« Le reflux du populisme d’extrême gauche lui ouvre boulevard à Marine Le Pen», pour Claude Malhuret

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00:00 Merci Monsieur le Président. Monsieur le Premier Ministre, comme tout chef de gouvernement,
00:04 vous allez affronter de nombreux défis politiques.
00:07 Et le premier, bien sûr, est l'absence de majorité parlementaire, qui n'a permis jusqu'à ce jour
00:12 que des palliatifs imparfaits, négociations épuisantes ou 49-3 au goût amer.
00:18 Le second défi est la pression permanente et déprimante des extrêmes.
00:23 La France échappe encore à la vague de populisme qui frappe les démocraties,
00:28 parce que si ailleurs le populisme n'est que d'extrême droite,
00:31 chez nous où l'on apprendait l'école qu'il faut préférer Robespierre à Tocqueville, il est coupé en deux.
00:37 La fin de ces exceptions est proche.
00:40 Parce qu'il faisait le plus de bruit, parce qu'il avait réussi à embrigader une gauche en perdition,
00:45 parce qu'il transformait l'Assemblée en zone à délirer, le danger d'extrême gauche paraissait le plus dangereux,
00:51 exacerbé par une caisse de résonance médiatique qui confirme que rien n'est plus sonore que ce qui est creux.
00:57 Mélanie Pesce, attelage improbable de la gauche woke, de la gauche vellib, de la gauche caviar,
01:04 de la gauche stalinienne, de la gauche trotskiste et de la gauche hamas,
01:08 s'est effondré sous le poids de ses incohérences.
01:11 Le Che Guevara des Calanques, en cédant la direction des Insoumis
01:14 et la présidence du groupe parlementaire à des comparses,
01:17 choisit tous deux, non pas malgré, mais en raison de leurs insuffisances,
01:22 a compris tardivement qu'il avait pris le train dans la mauvaise direction.
01:26 Il court depuis en sens inverse dans le couloir, à grand geste des bras et du menton,
01:31 lançant ses imprécations aux alliés comme aux ennemis,
01:35 mais ne parvenant qu'à démontrer que sa vie est devenue une interminable rage de dents.
01:41 LFI, c'était une surprise partie. La surprise, c'est qu'il n'y avait pas de parti, pas de statut, pas de vote, pas d'élection,
01:48 juste une secte gérée par un couple omnipotent, comme les Ténardiers tenaient le bouche de Montfermeil.
01:55 Le mouvement s'est fait à Rakhiri le 7 octobre, avec l'ignominy de Trot,
02:01 le refus de condamner le massacre du Hamas, qualifié de mouvement de résistance.
02:07 Les partenaires, enrôlés dans cette pantalonnade, en ont profité pour filer à l'anglaise, après que tout le monde a désoulé.
02:14 Ils resteront ceux qui ont bradé à un emprunti dictateur les valeurs de la gauche
02:19 qu'ils ont fracturées pour un plat de lentilles électorales.
02:24 Cet échec n'est pas qu'une bonne nouvelle. Le danger s'est déplacé dans une extrême droite
02:29 qui se renforce en proportion du déclin de son rival, porosité qui prouve que ce qui les rapproche
02:34 est infiniment plus fort que ce qui les sépare. Comme Orban est devenu la bite Poutine,
02:40 comme l'extrême gauche italienne vote pour Melanie, le RN fait ses meilleurs scores,
02:44 aussi bien dans les assiettes bastions du PC que dans ceux de la droite.
02:48 Les gauchistes sont bruyants, débraillés et réclament tout tout de suite.
02:53 Les marinistes sont silencieux, cravatés et attendent leur heure.
02:58 Ils savent que face aux insoumis, il suffit de se taire pour paraître intelligent.
03:03 Ils n'ont aucun programme. Ils affichent des convictions absolues,
03:07 mais ils n'ont aucun problème pour en changer si elles ne vous plaisent pas,
03:12 comme sur la sortie de l'euro ou le Frexit.
03:15 Ils affirment que nous dansons sur le pont du Titanic, mais c'est eux l'iceberg.
03:20 Ils ont enforché tous les délires complotistes. Ils ont été anti-vax, VRP de l'hydroxychloroquine.
03:26 Ils font aujourd'hui le sale boulot de chiens de garde de Poutine et ils le font salement,
03:31 ce qui n'est pas étonnant dans ce pays fondé largement par d'anciens collabos.
03:37 Ils dénoncent la corruption, mais leurs parlementaires européens sont mis en examen
03:42 pour avoir détourné des millions d'euros. Ce parti opaque est une sorte de traboule.
03:47 Ses arrières-cours obscurs des immeubles lyonnais à la façade bien propre.
03:52 Les anciens du GUD sont toujours là dans l'ombre.
03:55 Les contre-racistes anonymisés sur les réseaux sociaux aussi.
03:59 Enfin, les deux campagnes présidentielles de Marine Poutine,
04:02 arrivées à son poste comme Kim Jong-un par népotisme,
04:06 ont fourni la preuve de sa parfaite inaptitude à la fonction.
04:09 Et pourtant, le reflux du populisme d'extrême-gauche lui ouvre un boulevard.
04:15 La photo en 2027 d'un Emmanuel Macron raccompagné par elle sur le perron de l'Elysée,
04:21 comme Obama avait cédé sa place à Trump, n'est plus invraisemblable.
04:26 La fonction que vous exercez aujourd'hui, M. le Premier ministre,
04:29 vous a été confiée aussi pour faire obstacle à cet hypothèse lugueux.
04:34 À cela, il y a deux conditions.
04:37 La première est de réussir les douze travaux d'Hercule qui vous attendent.
04:40 Dans un pays taraudé depuis toujours, c'est sa grande faiblesse par le doute,
04:45 la hantise du déclin et le pessimisme.
04:49 Relever le niveau de l'école, guérir le système de santé,
04:52 redonner l'espoir aux agriculteurs, poursuivre la baisse du chômage,
04:56 réindustrialiser le pays, réduire le déficit, construire l'Europe puissance,
05:00 réformer l'État, restaurer l'autorité au sein de la société,
05:03 maîtriser l'immigration, assurer le développement durable à la française.
05:08 Je n'insiste pas, vous-même et tous les orateurs précédents
05:11 avez détaillé ce constat.
05:13 La tâche est immense.
05:16 Je n'ai énuméré que onze travaux.
05:18 Le douzième est capital, mais le moins compris.
05:22 Le chef de l'État a évoqué le réarmement moral, économique, civique.
05:27 Il reste le réarmement au sens propre.
05:30 Nous sommes en guerre.
05:33 C'est une très mauvaise idée européenne d'affirmer chaque jour qu'on ne veut pas la guerre,
05:37 qu'on n'est pas en guerre lorsque vos ennemis le sont.
05:41 L'international des dictateurs ne s'en cache pas.
05:44 Russie, Chine, Iran, Corée du Nord
05:48 proclament qu'ils veulent abattre l'OTAN, l'Europe et l'Occident.
05:52 Et ils font ce qu'ils disent.
05:54 La guerre en Ukraine se voit à cause des tanks et des missiles,
05:58 celles qu'ils nous livrent, cyberattaques, désinformation,
06:02 milliers de comptes sur les réseaux antisociaux pour fausser les élections,
06:06 abrutissement de nos enfants sur TikTok pendant que la Chine protège les siens,
06:10 est tout aussi violente.
06:12 Elle mine nos démocraties de l'intérieur.
06:15 La Russie s'est mise en économie de guerre.
06:18 Notre président parle d'économie de guerre.
06:21 Mais aucun pays d'Europe n'est capable, deux ans après le 24 février,
06:25 de livrer à l'Ukraine ne serait-ce que les munitions promises.
06:29 Si l'Ukraine perd la guerre, c'est l'Europe qui la perd.
06:32 Par peur d'annoncer les mauvaises nouvelles,
06:34 les gouvernements démocratiques ne préparent pas leurs opinions publiques à cette réalité.
06:39 Lorsque j'écoute certains d'entre eux,
06:41 j'ai l'impression d'entendre le toc-toc du parapluie de Daladier sur les pavés de Munich.
06:46 Monsieur le Premier ministre,
06:48 vous serez certes jugé sur vos résultats dans notre pays.
06:51 Mais à l'échelle de l'histoire, votre gouvernement et tous les gouvernements d'Europe
06:55 seront jugés à l'aune de la victoire ou de la défaite des démocraties
06:59 face à l'international reconstitué des dictateurs.
07:03 La deuxième condition pour qu'en 2027, au soir de l'élection présidentielle,
07:08 le visage qui paraît sur nos écrans à 20h ne soit pas celui qui,
07:13 comme ceux de Trump, d'Orban ou de Bolsonaro, nous fassent honte,
07:19 ne dépend pas seulement de vous.
07:21 Il est grand temps que ceux qui se revendiquent du camp de la raison
07:25 comprennent que le temps leur est compté.
07:28 S'ils ne sont pas capables de s'unir face à des extrêmes qui nagent
07:31 comme des poissons dans l'eau, des raisons antisociaux, des fake news et de l'injure,
07:36 il ne faudra pas qu'ils se plaignent d'une défaite qu'ils n'auront su empêcher.
07:40 Il est temps que les raisonnables se rassemblent,
07:43 qu'ils construisent une majorité ou des alliances,
07:46 seule façon de gouverner la France avec succès.
07:50 Ce souhait sera peut-être aujourd'hui considéré avec indifférence ou avec ironie.
07:54 Mais dans quelques mois, lorsque s'affichera le résultat des élections européennes,
07:58 ceux qui, dans la majorité comme dans les oppositions républicaines,
08:01 se complaisent dans des querelles de cours d'école,
08:04 comprendront, je l'espère, que le temps des anathèmes est terminé.
08:08 Le général MacArthur disait que les batailles perdues se résument en deux mots,
08:12 « trop tard ».
08:14 Réfléchissons à cette phrase tant qu'il est encore temps.
08:17 Je vous remercie.
08:19 Merci.

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