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Gabriel Attal a tenu mardi son discours de politique générale. Pour en parler, Etienne Gernelle, directeur du magazine Le Point.
Regardez L'invité d'Yves Calvi du 31 janvier 2024 avec Yves Calvi.

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Transcription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 7h, 9h
00:05 RTL matin 8h21 bonjour Etienne Gernel.
00:09 Bonjour.
00:09 Vous êtes le directeur du magazine Le Point, merci beaucoup de nous rejoindre ce matin au lendemain du discours de politique générale de Gabriel Attal.
00:15 Etienne Gernel, moi je l'ai trouvé bien sage, vous attendiez autre chose ?
00:18 J'ai trouvé pas mal, je trouvais qu'il avait de l'énergie.
00:21 Il fait penser un peu au Macron d'il y a dix ans,
00:25 espèce d'énergie un peu triple, il avait envie d'en découdre, voilà c'est ce qui ressortait d'Attal, il avait envie d'en découdre
00:31 plus que ses prédécesseurs, il y avait une espèce de petite rage
00:33 qui est pas mal. Et puis ça sonnait Macron, ça sonnait Macron, en fait ça sonnait Macron d'il y a dix ans.
00:39 Déverrouillé, je crois qu'il l'a prononcé 40 fois le mot, la lutte contre les rentes,
00:44 la libération de la société française, c'est le Macron d'il y a dix ans, le Macron qui s'est effacé au fur et à mesure du temps et du pouvoir.
00:50 Ça penche à droite ?
00:52 Oui c'est sûr, en tout cas sur l'autorité, si on considère que l'autorité c'est droite, parce que les gens ils ont oublié complètement l'histoire,
00:57 mais il suffit de lire Clémenceau, il y a un manque de culture dans la classe politique française qui est terrifiante.
01:01 Clémenceau il était pour l'ordre, il était socialiste, il disait même à Jaurès, il disait "pardon mais j'ai la prétention d'être socialiste",
01:06 il était quand même pour l'autorité.
01:08 - Le discours le plus réactionnaire depuis un siècle selon Jean-Luc Mélenchon, Gabriel Thatcher pour Fabien Rousset.
01:13 - Il n'a pas lu, pardon, mais il n'a pas lu Clémenceau.
01:15 Et puis d'une certaine façon c'est la victoire posthume de Gérard Collomb, qui lui était pour ça, Gérard Collomb une espèce de socialiste de droite finalement,
01:22 et qui est mort il y a très peu de temps, comme quoi nul n'est prophète de son vivant peut-être,
01:27 mais c'est une vraie victoire idéologique de Gérard Collomb, et qui d'ailleurs me semble-t-il est un rattrapage.
01:33 Il y a quand même un décalage entre le monde politico-médiatique français et la société française sur ces sujets régaliens,
01:38 qui est béant, béant.
01:41 - A quelle France le Premier ministre s'est-il adressé ? A la classe moyenne qui décroche et qui serait tentée notamment par le vote Rassemblement National ?
01:49 On pouvait se poser la question.
01:50 - C'est évidemment la question, dans tous les pays, mais c'est pas le vrai qu'en France d'ailleurs, dans tous les pays occidentaux,
01:55 il y a une montée des droites dites populistes parfois, ou en tout cas un peu dure.
02:00 Pourquoi ? Parce qu'il y a un raidissement, il y a une peur de perdre d'identité.
02:03 Il a prononcé le mot identité à plusieurs reprises, la fierté d'être français que ça, c'était évident.
02:08 Il a insisté sur le régalien, sur l'identité, sur le contrôle de l'avenir, sur la souveraineté, de manière très lourde.
02:18 C'est une forme de rattrapage parce que c'était un gros trou quand même dans la pensée de Macron, depuis le début.
02:23 Il avait des idées sur l'économie, sur l'Europe, de toute évidence, l'Europe qui est sa vraie colonne vertébrale,
02:28 mais il y avait un énorme trou sur les sujets régaliens, finalement il n'en pensait pas grand-chose.
02:31 Là, on sentait la cession de rattrapage.
02:33 - Ah oui d'accord, donc il doit appliquer et aborder des dossiers qui n'ont pas été jusqu'ici, si je vous suis bien.
02:39 Le Premier ministre veut, je cite, "désmicardiser la France", ça veut dire que le gouvernement a enfin décidé d'augmenter les salaires,
02:45 comment vous interprétez ça ?
02:46 - Non, le raisonnement il est plus bizarre que ça.
02:51 - Plus tordu ?
02:51 - Il dit quand même que le SMIC est plus élevé en France qu'ailleurs, ce qui est vrai.
02:54 - Oui.
02:55 - Et du coup ça fait une trappe, ce qu'on appelle une trappe à bas salaire, où finalement on n'est jamais augmenté,
02:59 parce que si on est augmenté ça coûte très très cher à l'employeur, ce qu'il a assez bien décrit.
03:03 Et donc sur le fond ça annonce plutôt un discours de libéralisation, et de ce point de vue là,
03:09 ça ressemble encore au Macron d'avant, au Macron peut-être même de 2006, de l'époque de la commission Attali,
03:15 avec tout son discours sur l'assurance chômage où il dit "il n'y a pas de tabou, le chômage à 7% c'est trop élevé".
03:21 Donc il a inversé par rapport à la logique de Macron, qui encore cet été, la dernière fois qu'on l'a interviewé,
03:26 il se félicitait de la baisse du chômage, il disait "7% c'est bien".
03:29 Attali non, il dit "non c'est pas bien", et c'est vrai que c'est pas bien par rapport à nos voisins européens.
03:33 Donc ça c'est le côté un peu libéral de l'affaire, on va voir ce que ça va donner, on n'est pas sûr.
03:38 - Alors il y a eu dans le discours de politique générale beaucoup de promesses, beaucoup de priorités,
03:41 c'est fait pour ça d'ailleurs, mais au bout du compte on ne sait pas comment il va s'y prendre,
03:45 avec quel argent et puis quel financement surtout ?
03:47 - Alors ça c'est l'énorme béance de son discours, mais c'est invraisemblable.
03:51 Il a fait un discours d'1h20 pendant lequel il a annoncé je ne sais combien de chèques,
03:55 avec des chiffres à chaque fois, y compris les frais vétérinaires, je ne dis pas qu'il ne faut pas le faire,
03:58 mais des chiffres absolument partout, il n'y a qu'un seul domaine dans lequel il n'a donné aucun chiffre,
04:02 ou quasiment aucun, c'est la dette, les finances publiques.
04:05 C'est incroyable, à part un vague 3% de déficit à l'heure de 2027 auquel vous croirez ou pas,
04:11 mais sinon c'est que de l'euphémisation.
04:14 Responsabilité budgétaire, il dit, la croissance va permettre de résoudre les...
04:17 mais c'est évidemment que c'est faux, les économies de structure,
04:20 mais quand vous entendez ça, ça fait pas mal, ça sonne un dolor, tout ça.
04:24 Parce que la réalité c'est que le gros des dépenses publiques c'est les dépenses sociales.
04:28 Donc est-ce qu'il a annoncé qu'il allait faire quelque chose sur les dépenses sociales ? Non !
04:31 Il parle de maîtrise des dépenses, voilà, moi je vais vous en donner un chiffre,
04:34 parce que lui il ne l'a pas donné, 780 milliards de dettes en plus depuis 2017.
04:39 Ça il ne l'a pas donné, Attal, ce chiffre.
04:40 - En revanche, il annonce 2 milliards d'impôts de baisse, je ne sais pas où.
04:44 - Oui, il annonce toutes les dépenses, les baisses d'impôts, avec des chiffres, etc.
04:49 - C'est le retour de l'argent magique alors ?
04:50 - L'argent magique n'est pas vraiment parti.
04:53 Et si vous voulez, je ne sais pas ce que ça va donner Attal, Premier ministre,
04:56 en tout cas il a réussi son entrée comme premier chéquier de France.
04:59 Ça, c'est une vraie réussite, c'est déjà un triomphe.
05:01 - Bon, je vous sens assez remonté sur les questions budgétaires.
05:03 Il n'y a qu'une opposition contre laquelle il s'est en fait largement exprimé,
05:07 le Rassemblement National.
05:08 Ça y est, la campagne des élections européennes est lancée ?
05:10 - Mais c'est une évidence.
05:12 Écoutez, quand vous entendez tout le monde, tout le monde dit "elle va arriver,
05:15 on l'annonce inéluctable ou presque inéluctable".
05:18 Et son discours sur l'autorité, évidemment on sait ça, il a nommé l'ERN
05:22 en tapant sur le Brexit, en disant "le Brexit ça marche pas", ce qui est vrai d'ailleurs.
05:26 Et donc oui, il a désigné l'adversaire, ça c'est absolument certain.
05:30 - Alors, il parlait à la France et aux Français,
05:33 mais absolument rien sur la situation internationale,
05:35 le budget de la défense, notre sécurité, c'est étonnant non, surtout en ce moment ?
05:39 - Il a parlé un peu d'Europe, pas énormément,
05:42 sachant que c'est quand même le thème macroniste numéro un,
05:45 il a à peine évoqué l'Ukraine,
05:47 mais de toute façon l'Ukraine, il y a un nom dit,
05:49 un tabou terrible dans les classes dirigeantes françaises,
05:50 c'est que les Françaises européennes et occidentales,
05:54 c'est qu'on est en train d'accepter une forme de compromis,
05:57 l'idée d'un compromis avec Poutine,
05:58 donc ça aussi c'est des choses dont on parle le moins,
06:01 on a moins de discours guerriers quand on a déjà prévu de faire un compromis.
06:03 - Ce sera ma dernière question, je suis frappé de voir que votre analyse finalement,
06:06 elle consiste aussi à nous dire "ben écoutez, c'est pas compliqué,
06:08 c'est Macron avec 10 ans de moins", enfin Macron il y a 10 ans.
06:11 - Oui, oui, oui, il y a... - Le Gabriel Attal d'aujourd'hui.
06:13 - Oui, l'autorité en plus,
06:15 l'autorité en plus et encore plus de chèques que Macron qui a 10 ans, oui.
06:18 Merci beaucoup Etienne Gernel.
06:20 Merci à tous !

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