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00:00 8h moins le quart, l'invité de l'U6 9 de France Bleu Hérault.
00:02 Dans un instant on accueille Benjamin Boilarami, président des jeunes agriculteurs de l'Hérault.
00:06 On a une question, on vous pose une question chaque jour.
00:08 Alors celle-là, je suis sûr qu'elle va vous faire réagir.
00:10 Elle vous fait déjà réagir sur les réseaux sociaux, sur la page Facebook.
00:13 Viande, fruits, légumes, est-ce que vous faites attention à la provenance des produits que vous achetez ?
00:18 C'est la question du jour Anne.
00:20 Oui et je suis en train de réactualiser les résultats mais on est toujours sur la même tendance.
00:24 84% d'entre vous disent qu'ils font attention.
00:28 Effectivement, on a quelques commentaires sur Facebook aussi qui nous disent
00:31 "oui je privilégie les producteurs locaux même si parfois on achète en Espagne parce que c'est un peu moins cher".
00:36 Alors 0467 58 6000, je redonne le numéro de téléphone parce qu'on veut vous entendre.
00:41 On veut savoir ce que vous en pensez, on veut savoir si vous faites attention.
00:43 Prenez la parole sur France Bleu Hérault, appelez-nous tout de suite.
00:46 Et si on en parle ce matin, c'est parce que les agriculteurs de la région ont manifesté hier à Toulouse.
00:51 Notamment pour dénoncer de la concurrence déloyale mais aussi pour d'autres raisons.
00:57 On va détailler tout ça avec vous ce matin Benjamin Boalahrami.
01:00 Vous êtes le président des Jeunes Agriculteurs de l'Hérault.
01:03 Vous êtes aussi viticulteur à Puys-Salicon.
01:06 Il y avait déjà eu une manifestation au mois de novembre.
01:09 La situation n'a pas changé depuis, vous n'avez rien obtenu ?
01:13 Non, alors après ce qui s'est passé hier sur Toulouse, on a eu deux annonces.
01:19 Donc la taxe au niveau de la RPD qu'on appelle "redevance" sur la pollution diffuse
01:24 au niveau des produits phytosanitaires ne se fera pas.
01:28 Au niveau de la redevance de l'eau aussi, il ne devrait pas y avoir d'augmentation de taxes.
01:33 Contrairement à ce qui était prévu ?
01:34 Voilà, c'est ce qui a été annoncé hier.
01:36 Ça vous convient, ça vous suffit ?
01:38 Ça ne suffira jamais.
01:39 Aujourd'hui on est dans un contexte où les agriculteurs ne vivent plus de leur métier.
01:44 On sait que dans cinq ans, la moitié des exploitations seront en âge de partir à la retraite.
01:49 Et nous au niveau des jeunes agriculteurs, nous ne serons pas en capacité de combler tous ces départs
01:55 pour plusieurs raisons.
01:57 Donc l'accès à l'eau qui est vital pour nos cultures, pour la pérennité de nos exploitations.
02:03 L'hausse des charges qui nous impacte depuis la crise Covid.
02:08 On subit une inflation, le consommateur aussi l'a subie.
02:12 Mais nous au niveau de nos exploitations, de nos ventes, de nos produits,
02:15 on n'est pas rémunéré à la hauteur des efforts que l'on fait pour se mettre à toutes les normes que l'état nous demande.
02:22 On va reprendre les problématiques les unes après les autres.
02:26 Pour la question de l'accès à l'eau, on en manque.
02:29 Là on voit que dans l'Hérault, il n'a pas beaucoup plu cet hiver déjà.
02:32 Est-ce que vous vous inquiétez pour les mois à venir, vous par exemple, pour votre domaine ?
02:35 Oui, on est très inquiet.
02:37 Quand on voit dans le département de l'Hérault, on voit bien qu'il est très coupé en deux.
02:41 On a eu une année 2023 en pluviométrie sur le côté est du département,
02:46 donc de la partie Montpellier-Rennes, qui a subi plus de pluviométrie, pas en quantité nécessaire.
02:54 Et un côté ouest du département où on est en dessous de 150 mm de plus, ce qui n'est pas acceptable.
03:00 Sachant que déjà la vigne est une culture qui demande le moins d'eau,
03:05 mais il nous faudrait entre 300 et 400 mm, un minimum, pour pouvoir produire correctement.
03:11 Et puisque l'eau ne tombe pas, puisque vous dénoncez un accès difficile à l'eau,
03:15 c'est quoi la solution ? On ne peut pas la créer typiquement ?
03:18 Non, on ne peut pas la créer.
03:20 On a des réseaux avec le canal du Baronne, du BRL, qui irriguent une partie du département,
03:27 une partie des exploitations, pas tous.
03:29 On sait que des secteurs de l'Hérault ne seront jamais irrigués.
03:33 C'est un gros problème, parce que quand on le voit avec des gros épisodes de Seven Hole,
03:40 ou même méditerranéens, il faudrait arriver à capter cette eau de pluie
03:46 pour pouvoir la redistribuer au cours de l'année sur nos exploitations.
03:50 Il y a des projets de bassins de rétention, c'est ça que vous demandez au pouvoir public par exemple ?
03:54 Ce ne sera pas un bassin, on l'appellera plutôt retenue hivernale,
03:57 qui a été envisagé par le département.
04:01 C'est une chose qui pourrait être une solution à long terme, pourquoi pas.
04:08 Mais déjà à court terme, il faudrait que ce soit réalisé,
04:11 parce que ces secteurs qui ont été ciblés par le département,
04:16 s'ils n'ont pas accès à cette eau avec ces retenues hivernales,
04:18 seront sûrement perdus pour l'agriculture,
04:20 avec les conséquences que l'on connaît derrière, incendie,
04:24 et tout un paysage, une biodiversité qui va disparaître.
04:27 Parmi les mots d'ordre de la manifestation d'hier,
04:29 il y avait aussi cette question de la concurrence des loyales.
04:32 Nous évidemment, on est très proche de l'Espagne,
04:34 j'imagine qu'on est un département un peu plus impacté que d'autres ?
04:37 - Oui, tout l'arc méditerranéen,
04:40 partant des Pyrénées-Orientales, de l'Aule jusqu'à Leroux, voire même le Gard,
04:43 on a une concurrence des loyales au niveau de nos normes environnementales.
04:46 - C'est-à-dire ? Est-ce que vous pouvez être un peu plus précis par exemple ?
04:49 - Alors non, nos exploitations en France sont,
04:53 pour la plupart, maintenant la majorité, la quasi-totalité, sont certifiées,
04:58 que ce soit du HVE, de l'agriculture biologique,
05:01 et en viticulture, du terravitis.
05:03 Alors tous les ans, on nous impose un cahier des charges,
05:07 auquel on se plie, auquel on fait attention, on est contrôlé, on a des audits.
05:12 Et tous les 6 mois, il y a une réforme,
05:15 donc nous, le temps de nous adapter, ça ne se fait pas en un claquement de doigts,
05:19 ça prend du temps, il nous faut des moyens.
05:21 Mais si tous les 6 mois, on nous dit "vous avez fait tel cahier des charges,
05:24 mais on va le réviser 6 mois plus tard, laissez-nous le temps",
05:28 nous, on ne demande qu'à travailler en paix,
05:29 on n'est pas là pour empoisonner les consommateurs,
05:33 on explique notre métier.
05:34 Et c'est sûr que quand on voit des produits arriver
05:37 de nos pays frontaliers, notamment l'Espagne,
05:41 qui ne respectent pas nos normes environnementales, nos cahiers des charges,
05:45 ça fait grincer des dents pour le moment.
05:48 - Alors vous demandez quoi ? Moins de normes pour vous,
05:50 ou plus de normes, les mêmes que les vôtres, en l'occurrence pour les pays frontaliers ?
05:54 - On est en Europe, il faut que les normes soient les mêmes pour tous les pays européens.
05:57 - Vous avez trop de charges aussi, des charges qui s'accumulent,
06:02 en tout cas qui augmentent, ça se vérifie vous sur votre exploitation ?
06:05 - Oui, on l'a vu avec le GNR, le gasoil non routier dans nos serres,
06:12 qui a augmenté.
06:13 Au niveau de nos fertilisants, avec la guerre en Ukraine,
06:17 les engrasotés ont fait x3.
06:20 Le désherbage, qu'il soit, si on le fait en chimique,
06:24 il a pris augmenter, si on le fait en mécanique,
06:27 comme le gasoil a augmenté,
06:28 notre passage en tracteur a forcément augmenté aussi.
06:33 Quand on veut installer une vigne, le palissage, les piquets ont augmenté,
06:38 les plantes de vignes ont augmenté, tout a augmenté,
06:40 sauf pour la viticulture, par exemple, le prix du vin qui lui baisse.
06:43 - C'est donc ça la réponse, augmenter les prix,
06:47 ou vous réclamez plus d'aides ?
06:48 C'est quoi la solution face à cette hausse des charges d'après vous ?
06:51 - Si on était rémunéré au niveau du prix du vin,
06:54 à la hauteur de nos efforts,
06:57 la pile serait moins difficile à avaler.
07:00 - Mais est-ce que les héroltés, en l'occurrence,
07:03 ont les moyens de payer leur vin plus cher,
07:05 puisque, comme vous le rappeliez, l'inflation touche tout le monde ?
07:08 - Mais sur le vin, le consommateur sera très peu impacté.
07:12 Parce qu'il y a tellement d'intermédiaires entre nous, producteurs, et le consommateur,
07:17 tous ces intermédiaires, eux, prennent leur marge.
07:19 - C'est pas le prix de la bouteille, au final, qui va forcément augmenter, c'est le prix...
07:23 - Ce jour-là, 2 centimes d'euros.
07:25 - Mais par contre, vous, ça pourrait changer les choses ?
07:27 - Nous, ça nous changerait beaucoup de choses.
07:29 On pourrait vivre un peu plus dignement.
07:32 - Sur tous ces motifs de manifestation,
07:36 quel est, d'après vous, de la part des pouvoirs publics,
07:39 la mesure la plus urgente à prendre pour aider l'agriculture française,
07:44 et donc, les héroltés, aujourd'hui ?
07:45 - Une rémunération à la juste hauteur de nos exploitations.
07:48 Parce qu'on parle de souveraineté alimentaire,
07:51 on est un mois du Salon de l'agriculture,
07:53 si on veut continuer à faire ce Salon de l'agriculture,
07:56 si on veut continuer à avoir ces circuits courts,
07:59 ces petites exploitations locales qui vivent,
08:02 il va falloir aider les agriculteurs, les jeunes qui veulent s'installer,
08:05 pour les futures générations.
08:07 Il faut nous aider financièrement, tout d'abord, en premier temps.
08:10 Et après, nous, on fera les choses comme on sait les faire,
08:13 on s'adaptera à ce que l'on nous demande,
08:16 en restant à la mesure du raisonnable.
08:18 - Donc, ça veut dire, c'est aux intermédiaires, du coup, de faire un effort sur les prix ?
08:22 - C'est à tout le monde.
08:23 Nous, on fait les efforts, il faut que toute la filière,
08:26 toutes les personnes qui font partie du circuit fassent les efforts aussi.
08:30 - Il y a des milliers d'agriculteurs qui sont mobilisés en Allemagne,
08:33 notamment, pour les mêmes raisons que les vôtres,
08:36 à Berlin notamment, encore hier,
08:38 ils sont rejoints par des commerçants, par des artisans,
08:41 vous pensez que le mouvement en France va prendre encore de l'ampleur ?
08:44 - C'est possible.
08:45 Tout est envisageable.
08:47 On entend aussi la colère de tous les corps de métier.
08:50 Nous, on l'exprime d'une façon,
08:52 eux, les autres aussi, pourquoi pas faire un jour comme en Allemagne,
08:57 si jamais le gouvernement ne nous entend pas et nous met de côté.
09:00 - Vous avez un rendez-vous prévu, justement, avec le gouvernement ?
09:02 Il y a des choses, un calendrier que vous attendez ?
09:06 - Nous, la deadline, ça sera le Salon d'agriculture.
09:10 Le but, c'est de faire monter la pression jusqu'au Salon d'agriculture
09:13 pour que le ministre de l'agriculture, Marc Fesneau,
09:18 ait fait des annonces, ou avant, ou en ce moment,
09:20 mais des annonces importantes.
09:22 - Merci beaucoup, Benjamin Boilarami,
09:24 président des Jeunes agriculteurs de l'Héros Viticulteurs.
09:27 A puis Saliquant d'avoir été avec nous ce matin. Merci bien.