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Pascal Fontaine, directeur commercial des pharmacies Lafayette, répond aux questions d'Alexandre Le Mer. Ensemble, ils reviennent sur les propos d'Emmanuel Macron lors de sa grande conférence de presse concernant la franchise médicale. Le chef de l'État s'est dit favorable à l’augmentation du reste à charge sur les médicaments remboursés.
Retrouvez "L'invité éco" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-eco

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Transcription
00:00 - Il est 6h42. - C'est l'une des annonces d'Emmanuel Macron la semaine dernière.
00:03 Le président se dit favorable au doublement des franchises médicales sur les boîtes de médicaments.
00:08 C'est une mesure censée responsabiliser la consommation dans un contexte marqué, y compris par les pénuries de médicaments.
00:14 Une mesure qui fait réagir les pharmaciens.
00:17 - Vous en parlez ce matin avec votre invité sur Europe 1, Alexandre Lemaire.
00:20 C'est Pascal Fontaine, directeur commercial des pharmacies Lafayette.
00:23 - Bonjour Pascal Fontaine. - Bonjour.
00:26 - On rappelle le principe de la franchise médicale, c'est la somme restant pour le patient sur chaque boîte de médicaments,
00:33 quelle que soit sa mutuelle, c'est le somme, elle devrait donc doubler, passer de 50 centimes à 1 euro par boîte.
00:41 Alors vous êtes le premier réseau de pharmacies en France.
00:43 Qu'est-ce que vous pensez de cette mesure d'abord ? Première question, Pascal Fontaine.
00:48 - Cette mesure chez pharmacies Lafayette, on la trouve totalement injuste.
00:52 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, la franchise était de 50 centimes, elle va doubler à 1 euro,
00:57 et elle va avoir un impact sur le pouvoir d'achat des Français,
01:01 puisque l'économie globale attendue est de 800 millions d'euros.
01:05 - 800 millions d'euros sur les plans de la Sécu, ce n'est pas neutre tout de même.
01:09 - Alors ce n'est pas neutre, mais c'est directement supporté par les Français,
01:13 alors que vous et moi, et les Français cotisent déjà à la Sécurité sociale.
01:18 Je pense que la santé doit être sacralisée.
01:20 Et il y a d'autres moyens, beaucoup plus efficaces, pour faire des économies.
01:23 - Mais comme Emmanuel Macron dit, je n'ai pas le sentiment qu'on fasse là un crime terrible.
01:27 Façon de dire que doubler la franchise, c'est doubler certes,
01:30 mais ce n'est jamais que passer de 50 centimes à 1 euro,
01:33 ce qui est censé, dans l'esprit du Président de la République, être relativement indolore.
01:37 - Alors déjà, les pharmaciens font des efforts d'accompagnement, de responsabilité des patients.
01:43 Quand on voit sur l'année entre 2022 et 2023, la consommation des médicaments a déjà baissé de 3%.
01:49 Et quand on parle de 1 euro, ce n'est pas grand-chose.
01:52 On voit, quand on vous écoute, qu'un étudiant a du mal à se nourrir au cruise pour 3 euros.
01:57 Donc aujourd'hui, je pense qu'on est loin des réalités.
02:00 - Oui, on en a parlé récemment sur Europe 1.
02:02 Quant à Emmanuel Macron, il dit que les Français n'hésitent pas à multiplier les abonnements à la maison,
02:07 téléphonie et autres, mais qu'ils rachigneraient à payer 50 centimes de plus pour des médicaments.
02:12 Ça, ça vous fait bondir également, Pascal Fontaine ?
02:15 - Alors ça, ça me fait complètement bondir,
02:17 parce qu'aujourd'hui, comparer la santé avec des loisirs,
02:20 quand je vous dis que la santé doit être sacralisée,
02:23 on voit qu'il y a un renoncement aux soins en France.
02:26 Les Français vont moins vers les généralistes,
02:28 refusent, et en tout cas font des arbitrages,
02:31 et on le voit nous tous les jours chez Pharmacie Lafayette au comptoir,
02:34 des gens qui, pour quelques euros, refusent de prendre un médicament non remboursé.
02:38 - Renoncent à se soigner, donc, oui, ça concerne effectivement surtout les produits non remboursés, hors ordonnance.
02:44 - Exactement, exactement.
02:46 - Et puis, fréquentent beaucoup moins les spécialistes.
02:50 - Alors, en revanche, il a bien précisé que le plafond annuel actuel
02:53 des franchises pour les personnes qui sont touchées par des affections de longue durée,
02:56 qui est de 50 euros par an, lui, ne va pas bouger.
03:00 Ce n'est pas suffisant pour vous rassurer ?
03:02 - Ce n'est pas suffisant pour m'assurer, c'est ce que je vous disais tout à l'heure,
03:04 il y a des mesures beaucoup plus efficaces pour faire des économies sur le budget de la sécurité sociale,
03:09 notamment en autorisant la substitution des biosimilaires,
03:13 qui auraient un impact, et vous parliez de 800 millions tout à l'heure,
03:16 de 3 milliards d'euros d'économies immédiatement sur le budget de la sécurité sociale,
03:19 qui s'est fortement dégradé entre 2019 et 2023,
03:23 on est passé de 3 milliards à 10 milliards de déficit.
03:27 - Alors, vous parlez des patients, c'est bien, Pascal Fontaine, d'être inquiet par vos patients,
03:30 mais si l'on parle, pour vos patients, si l'on parle du chiffre d'affaires de vos pharmacies,
03:35 est-ce que vous pensez que cette mesure va avoir un impact sur votre chiffre d'affaires ?
03:39 - Non, cette mesure n'aura pas d'impact sur notre chiffre d'affaires,
03:45 parce que là, ce dont je vous parle en ce moment,
03:50 c'est vraiment la baisse de consommation des médicaments et du renoncement aux soins.
03:55 Après, on a des nouveaux services et tous les accompagnements
03:58 qui font que les pharmacies Lafayette ne seront pas impactées, en tout cas de façon limitée.
04:02 - La consommation de médicaments, si on la regarde en dehors de l'hospitalisation,
04:06 elle a quand même dépassé 31 milliards d'euros, ça c'est le chiffre de 2021,
04:10 dépense en hausse, financée donc au trois-quarts par la Sécu.
04:13 On peut comprendre aussi que l'État cherche à faire des économies
04:17 en actionnant tous les leviers possibles, Pascal Fontaine.
04:21 - Oui, mais c'est pour ça que je vous dis que quand on voit que l'État tergiverse
04:24 la substitution des biosimilaires et que, comparé aux 800 millions d'euros
04:30 qui vont plomber le pouvoir d'achat des Français,
04:33 3 milliards d'économies sur une mesure où, et si on regarde les biosimilaires,
04:37 ce sont des médicaments qui valent très cher,
04:39 qui, s'ils étaient substitués, l'économie est de 30%
04:43 entre un médicament biosimilaire et son générique,
04:47 et des médicaments à 1000 euros, et bien effectivement, si vous le génériquez,
04:50 c'est 300 euros d'économies directement sur le budget de la Sécurité sociale.
04:54 - Bon, mais lorsqu'on voit que les Français font partie des plus gros consommateurs
04:57 de médicaments en Europe, tout de même, c'est une réalité qu'on peut au moins questionner.
05:02 Mais vous avez tout à fait raison, et ça c'est vraiment aussi
05:04 dû aux politiques publiques de ces dernières années.
05:09 En France, nous avons une politique qui est curative.
05:11 On dit aux Français depuis des années "tu es malade, tu prends un médicament".
05:14 Aujourd'hui, il est largement temps d'engager une politique forte de prévention
05:20 pour que les Français apprennent à anticiper, se soigner, se tester,
05:24 et aujourd'hui on voit bien qu'on se retrouve devant le mur
05:29 avec des arbitrages qui se sont demandés aux Français,
05:31 on leur demandait du jour au lendemain, sans pédagogie,
05:33 de changer totalement de façon de consommer le médicament.
05:38 - On a bien entendu votre message, doubler la franchise médicale,
05:40 ce n'est pas ça qui va responsabiliser les patients,
05:42 ça va plutôt leur faire renoncer à une partie de leurs soins.
05:45 Merci Pascal Fontaine, directeur commercial des pharmacies Lafayette sur Europe 1.

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