• il y a 8 mois
Le procès de l'l'attentat du marché de Noël de Strasbourg s'ouvrira le 29 février prochain, cinq ans après le s faits. Mostafa Salhane sera le témoin clé : l'ancien chauffeur de taxi fut pris en otage par le terroriste. Une histoire qu'il raconte dans un livre, "15 minutes pour sauver sa vie", disponible en librairie.
Regardez L'invité de RTL Soir du 05 février 2024 avec Marion Calais et Julien Sellier.

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Transcription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 Julien Célier, Marion Calais et Céprien Séni.
00:08 RTL Bonsoir jusqu'à 20h.
00:10 Allez RTL Bonsoir, votre émission continue. On vous propose maintenant un témoignage d'événement.
00:16 Le procès de l'attentat de Strasbourg va s'ouvrir dans quelques jours, le 29 février précisément.
00:21 Cinq accusés seront jugés. Le terroriste, lui, a été tué le 13 décembre 2018,
00:27 deux jours après le massacre du marché de Noël. Cinq morts et onze blessés.
00:31 Ce soir-là, Shérif Sheikhat cherche à fuir après sa tuerie.
00:35 Cet islamiste monte dans un taxi avant de tenir en joue le chauffeur.
00:38 Ce chauffeur, c'était vous, Mostafa Salam. Bonsoir.
00:41 M. S. Bonsoir.
00:42 RTL Merci d'être avec nous.
00:43 Vous racontez ce huis clos dans l'habitacle de votre véhicule dans un livre,
00:47 "15 minutes pour sauver ma vie", c'est aux éditions Plon.
00:51 Ce soir-là, Mostafa Salam, l'assaillant, vous le repérez.
00:56 Vous ne savez pas qu'il vient d'assassiner des passants,
00:58 mais vous repérez sa démarche dans vos rétroviseurs, en quelque sorte, c'est ça ?
01:02 M. S. Je l'aperçois sortir derrière une camionnette, me fixant dans les yeux.
01:06 Donc, il vient vers moi et s'installe dans la voiture.
01:10 RTL Et il surgit en quelque sorte dans votre voiture,
01:12 parce que vous alliez prendre d'autres clients à ce moment-là ?
01:15 M. S. Il leur grille, si vous voulez, le passage, et il monte dans la voiture.
01:19 Il me dit d'avancer, de rouler vite, et je comprends très vite,
01:23 il y a quelque chose qui ne va pas. Mais je ne sais pas de quelle nature et de quel degré.
01:27 J'essaie de comprendre ce qui se passe, parce qu'il est très nerveux,
01:30 il n'est pas bien, il cogite un peu dans tous les sens.
01:33 Comme il transpirait beaucoup, donc il s'interpelle.
01:37 C'est très tendu, il y a un face-à-face qui se crée.
01:39 C'est vraiment une conversation très virulente,
01:42 parce que ça monte dans les tours, il crie beaucoup.
01:46 Pour moi, la première des choses, c'est sans doute qu'il vient de piquer un sac.
01:50 - Vous commencez à réaliser qu'il y a vraiment un danger
01:53 quand vous sentez un objet pointu au niveau de vos côtes, c'est ça ?
01:56 - D'abord, il y a l'annonce. L'annonce d'un attentat.
01:59 En disant qu'il vient de faire un attentat à Strasbourg,
02:02 et qu'il y a eu beaucoup de morts.
02:04 Et à partir de maintenant, il me dit "tu ne vas plus nulle part,
02:07 tu vas rester avec moi, on va mourir ensemble".
02:09 Et là, je me retourne, il y a l'arme qui est pointée vers moi.
02:11 - Vous vous rendez compte aussi qu'il est blessé ?
02:13 - Oui, parce qu'il met sa main gauche, là il y a beaucoup de sang qui coule.
02:16 - Le sentiment que j'ai, bien sûr, il y a cette jubilation,
02:20 qui est la jubilée, si vous voulez, par rapport à ce qu'il venait de faire.
02:25 Mais il n'y a pas de regret, au bout.
02:28 Au contraire, parce que le travail, il veut le finir.
02:31 - Est-ce qu'à ce moment-là, vous vous refaites le film de votre journée ?
02:35 Parce que je crois que vous deviez dîner à la maison, ce soir-là.
02:38 Et puis des collègues vous appellent, il y a du travail,
02:41 et finalement, vous sortez travailler.
02:43 - Le film que je me fais moi-même à ce moment-là,
02:46 qui passe devant mes yeux, c'est "Mes enfants".
02:48 C'est mes parents, c'est mon épouse.
02:50 Et où je dis au revoir à tout le monde, pour s'apprêter à mourir.
02:55 Donc il y a une prière avant de mourir, que je viens de citer, à ce moment-là.
03:02 Et j'attends la détonation, j'attends que ça se passe.
03:05 - Vous êtes ceinture noire de karaté, Mostafa Salam.
03:08 Vous veillez à garder les mains libres, au cas où.
03:11 Pour peut-être tenter de neutraliser, si l'occasion se présente.
03:14 - Oui, parce que ça je sais faire.
03:16 Mais il faut être quand même dans une position où je peux le faire.
03:19 Moi qui est assez devant, lui il est derrière.
03:22 C'est très difficile.
03:23 Mais il y a plusieurs scénarios qui passent par la tête.
03:26 Et surtout, on ne sait pas ce qu'il a en dessous de sa veste, peut-être de l'explosif.
03:31 - Quand vous êtes dans l'habitacle de votre taxi,
03:34 vous recevez un coup de fil d'un ami, qui lui aussi est taxi.
03:38 Et c'est le moment où vous en profitez pour essayer de faire comprendre aux terroristes
03:42 que vous devez partir vous aussi, que vous devez rejoindre votre collègue, que votre service est fini.
03:46 - C'est là qu'on voit que le cerveau a une puissance.
03:50 Le téléphone sonne, c'est un collègue qui me demande du travail, tout simplement.
03:54 Et je décroche, j'ai eu cette intelligence de dire à mon collègue,
03:58 je suis avec mon dernier client, je vais l'encaisser et je t'apporte la voiture.
04:02 Et je dis bien sûr aux terroristes que je ne peux pas rester avec lui,
04:05 étant donné que l'heure est passée.
04:07 - Et le terroriste, à ce moment-là, il commence à hésiter,
04:10 mais il ne cesse de vous dire "mais tu vas aller prévenir la police".
04:14 - Oui, il m'interpelle à plusieurs reprises, si je vais voir la police,
04:18 et j'essaie de le rassurer.
04:20 On a joué aux échecs pendant ces deux minutes, très très longtemps,
04:24 et c'était celui-là qui allait faire échec et mat.
04:28 - C'est un dialogue où votre vie est en train de se jouer,
04:31 Mostafa Salam.
04:33 Vous réussissez à le convaincre de sortir de la voiture,
04:36 vous sortez de la voiture pour aller chercher des médicaments,
04:39 pour lui donner, pour nettoyer sa plaie.
04:41 Et c'est là, en quelque sorte, que votre destin bascule.
04:45 Vous saisissez l'occasion pour vous enfuir.
04:48 - Le seul moyen de pouvoir se débarrasser, d'une manière ou d'une autre,
04:52 c'est de le descendre de la voiture.
04:54 Si la police arrive, on est mort les deux.
04:57 Et comme il a beaucoup mal et il saigne, il hurle de douleur,
05:01 je lui dis "il faut que tu descends, j'ai tout dans le coffre,
05:04 et là je pourrai te soigner et je pourrai t'aider".
05:06 Il me fait descendre de la voiture, et en descendant pratiquement en même temps,
05:10 tout en me pointant l'arme sur moi, en me mettant en joue.
05:13 Quand j'arrive au niveau du coffre, il me met l'arme sous le ventre.
05:16 Et il me dit "si tu fais le malin, je t'allume".
05:18 - A un moment donné, il va prendre les médicaments.
05:21 Et donc, laisser son arme l'espace de quelques secondes.
05:24 - Et à ce moment-là, il baisse son arme,
05:26 et à un moment d'inattention, je recule, je monte dans la voiture, et je pars.
05:31 - Vous démarrez en trombe, qu'est-ce que vous ressentez à ce moment-là ?
05:33 - Vous ne réalisez pas ce qui vient de vous arriver.
05:36 À un temps donné, vous ne savez pas si c'est de la fiction, si c'est un film.
05:41 Vous rêvez, vous planez.
05:43 - Vous foncez au commissariat, vous prévenez la police.
05:46 Il va se rendre lui-même au commissariat,
05:48 vider son barillet devant les locaux.
05:52 Racontez-nous cette nuit au commissariat.
05:54 Vous y restez quasiment jusqu'à 4, 5 heures du matin,
05:58 avec un sentiment, c'est que, en quelque sorte,
06:00 on ne vous considère pas à ce moment-là comme une victime.
06:02 - Bien sûr, là, je suis interrogé.
06:04 On est vu uniquement comme témoin.
06:07 Interrogé, et après, laissé partir dans la nature,
06:11 sans se préoccuper de l'état psychologique ou physique.
06:16 - Oui, parce que vous rentrez à la maison, quelque part, en fin de nuit,
06:19 et c'est là que vous êtes submergé par l'émotion, en retrouvant votre famille.
06:23 Vous comprenez à quel point votre vie ne tenait qu'à un fil.
06:25 - Parce que ma famille... Moi, j'ai vécu 8 heures avec la police,
06:29 mais ma famille, elles ont vécu aussi 8 heures en parallèle,
06:35 dans l'angoisse, étant donné qu'elles ne savaient pas si j'étais mort ou vivant.
06:39 Ils voyaient qu'on parle du chauffeur de taxi à travers les médias,
06:45 et on voit une voiture qui garait devant le commissariat.
06:49 Mais on ne sait pas si le chauffeur de taxi est mort ou vivant.
06:52 Et là, une fois arrivé à la maison, quand je mets la clé dans la porte,
06:56 tout le monde est en pleurs, et là, ça dure très très longtemps.
07:01 - Ça dure très très longtemps, parce que le terroriste sera battu 48 heures plus tard,
07:05 mais votre vie, vous, elle ne sera plus la même.
07:08 On vous a dit de vous mettre au verre, on vous a mis en garde sur l'éventualité de complices,
07:14 et vous allez vivre sur vos gardes pendant des mois, en quelque sorte, ensuite.
07:17 - Des années. Je sortais que par nécessité, sinon j'étais le cloîtré chez moi,
07:23 les volets fermés, vivre dans le noir, manger dans le noir,
07:28 et puis ces médicaments aussi, pour pouvoir dormir, pour le stress, pour l'angoisse.
07:33 - La reconstruction, vous êtes allé la chercher vous-même, en quelque sorte,
07:36 vous avez fondé AVA, c'est une association d'aide aux victimes.
07:40 Cinq ans après, vous dites que vous retrouvez petit à petit le chemin de la vie,
07:44 le chemin de l'harmonie, c'est ce que vous écrivez.
07:46 - J'essaye de trouver un cap à ma vie, parce que vous savez,
07:50 je n'étais pas seulement chauffeur de taxi, au moment des faits.
07:53 J'étais aussi chef d'entreprise, et il y a tout qui, comme un château de cartes,
07:57 ça tombe, vous avez l'impression que vous ne vous servez plus à rien.
08:02 Et pour chercher à rester la tête de l'eau, il y a cette association-là,
08:09 il y a l'écriture du livre, et puis il faut attendre le procès,
08:13 parce que sans ça, on ne peut pas se reconstruire avant, il faut attendre le procès.
08:17 Ça aussi, c'est une épreuve qui va être là, durant six semaines quand même,
08:23 qu'il faut endosser.
08:25 - Merci beaucoup, Mostafa Salam, pour votre témoignage,
08:27 aujourd'hui dans RTL Bonsoir.
08:29 "15 minutes pour sauver ma vie", c'est votre livre,
08:31 écrit avec Frédéric Ploquin chez Plon, qui raconte comment vous avez réussi
08:35 à échapper aux meurtriers, aux terroristes de l'attentat du marché de Noël de Strasbourg
08:40 à quelques jours maintenant du procès.
08:42 Merci d'avoir été ce soir à notre avis. - Merci à vous.
08:44 - RTL Bonsoir.
08:50 - RTL Bonsoir, c'est votre émission, on est ensemble avec toute l'équipe
08:53 jusqu'à 20h pour vous accompagner. La suite, bien entendu, c'est RTL Inside.
08:57 - RTL a testé pour vous le nouveau Big Mac, le hamburger star de McDo,
09:02 change de recette, révolution au coup de com', on vous dit tout.
09:05 - Et ensuite, place à un spécialiste justement des fast-foods,
09:08 la Viso-Conférence avec vous, Alex Vizorek, au menu ce soir.
09:12 - Et un spécialiste aussi de la mort, puisque nous allons parler de musique d'enterrement.
09:15 - Ah oui ? - Oui, il y a une info qui est tombée.
09:17 - Ah, tout de suite alors !
09:19 Réussi !

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