.
51:50 pour une appréhension plus diverse
51:52 des projets d'entreprise.
51:54 Il faudrait aussi plus de rôle-modèle,
51:56 c'est-à-dire de femmes entrepreneurs
51:58 comme les deux jeunes femmes qui sont ici sur le plateau
52:00 pour que les investisseurs, les banquiers
52:02 s'habituent à voir des femmes diriger des entreprises,
52:04 des entreprises qui grossissent
52:06 parce qu'aujourd'hui, les femmes qui dirigent
52:08 des entreprises... - Le problème, c'est la poule et l'œuf.
52:10 - Non mais bien sûr.
52:12 - C'est pas pour le pas pondu.
52:14 - Mais ces entrepreneurs, elles existent,
52:16 donc il faut les valoriser, il faut les montrer.
52:18 Ce que vous avez fait aujourd'hui, c'est formidable.
52:20 Donc il faut des rôles-modèles
52:22 parce qu'effectivement, il faut montrer que des femmes
52:24 peuvent défendre des projets et que la question
52:26 effectivement, la question
52:28 des enfants qui peut être posée à une femme,
52:30 on ne va pas la poser à un homme. Je suis désolée,
52:32 un enfant, il a
52:34 souvent un père et une mère, donc le père peut être
52:36 tout aussi concerné par cette
52:38 question-là. Et donc c'est sûr que les jeunes
52:40 femmes doivent se préparer à répondre
52:42 à des questions auxquelles les jeunes hommes
52:44 entrepreneurs n'auront pas à répondre.
52:46 Et ça, quelque part, aujourd'hui,
52:48 c'est pas normal, mais il faut quand même l'avoir en tête.
52:50 - Stéphane Follière, quelle est la part d'étudiante
52:52 parmi vos étudiants ? Et quelle est
52:54 la part d'étudiante qui choisisse
52:56 l'entrepreneuriat, le statut
52:58 d'étudiant entrepreneur ? - Alors là, je vais parler
53:00 de manière un petit peu plus large au niveau national. On vient de faire
53:02 une étude justement dans le cadre des 10 ans de Pépite,
53:04 enfin des 10 ans du Prix Pépite,
53:06 sur justement la répartition des
53:08 étudiants qu'on a pu accompagner. Dans le cadre
53:10 du statut national ou dans le cadre du
53:12 D2E, on est à peu près à 60-40.
53:14 C'est 60 % hommes, 40 % femmes.
53:16 Par contre, il y a... Voilà, l'écart
53:18 est en train de se réduire. Il y a surtout quelque chose
53:20 qui est intéressant, c'est que
53:22 la proportion de
53:24 création d'entreprise, on est à peu près à 30 %
53:26 d'étudiants entrepreneurs
53:28 qui transforment en création d'entreprise
53:30 derrière, on est dans les mêmes proportions, on est à 30 %.
53:32 Hommes, 30 % femmes. Donc le
53:34 problème, il n'est pas dans l'accompagnement, c'est pas la période
53:36 qui fait la différence.
53:38 Il n'y a pas un plafond de verre à ce moment-là, au moment
53:40 de transformer l'idée en entreprise.
53:42 - Vous dites que s'il y avait 50 % de femmes
53:44 et 50 % d'hommes qui voulaient lancer une entreprise,
53:46 tout le monde serait à 30 % de...
53:48 - C'est ça. Aujourd'hui,
53:50 on est à 30 %. - Donc c'est des biais antérieurs.
53:52 - Exactement. On revient
53:54 sur une dimension culturelle et peut-être
53:56 aussi une dimension avant
53:58 l'incubation. Il y a tout un travail de sensibilisation
54:00 important à faire
54:02 dans le cadre
54:04 des études. Ce que j'ai entendu,
54:06 seulement deux heures de sensibilisation
54:08 à l'entrepreneuriat, c'est peu quand même.
54:10 Nous, à l'université, on a inscrit ça
54:12 dans nos maquettes pédagogiques. Une sensibilisation
54:14 est obligatoire pour tous les étudiants,
54:16 sous des formes variées, jusqu'à la création d'entreprise,
54:18 c'est ce qu'on propose à l'IUT.
54:20 On essaye d'aller
54:22 casser des mythes, d'aller casser le fait
54:24 qu'il faut cocher toutes les cases.
54:26 On en a bien conscience. On n'est pas obligé
54:28 d'avoir toutes les compétences, on n'est pas obligé
54:30 d'avoir un business plan, un business model parfait
54:32 pour aller le présenter. Mais oui,
54:34 on travaille le pitch, oui, on travaille
54:36 la réponse à ces questions et puis aussi
54:38 ce qu'on appelle la posture entrepreneuriale,
54:40 être capable de comprendre
54:42 la situation de l'autre. Je reviens sur ces termes, ils sont importants,
54:44 c'est comprendre l'autre et réussir à le convaincre.
54:46 Ça, ça ne s'improvise pas, ça se travaille.
54:48 - Léa, vous, est-ce que
54:50 en tant que femme, vous avez eu l'impression
54:52 que c'était plus difficile ? Vous n'avez peut-être pas
54:54 beaucoup d'éléments de comparaison, mais
54:56 est-ce que vous avez senti, je ne sais pas,
54:58 des réflexes un peu machistes
55:00 dans ce qui vous finance,
55:02 ou dans l'univers dans lequel vous avez évolué ?
55:04 - Alors, dans l'univers dans lequel je travaille,
55:06 on est exclusivement féminin.
55:08 - Mais non, mais ça, c'est intéressant parce qu'il y a aussi
55:10 des secteurs où il y a beaucoup de femmes entrepreneurs,
55:12 des secteurs où c'est zéro.
55:14 - Mais ça s'est inversé, parce que la poterie,
55:16 en tout cas, et la céramique, avant, c'était surtout
55:18 un métier d'homme. Et ça s'est inversé,
55:20 peut-être, il y a 20, 30 ans, c'est devenu
55:22 surtout un métier de femme et en formation, on n'avait qu'un homme.
55:24 Sur 15 personnes, c'était rempli
55:26 que de femmes. Donc, on n'a pas
55:28 vraiment eu ce côté, cette barrière,
55:30 justement, du genre
55:32 qui peut bloquer.
55:34 Et dans mon entreprise, comme je suis toute seule,
55:36 de toute façon... - Vous n'en êtes pas encore là.
55:38 - Non, voilà. Peut-être face aux fournisseurs,
55:40 où là, il y a peut-être ce blocage
55:42 qui peut arriver des fois des fournisseurs
55:44 quand ils les appellent, qu'ils ne s'attendent pas forcément à ce qu'on soit
55:46 le gérant d'entreprise en tant que femme.
55:48 Mais je n'ai pas encore eu
55:50 ce problème-là.
55:52 - Valérie Lyon, je commençais à l'évoquer, c'est qu'il y a aussi
55:54 des grosses différences selon les secteurs, j'imagine.
55:56 Où est-ce que les femmes entreprennent ?
55:58 Où est-ce que les hommes sont le plus présents ?
56:00 - Les femmes entreprennent essentiellement dans le conseil,
56:02 les services et le commerce.
56:04 Et ça, c'est aussi un sujet parce que ce ne sont pas
56:06 forcément les secteurs,
56:08 on va dire, les plus faciles
56:10 et les plus rémunérateurs.
56:12 Et les hommes, ils vont essentiellement
56:14 aller dans l'industrie, la technologie,
56:16 etc. Donc, c'est vrai
56:18 qu'il y a aussi ce stéréotype.
56:20 Et d'ailleurs, à la limite, si une femme
56:22 va entreprendre dans les transports,
56:24 elle aura peut-être plus de chances d'aller
56:26 décrocher des financements parce qu'elle aura moins de concurrence,
56:28 il y aura moins d'autres femmes qui vont aller chercher
56:30 des financements pour une entreprise de transport
56:32 que pour un commerce, par exemple.
56:34 Et elle va aller chercher plus
56:36 d'argent parce que c'est un secteur qui demande
56:38 plus d'argent. Donc, c'est vrai
56:40 qu'il y a encore cet aspect
56:42 un peu stéréotypé
56:44 sur les secteurs.
56:46 Et puis, on a commencé l'émission sur la question
56:48 du sens et de l'impact. Les femmes,
56:50 globalement, vont plutôt entreprendre
56:52 dans des secteurs à impact.
56:54 Donc, l'environnement, vous en êtes
56:56 un bel exemple, l'éducation,
56:58 la santé.
57:00 Et là, je pense qu'il y a vraiment
57:02 une prise de conscience qui doit se faire, même d'un point de vue
57:04 je dirais national. C'est que
57:06 ces secteurs à impact, ils sont essentiels
57:08 pour le futur, pour toutes les transitions dont on parle,
57:10 écologiques,
57:12 alimentaires, etc.
57:14 Et donc, il faut absolument soutenir l'entrepreneuriat
57:16 des femmes, les femmes qui entreprennent
57:18 dans ce domaine parce qu'elles sont nombreuses
57:20 avec des projets très porteurs
57:22 de sens, mais aussi, je dirais,
57:24 de richesse pour la société future.
57:26 - Soutenir l'entrepreneuriat
57:28 et l'entrepreneuriat des femmes en particulier.
57:30 Merci beaucoup à tous les quatre
57:32 d'avoir participé à cette émission.
57:34 Merci à vous de l'avoir suivie.
57:36 On se retrouve le mois prochain
57:38 pour un nouveau numéro d'Avoir 20 ans.
57:40 ♪ ♪ ♪

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