Colère des agriculteurs : "Le monde paysan a le sentiment qu'il est en voie de disparition"

  • il y a 8 mois
Malgré les annonces du Premier ministre Gabriel Attal en leur faveur, les agriculteurs poursuivent leur mobilisation à travers la France. La FNSEA et les Jeunes agriculteurs appellent à un siège de Paris à partir de lundi 29 janvier. Pour en parler, le sociologue Jean Viard, directeur de recherche associé au Cevipof-CNRS, et le réalisateur Gilles Perret, auteur du documentaire “La Ferme des Bertrand” qui sortira en salles ce 31 janvier 2024, étaient les invités du Grand entretien de France Inter, dimanche 28 janvier.

Retrouvez tous les entretiens de 8h20 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-du-week-end

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Transcript
00:00 Un grand entretien ce matin aux racines de la crise agricole.
00:04 La FNSEA et les jeunes agriculteurs, vous l'entendiez dans le journal, appellent à
00:08 un siège de Paris pour une durée indéterminée à partir de demain 14h.
00:13 Et deux invités ce dimanche dans le studio d'Inter.
00:15 Avec Marion Lourds, nous recevons l'un de nos grands sociologues, auteur de plusieurs
00:20 livres de référence sur la campagne, sur le monde paysan et notamment le Sacre de la
00:24 Terre aux éditions de l'Aube.
00:26 L'autre est réalisateur, il raconte et c'est passionnant, les 50 ans d'une ferme, la ferme
00:31 des Bertrands, un documentaire qui sort en salle mercredi.
00:35 Intervenez, chers auditeurs, faites-nous part de votre expérience, de vos interrogations,
00:40 de votre regard sur cette crise agricole et sur le monde paysan.
00:45 Le 01 45 24 7000 vous attend ou sur l'application Radio France.
00:51 Jean-Viar et Gilles Perret, bonjour.
00:53 Bonjour.
00:54 Et bienvenue.
00:55 Vous voulions croiser vos regards, il y a 25 ans, Jean-Viar, vous publiez l'archipel
00:59 paysan, la fin de la République agricole.
01:01 Le titre était peut-être prémonitoire, on va en parler en tout cas.
01:04 Gilles Perret, vous, vous avez passé 25 ans à filmer et revenir filmer une petite ferme
01:11 nichée au cœur d'un petit village en Haute-Savoie.
01:13 C'est la ferme des Bertrands, c'est une histoire et un cas d'école des crises que
01:19 traverse l'agriculture depuis maintenant longtemps.
01:22 On va reprendre le fil de ce qui vous réunit, Jean-Viar, vous avez vu le film de Gilles
01:28 Perret, mais de quoi cette crise agricole est-elle le symptôme, Jean-Viar ?
01:33 D'un grand malheur, on pourrait le dire comme ça.
01:35 Si vous voulez, le monde paysan a le sentiment qu'il en voit de disparition.
01:40 On va le dire comme ça.
01:41 Il y avait 25% des Français liés à la terre en 45, il reste 388 000 fermes et il n'y
01:45 a pas d'avenir dessiné clairement.
01:46 Est-ce qu'on est pour la souveraineté européenne ? Ce n'est pas clair parce qu'on ouvre les
01:49 frontières de l'Ukraine, on ouvre les frontières du Brésil.
01:51 C'est quoi le projet ? La vraie question c'est que c'est un grand métier du passé.
01:56 On dit toujours qu'on descend tous des paysans.
01:57 Un grand métier du passé ?
01:58 Oui, un grand métier.
01:59 Mais c'est aussi un grand métier de l'avenir.
02:00 C'est ça le jeu, si vous voulez.
02:02 C'est-à-dire qu'en gros, on entre dans une société avec la guerre climatique du vivant.
02:06 C'est vrai pour l'industrie aussi.
02:08 Le vivant est au cœur de la société de demain.
02:11 Or, les grands spécialistes du vivant sont les agriculteurs.
02:13 Je ne dis pas qu'ils font toujours tout bien, ce n'est pas ça la question.
02:15 Mais ils savent des choses énormes qu'on ne sait pas dans les bureaux.
02:18 Et c'est ça, il y a un décalage.
02:20 Quand vous voyez les normes, quand vous voyez le nombre de fonctionnaires du ministère
02:22 de l'Agriculture, 18 000.
02:24 En Allemagne, il y en a 1000.
02:26 Donc ça pose des tas de questions.
02:27 Est-ce qu'on considère que ces gens peuvent porter la lutte avec l'idée qu'au fond,
02:32 il y a un affrontement entre la liberté et la norme ?
02:34 Est-ce qu'on considère que la liberté, après contrôle et derrière, je n'y parle,
02:39 la liberté dans l'industrie comme dans l'agriculture est un cheval de transformation ?
02:42 Ou est-ce qu'on considère qu'il faut mettre des normes partout, des fois que le mec aura
02:45 oublié de penser ?
02:46 Je crois que je schématiserais comme ça.
02:47 Gilles Perret ?
02:48 Oui, c'est sûr qu'il y a un grand malaise.
02:50 On ne peut pas dire que ça aille bien dans l'agriculture quand il y a quasiment un suicide
02:53 d'agriculteur par jour.
02:54 Par contre, c'est vrai que l'histoire que je raconte dans ce film, qui est une histoire
02:57 sur le tendon, c'est plutôt une histoire qui va bien.
02:58 Cinquante ans de la vie d'une ferme, la ferme des Bertrands, qui élève des vaches dans
03:05 les Alpes.
03:06 Dans la zone Roblechon.
03:07 Dans la zone Roblechon.
03:08 Et c'est donc une grande ferme au milieu d'un village.
03:11 Ça commence avec trois frères qui habitent tous dans la même maison.
03:14 Donc on a un regard très précis, très détaillé sur une ferme.
03:18 Oui, mais après, ce sont mes voisins.
03:20 Puisque moi, je suis né, j'ai grandi et j'habite toujours là-bas.
03:22 Donc c'est une ferme.
03:23 Mais moi, je suis persuadé qu'en racontant l'histoire de son voisin, on est capable de
03:26 raconter l'histoire du monde puisqu'ils sont le fruit de leur histoire familiale.
03:30 Ils sont le fruit de leur histoire sociale.
03:31 Alors nous, c'est une histoire qui va plutôt bien.
03:33 Contrairement, c'est un peu un rayon de soleil par rapport à ce qui se raconte aujourd'hui
03:36 parce qu'on est dans la zone d'appellation Roblechon.
03:38 Et contrairement à ce que dit Jean Vierre, pas contrairement, mais en tout cas, il y a
03:42 un peu de la question de normes.
03:43 Je crois que nous, justement, dans la zone Roblechon, c'est parce qu'il y a beaucoup
03:46 de règles, parce qu'on a fait du protectionnisme sur une zone géographique particulière.
03:50 On a défini une zone sur laquelle le lait ne serait pas mis en concurrence avec le lait
03:54 de Plaine ou le lait de Pologne ou d'Allemagne.
03:56 Et le lait est payé deux fois plus cher aux agriculteurs.
03:59 Donc on a mis des règles de production qui préservent à la fois l'environnement, qui
04:02 préservent le paysage.
04:04 Et grâce à ça, les agriculteurs arrivent à travailler et vivre dignement de leur
04:08 salaire, ce qui serait un souhait pour l'ensemble de la profession.
04:11 C'est intéressant ce que dit Gilles Perret, Jean Vierre, parce qu'en fait, il y a tellement
04:14 d'agriculteurs différents entre des éleveurs laitiers, alors qu'ils ont souvent des revenus
04:17 aussi inférieurs aux éleveurs de grandes cultures, aux cultivateurs de grandes cultures,
04:22 les céréaliers par exemple.
04:23 Est-ce que finalement, il y a une colère paysanne ou plusieurs colères à laquelle
04:27 il faut répondre de façon différenciée aussi ?
04:29 Il y a les deux.
04:30 Parce que c'est un monde très solidaire.
04:31 En réalité, ils ne sont pas tous aussi riches.
04:33 Il y en a qui gagnent bien leur vie.
04:35 Il y en a qui sont quasiment misérables.
04:36 Il y en a qui travaillent tout le temps avec des animaux.
04:39 Il y en a l'hiver, moi j'habite dans une zone de raisin, de vignes, de vin.
04:43 L'hiver c'est cool parce qu'il n'y a pas grand-chose à faire, etc.
04:45 Donc c'est des métiers très différents.
04:47 Mais ils appartiennent à un groupe social, à un groupe culturel.
04:49 Bertrand Hervieux dit…
04:50 Vraiment, quoi de commun entre un grand céréalier de la Beauce et celui qui a une petite ferme
04:56 et le groupe ferme ?
04:57 C'est ce que dit très bien Bertrand Hervieux.
04:58 C'était au fond un groupe majoritaire qui est devenu minoritaire.
05:00 Mais culturellement, il reste les paysans.
05:03 Mais la réponse n'est pas unique du coup, je pense aux mesures proposées par le gouvernement.
05:06 Non, il y a deux réponses.
05:07 L'agriculture est le grand métier de l'avenir, un des grands métiers de l'avenir, parce
05:10 qu'elle travaille sur le vivant.
05:11 Et donc il y a des savoir-faire qu'il faut articuler avec la révolution climatique.
05:15 Et actuellement, avec en plus les Covid et l'Ukraine, il aurait fallu donner du temps.
05:21 Parce que ce qui a été pensé avant le Covid, dans des sociétés totalement bousculées,
05:25 le marché mondial est bousculé, tout ça, on applique des règles qui ont été pensées
05:27 avant le Covid.
05:28 Donc ça, ça pose un vrai problème et du coup on a un sentiment d'étranglement.
05:31 Ça, il ne faut pas s'en cacher, je veux dire.
05:33 L'Europe ne sait pas suivre ces délais.
05:34 Et surtout, on n'a pas défini ce que je dis, la souveraineté alimentaire.
05:37 Après, c'est différent.
05:38 Moi, je pense que la question de l'élevage, soit c'est vraiment des passionnés familiaux
05:41 comme le film, soit honnêtement, de nos jours, 80% des femmes ne sont plus agricultrices
05:47 dans les fermes.
05:48 Parce que l'élevage, c'est tous les jours.
05:52 Si on est tout le temps là, il n'y a pas de week-end, l'élevage, ça peut être la
05:55 nuit.
05:56 Et donc si on est plusieurs, on se relaye.
05:58 Mais sinon, on ne s'arrête jamais.
05:59 Mais ce n'est pas vrai partout, ce n'est pas forcément vrai dans la vigne.
06:02 Et puis il y a une chose qu'il faut dire, les Français ne consomment plus pareil.
06:04 L'année dernière, on a bu plus de bière que de vin.
06:07 Et dans le vin, on a bu plus de rosé que de rouge.
06:09 Résultat, regardez ce qui se passe dans le bordelais.
06:11 C'est-à-dire que le monde change à toute vitesse, y compris nos habitudes de consommation,
06:15 nos problèmes de santé, on boit moins d'alcool.
06:17 Il y a que 8% des Français qui boivent de l'alcool tous les jours.
06:20 Forcément, ça pose un problème, vous voyez, pour ne prendre que ces exemples-là.
06:23 Et Gilles Perret, c'est vrai qu'on parle de la crise agricole aujourd'hui, on voit
06:27 la colère, les blocages, etc.
06:29 Et pourtant, dans votre documentaire, il y a des archives, alors qu'elles n'ont pas
06:31 été tournées par vous, d'un film qui date d'il y a 50 ans déjà, sur cette même
06:35 ferme des Bertrands.
06:36 Et les trois frères célibataires, tous les trois, qui se plaignent déjà de conditions,
06:40 je ne les cite pas chouettes, ils disent « on travaille beaucoup trop par rapport à d'autres ».
06:43 Ça ne date pas d'hier en fait ce malaise ?
06:45 Non, non, c'est sûr.
06:46 Et puis cette génération-là d'agriculteurs qui témoignent aussi dans mon premier film
06:49 de 1997, ça a été une grosse vie de travail.
06:51 Quand vous avez commencé à…
06:52 Quand j'ai commencé à filmer, voilà, c'est en 1996.
06:55 C'est une grosse vie de travail où ils se sont rincés physiquement et ils ont sacrifié
06:58 leur vie personnelle puisqu'ils sont…
06:59 On voit André, le plus ancien, qui est quasiment plié en deux aujourd'hui.
07:02 Oui, oui, quelqu'un à constat terrible, où il dit « c'est un succès sur le plan
07:05 économique, mais c'est un échec sur le plan humain ». Mais on bascule petit à
07:08 petit dans une génération qui aujourd'hui a choisi, ils sont fiers de ce qu'ils font
07:11 et en plus, ils arrivent à en vivre correctement.
07:13 Alors il ne s'agit pas de généraliser ça sur l'ensemble du territoire, mais c'est
07:17 vrai qu'on est quand même dans une communauté agricole qui est quand même assez solidaire.
07:20 Même si ça va bien, ils sont quand même solidaires de ce qui se passe en ce moment
07:24 parce qu'ils voient bien que même les annonces d'hier, c'est un peu un pansement sur une
07:28 jambe de bois pour gagner un petit peu de temps.
07:29 Mais les problèmes de fond quant à la régulation du commerce et tout, ce n'est pas résolu.
07:33 Et puis il y a la relève, il y a la transmission, c'est un monde où les vaches ont encore
07:38 un nom, il y a jujote, il y a fantaisie…
07:41 De quoi est-ce que le tracteur est un symbole, Jean Viard ? Je vais vous faire travailler
07:46 un peu, monsieur le professeur en sociologie.
07:48 Si vous voulez, d'abord une chose sur les manifestations.
07:51 Vous avez vu la taille des tracteurs ? Prenez une manifestation il y a 30 ans, les tracteurs
07:56 étaient beaucoup plus petits.
07:57 Pourquoi ? Parce que les fermes sont beaucoup plus grandes.
07:59 Il y a moitié moins de paysans qu'il y a 30 ans.
08:01 Ils ont des monstres.
08:02 C'est des machines qui…
08:03 Mais c'est pas fait pour les femmes, les tracteurs.
08:04 La distance entre le volant et les pédales…
08:08 Oui, c'est compliqué.
08:09 Non mais ce que je veux dire par là, c'est que ça a changé profondément, c'est très
08:13 technique, ce qui fait aussi que c'est des manifestations, m'excuserai, relativement
08:16 calmes.
08:17 Il y a encore quelques types qui…
08:18 Parce que quand vous sortez votre tracteur à ce prix-là, bon, vous savez pas, c'est
08:21 pas comme un gilet jaune qui sort avec un casque et une paire de gants.
08:24 Donc c'est un rapport complètement différent.
08:25 On a l'impression qu'on n'est pas la même.
08:26 Non, non, c'est pas la même chose.
08:27 Vous savez ce qui est très particulier à l'agriculture ? C'est que vous êtes à
08:30 la fois le capital et le travail.
08:32 Vous êtes propriétaire, c'est des gens qui sont souvent propriétaires.
08:35 Et donc dans les autres métiers, vous n'avez pas acheté votre poste de travail.
08:38 Là, vous achetez votre ferme, ou vous en avez hérité.
08:41 Il faut investir.
08:42 Il faut les deux.
08:43 Il faut les deux.
08:44 Et ça, ça sert aussi à cette question-là du modèle.
08:45 Et puis, il y a que notre société a des codes sociaux qui sont ceux du temps libre,
08:49 ceux de la trucidité, on va dire des 35 heures, des vacances, de la retraite.
08:52 Et bien ça, dans les fermes, ce modèle-là, il arrive à peine.
08:55 Et donc forcément, ils se sentent exclus de la vie de tout le monde.
08:59 Alors cette exclusion, elle a des conséquences.
09:02 Elle a des conséquences sur la manière dont on perçoit son métier.
09:05 Il y a une question qui revient régulièrement dans votre documentaire, Gilles Perret, dans
09:09 cette famille, dans la ferme des Bertrands.
09:12 Cette question, on va l'écouter.
09:14 « Ma conviction, moi, c'est qu'il n'y avait pas de solution autre que suivre l'évolution
09:20 technique ou abandonner la profession, ou se sauver.
09:22 Ce que la plupart des jeunes de notre âge ont fait.
09:27 On peut presque dire, affirmer maintenant, puisqu'on arrive au bout de notre vie professionnelle,
09:33 que c'est eux qui ont eu raison.
09:34 C'est ceux qui sont partis qui ont eu raison.
09:36 Parce qu'ils ont eu une vie beaucoup moins pénible que la nôtre.
09:39 »
09:40 « Ils ont eu raison, c'est l'un des frères qui dit ça, c'est extrêmement
09:44 brutal et pourtant, est-ce que ça dit tout de la situation actuelle, Gilles Perret ? »
09:48 « Non, ça ne dit pas tout.
09:50 En tout cas, sur cette génération-là, oui, c'était la période de l'exode rural,
09:54 cette génération d'agriculteurs.
09:56 Aujourd'hui, on a Alex qui est rentré dans la ferme et qui lui, travaillait en tant
10:00 que salarié.
10:01 Il dit que c'est presque plus facile aujourd'hui que je suis agriculteur, plutôt qu'avant
10:04 quand j'étais salarié, où le temps était compté, la pression était là, même les
10:08 efforts physiques.
10:09 Et donc, du coup, lui, il est content de son choix aussi d'être revenu dans l'agriculture.
10:13 Donc, c'est aussi dans ce film-là, des histoires humaines qui se passent plutôt pas trop mal.
10:17 »
10:18 « C'est ceux qui sont partis qui ont raison.
10:19 Comment comprenez-vous cette phrase, Jean-Pierre ? »
10:20 « C'est compliqué parce que ceux qui sont partis souvent se sentent coupables.
10:24 Ils ont lâché la terre familiale.
10:25 Ils n'ont pas été fidèles à l'héritage.
10:28 Donc, ce n'est pas simple comme histoire, si vous voulez.
10:30 Mais moi, je voudrais dire une chose, si vous voulez.
10:32 On a fait une agriculture moderne avec le gaullisme, qui nous a permis notre indépendance alimentaire.
10:37 Et de Gaulle, il avait deux bases après l'indépendance de l'Algérie, le nucléaire et l'indépendance
10:42 alimentaire.
10:43 On n'avait jamais été indépendant alimentaire, on se tenait aussi sur les colonies.
10:45 Et donc, on a mis la chimie en avant et la technique.
10:48 Les tracteurs dont vous parliez.
10:49 Et ils ont fait le boulot, les paysans.
10:51 Et aujourd'hui, ce n'est plus ça, le deal.
10:53 Sauf qu'il n'y a pas de deal.
10:54 Le nouveau deal, c'est un grand deal sur le vivant, qui doit effectivement dire que
10:57 l'agriculture, c'est le cœur du vivant.
10:59 Parce que l'agriculture, ça nous nourrit, ça nous habille, ça capte du carbone, ça
11:05 défend des paysages.
11:06 Donc c'est un acteur central du monde de demain.
11:08 Mais cette agriculture, or il n'y a pas eu, je dirais, il n'y a pas le Pizani du Gaullisme.
11:12 Il nous manque cette grande pensée au niveau européen et au niveau français.
11:16 Nathalie : Pizani, l'économiste qui avait fait ce rapport sur la transition énergétique.
11:19 On le rappelle.
11:20 Gilles Perret.
11:21 Non, non, non, son père.
11:22 Edgard Pizani, qui était le grand ministre de l'agriculture de Gaulle en 62.
11:25 Nathalie J'avais pas cédé votre référence, excusez-moi.
11:27 Mais c'est bien de l'expliciter en tout cas.
11:30 Gilles Perret, pour parler de l'actualité chaude, brûlante, qui n'est pas en l'occurrence
11:34 dans votre documentaire, mais ce sont vos voisins, les Bertrands.
11:38 Est-ce que vous avez discuté avec eux de ces annonces, de ce contexte général, de
11:42 ces annonces de Gabriel Attal et de comment ils les ont reçues ?
11:45 Oui, évidemment qu'ils se tiennent au courant, même si en ce moment ils sont en train d'installer
11:50 de la nouvelle technologie dans la ferme.
11:52 Parce qu'on n'est pas dans le fascisme.
11:53 Mais ils font pas de blocage ?
11:54 Là, ils n'ont vraiment pas le temps.
11:55 Et par contre, ils sont solidaires par rapport au mouvement.
11:57 Et puis extrêmement, enfin pas dupe, des effets d'annonce de ce gouvernement-là.
12:03 Et surtout, eux, ce qui les inquiète beaucoup, c'est de ne pas remettre en cause ces accords
12:08 de libre-échange qui sont signés.
12:09 On ne peut pas, je crois, d'un côté faire les marioles au salon de l'agriculture à
12:14 la gloire des AOP, qui sont des mesures très régulées.
12:17 Les Appellations d'Origine Protégée.
12:18 Oui.
12:19 Et puis d'un autre côté, le lendemain, les signés des accords avec la Nouvelle-Zélande
12:22 de libre-échange ou avec le Mercosur.
12:24 Et ça, eux, ils ont besoin de protection.
12:27 Ils ont besoin d'être assurés.
12:28 Le malaise dans l'agriculture, c'est ça.
12:30 L'angoisse du lendemain.
12:32 Et puis aussi, ils ont besoin, je crois, de dignité.
12:34 On ne met pas des gens dehors comme ça, s'il n'y a pas un problème de dignité et de reconnaissance.
12:38 Et donc, eux, ils ont besoin aussi de cette reconnaissance-là.
12:40 Ils ne sont pas que des pollueurs.
12:41 Il y a autre chose.
12:43 Avant de fier au standard, justement, la question de l'agrobashing, elle est extrêmement présente
12:48 dans les pancartes, dans les slogans des manifestants.
12:53 Non mais bien sûr.
12:54 Parce qu'ils le vivent extrêmement mal.
12:56 En ce moment, il y a 1 200 procès contre des agriculteurs pour des problèmes d'odeur
12:59 ou de bruit.
13:00 Pourquoi ? Parce que les Français habitent de plus en plus en dehors des villes.
13:03 Donc, à côté de chaque ferme, il y a de plus en plus des gens qui ont mis des maisons,
13:07 qui ont acheté, etc.
13:08 Donc, ce voisinage, il n'existait pas.
13:10 Donc, ça, c'est une chose fondamentale.
13:11 Et puis, c'est vrai que la culture urbaine est portée par les valeurs écologiques.
13:15 Mais les paysans, plus qu'on le croit.
13:16 Parce que le début du mouvement s'est fait dans une région où il y a beaucoup de bio.
13:19 Faites pas être dans la caricature.
13:21 Mais moi, je voudrais dire une chose.
13:22 On ne peut pas avoir un marché qui n'est pas régulé par les mêmes règles et par
13:25 les mêmes droits sociaux.
13:26 Alors, le marché européen, d'abord, il y a des trous, comme vous l'avez dit.
13:29 Ça, c'est pas possible.
13:30 Et en plus, c'est pas les mêmes règles.
13:32 Ça n'existe pas un marché.
13:33 En France, il y a plus de règles qu'il y a en Allemagne.
13:35 Mais après, les produits se mélangent.
13:36 Regardez le problème de la cerise.
13:37 Effectivement, chez moi, c'est une région de cerise.
13:39 On les traite en Espagne, pas comme en France.
13:41 Du coup, on va manger les cerises espagnoles traitées et les nôtres, on ne les cueille plus.
13:44 À un moment, on est dans l'absurdité et on est dans un monde de bureaucratie.
13:48 Je m'excuse, mais l'histoire des "et".
13:49 Le problème, il y en a 14, j'en mets que une.
13:52 Comment on a pu être abrutis au point d'avoir des gens dans des tas de bureaux qui produisent
13:57 des normes ?
13:58 Moi, le ministère de la Culture, je prendrais 10 000 fonctionnaires et je leur donnerais
14:01 des questions nationales.
14:02 On manque de profs.
14:03 Là, il y en a la moitié.
14:04 On pourrait déjà boucher le trou de cette prof qu'il nous manque.
14:05 À un moment, il faut bousculer cette culture de la bureaucratie.
14:08 Et on construit des paysages de bocage, par exemple, justement, puisque vous parliez
14:13 des origines de la crise janvière.
14:15 Bonjour Sylvie.
14:16 Bonjour.
14:17 Bienvenue sur France Inter.
14:19 Merci.
14:20 Vous aviez une question ou une intervention pour nos invités ?
14:24 Oui.
14:25 Moi, je suis assez directe.
14:26 Je dirais que chaque citoyen français est responsable de la crise actuelle des agriculteurs.
14:32 Je pense que si chacun allait sur les marchés, chacun achetait directement un producteur,
14:41 le producteur vivrait mieux.
14:43 Il n'aurait pas tant d'intermédiaires et puis il n'aurait pas la pression des grands
14:47 groupes qui leur payent le lait une misère.
14:50 Ils n'ont même pas de quoi vivre avec.
14:52 Et vous, Sylvie, vous avez changé votre manière de faire vos courses et de consommer.
14:56 Voilà.
14:57 Il y a une dizaine d'années, pour des raisons personnelles et parce que j'achetais de moins
15:02 en moins de choses en grande surface, j'ai commencé… J'ai la chance d'être dans
15:06 un petit village où il y a un beau marché.
15:08 Donc, je pars un peu plus tôt le matin avant d'aller au travail et je fais mon marché.
15:14 Merci.
15:15 Et je vis d'un producteur à l'autre.
15:16 Et voilà.
15:17 Merci Sylvie pour votre témoignage.
15:18 Gilles Perret.
15:19 Oui, moi je suis conscient du pouvoir du consommateur, mais malheureusement, je ne crois pas que ça
15:23 suffira parce que le consommateur, il consomme toujours de la manière dont il est contraint
15:27 de se comporter et selon ses moyens.
15:29 Donc, je suis toujours favorable au pouvoir du consommateur, mais je crois plus à la
15:36 loi, à la règle qui permettra à tout le monde de consommer des produits corrects parce
15:40 que pas tout le monde a les moyens malheureux.
15:42 Le citoyen consommateur est responsable, comme le disait Sylvie Janviar ?
15:45 La hausse des prix de l'alimentation depuis quelques années est une bonne nouvelle.
15:50 Je veux dire, il faut arrêter de dire que c'est une mauvaise nouvelle.
15:52 La question, elle est, est-ce qu'on donne une aide alimentaire pour les milieux les
15:55 plus modestes ?
15:56 Ça, c'est vrai.
15:57 Mais la hausse des prix alimentaires qui est à peu près 18 à 20% est une bonne nouvelle,
16:01 même si la répartition de la valeur entre l'agriculteur, l'entreprise, etc. est assez
16:05 catastrophique.
16:06 Et c'est pour ça que je veux dire une chose, l'agriculture n'est pas un problème de paysan,
16:10 c'est le problème de la société, de son rapport à sa nourriture, à son territoire,
16:13 à ses valeurs.
16:14 Le paysan est un acteur.
16:15 Mais quand il y a une crise dans l'automobile, on ne dit pas que c'est la question des ouvriers,
16:18 on dit que c'est la question de l'automobile.
16:20 La société doit repenser son agriculture.
16:22 On a tous un intérêt dans l'agriculture.
16:24 Les paysans bien sûr, puisqu'ils y travaillent, ils en vivent.
16:26 Mais tout le monde, parce qu'on mange tous, on se promène tous, on aime tous nos territoires.
16:30 C'est un problème de société.
16:31 Il faut le traiter à ce niveau-là.
16:32 Et pas simplement dans un face-à-face paysan, paysan administratif ou écolo-paysan.
16:38 Non.
16:39 À propos de face-à-face, Janviar, aujourd'hui, les agriculteurs, ils parlent de bloquer Paris
16:42 à partir de demain, si on regarde la sociologie, l'histoire, ça peut aller jusqu'où ?
16:48 Et est-ce que vous comprenez la mensuétude des forces de l'ordre à l'égard de ce
16:51 genre de mouvement qui peut parfois être violent ?
16:53 On a vu la MSA qui a été brûlée par exemple.
16:56 Il ne faut pas mélanger les quelques extrémistes qui ont brûlé des choses, ce qui est vrai.
17:00 Les paysans, ils ne manifestent pas très loin de chez eux.
17:02 Vous savez qu'en devenant tracteur, vous n'êtes pas 600 kilomètres.
17:04 Donc en gros, vous habitez autour de chez vous avec un objet qui vaut extrêmement cher
17:08 et ils manifestent peu de temps de manière relativement violente parce qu'ils ne peuvent
17:11 pas laisser leur ferme, je veux dire, les vêtements sont là, etc.
17:13 Donc c'est toujours brutal, des coups de poing, etc.
17:16 Donc c'est vrai qu'il y a cette forme de tolérance et en plus, ils ne cassent rien.
17:19 Ils bloquent, ils gênent, je ne dis pas que ce n'est pas le contraire.
17:22 Il faut faire très attention avec certains mouvements écolo qui ne cassent pas tout,
17:25 il y en a plein qui ne cassent pas.
17:26 Donc voilà, je crois qu'il faut insister là-dessus.
17:29 Après, il y a une limite.
17:30 Le blocage de Paris ne va pas durer sans fin.
17:32 Après, on a un peu l'impression…
17:34 On parle de siège.
17:35 Voilà, oui, mais ça a commencé en Occitanie.
17:37 Et maintenant, c'est effectivement les éleveurs de blé du bassin parisien.
17:40 Bon, excusez-moi, ce ne sont quand même pas tout à fait les mêmes problèmes économiques.
17:43 Alors justement, énormément de questions et d'interventions sur l'application Radio
17:47 France.
17:48 Les agriculteurs, vous dites Didier, les agriculteurs d'aujourd'hui ne se rendent pas compte
17:52 qu'ils ont participé à la fin des petites fermes.
17:54 Il y a quelqu'un qui vous interpelle, Jean Viard, pour admettre que le malaise agricole,
18:01 c'est l'asservissement des hommes par les grands groupes, la spoliation des terres.
18:06 Et puis, il y a ceux qui témoignent aussi de ce qu'est la réalité de la vie paysanne.
18:11 Gilles Perret, que vous avez donc filmé pendant 25 ans, 42 ans de cotisation, nous dit Philippe,
18:17 900 euros de retraite.
18:19 Pas un jeune ne veut s'engager pour reprendre l'exploitation.
18:22 Là, on est quand même au cœur du cœur du problème.
18:25 Et pour reprendre ce que disait Jean Viard au tout début de notre entretien, bon, c'est
18:30 une situation de malheur et on regarde le passé.
18:33 Oui, bien sûr.
18:34 Alors, en fait, ce n'est pas 25 ans, c'est 50 ans de notre histoire du film.
18:38 Moi, je reste à ma place de cinéaste.
18:39 On a quand même un film où on rit, où on pleure, où on s'énerve.
18:45 Voilà, ça reste du cinéma, etc.
18:47 Mais oui, il y a des drames.
18:49 Par exemple, il y a plein de jeunes qui veulent quand même rentrer dans l'agriculture.
18:53 C'est un métier passionnant dans lequel il y a un nombre de connaissances énormes.
18:57 Là, je discutais tout à l'heure avec Marc Bertrand au téléphone, qui est à ma l'œuvre
19:03 aujourd'hui, qui me disait, par exemple, il n'y a aucune aide pour l'installation
19:08 des jeunes agriculteurs.
19:09 Et la formation, justement.
19:11 Christophe vous demande pourquoi il n'y a pas de formation plus précise et spécifique.
19:15 Moi, je suis perçu, dès que je vois les enjeux qui s'annoncent sur nourrir l'humanité,
19:20 il y a vraiment un intérêt à installer des jeunes et puis faire en sorte que les gens
19:24 puissent vivre dignement sur des territoires de leur travail.
19:27 Et ce n'est pas par des fermes des milevages, des choses comme ça.
19:29 Il y a bien un moment donné dans notre société où il faudra que tout le monde vive dignement
19:33 de son travail.
19:34 Et Hélène, qui est la mère, elle a l'air dans le film de penser que la mécanisation
19:38 est une réponse.
19:39 Elle dit que ça va leur faciliter la vie.
19:41 Oui, mais ça, effectivement, là dans le film, ce n'est pas un film misérabiliste.
19:46 On est dans l'agriculture d'aujourd'hui.
19:49 Et là, ils ont des codes-barres qui disent combien on doit leur donner à manger.
19:53 Oui, mais en même temps, ce n'est pas incompatible avec le respect de l'environnement.
19:56 C'est ça qui casse un peu l'image qu'on a.
19:57 Parce qu'en fait, on a une famille qui est très respectueuse du territoire, de ce qu'on
20:01 va transmettre, qui sont très modernes, très modernisées.
20:03 Et on se rend compte que cette modernisation répond quand même au cahier des charges Roblochon
20:08 qui lui-même préserve le territoire et préserve l'environnement.
20:11 Donc, ce film, il bouscule un petit peu des fois les idées reçues.
20:14 J'en reviens.
20:15 Non, mais c'est une zone du Roblochon intéressante.
20:17 On a la même chose dans le comté autour de Besançon, par exemple.
20:19 Ils ont entièrement intégré le blé, le moulin, l'ensemble du système.
20:23 Moi, j'ai ouvert leur Assemblée Générale.
20:24 C'était passionnant parce qu'il y avait tous les métiers.
20:26 On voyait un territoire qui avait…
20:28 Après, je suis allé dans le Minster, dans les Vosges.
20:30 Ce n'était pas possible parce que le Minster, déplacé en avion, c'est triste.
20:33 J'adore le Minster, mais ça sent quand même très fort.
20:35 Donc, on ne peut pas faire partout la même chose.
20:36 On a fait ça beaucoup avec les AOC sur le vin.
20:38 Regardez le rosé de Provence.
20:39 Maintenant, il se vend très bien.
20:40 Il ne se vendait pas bien il y a longtemps, etc.
20:42 Mais ça ne peut pas être une solution unique.
20:44 Ça vous l'avez dit.
20:45 Dans les écoles d'agriculture, il y a surtout des jeunes filles.
20:47 Il y a une grosse demande de dames.
20:49 Et oui, y compris parce que dans leur tête, ça va être aussi bien élevage de chiens,
20:53 élevage de chevaux, agriculture périurbaine, etc.
20:55 Ou agriculture urbaine.
20:57 Donc, il y a cette petite agriculture qui n'est pas forcée.
20:59 On peut en vivre.
21:00 Les gens qui ont 25 chèvres, ils en vivent.
21:02 Ce n'est pas des grosses exploitations.
21:04 Vous voyez, c'est pour ça qu'il ne faut pas être caricaturo.
21:06 Donc, il y a des entrants.
21:07 Moi, je vais vous dire une chose.
21:08 Et puis, il y a un problème de foncier.
21:09 Un des problèmes, c'est le foncier.
21:10 Ça, c'est effectivement une vraie question.
21:13 Il y a dans les successions…
21:14 On va dire, le prix moyen d'une ferme aujourd'hui, c'est 1 million.
21:17 C'était 500 000 euros il y a 30 ans.
21:18 J'ai vu ça dans je ne sais plus quelle journée.
21:20 Disons, prix moyen, ça ne veut rien dire, mais ça nous donne un ordre de grandeur.
21:22 Mais pour avoir une ferme de quelle nature ?
21:24 Non, mais c'est le prix moyen.
21:25 Si on met à l'entreprise, il y en a qui vont être à 5 millions, 3 millions.
21:28 Et d'autres à 50 000.
21:30 Mais en gros, c'est 1 million.
21:31 Ça a doublé en 30 ans.
21:33 Ça veut dire comment les successions, comment vous gérez si vous avez plusieurs enfants.
21:36 Celui qui reprend, comment on fait ?
21:37 On ne fait pas, on vend.
21:38 Comment on fait effectivement si on rentre dans le métier ?
21:41 C'est-à-dire, on n'a pas de terre, on a la compétence.
21:43 Mettons qu'on ait la compétence.
21:44 Ça pose une question.
21:45 Est-ce qu'une partie du foncier ne va pas devoir devenir publique ?
21:48 Je pense que c'est un vrai souci.
21:49 Moi, je pense que les régions devraient reprendre des fermes enviagées quand il n'y a pas
21:53 de succession, plutôt que d'être que dans l'agrandissement.
21:56 À un moment, pour installer des jeunes, pour faire des pépinières agricoles, il y en
21:59 a qui marchent très bien.
22:00 Il faut installer les jeunes sur 2-3 hectares.
22:02 On les encadre 3-4 ans comme des pépinières ouvrières, industrielles, des start-up.
22:06 Il faut penser start-up agricole.
22:08 Tout à fait, absolument.
22:10 Il faut là-dessus et ils font former les jeunes.
22:12 Et là, il y a des endroits magnifiques.
22:14 La start-up collectiviste par Janvier, c'est la révolution.
22:20 Ça décide un horizon.
22:21 Bonjour Alain, vous nous appelez du Cantal.
22:23 Oui, bonjour Jean-Pierre, bonjour les auditeurs.
22:27 J'ai une question que personne n'a relevée devant toute cette crise.
22:32 J'ai une petite élevage de race locale dans le Cantal en Aouppé, Sénecterre, avec
22:37 un cahier des charges très strict et avec des mesures de travail avec des conditions
22:44 HVE, haute valeur environnementale, que je suis régulièrement.
22:48 Et le début janvier, Malétrie, qui est sous le contrôle de l'actualisme, a annoncé
22:54 qu'on ne passait plus vous collecter parce que vous n'êtes pas assez rentable et trop
22:58 petit.
22:59 Donc, on a été 18 familles être exclues.
23:02 Le cahier des charges de l'Aouppé dit rester parce qu'on a besoin de vous.
23:05 Et de l'autre côté, on nous dit qu'on ne vous collecte pas parce que vous n'êtes
23:09 pas rentable et vous coûtez trop cher.
23:12 Il y a une incohérence énorme.
23:15 Qu'est-ce qu'on doit faire ? J'ai fait passer une huitière.
23:17 Ils n'arrivent pas à vider 650 litres de lait dans les égouts.
23:22 Merci Alain pour votre intervention.
23:24 Gilles Perret.
23:25 Oui, évidemment, c'est un problème.
23:27 C'est pour ça que nous, dans l'Aouppé-Roblochon, ils ont plafonné à 50% maximum qu'ils
23:32 puissent avoir un même producteur.
23:34 Nous, par exemple, l'Actalis est déjà propriétaire de la moitié de la production
23:37 de Roblochon, mais ils ne pourront pas aller plus loin.
23:39 Mais c'est sûr que quand il y a un monopole comme ça, c'est eux qui vont faire un peu
23:43 la pluie et le beau temps.
23:44 Donc, il faut vraiment que les agriculteurs se battent pour maintenir un haut niveau d'exigence
23:48 sur ce qu'ils produisent.
23:49 Et c'est évident qu'un groupe comme l'Actalis, là où il y a de l'argent qui est produit
23:53 et là où il y a de la plus-value, ils vont venir se nicher et faire les coucous dans
23:57 le nid pour prélever des richesses.
23:59 Et ça, ça s'est fait en très peu de temps.
24:01 Heureusement qu'ils sont un peu barrés dans certaines Aouppé.
24:05 C'est la fin de cet entretien.
24:07 Jean Viard, il faut remettre le poireau à l'endroit, comme vous l'aviez dit il y a
24:14 quelques années.
24:15 C'était le titre d'un de vos livres.
24:17 « Non pas cultiver notre jardin, mais remettre le poireau à l'endroit ». Et en tout cas,
24:21 lire « Le Sacre de la Terre ». C'est publié aux éditions de l'Aube.
24:24 Merci infiniment d'avoir été notre invité.
24:25 Et quant à vous, Gilles Perret, il faut citer, et c'est un film important, c'est un film
24:31 qui est absolument passionnant, ce travail formidable qui est abouti à la ferme des Bertrands.
24:38 C'est un grand documentaire, il sort en salle mercredi prochain.

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